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11/09/2015

Comment le business biotech s'empare de l'humain pour des millions de dollars

 biotechnologies

Un nouveau cas : la médicalisation du désir sexuel féminin par l'industrie biotechnologique (et ses mercenaires idéologues, les lobbies des "progrès sociétaux"). La FDA américaine a cédé sous la pression. Que va décider l'Agence européenne du médicament ? 


 

Le Monde (Science & médecine) vient de publier un dossier signé de Paul Benkimoun, Chloé Hecketsweiler et de la correspondante à San Francisco Corinne Lesnes. Vous n'en avez rien lu chez nos « libéraux conservateurs » – soi disant si vigilants quant aux problèmes socio-sexuels – pour une raison de milieu social: le fond de l'affaire est financier et ses opérateurs sont les laboratoires pharmaceutiques, univers au-dessus de tout soupçon puisque free-market, think corporate, etc. Il faut lire l'enquête du Monde. Résumons-la en partie : 

 

1. Les faits

En 2010 et 2013, l'administration américaine (FDA) refuse son autorisation de mise sur le marché (AMM) à un médicament, la flibansérine, agissant sur des neurotransmetteurs du système nerveux central et censé traiter le « trouble du désir sexuel hypo-actif généralisé chez les femme avant la ménopause ». Motif du refus : ses effets antidépresseurs sont hypothétiques, mais ses effets secondaires sont certains et dangereux ; notamment « la baisse sévère de la tension artérielle » et « les syncopes ».

En 2015, après une énorme campagne de lobbying (voir ci-dessous), la FDA finit par capituler. Elle autorise la flibansérine, qui sera en vente sous le nom d'Addyi à partir du 17 octobre 2015 aux Etats-Unis et au Canada.

48 heures après la décision de la FDA, les propriétaires du laboratoire américain Sprout, détenteur du brevet, le revendent au laboratoire canadien Valeant pour 1 milliard de dollars (plus les royalties sur la commercialisation). Valeant escompte un profit de 100 millions à 300 millions de dollars.

 

2.  Les coulisses, côté laboratoires 

Tout s'est passé comme si le laboratoire Sprout avait été créé uniquement pour cette bataille juridique et la revente qui l'a suivie. Explication :

La flibansérine n'avait pas été découverte par le laboratoire Sprout : il l'avait rachetée à son inventeur, le laboratoire Boehringer. A l'origine c'était un traitement de la dépression sévère et non pas du « dysfonctionnement (?) du désir sexuel féminin ». Mais parmi ses effets secondaires, ce traitement en avait un (plus ou moins « mesuré » (?) par un « indice fonctionnel ») sur la sexualité féminine...

Lorsque la FDA refuse le feu vert en 2010 au laboratoire Boehringer, celui-ci se décourage. Deux businesspersons, Cindy et Robert Whitehead, rachètent alors la flibansérine au nom d'un petit laboratoire nommé Sprout qu'ils ont créé pour l'occasion.

 

3.  La campagne de lobbying « scientifique ». 

Les Whitehead déclenchent une offensive lobbyiste de grande envergure. Ils escamotent le volet « antidépresseur » de la flibansérine et mettent en exergue l'effet « désir sexuel féminin ».

En 2013, la FDA renouvelle son refus pour les mêmes raisons qu'en 2010, plus quelques autres : le fait que l'efficacité sur le désir sexuel soit non-prouvée, et le fait que la flibansérine soit contre-indiquée par rapport à une bonne vingtaine d'autres médicaments et à la consommation d'alcool. (C'est donc un produit à haut risque).

