Débats ou dialogues de sourds ?

Les discussions Facebook autour du prétendu "retour de Maurras" et de sujets associés (nostalgies et fixations diverses), reflètent souvent un défaut gaulois : préférer les postures aux réalités...

 

On vient de le voir une fois de plus dans les longs échanges de balles autour de Maurras sur Facebook :  il est difficile de discuter quand l'interlocuteur aime les postures plutôt que les réalités. Les réalités sont les mêmes pour tout le monde, mais les postures sont irréfutables comme l'éléphant de Vialatte. S'agissant de Maurras, exhumé par Bouquins et Le Monde, le débat tourne tout de suite au dialogue de sourds : d'un côté ceux qui s'en tiennent aux réalités de l'histoire, lesquelles jugent sévèrement le vieux polémiste mort en 1952 ; de l'autre, ceux qui se posent en gardiens du mausolée. Les premiers disent que l'aveuglement de Maurras sur les réalités du régime Pétain (prince-esclave) a consommé le naufrage de sa pensée politique : et cela précisément dans le domaine où cette pensée se disait sans rivale, celui des réalités... Les seconds refusent d'aller sur ce terrain qui les gêne. Ils montent en ballon dans les nuages. Ils installent Maurras en dieu de la Théorie trônant sur la sphère des fixes : peu importent ses fautes et ses erreurs terrestres, il suffit de monter assez haut pour ne plus les voir.

Le micro-milieu qui vient de placer Maurras parmi ses dieux lares, sans l'avoir lu et seulement "parce que la gauche est contre lui", fait sociologiquement  partie du plus large milieu qui croit "combattre la décadence actuelle" - surtout sur le plan des moeurs. Donc une discussion ouverte sur la controverse Maritain-Maurras (la crise religieuse de 1926) déraille en messages appelant "la droite" à se serrer les coudes contre la PMA...  Maurras et la PMA, où est le rapport ? nulle part : mais le même milieu qui crie depuis huit jours "vive Maurras", par ailleurs persiste à croire - en 2018 - que la Manif pour tous de 2013-2014 est un mouvement de "reconquête culturelle" voué au plus grand avenir. Les deux sujets n'ont rien à voir entre eux, mais ledit milieu attribue à la MPT la même vertu qu'à feu Maurras : ne s'être jamais trompé(e). Et le double échec de la MPT : d'abord la loi, puis l'enlisement UMP-LR ? Peu importe, ces choses-là ne se voient plus quand on plane au ciel de "l'anthropologie" et des bonnes intentions.

Loin de moi évidemment l'idée de comparer le naufrage tragique de Maurras et les échecs de la MPT. Leur seul point commun est d'être niés par le même genre d'esprits : ceux pour qui les résultats sont sans importance si les intentions sont bonnes (au moins à leurs yeux). Ce critère est sans doute valable dans certains domaines. Il ne l'est pas en politique, ni en histoire, où il déguise simplement des postures.