22/02/2015
Grandes marées : le Mont Saint-Michel redevenu une île
...selon sa vocation naturelle et surnaturelle :
Ce mont artificiel est un parfait symbole de l'idée de montagne : c'est l'immobilité verticale, l'ossature du monde. Et tout autour, il y a l'inverse horizontal : l'immensité mouvante de la mer, circulation sanguine de la planète. La mer et le Mont sont mariés. Le vertical et l'horizontal font un couple universel : l'eau et la montagne inspirent tous les peuples... La montagne était un message dès avant le christianisme. Elle figurait l'axe du monde et le chemin de l'homme. A sa base s'ouvraient les portes du royaume des morts ; à son sommet, le ciel épousait la terre. La mer aussi était un message : source de vie et de mort, elle montrait les frontières de la condition humaine. Les siècles chrétiens ont hérité de cette sensibilité en la tournant vers le Dieu de la Bible : "Que de belles choses tu as faites, Seigneur ! Cette grande mer large et profonde : là fourmillent des vies qu'on ne saurait compter, l'infiniment petit et les bêtes énormes, Léviathan que tu fis pour jouer..." Les flots obéissent au ciel, dit le recueil des Miracles de saint Michel. Il est composé vers 1090. Soixante-deux ans plus tard, une femme en couches a été sauvée de la mer au milieu des grèves, tandis qu'elle donnait naissance à un enfant... Pour l'homme du Moyen Âge, ces rapprochements de la terre, de la mer et du ciel ne sont pas un jeu de l'esprit : ils sont d'une évidence profonde. L'homme du Moyen Âge pense que Dieu lui offre des routes secrètes vers un Autre Monde, et que ces routes sont jalonnées de merveilles. Les merveilles de la terre et de la mer sont innombrables et toutes plus déconcertantes les unes que les autres ; mais leur source céleste est unique, comme la lumière blanche devient arc-en-ciel en traversant les eaux. Voilà la clé du Mont Saint-Michel dans son désert marin : c'est une écologie spirituelle. L'homme, la nature et l'archange ont un lien de famille...
Les romans du Mont Saint-Michel (Le Rocher, 2011)
Manuscrit 235 du Mont Saint-Michel, XIIe siècle
(astronomie)
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