09/04/2013
Le bilan de Margaret Thatcher...
...que les libéraux ne donnent pas, préférant saluer son idéologie :
- dérégulation de la finance
- dégradation des infrastructures
- délabrement des services publics
- salariat précaire
- baisse de qualité de l'éducation
- doublement du nombre des pauvres
- accroissement des disparités régionales
- réforme fiscale favorable aux riches, et aggravation des disparités sociales : 60 % de défavorisés ou de précarisés, 40 % de privilégiés.
A cela s'ajoutent les deux boucheries perpétrées sur l'ordre de l'Iron Lady (que la reine appelait "Mrs Cromwell") :
- la répression, implacable et perverse, en Irlande du Nord : 3601 morts dont les grévistes de la faim de la prison de Maze ("let them die in their shitblocks")
- la reprise des îles Malouines aux Argentins : 904 morts. (Le capitalisme-casino tue beaucoup de monde et sait fait marcher en rang, rantanplan, ceux qui se satisfont du mirliton.)
Entre le bilan du thatchérisme et la doctrine sociale de l'Eglise catholique, notamment dans l'encyclique Caritas in veritate, l'incompatibilité est donc flagrante à tous points de vue. C'est que les deux démarches sont antinomiques. Mme Thatcher disait : "les marchés et les intérêts individuels sont la seule réalité, je ne vois rien qu'on puisse appeler 'la société' ". Cette affirmation est "à l'opposé de la pensée sociale de l'Eglise", soulignaient à l'époque les journaux catholiques du Royaume-Uni.
Pourquoi les libéraux français vouent-ils un culte à cette personne ? Parce qu'elle incarne la dictature de leur idéologie sur la réalité. Mme Thatcher se résumait tout entière dans son leit-motiv : "There is no alternative". C'est toujours le gimmick de nos libéraux, en dépit du désastre de leur utopie dérégulatrice et financiarisante (2008). Aujourd'hui Berlin et Bruxelles disent elles aussi "no alternative" pour imposer un carcan aux peuples de l'Europe. Voilà feue Mme Thatcher réconciliée avec cette Europe qu'elle a tant haïe ! Pour les eurosceptiques vivants, c'est l'heure de rompre avec le libéralisme ou de mourir idiots.
En guise d'absoute, ce détail final dédié aux libéraux : si les conservateurs ont évincé Mme Thatcher en 1990, c'est qu'elle venait de créer... un impôt supplémentaire. Nobody's perfect.
20:21 Publié dans Idées, La crise | Lien permanent | Commentaires (17)
Commentaires
LE CARDINAL CONTRE THATCHER
> "les marchés et les intérêts individuels sont la seule réalité, je ne vois rien qu'on puisse appeler 'la société' "
Margaret Thatcher
"On nous reproche d'être des individualistes même malgré nous, par la logique de notre foi, alors que, en réalité, le catholicisme est essentiellement social. Social, au sens le plus profond du terme : non pas seulement par ses applications dans le domaine des institutions naturelles, mais d'abord en lui-même, en son centre le plus mystérieux, dans l'essence de sa dogmatique. Social à tel point, que l'expression de « catholicisme social » aurait toujours dû paraître un pléonasme."
Cardinal de Lubac
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Écrit par : Serge Lellouche / | 09/04/2013
MISERICORDE
> Margaret Thatcher est décédée. C'est une chose délicate que de régler ses comptes avec les morts, avant même la célébration de leurs funérailles. Tel homme politique, qui ne croit même pas dans la résurrection des corps, la voue aux flammes de l'enfer; c'est affligeant.
Elle s'était retirée depuis longtemps de la vie politique, sans avoir pu redresser l'économie de son pays. Comme mère aussi, elle n'a pas été gâtée; et pour finir, elle a dû surmonter une épreuve difficile, la maladie d’Alzheimer. Durant toute sa vie, elle n'aura essuyé que des échecs.
Il y a aussi une place pour le repentir; et Dieu est miséricordieux.
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Écrit par : Blaise / | 09/04/2013
> Blaise, attention au penchant catho à tout dissoudre dans l'imagerie pieuse. Laissez Mme Thatcher devant son Créateur, ça ne nous regarde pas, et laissez les vivants envisager les conséquences graves de ce qu'elle a imposé aux autres sur terre : ça, ça nous regarde ! Si on vous écoutait les historiens n'auraient pas le droit de faire le bilan des puissants qui marquent l'avenir de leurs contemporains pour des dizaines d'années ? Un peu trop facile.
