Kobané : l'incohérence de BHL

 

Un texte tissé de contradictions :

 

Prenant la pose au Levant après l'avoir prise en Ukraine (etc, etc), BHL fulmine ce matin un Dernier appel pour Kobané.  Sous ce titre à résonance d'aéroport : un texte aussi  grandiloquent que d'habitude,  orné de plusieurs incohérences inédites. BHL accuse M. Erdogan de laisser « Daech » (comme on dit dans nos salons) prendre Kobané, mais il lui reproche... d'être un mauvais membre de l'OTAN, puisqu'en 2003, dit-il, la Turquie « a jeté une ombre durable sur ses relations avec ses alliés » en refusant « le passage et le stationnement de 62 000 militaires américains en route vers Bagdad » ! Or cette invasion de 2003 – dont BHL était un partisan lyrique – est l'origine du drame de 2014. BHL ne veut pas le savoir. Il ne veut pas non plus savoir que sa guerre libyenne de 2011, origine du drame africain actuel, n'est pas sans lien avec la montée de « Daech ». BHL mérite depuis longtemps le Nobel de l'absurde.

 

PS – Cette absurdité se renforce d'une autre : le texte de BHL exhorte M. Erdogan à ne pas laisser passer « la chance de nouer avec l'Europe les partenariats économiques et, un jour, politiques auxquels aspirent ses élites ». BHL ne veut pas savoir que le jeu envers Bruxelles n'est que l'une des cartes d'Ankara, la Turquie affichant le caractère nationaliste de sa politique (d'où son attitude vis-à-vis des Kurdes ; d'où aussi la soumission de l'armée – naguère bastion du laïcisme kémaliste – envers ce président islamique). Le nationalisme turc a même des accents impérialistes, quand M. Erdogan vient dire aux deux millions de Turcs d'Allemagne qu'ils sont « l'avant-garde de la patrie » (2014) ou que « l'assimilation est un crime contre l'humanité » (2008)... Mais quoi que dise ou fasse M. Erdogan, Bruxelles n'arrêtera pas l'engrenage des pourparlers d'adhésion de la Turquie à l'UE : c'est une directive de Washington.