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16/04/2013

Le cas Cahuzac et le libéralisme, vus de Londres

 will-hutton.jpg

"There was a time

when to live a life virtuously

was well understood..."

Traduction de l'article :

 

 


<<  Il fut un temps où l’on comprenait la vertu dans l'existence. Cela impliquait de l'intégrité, des buts dépassant le gain personnel, un certain degré d'altruisme, voire de modestie. Les dominants étaient peut-être parvenus par la dureté et l'ambition, mais ils savaient que pour gouverner il fallait donner l’exemple, et que cela nécessitait d’autres qualités que de penser à soi. Fini ! Le pire effet de la réaction libérale est peut-être d’avoir investi son énergie à démontrer que la vertu, même reconnue dans la sphère privée, n’a aucune valeur dans la sphère publique. Selon les néolibéraux, l'économie et la société ne fonctionnent que par la poursuite exclusive des intérêts individuels : toute responsabilité envers le bien commun doit être écartée.

La déroute de la vertu est devenue le fléau de notre temps. La cupidité est devenue légitime, la seule règle du jeu est d'accumuler des richesses par n'importe quel moyen – y compris les primes scandaleuses ou l’évasion fiscale. Mais, dans tout l’Occident, cette attitude a des conséquences de plus en plus évidentes. La politique, les affaires et la finance en sont aujourd’hui grevées au point de dérailler, et un abîme s'est ouvert entre les élites et le peuple.

Le psychodrame français en est un exemple. François Hollande est élu président il y a moins de douze mois en promettant « un gouvernement exemplaire » après les vilenies de l'ère Sarkozy. Puis vient Jérôme Cahuzac. Le mois dernier encore, il était ministre socialiste délégué au Budget, chef de file de la croisade contre l’évasion fiscale. Et l'on découvre qu’il avait lui-même caché 600 000 euros sur un compte secret en Suisse. Il démissionne, déclenchant une crise non seulement pour le président français mais pour la classe politique et l'ensemble du système.

[…] Il semble qu'il y ait déormais une règle pour l'élite, et une autre pour les simples gens taraudés par l’austérité, la dégradation du niveau de vie et un chômage en crue depuis seize ans.

Pendant ce temps, en Espagne, le Premier ministre Mariano Rajoy a été accusé d’avoir dissimulé 250 000 euros au fisc. Et la fille du roi Juan Carlos, Cristina, se retrouve face aux juges dans les affaires délictueuses de son mari. En Italie, le mouvement anti-élites de Beppe Grillo a remporté près de 30 % des suffrages, en protestation contre une classe politique corrompue du haut en bas.

[…] L'opinion publique sait que les nouvelles règles du monde sont les paradis fiscaux, les primes des banquiers et la rapacité des firmes drapée dans une idéologie sur mesure. Aujourd’hui, l’Etat est perçu comme inefficace et répressif à la fois. Les riches n’ont aucun scrupule à dissimuler leurs richesses, et l’évasion fiscale égoïste est présentée comme légitime, voire moralement nécessaire.

[…] Les vertus d’une société équitable sont connues en principe : la juste proportion entre effort et récompense, l'entraide quand ça va mal, le partage des bénéfices quand ça va bien. Mais une telle société a besoin d'être dirigée par des hommes et de femmes animés eux-mêmes de ces vertus. Il y a encore cinquante ans, la foi en Dieu sous-tendait la moralité publique, et si les élites se comportaient mal, elles savaient au moins que c’était mal. Aujourd’hui, nous traversons la période de « révolte des élites » qu'annonçait il y a vingt ans l’historien Christopher Lasch. Le code éthique soutenu par les valeurs chrétiennes, qui maintenait un certain sens de l'équité, a été sapé par la sécularisation et le culte du libre-échange. Ont disparu également les mouvements de travailleurs portés par la foi dans la crédibilité du socialisme, et qui obligeaient les élites à rester honnêtes.

[…] Pour restaurer la confiance, nous avons besoin d’encore plus de transparence, avec les mêmes principes appliqués à nos entreprises et à nos banques. Et il faut une nouvelle conscience de la légitimité du domaine public et de l'intervention publique. Pour nos dirigeants, dans le secteur public et le secteur privé, l'heure est venue de rendre compte de leurs actes. >>


Will Hutton (photo ci-dessus), The Observer, 7 avril

 

Commentaires

IMPORTANT

> "Aujourd’hui, l’Etat est perçu comme inefficace et répressif à la fois."
Cette remarque est très importante, elle décrit le sentiment de ceux qui n'appartiennent pas à la clientèle du système.
Ainsi le libéralisme financier est-il parvenu jusqu'à présent à s'exonérer de sa propre responsabilité au yeux de nombre de ses victimes !
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Écrit par : Pierre Huet / | 16/04/2013

RIRE D'ESPERANCE

> Le Christ s'annonce comme Le Révolutionnaire du XXIe siècle. L'Eglise se retrouve dans la position du défenseur des faibles, de la justice, de l'humanité, de l'empathie, etc.. "Aime ton Prochain comme Toi-même" s'annonce comme la bombe atomique que le monde moderne doit affronter.
Ce dernier est en train de se désintégrer. Si un moderniste me lit, il me dira "il ne faut pas exagérer".
J'ai envie de pleurer de peur et de rire d'espérance.
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Écrit par : DidierF / | 17/04/2013

@ PP

> Cet article n'est pas directement en lien... mais quand même un peu. Je crois que vous trouverez cela intéressant.
http://www.theatlantic.com/business/archive/2013/04/what-thatcher-didnt-understand-inequality-hurts-the-rich-and-poor-alike/274940/
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Écrit par : François S. / | 17/04/2013

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