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Écrit par : myriam / | 09/04/2013
@ Myriam
> Vous vous trompez. Ce que je n'aime pas, c'est la curée avant même que le corps soit refroidi. Question de décence, voilà tout!
Par ailleurs, elle n'a pas été seule dans son coin à imposer sa politique; les responsabilités sont très largement partagées. Thatcher a servi de bouc-émissaire commode, tandis que ses idées se diffusaient un peu partout en Europe.
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Écrit par : Blaise / | 10/04/2013
LA FROIDE EFFICACITE ECONOMIQUE
> Avec une contradiction dans sa proclamation individualiste: elle était résolument anglaise. Depuis Elisabeth Ière la puissance anglaise s'est faite sur la froide efficacité économique: évictions terriennes, workhouses, déportations, exportations de denrées en pleine famine irlandaise etc.
Quant à la guerre de Malouines, il faut se souvenir que c'était en pleine guerre froide et que les militaires argentins fleurettaient avec l'URSS qui ne pouvait que soutenir l'éviction d'un pays de l'OTAN de cette zone océanique.
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Écrit par : Pierre Huet / | 10/04/2013
"PRIVATISONS LES OBSEQUES DE MARGARET THATCHER"
> tribune de Ken Loach (le cinéaste qui a le mieux dépeint l'effet déshumanisant des "réformes" Thatcher sur la vie des ouvriers anglais ) :
" Margaret Thacther a été le premier ministre le plus diviseur et destructeur des temps modernes : chômage de masse, fermeture d'usines, des communautés détruites, voilà son héritage. C'était une combattante et son ennemi était la classe ouvrière britannique. Ses victoires, elle les a obtenues grâce à l'aide des figures politiquement corrompues du Parti travailliste et de nombreux syndicats.
C'est à cause des politiques mises en place par elle que nous sommes aujourd'hui dans cette situation. D'autres Premiers ministres ont suivi son exemple, notamment Tony Blair. Elle a tiré les ficelles, il fut sa marionnette.
Souvenez-vous qu'elle a qualifié Mandela de terroriste et qu'elle a pris le thé avec Pinochet, ce tortionnaire et assassin.
Comment lui rendre hommage ? En privatisant ses obsèques. Faisons jouer la concurrence et allons au moins offrant. C'est ce qu'elle aurait voulu."
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Écrit par : luça / | 10/04/2013
LA GUERRE DES MALOUINES
> Circule sur le web un article de Paul Blond et Chris Marsden paru à Londres en 2007 :
" La classe dirigeante britannique a célébré avec une grande parade militaire le 25e anniversaire de la victoire des Malouines (Iles Falkands). Les services religieux et les défilés militaires survolés par l’aviation qui eurent lieu sur l’île et de par la Grande-Bretagne, donnèrent à cette célébration des airs de triomphalisme impérialiste. Quelque 900 personnes, 255 militaires britanniques, 649 argentins et 3 habitants de l’île (tués durant le bombardement naval de Port Stanley), moururent au cours de cette guerre qui dura 74 jours.
L’atmosphère fut résumée par l’ancien premier ministre, Margaret Thatcher, qui avait envoyé des troupes aux Malouines en avril 1982. Elle avait enregistré un message radiophonique qui fut retransmis aux habitants de l’île et aux forces britanniques et dans lequel elle décrivait la « libération de nos îles » comme « une grande victoire et une cause noble. » Qualifiant la guerre de « juste », elle dit que la Grande-Bretagne « s’était réjouie du succès et nous devrions encore nous réjouir. »
Le premier ministre, Tony Blair, était d’accord avec elle qu’« un principe était en jeu ». La décision de faire la guerre, dit-il dans une interview du mois dernier enregistrée pour le site web de Downing Street [résidence officielle et bureaux du premier ministre] avait nécessité du « courage politique », « mais c’était la chose à faire ».
Que s’est-il passé il y a 25 ans ?
Las Islas Malvinas, apparemment inhabitées au moment de l’arrivée des Européens dans le Nouveau Monde, étaient un petit bout de l’empire colonial espagnol en Amérique latine et qui avaient été explorées et réclamées aussi bien par les Britanniques que par les Français à la fin du dix-huitième siècle. De par la déclaration de leur indépendance de l’Espagne en 1816, les Argentins revendiquèrent le contrôle des Iles en tant qu’ancien territoire colonial espagnol.