 

3. Les mercenaires idéologues sociéto-libéraux, liés à l'industrie biotech

Les Whitehead dégainent alors l'arme absolue : l'idéologie dominante. (de même que l'on verra en 2015 la collusion multinationales-LGBT dans l'affaire de l'Indiana, on voit en 2014, dans l'affaire Sprout, la collusion entre le business pharmaceutique et l'aile technoïde du féminisme US*)... Les Whitehead mobilisent cette aile et troquent l'argument « scientifique » de l'efficacité sur le désir sexuel mise en doute par la FDA contre un argument propagandiste : les témoignages de femmes victimes de « souffrances en lien avec le désir sexuel » et censées mettre leurs espoirs d'orgasmes dans la flibansérine. Et, là, la FDA prend peur. Le 4 juin 2015 (oubliant qu'elle avait elle-même envoyé un avertissement aux Whitehead en 2010 pour publicité trompeuse sur un autre médicament), elle autorise la commercialisation de la flibansérine.

– Ainsi une molécule  « mise au placard par Boehringer » a triomphé de l'administration parce qu'on a réussi à la « transformer en star », constatent les enquêteurs du Monde...

Pour en arriver là, les Whitehead ont versé 42 500 dollars au comité de campagne démocrate et à plusieurs élues féministes du Congrès. Ils ont surtout mobilisé à Washington une agence de communication managée par d'ex-conseillers de la Maison Blanche : ceux-ci ont érigé le flibansérine (désormais nommée Addyi) en « étendard de la cause féminine », à travers deux sites à succès intitulés « Women deserve » (« les femmes le méritent ») et « Even the Score »  (« égaliser le score »). Leitmotiv : «  il y a 26 médicaments contre l'impuissance masculine mais aucun pour le désir féminin, c'est donc une discrimination anti-femmes. »

Les Whitehead ont également loué les services de la société Veritas (« organisatrice d'événements »), qui a payé le voyage des « victimes » à Washington pour qu'elles viennent « témoigner » devant la FDA de « l'impact sur leur vie de la baisse du désir ». Comment la FDA aurait-elle résisté à cette exhibition d'émotions « non-négociables » ?

–  La capitulation de la FDA est un triomphe pour les organisations féministes technoïdes ! La National Organisation for Women (NOW) pavoise, au nom de l'égalité hommes-femmes dans le domaine du « droit aux expériences sexuelles satisfaisantes ».

–  Mais regardez de plus près ces associations, suggèrent les enquêteurs du Monde... L'International Society for Women's Sexual Health (ISSWH), par exemple, a pour président un médecin proche de Sprout après l'avoir été de Pfizer pour le Viagra : Le Monde donne le montant (considérable) des revenus que ce médecin tire des industriels.

 

4. L'industrie biotech s'empare de notre intimité en la médicalisant pour nous la revendre. 

Cette affaire n'est qu'un exemple supplémentaire du processus en marche depuis plus de vingt ans : le système économique global s'empare de toutes les « ressources » de la planète et transforme l'humain lui-même en « ressource », comme le pape François l'a lumineusement exposé dans Laudato Si et l'exhortation apostolique La joie de l'Evangile.

C'est l'extension permanente des domaines du marché : avec la PMA-GPA, la reproduction humaine est progressivement prise en main par le marché et les laboratoires ; il s'agit de rendre artificiel et payant ce qui avait toujours été libre et gratuit...

Avec la transformation des troubles sexuels en « maladies », même processus ! Ray Monihan, cité par Le Monde, écrivait en 2003 dans le British Medical Journal : « la fabrication d'une maladie par l'industrie pharmaceutique n'est pas un phénomène nouveau, mais celle des dysfonctions sexuelles féminines en est l'exemple le plus récent et le plus évident. »

Pour que ce marketing soit efficace, il faut formater les esprits du grand public en les habituant à croire que tout n'est que circuits physiologiques améliorables par pilules. Idée grossièrement scientiste : mais idée à laquelle le public d'aujourd'hui adhère docilement. Comme le dit une féministe non-technoïde au Monde : « c'est dans la culture américaine, nous aimons nos pilules... » Lorsque la libido diminue (à cause de l'âge, de la routine ou des modifications psychologiques du couple), la réponse de la société matérialiste mercantile est de proposer une molécule chimique. Ce qui fait hausser les épaules aux sexologues sérieux, tel celui qui dit au Monde : « souvent c'est un problème de couple plus que d'individu... »

  

5. Après la FDA américaine, l'UE va-t-elle se coucher à son tour devant le biotech nord-américain ?

Dans cette affaire (tandis que se trame le traité de libre-échange euro-américain qui va donner pleins pouvoirs aux multinationales sur les gouvernements), l'UE va se trouver – comme dans d'innombrables autres cas – sous la pression du bulldozer nord-américain. L'Agence européenne du médicament trouvera-t-elle la force de dire non à l'Addyi américano-canadien ? Les paris sont ouverts.

