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30/04/2014

On dirait la IVe République, mais c'est l'agonie de la Ve

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Émiettement des partis, acrobaties de Matignon, vassalité envers les USA ? Ça ressemble à la IVe... Mais il y a autre chose :

 


 

Ce qui se passe à Paris depuis une dizaine de jours semble nous renvoyer soixante ans en arrière, sous le régime parlementaire de la IVe République. Déjà l'impuissance des gouvernants déclenchait des fureurs dans la population : fonction publique en grève, paysans barrant les routes, Parisiens huant les ministres, naissance du mouvement Poujade, cri d'angoisse et de solidarité lancé par Emmaüs, etc. Pierre Mendès-France analysait ces phénomènes comme nés ''de la tristesse, du désespoir et du découragement''... Le Palais-Bourbon de l'époque renversait les gouvernements les uns après les autres.

M. Valls, lui, s'en est tiré hier soir. À quel prix ! Deux jours de contorsions devant son propre groupe parlementaire, pour l'adjurer de bien vouloir voter la loi... Une loi finalement votée grâce aux centristes (c'est très 1954), tandis que 44 socialistes sur 291 s'abstenaient ou votaient contre : chiffre bien plus élevé que ne l'attendait Valls. C'est un effritement de la majorité et un ''message d'alerte au gouvernement'', selon le député Laurent Baumel (Indre-et-Loire). M. Baumel, ex-chevènementiste, est membre du courant de la Gauche populaire. Ce courant vise à ''renouer'', entre le PS et la population des ouvriers et des employés, un ''contact'' qui avait été délibérément brisé par les bobo-libéraux atlantistes du cercle Terra Nova, gourous de M. Hollande. Autant dire que ces derniers et les amis de M. Baumel n'ont pas le mêmes idées sur la société, la nation et la marche du monde...

Qu'est-ce qu'un parti assemblant des gens qui ne pensent pas du tout la même chose ? Une machine d'artifices. Comme le PS.

Ou comme l'UMP... Le 25 avril, une quarantaine de personnalités de ce parti, dont les ex-ministres sarkozyens Laurent Wauquiez et Patrick Ollier  (ainsi qu'Henri Guaino), signaient un manifeste vigoureusement eurosceptique : dénonçant ''l'austérité aveugle, la politique monétaire, l'ouverture sans contrepartie à toutes les concurrences déloyales,  la politique de la concurrence, la libre circulation poussée à l'excès, le dumping fiscal et social à l'intérieur de l'Europe, les frontières extérieures de l'espace Schengen, l'Europe désarmée, l'élargissement sans fin...'', ces grands notables de l'UMP concluaient : ''trente années de dérives ont condamné  l’Europe  à devenir une machine bureaucratique qui réduit, jour après jour, l’espace des libertés et de la démocratieSi nous ne voulons pas que le rêve tourne au cauchemar, il faut changer d’Europe !'' Ils réclamaient purement et simplement le recentrage sur une Europe  à  Six ou Sept, pour rompre avec l'Europe informe du libre-échangisme. D'où rage d'Alain Lamassoure, partisan de cette Europe-là ! Il se trouve que M. Lamassoure est le chef de file de l'UMP aux européennes, et que tous les notables UMP – sauf les quarante rebelles – sont, comme lui, acquis à l'actuelle UE. On voit ainsi que l'UMP, comme le PS, assemble des gens qui ne pensent pas la même chose sur des questions essentielles. À l'UMP comme au PS, les managers sont de plus en plus contraints de tout négocier avec les ''courants'', qui ne sont rien d'autre que les anciens partis mais transposés à l'intérieur de la grande machine d'artifices. (Ça ressemble à la IVe République mais c'est autre chose, comme on va le voir).