La Grande-Bretagne tenta en vain par deux fois d’envahir l’Argentine même, en 1806-1807. Durant les guerres qui aboutirent en fin de compte à l’indépendance de l’Argentine (1816-1853), la Grande-Bretagne occupa les îles, en 1833. Les rebaptisant Falkands, elle commença par peupler les îles de citoyens britanniques et depuis, elle se sert d’eux pour revendiquer le pétrole et les ressources minérales des eaux polaires du sud. L’Argentine continue d’en réclamer la souveraineté.
En 1982, la junte militaire du général Leopoldo Galtieri chercha à se servir de cette revendication légitime sur les îles pour détourner l’opposition à sa politique intérieure sanglante. En mars de cette année, un navire marchand argentin débarque sur les Iles de Géorgie du Sud et le 2 avril Galtieri envoie des troupes dans ces îles et aux Malouines.
Thatcher se décida en faveur d’une réponse militaire pour défendre les intérêts de l’impérialisme britannique dans l’Atlantique du Sud. Une force opérationnelle fut envoyée à 8000 milles de là pour reconquérir les îles. Dans les cinq jours qui suivirent le débarquement argentin, le gouvernement britannique déploya des navires dans les Iles de Géorgie du Sud et déclara une zone d’exclusion de 200 miles nautiques autour d’elles.
Galtieri ne s’était pas attendu à ce que le gouvernement britannique réagisse. La junte n’avait reçu aucun indice des Nations unies quant à une invasion. La Grande-Bretagne était en train de réduire sa présence sur l’île. Depuis de nombreuses années, elle s’était également efforcée de négocier de nouveaux arrangements concernant leur administration.
Sir Laurence Freedman, un professeur d’études de guerre au King’s College de l’université de Londres, et auteur de l’histoire officielle des Falkands, révéla que le gouvernement de Thatcher avait proposé deux ans avant le conflit d’abandonner la souveraineté des îles à l’Argentine.
En juin 1980, le ministère des Affaires étrangères avait rédigé une proposition pour donner la souveraineté officielle des îles à Buenos Aires, après quoi la Grande-Bretagne conclurait un contrat de leasing pour une période de 99 ans. Le ministre des Affaires étrangères, Nicholas Ridley, rencontra secrètement en Suisse puis de nouveau à New York, Comodoro Cavandoli d’Argentine, mais le projet fut enterré en raison de l’opposition manifestée à l’encontre des propositions par les habitants des îles, comme l’avait relevé Ridley lors d’une visite officielle, et du Parti travailliste au parlement.
La junte avait également espéré que le gouvernement américain n’interviendrait pas en retour de services rendus. Galtieri avait escompté un soutien des Etats-Unis en raison de son bilan de torture et de meurtre de travailleurs et d’étudiants de gauche ainsi que pour son aide dans l’armement de la CIA et l’entraînement des Contras au Nicaragua.
Galtieri sera déçu. Les Etats-Unis restèrent officiellement neutres tout au long du conflit, mais fournirent un soutien tactique et de renseignement aux forces britanniques.
Il y avait de fortes raisons pour le soutien donné par les Américains aux Britanniques.
D’abord, Reagan et Thatcher étaient des alliés pour s’être fait les chantres d’un programme économique monétariste de contre-réformes et d’attaques contre les salaires, les emplois, les droits syndicaux et les acquis sociaux. Ensuite, cela aurait été un précédent dangereux pour quiconque, même une junte argentine qui avait été un allié précieux des Etats-Unis, que de confisquer le territoire d’une puissance impériale.
Néanmoins, ce fut une bataille politique pour Thatcher que de s’assurer le soutien des Etats-Unis, compte tenu de leurs intérêts stratégiques en Amérique du Sud. Selon le Guardian, Freedman attira aussi l’attention sur la manière dont « le gouvernement Thatcher dut subir la pression incessante de Washington pour accepter un cessez-le-feu après l’invasion argentine et avant la reprise des îles. »
A un moment donné du conflit, le secrétaire d’Etat américain, Alexander Haig proposa un cessez-le-feu accompagné d’une force internationale de maintien de la paix comprenant des troupes américaines. Fin mai 1982, Thatcher dit à Reagan au téléphone qu’un cessez-le-feu avant le retrait argentin était inacceptable.
