24/07/2018
Benalla, sous-produit de la Disruption
Visionner les débats de la commission, expérience instructive :
Avez-vous essayé de visionner intégralement la comparution de Gérard Collomb, puis celle de Michel Delpuech, devant la commission d'enquête de l'Assemblée nationale ? Etrange impression. Ministre de l'Intérieur évasif et cafouilleux, préfet de police soucieux de ne pas porter le chapeau... M. Collomb puis le préfet Delpuech s'empressent de désigner l'Elysée comme origine du problème Benalla ; Delpuech va jusqu'à parler de "copinage malsain" pour désigner le réseau de l'ombre qui semblait unir M. Benalla à des responsables du maintien de l'ordre.
Mais un "copinage" subalterne ne peut expliquer les privilèges de M. Benalla : une Renault Talisman suréquipée police (mais non fournie par l'Intérieur ni la préfecture) ; un port d'armes (refusé par l'Intérieur mais accordé par la préfecture) ; un badge d'accès H (hémicycle) à l'Assemblée nationale ; un grade de lieutenant-colonel de réserve dans la gendarmerie (à 26 ans) ; un appartement dans l'immeuble élyséen où Mitterrand abritait Mme Pingeot. Tout ça décerné à un ex-agent de sécurité par l'autorité de la Présidence de la République... Nous voilà dans l'étrange.
Mais pas dans l'inexplicable. Comme nous le disions ici le 20 juillet, M. Benalla et ses sbires étaient des rouages du commando avec lequel M. Macron s'est emparé de la Ve République. Le but du régime macronien n'est pas d'instaurer le règne des barbouzes ; il est d'installer une technocratie sans fard à la place du système semi-parlementaire né en 1958-1962. Pour ce faire, M. Macron personnalise à outrance le pouvoir présidentiel. Dans quels intérêts ? Sa réforme constitutionnelle vise à diminuer le nombre des députés en les éloignant de circonscriptions devenues géantes – ce qui les rapprochera encore des lobbies économiques... Cette perspective irrite une partie des députés (on les comprend) : l'affaire Benalla leur sert donc à taper sur la table.
Vu sous cet angle, ladite affaire se réduit au rang de sous-produit du macronisme. “Manu” règne dans les hauteurs avec des technocrates : pourquoi ne laisserait-il pas les bassesses à des barbouzes ? Dans les deux cas il s'agit de disrupter, de contourner ces vieilleries que sont les formes et les normes. En ce sens M. Macron est très postmoderne, en phase avec l'esprit du temps.: unexpected chantier, comme on dit dans les centres commerciaux... L'opposition parlementaire est loin d'avoir partie gagnée – même sur le seul plan moral.
10:37 Publié dans Idées, Macron | Lien permanent | Commentaires (3) | Tags : benalla
Commentaires
> La Ripoublique En Marche
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Écrit par : e levavasseur / | 24/07/2018
HISTOIRE
> Cette pratique me fait penser à celle de Louis XIV, qui, voulant se "protéger des grands seigneurs", les a tous fait venir à la cours, les coupant de leur base populaire (pour les affaiblir et les ruiner), ce qui a contribué à un abandon politique des régions (lire Tocqueville, De la Révolution Française), laissée aux mains des bourgeoisies locales. Au final, 2 siècles plus tard, la bourgeoisie soulevait une partie du peuple contre le roi, et les seuls appuis du roi ont été une partie du peuple (moins bête et déchristianisée que les sans-culottes), et ... les seigneurs que craignait le roi ...
La bourgeoisie que cageolait le roi, en la pompant financièrement à coup de vente de titres de noblesse, a retourné sa veste pour virer le souverain et prendre la place du calife à la place du calife.
Les "ennemie supposés du roi" se sont retrouvé ses derniers soutiens ... impuissants ...
Qui dit que dans quelques années, les députés ne seront pas les dernier défenseurs de la République face à la dictature bananière des multi-nationales ...
Rien de nouveau sous le soleil disait ecclésiaste ...
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Écrit par : Bergil / | 24/07/2018
JEAN-FOUDRE
« Qu’ils viennent le chercher ! », a déclaré hier M. Macron en évoquant, dans son style « jupitérien » le plus pur, les déboires du président de la République (lui-même) devant son club de supporters. Parole de jean-foudre !
Reste à savoir qui M. Macron défie-t-il ainsi… car ça n’est pas bien clair ? Le peuple de France, les élus de la Nation, les policiers, les gendarmes, les juges… les barbouzes ?
Et comment compte-t-il en découdre ? Dans une aimable interview. Ou à coups de poing, de savate, sur un ring, un tatamis ? Seul, aidé par Brigitte… soutenu par ses invités et amis de la Fête de la Musique ?
Ce « qu’ils viennent le chercher » sonne déjà furieusement à nos oreilles. A se demander s'il ne va pas rivaliser, dans l'histoire de notre belle République, avec le légendaire « Kesque j’enana à foutre » du Johnny des Guignols de l’info…
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Écrit par : Denis / | 25/07/2018
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