Sur le plan des convictions, l'UMP, comme le PS, sont des machines vides, et ce vide ne peut pas être rempli par ''nos idées'' comme le croient les naïfs : en effet ces machines sont faites pour dissoudre toutes les idées, les bons jeunes gens de Sens commun vont s'en rendre compte comme les Poissons roses. Il y a deux causes à cela :

a) d'un ''micro-point de vue'',  la vacuité paraît née de la dérive des institutions. Fondée pour rompre avec l'instabilité de la IVe, la Ve fut sabotée par le quinquennat (facteur de campagne électorale permanente), qui oblige les partis à s'agglutiner en grandes machines creuses et à refouler en ''courants'' les intérêts des anciens partis qui  s'y assemblent ; mais le processus  tombe en panne  quand l'exécutif donne des signes de faiblesse, ce qui pousse les courants à fronder et à redevenir (ou devenir) des quasi-partis avec lesquels l'exécutif doit derechef négocier. Comme autrefois...

b) Mais d'un ''macro-point de vue'', une force bien plus large est à l'œuvre pour vider le politique de tout contenu. Cette force est économique : néolibéralisme, libre-échangisme, consumérisme sociétal, elle a subjugué nos politiciens mais aussi les citoyens, qui ne voient pas d'où vient ce qui leur arrive en tous domaines – y compris dans leur vie privée... Ce paysage crépusculaire est celui du capitalisme tardif que les charlatans atlantiques de 1990 nous présentaient comme ''l'horizon ultime de la démocratie''.  Mais un autre horizon se dessine. Il promet du nouveau.

 

  

Commentaires

SAUVAGE

> Valls a posé en fait la question de confiance en dehors du cadre constitutionnel protecteur de la Ve République. En cas de question de confiance il faut le dépôt d'une motion de censure votée à la majorité pour renverser le gouvernement, c'est ce qu'on appelle le parlementarisme rationalisé. Tandis que cette question de confiance "sauvage" est très IIIe République (il y a même eu des gouvernements qui sont tombés à cause d'une "question de confiance" au Sénat !).
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Écrit par : B.H. / | 30/04/2014

A L'AMÉRICAINE

> Vous évoquez l'existence de deux machines à élire avec en leur sein des courants finalement comparables dans leurs idées d'une machine à l'autre, ça me fait penser à la situation américaine si j'ai bien compris leur fonctionnement.
Le PS a organisé des primaires à l'américaine (dites ouvertes) pour l'élection présidentielle ce qui a eu pour effet d'exposer tous ces courants au vu et au su de l'opinion ainsi que leur poids, aussi pour constituer le gouvernement le président et son 1er ministre ont été et sont toujours, de fait, obligés d'embaucher des représentants de ces courants à hauteur de leur poids ce qui a pour effet de nous donner un gouvernement sans fil conducteur clair et stable ; la mode risquant d'être reprise par l'autre machine à élire d'organiser des primaires à l'américaine, ce phénomène de gouvernement ornithorynque risque de s'installer dans notre paysage durablement.
Quant à l'idée de revenir à une Europe resserrée je trouve l'idée excellente, elle a été exposée par P Larrouturou (fondateur du parti Nouvelle Donne)sur l'antenne de Radio Notre Dame. J'aime également beaucoup son engagement de soumettre tout traité à un référendum !
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Écrit par : DV / | 30/04/2014

LGBT

> Je suis d'instinct sympathisant avec ce qu'on appelle la "gauche du PS", lucide face au virage libéral du gouvernement. Le problème est que ces mêmes parlementaires sont souvent les plus ardents partisans du LGBTisme: Laurent Baumel a ferraillé pour le mariage gay, Yann Galut (celui qui a embrassé sur la bouche son collègue Nicolas Bays par "solidarité avec les homos") est pour la PMA, Jérôme Guedj idem (et il jouait sur sa tablette pendant les débats) etc.

PJ


[ PP à PJ - Qui leur dira de chasser le libéral de leur tête ? ]

réponse au commentaire

Écrit par : Pierre Jov / | 30/04/2014

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