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11/03/2017

Transfiguration : le contraire d'une "installation"

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Hans Urs von Balthasar et Louis Bouyer nous préviennent contre la tentation de vouloir enfermer Dieu (et la religion) dans nos limites : 


 

 Matthieu 17:1-9

 

<< Six jours après, Jésus prend avec lui Pierre, Jacques et Jean son frère, et il les emmène à l’écart, sur une haute montagne. Il fut transfiguré devant eux ; son visage devint brillant comme le soleil, et ses vêtements, blancs comme la lumière. Voici que leur apparurent Moïse et Élie, qui s’entretenaient avec lui. Pierre alors prit la parole et dit à Jésus : "Seigneur, il est bon que nous soyons ici ! Si tu le veux, je vais dresser ici trois tentes, une pour toi, une pour Moïse, et une pour Élie." Il parlait encore, lorsqu’une nuée lumineuse les couvrit de son ombre, et voici que, de la nuée, une voix disait : "Celui-ci est mon Fils bien-aimé, en qui je trouve ma joie : écoutez-le !" Quand ils entendirent cela, les disciples tombèrent face contre terre et furent saisis d’une grande crainte. Jésus s’approcha, les toucha et leur dit : "Relevez-vous et soyez sans crainte !" Levant les yeux, ils ne virent plus personne, sinon lui, Jésus, seul.En descendant de la montagne, Jésus leur donna cet ordre : "Ne parlez de cette vision à personne, avant que le Fils de l’homme soit ressuscité d’entre les morts."  >>

 

 

 

Hans Urs von Balthasar  sur cet évangile

 

<< Sur la montagne, les disciples  aperçoivent le ciel ouvert et une épiphanie du Dieu trinitaire : le Père leur montre son "Fils bien-aimé" qu'ils doivent écouter, et le Saint-Esprit sous la forme d'une nuée lumineuse les introduit dans la sphère du mystère. Entendre réellement ne leur sera accordé qu'après Pâques. De même, la peur de Pierre dans la Passion, un trouble semblable à celui-ci (Matthieu 17:4) où il veut "dresser les tentes" : seule la triple question du Ressuscité ("Pierre, m'aimes-tu ?" Jean 21:15-19) l'en délivrera... [*]  >>

[*]  Dans ses épîtres, il sera le témoin des deux événements et de leur intime rapport : 2P 1:16 s. ; 1P 2:21 s.

 

 

 

H.U.v.B. sur la première lecture (Genèse 12:1-4a)

 

<<  Dans l'obéissance parfaite du patriarche (tout quitter : pays, maison paternelle, parenté) est émise la promesse d'une bénédiction universelle qui procède de sa fidélité à Dieu. Une telle bénédiction divine ne peut rayonner que d'un homme qui  - pour l'amour de Dieu et en raison de son injonction - a quitté tout ce qu'il possède. Sinon, la bénédiction de Dieu serait restée pour ainsi dire "attachée" à lui-même et ses biens ; mais d'Abraham il est dit : "Tu deviendras une bénédiction".  Dans le renoncement total se trouve la fécondité illimitée... >>

 

 

H.U.v.B. sur la deuxième lecture (2Timothée 1:8b-10)

 

<<  "Souffre avec moi pour l'Evangile" : ainsi parle Paul à son "fils" Timothée. C'est maintenant une souffrance et un renoncement dans la marche consciente à la suite du Christ, celui qui a souffert et qui est ressuscité... >>

 

 

 

Louis Bouyer sur le dynamisme d'exode

 

<<  Le thème [évangélique] de l'Incarnation est la dernière révélation de la Schekinah [l'obscurité de la Nuée : YHWH descendant jusqu'à Israël dans son pèlerinage terrestre et se manifestant à lui autant qu'il se peut à l'homme]. Le thème évangélique non moins essentiel de l'ascension de Jésus vers le Père par sa croix, son départ pour nous préparer une place, est l'accomplissement et comme l'exaucement de la mystique de la Merkabah [la rayonnante Gloire de Dieu : le char des chérubins aux roues éclatantes] : sur la Merkabah des chérubins, YHWH est libre de tout lien terrestre, il vole au-delà du plus haut des cieux. Dans toutes ces visions divines de la Bible, un même mot revient à propos de la Présence qui s'y livre : Dieu "passe" auprès d'Abraham, il "passe" devant Moïse, il "passe" devant Elie. Pareillement les chevaux de feu entraînent Elie loin d'Elisée vers le Dieu qui ne demeure dans aucune maison faite de main d'homme... Sur la montagne de la Transfiguration, d'après saint Luc, Jésus s'entretient avec Moïse et Elie "de son exode qu'il devait accomplir à Jérusalem" (Luc 9:31). C'est peut-être le trait le plus profond et le plus distinctif de cette mystique d'Israël. Rien de moins statique. La Présence divine, elle-même, y est l'insaisissable par excellence. La Merkabah d'Ezéchiel est bien son symbole : Dieu n'est pas plus "au ciel" (comme en un lieu surnaturel) qu'en aucun lieu de la terre. Il est la liberté même. Les Esprits cosmiques dont Il fait son trône sont des coursiers et des roues de feu : ce trône est un char qui se meut sans cesse, quand bien même il semble immobile...   Loin que l'Incarnation, comprise selon l'Ecriture, doive installer Dieu sur la terre, elle ne l'y fait descendre que pour nous entraîner à sa suite, le voyant "de dos" comme Moïse, dans une ascension où, selon le mot magnifique de Grégoire de Nysse (dans son Commentaire du Cantique), "à celui qui se lèvre vraiment, il faudra toujours se lever ; à celui qui court vers le Seigneur, il ne manquera jamais un vaste espace. Ainsi celui qui monte ne s'arrête jamais, allant de commencement en commencement par des commencements qui n'ont jamais de fin."   >>

 

 

 

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