 

► Lisez l'article du Monde in extenso, vous en apprendrez beaucoup plus !

 

 _______________

 celle dont l'homologue française revendique la GPA, la PMA etc.

 

Commentaires

PERVERS

> Eh bé, en voilà qui ont porté à son comble l'aphorisme du docteur Knock : tout bien-portant est un malade qui s'ignore.
En plus avec tous les effets secondaires pervers, il y aura de plus en plus de malades, donc de nouvelles dépenses de santé en perspective. Et s'il y a des morts... ma foi, ce sont des retraites en moins à payer, non ? Déjà que la sexualité est un dieu (une déesse ?) qu'il convient de vénérer en toute occasion, si on y ajoute l'intérêt des effets secondaires, j'en déduis que ce "médicament" sera rapidement adopté en Europe.
Tiens, j'avais même oublié l'impact bénéfique sur l'égalité : grâce à ce médicament, on réduira l'espérance de vie des femmes pour qu'elle se rapproche de celle des hommes.
Enfin, on ne nous imposera pas de prendre ce "médicament" et j'espère que la majorité des femmes sera assez sensée pour le laisser chez le pharmacien.
______

Écrit par : Bernadette / | 11/09/2015

'LE MONDE'

> Dois-je conclure que 'Le Monde' soutient dans ce cas le business contre la santé ?

Ludovic

[ PP à L. - Le dossier est nettement instruit à charge contre Sprout. ]

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Écrit par : Ludovic / | 11/09/2015

L'U.E.

> Bien sûr. L'UE ne peut pas s'opposer aux LGBT. Elle acceptera. Le propriétaire du labo le revendra pour au moins un milliard.
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Écrit par : DidierF / | 12/09/2015

SPROUT

> Cette édifiante histoire mériterait d'être mise en bandes dessinées, avec un scénariste amateur de jeux de mots. Il est assez plaisant que les laboratoires Sprout, dont le nom évoque en anglais la germination et la pousse, s'adonnent au commerce du plaisir stérile. Quant à l'onomatopée qu'entraîne une prononciation à la française, elle dit bien à quel niveau ledit laboratoire entend se situer. Et les Whitehead aux mains sales, quels beaux spécimens du délire autodestructeur de l'homme blanc postmoderne! Enfin, la National Organisation for Women, c'est en l'occurrence "Apocalypse NOW"...
Arrêtons-nous là pour nous rappeler, avec le poète, "que lorsqu'on vient d'en rire, on devrait en pleurer".
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Écrit par : Jean-Marie Salamito / | 12/09/2015

GREY

> à Bernadette - A en juger par le triomphe commercial du porno pour femmes entre deux âges("Nuances de Grey" etc), l'Addyi est voué à un pont d'or !
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Écrit par : emmeline / | 12/09/2015

@ Bernadette

> "Tout bien portant est un malade qui s'ignore".
Oui, Jules Romain était un visionnaire avec son Dr Knock, description pas assez connue de nos jours du mécanisme de la manipulation: inquiéter et culpabiliser.
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Écrit par : Pierre Huet / | 12/09/2015

LE SENS

> "Mal nommer les choses, c'est ajouter au malheur du monde" (A.Camus) ...
Encore une fois, l'on constate la même stratégie du malin, brouiller les intelligences en déformant le message, le sens des choses, pour faire croire qu'on arrive à plus de puissance ; alors qu'en fait on ajoute de la confusion, ce qui nous mène au chaos.
______

Écrit par : franz / | 13/09/2015

Les commentaires sont fermés.