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22/01/2017

Trump et les "Nasty Women" sont deux produits Twitter

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Dans les cortèges Nasty Women d'hier, pas de slogans contre le côté "Goldman Sachs" de Trump. Une mobilisation politique sans contenu politique... Signée Twitter, comme l'élection de novembre :


 

 

Comme dit l'intellectuel conservateur britannique Roger Scruton, "dans l'ère Trump le style et le tempérament de la politique seront profondément influencés par Facebook et Twitter. On discutera peu de politiques publiques requérant une description de plus de 140 caractères ou privées d'une émoticône souriante ou d'un doigt d'honneur... L'idée que les décisions prises en notre nom le sont par des personnes qualifiées qui assument la pleine responsabilité de leurs erreurs pourrait bien être bientôt une chose du passé."

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Ce qui s'applique à Trump s'applique aussi à la "mobilisation internationale anti-Trump" d'hier : ces "centaines de milliers de femmes motivées" qui se sont retrouvées "spontanément", toutes coiffées du même pussy hat - un bonnet rose à oreilles de chat, par allusion à la vieille phrase obscène de Trump sur les femmes. Cette mobilisation dans plusieurs pays porte partout le même nom : "Nasty Women" ("les sales bonnes femmes") : autre allusion à Trump, tirée cette fois du débat télévisé où il traita Mme Clinton de "nasty woman".

Mais dans ces rassemblements on aurait attendu des banderoles contre les orientations Goldman-Sachs-friendly de l'équipe Trump. On n'en a pas vu. En revanche, on a vu (à Washington, Los Angeles, Montréal, Londres, Paris, Berlin, Sydney...) des pancartes ainsi libellées : "My voice, my story, my body !".

"Ma voix", "mon histoire", "mon corps" ? quel rapport avec le politique ?

Tout est centré désormais sur le sexuel et le subjectif. Si l'on doit combattre le nouveau gouvernement américain, c'est pour une seule raison : il sera "anti-femmes et anti-LGBT"... Qu'est-ce qui permet de le prédire ? Rien. Mais la gauche occidentale s'est recroquevillée sur les questions de moeurs, après avoir déserté le politique et l'économique en se ralliant au néolibéralisme.

Le "grand mouvement anti-Trump" dont se gargarisent les médias n'est donc pas un mouvement de contestation politique : c'est un mouvement "d'émotions". La mobilisation s'est faite sur Twitter, comme le vote Trump s'était catalysé sur Twitter ; et le vote Trump non plus n'a pas été un vote "politique" mais, comme le note le conservateur Scruton, un vote d'humeurs et d'émotions :  humeurs et émotions inverses - donc symétriques - de celles des bobos qui soutenaient Mme Clinton.

Les électeurs de Trump vont se rendre compte qu'ils ont été fucked, comme dirait leur héros. Le grandiose avènement du Populisme "pour le millénaire à venir" (sic) dissimulait le triomphe de Wall Street ; l'establishment financier restait gagnant quel que soit l'élu. Ces électeurs se rendront-ils compte que leurs émotions en 140 signes - sur lesquelles tweeting Donald a surfé - n'étaient qu'une réaction [*] aux émotions en 140 signes du camp d'en face : ces libéraux urbains qu'ils détestent ?  Le "Great Again" des électeurs de l'Amérique profonde n'a pas plus de substance politique que l'arc-en-ciel coiffé d'un pussy hat.

