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29/11/2013

Cameroun, Nigeria, Boko Haram, Georges Vandenbeusch

Sur le terrain : abubakar-shekau-le-leader-du-groupe-islamiste-boko-haram_362924_800x600.jpg


Témoignage catholique et interreligieux : 

 

<<  Mardi 12 novembre. Nous avons visité longuement le Centre d'accueil des réfugiés du Nigéria, avec Henri le vicaire général et Frans Byl puisque le Centre est sur sa paroisse de Zamay (près de Mokolo). Avec le staff du HCR (Haut Commissariat aux Réfugiés) on a fait longuement le tour du camp et des familles. A la fin on a prié tous ensemble (en anglais traduit en haoussa !), protestants, pentecôtistes, catholiques, même des musulmans se sont joints à nous, pour la paix, pour la conversion des bourreaux, pour le retour rapide au Nigéria... Il y a actuellement 1779 réfugiés, dont au moins les 2/3 sont des enfants (les adultes viennent mettre leurs enfants en sécurité au Cameroun, et eux-mêmes, certains du moins, essayent de retourner au moins de temps en temps chez eux au Nigéria pour cultiver ou récolter leurs champs...). Le camp est prêt à recevoir 15.000 réfugiés si nécessaire. La situation au camp est paisible, ils sont bien pris en charge au plan logement et nutrition par le HCR. Avec l'aide des amis, que nous avons reçue, nous essayons d'aider avec les habits, le savon, le matériel scolaire (toute une école s'est mise en route au camp, de la SIL au CM2, en anglais évidemment, avec des professeurs bénévoles qui sont eux-mêmes des réfugiés). Beaucoup de musulmans sont également réfugiés, ils craignent eux aussi les Boko Haram autant que les chrétiens...

Ce qui se passe aujourd'hui au Nord-Est Nigéria est épouvantable. Une école attaquée, près de 50 enfants massacrés. Un cortège de fête de mariage, 30 tués. Un car arrêté, ils font sortir les passagers, demandent la nationalité : les 2 ou 3 camerounais ou tchadiens ont pu partir (c'est eux qui ont ensuite raconté la scène), les Nigérians hélas tous massacrés. Et pourquoi, dans quel but ? personne ne le sait. L'armée nigériane est très présente, il y a plein de représailles de leur part contre les groupes Boko Haram, mais bien sûr la violence ne fait qu'engendrer la violence. Tout cela se passe (pour le moment ???) uniquement sur le territoire nigérian, mais à nos frontières.

  

Georges Vandenbeusch

 

Jeudi 14 novembre. Georges Vandenbeusch, prêtre du diocèse de Nanterre, « fidei donum » à Nguetchéwé, a été enlevé hier soir à 23 heures chez lui par des bandits venus en moto, parlant haoussa (langue du Nord-Nigéria) et anglais. Ils l'ont amené au Nigéria (la frontière est à 20 km de la paroisse). C'est sans doute pour demander une rançon, on verra. C'est sans doute en lien avec "Boko Haram", mais pourtant on est frappé par la ressemblance entre l'agression d'hier et une autre agression qui avait eu lieu en avril 2009 (donc avant le phénomène Boko Haram) à la paroisse de Nguétchéwé. Après Georges, ils ont visité aussi les Sœurs, comme en 2009, mais sans leur faire de mal. Alors peut-être s'agit-il des mêmes « simples » bandits ? Nous sommes dans la tristesse et aussi dans la confiance.

 

Lundi 18 novembre

 

Boko Haram a déclaré qu'ils retenaient Georges en otage, et tout concorde pour dire que c'est bien entre leurs mains qu'il se trouve. Pour le Cameroun c'est très grave, puisqu'ils ont pénétré à l'intérieur du pays, sur 20 km, ce qu'ils n'avaient jamais fait.

 

L'administration camerounaise a tout à fait bien pris les choses en mains. Le Gouverneur de notre Région de l'Extrême-Nord, averti dans la nuit, était déjà à Nguetchéwé (2h1/2 de route depuis Maroua) le 14 à 4 heures du matin, et y est resté avec nous jusqu'à midi ce jour-là. Le Cameroun travaille en lien avec le Nigéria, et aussi avec la France. Des gendarmes français sont arrivés sur le terrain. L'ambassadrice de France (qui est en poste au Cameroun depuis 15 jours seulement !) est venue à Maroua et hier nous avons longuement échangé avec elle et ses collaborateurs.

