06/11/2015
Ethique entrepreneuriale : l'omertà
Après VW (moteurs truqués), Takata (airbags qui explosent) :
Le scandale Volkswagen ne cesse de s'élargir, et un autre scandale éclate – qui met en cause un équipementier automobile nippon : le fabricant d'airbags Takata. Il a reculé de 20 % en Bourse le 4 novembre après que Honda, son principal client, ait rompu tous ses contrats avec lui. Motif : Honda venait de révéler que les airbags Takata étaient susceptibles d'exploser (« au moindre choc ») en criblant de bouts de plastique – mais aussi de morceaux d'acier – les passagers du véhicule. Les airbags Takata ayant tué sept personnes et blessé une centaine d'autres, ce fait vérifié par Honda en 2012 aurait dû être public depuis lors... Commentaire de Philippe Escande (Le Monde Eco & entreprise) : « Les premiers incidents sur les airbags remontent à 2004 et les premiers doutes émis sur la sincérité des tests de Volkswagen datent également de plusieurs années. On minimise et on continue, en klaxonnant ! » N'ayant apparemment rien fait pour remédier au désastre, Takata, enfin dénoncé, encourt une amende de 200 millions de dollars.
Escande conclut qu'il serait « peut-être donc temps » de se « rappeler » que des comportements d'entreprise peuvent bafouer la fameuse éthique entrepreneuriale, célébrée à l'envi.
S'il faut se le rappeler, c'est qu'on l'avait oublié. Pourquoi ? Depuis quand ? Depuis que l'air du temps nous invite à mettre, comme dit le pape, « une confiance grossière et naïve dans la bonté de ceux qui dirigent l'économie et dans les mécanismes sacralisés du marché » (Evangelii gaudium, § 54). C'est-à-dire depuis les années 1990, date à laquelle est entré en vigueur quasi-officiellement l'axiome suivant : article 1, les grandes entreprises doivent respecter des normes éthiques ; article 2, les grandes entreprises sont chargées de l'application de l'article 1.
Les faits montrent que l'autorégulation des multinationales par elles-mêmes est une vue de l'esprit. Tant que les Etats resteront leur vassaux et leur signeront des TAFTA, on aura Volkswagen, Takata et bien d'autres affaires ; comme on aura demain le sabordage de la COP 21 – à moins d'une marée humaine dans la rue le 29 novembre. Rassemblement à la République à partir de 13 heures.
18:55 Publié dans Economie- financegestion | Lien permanent | Commentaires (2) | Tags : volkswagen, takata
Commentaires
RV
> Ah, le bienfait et la fraîcheur d'un texte argumenté qui ne se limite pas à informer (ce qui est déjà bien), mais qui se termine, qui culmine par un appel à l'action, par un rendez-vous précis !
______
Écrit par : Jean-Marie Salamito / | 06/11/2015
CARENCE DES POUVOIRS PUBLICS
> Dans le cas de l'affaire VW, la carence des pouvoirs publics de nombreux pays est manifeste: une pareille modification des conditions de fonctionnement du moteur devait sauter aux yeux lors de tests d'agrément.
En France, tout ceci est délégué à l'UTAC-CERAM qui est de droit privé mais bénéficie d'une délégation de service public du ministère de l'Ecologie. Mais en fait, au niveau européen, tout modèle agréé dans un état membre de l'UE l'est dans les autres. Il suffit de choisir le plus laxiste et, éventuellement, le plus corrompu.
http://www.developpement-durable.gouv.fr/IMG/pdf/1-_Presentation_Homologation_europeenne_vehicules.pdf
Ce qui est à craindre, c'est que les normes actuelles, devenues sévères, ne soient pas réalisables, ce qui expliquerait un certain nombre de magouilles.
______
Écrit par : Pierre Huet / | 07/11/2015
Les commentaires sont fermés.