Revenons au mouvement Nasty Women qui électrise nos chaînes d'info. Pour cerner sa nature et comprendre la dégénérescence finale des idéaux de gauche en sexomanie queer, prenez le dernier Michéa (Notre ennemi le capital, Climats) page 225 :

<< Si le prolétariat indigène ou la paysannerie locale en venaient à décevoir les espérances intellectuelles qui s'étaient portées sur eux, un autre groupe élu ne manquerait pas de prendre aussitôt  la relève, qu'il s'agisse des immigrés, de la jeunesse, des femmes, du lumpenproletariat ou même, comme chez Judith Butler, des drag-queens. C'est d'ailleurs la raison pour laquelle tant d'intellectuels de gauche en concluent si allègrement, aujourd'hui, que "le peuple n'existe pas"... Entendons par là que seuls importent à leurs yeux la Théorie juste et ses gardiens autoproclamés. >>

Ou plus exactement, seul importe leur statut (leur job) de gardiens autoproclamés ; car la Théorie n'existe plus depuis longtemps, remplacée aujourd'hui par cette arnaque du capitalisme tardif : les social networks comme "forme supérieure du débat démocratique"... "Join the Pussy Hats revolution !", proclame leur site : voilà le Che remplacé par Dorsey et Zuckerberg. Twitter et Facebook accouchent successivement de Trump et des Nasty Women : tout est pour le mieux dans le meilleur des mondes calculés par algorithme.

 

PS - Quant au discours d'investiture du 45e président des Etats-Unis, un seul mot le définit :  abject.

 

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[*]  Même chose pour nos soi-disant "réacs" hexagonaux : ils sont "réactifs" et non "réactionnaires". Se définissant par rapport à leur adversaire conventionnel, ils en sont les marionnettes. 

 

 

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19:00 Publié dans Idées, Trump | Lien permanent | Commentaires (6) | Tags : trump, nasty women

Commentaires

INROCKS

> "Pour cerner sa nature et comprendre la dégénérescence finale des idéaux de gauche en sexomanie queer", "prenez" aussi, comme je l'ai fait hier chez quelqu'un qui m'avait invité, un numéro du magazine 'Les Inrockuptibles', et feuilletez-le : c'est écoeurant, ils ne jurent que par les séries / films / expositions / "oeuvres" pornographiques et sanglantes (en même temps), stade suprême de la culture, leur semble-t-il.
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Écrit par : Alex / | 22/01/2017

EN PLEINE POST-MODERNITÉ

> "Tout est centré désormais sur le sexuel et le subjectif." C'est exact, et le subjectivisme est précisément ce qui caractérise la post-modernité dans laquelle nous vivons.
La lecture d'un récent et excellent ouvrage de Fr Thierry-Dominique Humbrecht, o.p., 'L'évangélisation impertinente, Guide du chrétien au pays des post-modernes', apporte une analyse remarquable sur l'état actuel du monde et des idées.
Son auteur, dominicain, philosophe et théologien, y décrit rien de moins que le mal du siècle, celui d'être chrétien dans un milieu qui ne l'est plus depuis au moins Mai 68.
C'est vrai, comme il l'écrit, qu'être chrétien dans un monde où le relativisme prédomine est très difficile, conduisant parfois jusqu'à la schizophrénie, car les chrétiens que nous sommes dans un monde non seulement postmoderne mais aussi consumériste jusqu'à la lie, doivent, au risque de se mettre au ban de la société, composer avec elle : dans l'entreprise pharmaceutique pour laquelle je travaille, je ne pourrais, au risque d'être vilipendé par mes collègues (évidemment tous "progressistes"), affirmer l'abomination que représente à mes yeux l'acte d'avorter. On me répondrait que je suis rétrograde, qu'il faut laisser ce choix aux femmes, que chacun doit être en mesure de maîtriser son corps, etc. Je ne peux donc pas exprimer ma conviction de chrétien car l'idéologie ambiante, effectivement nietzschéenne et nihiliste, s'y oppose : "on ne peut plus affirmer que...".
Ce relativisme omniprésent est difficilement supportable pour le chrétien qui, en pratique, ne peut vivre sa foi qu'en privé ; or, éliminer le fait religieux de la sphère publique est l'objectif poursuivi par les libres-penseurs depuis les Lumières, objectif qui, semble-t-il a été atteint.
C'est précisément ce relativisme qu'expriment les Nasty Women, en envisageant l'opposition à Trump exclusivement sous l'angle du subjectivisme. Nous baignons en pleine post-modernité...
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Écrit par : Philippe de Visieux / | 23/01/2017

