Ferry pêche une vieille lune et la propose à l'électeur UMP

 

         "Il faut réconcilier les trois droites", écrit l'essayiste :

 

Promulgué en 1954 par René Rémond, l'inusable mythe des « trois droites » désignait trois courants d'idées : le légitimisme, l'orléanisme et le bonapartisme. Le défaut de la démonstration était le caractère indéfinissable du concept de « droite », dans la mesure où ces trois courants historiques n'avaient aucune idée commune... et se définissaient à l'origine par leur haine ou leur mépris réciproques. Et où M. Ferry croit-il repérer ces « trois droites » aujourd'hui ? « Dans l'UMP », déclare-t-il. Ah bon.

 

 

 Voyons le bonapartisme... On sait que deux rigolos de l'UMP avaient organisé en juillet 2014 une « fête de la violette » à la gloire de Sarkozy ; la violette fut l'emblème du retour de l'île d'Elbe en 1815, d'où l'idée d'en faire un emblème sarkozyste et saugrenu (si l'on songe à Waterloo). De là à croire qu'il y ait une fibre bonapartiste à l'UMP... Mais si, assure M. Ferry, il y en a une : « eurosceptique, républicaine plus que démocrate, favorable au maintien d'un Etat fort, elle tient qu'une réduction massive des dépenses publiques va casser la croissance », etc. Un peu faible, comme argument.  

 

 Et les légitimistes de l'UMP, où M. Ferry les voit-il ? Dans « La Manif pour tous », répond-il... Quoi ? Comme si c'était un courant de l'UMP ? Haut-le-corps des chefs de file de la Manif ! Et il faudrait démontrer en quoi le légitimisme, courant politique du XIXe siècle, aurait quelque chose à voir avec la Manif pour tous, phénomène atypique répondant à un défi propre au XXIe... (D'ailleurs le livre de Rémond n'arrivait pas – non plus – à prouver que le légitimisme du XIXe avait eu des avatars politiques au XXe).  

 

 

 Restent les orléanistes, autrement dit l'argent. Là Ferry renoue avec le plausible, puisque « les trois présidentiables, Nicolas Sarkozy, Alain Juppé et François Fillon », correspondent à ce profil. (Il leur consacre d'ailleurs quinze lignes (deux fois plus qu'aux « bonapartistes » et aux « légitimistes »), précisant au passage – et là aussi il est dans le vrai – que la « sensibilité libérale » s'exerce « en matière d'économie comme de moeurs ». C'est exact, et c'est pourquoi la Manif pour tous ne peut pas se confondre avec l'UMP. Ce que M. Ferry constate lui-même trente lignes plus bas, sans voir qu'il dément ainsi la compatibilité de l'une de ses trois droites avec le parti de la droite !

 

L'UMP n'est d'ailleurs pas le « parti de la droite », puisque (dit M. Ferry) son candidat devra, « s'il veut être élu », « y agréger la plus grande partie d'un centre qui, sur les questions de société, est souvent plus proche de la gauche », etc. Conclusion : « Le prochain candidat UMP devra donc tout faire pour rassembler son camp. » Quel camp ?

M. Ferry est l'un des parangons de la pensée libérale. On comprend pourquoi Emmanuel Todd, il y a vingt ans déjà, la qualifiait de « pensée zéro ».