 

Les tractations se font bien sûr dans la plus grande discrétion possible. Mais ici interviews, coups de téléphone et e-mail n'arrêtent pas, même l'agence Chine Nouvelle de Pékin m'a téléphoné (en français !) pour avoir des nouvelles... !!! On se passerait bien de toute cette publicité, on préférerait revoir Georges !

 

La population, en particulier à Nguétchéwé, est consternée et humiliée. C'est la grande tristesse. Et pour nous tous aussi. Cette région est la plus belle du Cameroun et même d'Afrique, la région la plus accueillante, la plus pacifique, où règnent l'harmonie et la bonne entente entre les 50 ethnies de la région et entre les religions, musulmans, protestants, religion traditionnelle, catholiques, on vit en paix, dans le respect, l'amitié (l'imam de la grande mosquée de Maroua est à la Mecque, mais son secrétaire a été un des premiers à me manifester sa sympathie). Et voilà qu'on nous force à déclarer la région « zone rouge » !!! « N'y allez pas » !!! Pour nous c'est très difficile à accepter.

 

La première réaction de l'administration était de rassembler (pour un temps ?) tous les missionnaires expatriés à Maroua. Finalement ils acceptent que chacun et chacune reste à son poste, et des équipes de sécurité (police, gendarmerie, « BIR ») se relayent à Koza, à Ouzal, à Nguétchéwé, à Zhelevet, à Kolofata, Amchidé, entre autres. Le sud de Mokolo (de Rhumzu à Bourha) ne semble pas concerné (pour le moment ???).

 

Hélas, hier dimanche, à Assigassya (au Cameroun, mais sur la frontière, à 20 km de Nguétchéwé), les bandits sont venus mettre le feu à la chapelle protestante, ont tué le pasteur (camerounais) et un enfant. Il y a quelques jours, au Nigéria, ils ont tué plusieurs dizaines d'enfants (musulmans) réunis dans une école coranique. Ici les musulmans de Maroua me disent que les écoles coraniques sont pleines d'enfants nigérians réfugiés. Boko Haram détruit et tue même les musulmans ! des petits enfants musulmans ! au nom d'Allah !!! C'est inimaginable.

 

A Nguétchéwé, dans la maison de Georges, il y a un grand rosaire (c'est la paroisse ND du Rosaire !) avec de très gros grains, qui s'étale sur un mur. Les bandits lors de leur « visite » l'ont arraché, cassé, coupé... sûrement en haine des chrétiens. On va célébrer à Nguétchéwé une messe pour remettre en place ce chapelet profané.

 

Partout les gens prient pour Georges, avec Georges, et pour la paix. Et moi je vis avec lui, je suis tout le temps en train de lui dire « courage Georges, courage Georges » ! Je pense qu'il sait que je suis en train de lui dire cela.

 

Voilà quelques nouvelles. J'espère que mon prochain billet sera pour vous annoncer le retour de Georges parmi nous !

 

Merci mille et mille fois de vos messages fraternels, de votre amitié, de vos prières.

 

 

Fr. Philippe Stevens, petit Frère de l'Evangile   >>

 

 

 

Commentaires

RAISON DE PLUS

> L'Agence Chine Nouvelle qui appelle pour demander des nouvelles ... Des musulmans qui vivent en harmonie avec des chrétiens et prient avec eux pour la libération du Père Vandenbeusch ... Des assassins de Boko Haram qui vont jusqu'à massacrer des enfants musulmans des écoles coraniques, de petits innocents eux aussi créatures de Dieu (on ne naît pas musulman, on le devient)...

...c'est tout le contraire de ce qu'on avait lu et entendu jusqu'à présent. Le mal suprême à éradiquer s'est lui-même pointé du doigt, tandis que parmi les ennemis traditionnels des chrétiens de bonnes âmes se manifestent. Raison de plus pour prier encore plus pour la libération de ce prêtre tant aimé !
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Écrit par : Françoise Authosserre / | 01/12/2013

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