ARCHAÏQUE MODERNITÉ

> La symétrie des comportements des électeurs et des opposants de M. Trump mérite en effet d'être soulignée.
Et c'est encore pire, à mon humble avis (ou selon ma modeste intuition) qu'une symétrie d'émotions.
De même qu'avec la "post-vérité" (expression en vogue en ce moment, pourquoi pas, mais il faut alors, une fois de plus, en reconnaître la symétrie), nous sommes peut-être parvenus à une époque de la "post-pensée", voire de la "post-émotion" : la répétition aveugle de slogans (pro ou anti-Trump) préfabriqués, voire prédigérés, me semble relever plus du réflexe conditionné que de l'émotion.
La manipulation des "masses" n'est pas d'hier, certes, mais les réseaux dits sociaux en sont un outil redoutable, faisant régresser des personnes se percevant comme réfléchies, éclairées, etc. à un stade presque infra-humain (celui du réflexe, donc, qui remplace l'émotion).
Où la modernité la plus avancée rejoint l'archaïsme...
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Écrit par : Sven Laval / | 23/01/2017

@ PP

> Dans le sens de vos observations, des groupes féministes et pro-vie (mais hostile à Trump) ont étés exclus de la marche pour non rectitude de pensée.
http://www.slate.com/blogs/xx_factor/2017/01/17/pro_life_feminist_group_new_wave_feminists_removed_from_women_s_march_partnership.html
Le plus révélateur est que les groupes en question se situent à la gauche de la gauche sur la grande majorité des enjeux (contre la peine de mort, pour l'assurance-maladie, pacifiste en politique étrangère, etc.) du moins, d'un point de vue américain. Quand on connait le profil de la candidate officielle du parti "progressiste" de ce pays il y a à moins de trois mois, cela ne manque pas de piquant.

FS


[ PP à FS - Cette sacralisation collective de la mort a quelque chose de glaçant. Moloch ? ]

réponse au commentaire

François Sarrazin

Écrit par : François Sarrazin / | 23/01/2017

TRAITEMENT

> "pas de slogans contre le côté "Goldman Sachs" de Trump" : bien sûr! Bien qu'affairiste, D. Trump a remet en cause les traités de libre-échange, en particulier l'ALENA (USA, Canada, Mexique) acronyme anglais: NAFTA. Crime de blasphème envers le Dieu libre-échange. D'ou la mobilisation habillée en sociétal, et l'orwellien traitement médiatique.
Vu et entendu sur une grande chaîne française "cérémonie boudée par le public" avec image de l'esplanade du congrès à moitié vide, alors que quelques instants avant, le direct la montrait pleine. Ils avaient du ressortir l'arrivée du public.
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Écrit par : Pierre Huet / | 23/01/2017

ROLAND HUREAUX

> Une des dernières raisons (peut-être la dernière, d'ailleurs...) d'aller sur le site Liberté Politique : les excellents articles qu'y publie Roland Hureaux (et qu'on ne trouve pas sur le blog de l'intéressé).
Sur la "nouvelle donne "internationale induite par l'élection de M. Trump, mais pas seulement :
http://www.libertepolitique.com/Actualite/Decryptage/Nous-entrons-dans-un-monde-nouveau3
http://www.libertepolitique.com/Actualite/Decryptage/Le-morne-printemps-qui-attend-l-Europe3
http://www.libertepolitique.com/Actualite/Decryptage/Nous-pourrons-a-nouveau-aimer-l-Amerique2
http://www.libertepolitique.com/Actualite/Decryptage/Macron-a-Berlin-reconnaissance-ou-allegeance2
Plus d'autres : toute une "flopée" datée du 19 janvier !
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Écrit par : Feld / | 23/01/2017

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