Elle demande à Reagan, « Comment les Américains réagiraient-ils si l’Alaska était envahi et, si avant que les envahisseurs furent repoussés, des appels à un retrait américain étaient lancés ? »
Thatcher insista à plusieurs reprises pour dire que la souveraineté des Falklands était une question de principe. Mais des calculs majeurs de politique intérieure se cachaient derrière sa détermination d’aller en guerre. En 1982, le gouvernement Thatcher était profondément haï. Le chiffre du chômage se situait à environ 3,6 millions, le total officieux étant supposé être bien plus élevé. Sa politique était confrontée à une opposition se manifestant par un grand nombre de conflits industriels et de grèves qui avaient lieu dans les grandes entreprises, et même par la menace d’une grève des infirmières. Les projets gouvernementaux de fermer 23 mines de charbon durent être ajournés en 1981 en raison d’une menace de grève.
Le gouvernement Thatcher ne tenait qu’à un fil. Le soutien du Parti travailliste pour la guerre des Falklands joua un rôle clé en le sauvant.
Deux ans auparavant, le ministre des Affaires étrangères du « shadow cabinet » [le « gouvernement » de l’opposition], Peter Shore, avait attaqué les projets des conservateurs prévoyant de nouveaux accords avec l’Argentine en employant un vocabulaire qui devait devenir familier par la suite durant la guerre elle-même. Au parlement, Shore avança l’argument de « l’importance suprême » de l’opinion des habitants des îles. Avec la décision d’envoyer la force opérationnelle, le Parti travailliste se jeta tête baissée dans le soutien patriotique du militarisme impérialiste. Seuls 33 députés travaillistes exprimèrent leur opposition à la guerre tandis que le dirigeant travailliste, Michael Foot, mettait en avant l’argument que le caractère droitier de la junte justifiait le soutien de l’impérialisme, insistant dans un discours tenu au parlement et qui dépassait la démagogie de Thatcher, pour dire que l’« agression vile, brutale » du côté argentin, n’avait pas le droit d’être victorieuse.
Sans le soutien du Parti travailliste, le conflit et les atrocités qui s’ensuivirent n’auraient pas été possibles. Aux côtés des médias, les fauteurs de guerre travaillistes permirent de par des efforts conjugués de déclencher un patriotisme frénétique au sujet d’une « guerre juste » contre une junte fasciste et pour le compte des insulaires qui désorienta et jeta dans la confusion de vastes couches de travailleurs.
Le 25 avril, alors que les négociations de paix entre Haig et Fernando Belaunde Terry étaient encore en cours, les marines britanniques battirent facilement la garnison se trouvant sur la Géorgie du Sud. Thatcher, en intensifiant sa propagande militariste, critiqua les journalistes leur disant de « simplement se réjouir de la bonne nouvelle. »
Le 2 mai, le croiseur argentin Général Belgrano naviguait en dehors de la zone d’exclusion et faisait route vers l’ouest-nord-ouest à 270 degrés (donc en direction opposée à l’île) lorsqu’il fut coulé par le sous-marin nucléaire HMS Conqueror, causant la mort de 323 militaires argentins. Le journal de Rupert Murdoch, le Sun, titra à la une « Gotcha ! » (On l’a eu), qu’il dut par la suite retirer en raison d’un sentiment de dégoût largement répandu. Le lendemain, le HMS Sheffield était touché par les avions argentins, tuant 20 hommes de son équipage et forçant l’abandon du navire. Cinq navires britanniques supplémentaires furent coulés durant le conflit.
Avec le début des combats au sol, la disparité entre l’armée professionnelle britannique et les soldats argentins mal équipés et mal entraînés et dont beaucoup étaient des jeunes devint apparente. A Goose Green, le premier jour des combats au sol, les forces britanniques moins nombreuses perdaient 17 hommes contre 250 tués du côté argentin. Plus de 1 000 prisonniers de guerre furent faits. Les troupes argentines furent seulement en mesure de mener des combats d’arrière-garde contre les Britanniques au fur et à mesure qu’ils avançaient dans l’île en direction de Port Stanley. Les forces argentines à Stanley capitulèrent le 14 juin, et les Britanniques annoncèrent la fin des hostilités le 20 juin.
Deux jours plus tard, le général Galtieri démissionnait. La colère populaire face à la débâcle sanglante sur les Malouines entraîna un an après la chute de la junte.
Toutefois, en dépit de la victoire expresse et de la supériorité militaire de la Grande-Bretagne, plus de militaires britanniques perdirent leur vie que ce n’a été jusque-là le cas en Irak et en Afghanistan réunis. Les conséquences à long terme furent également terribles. L’intensité des combats au corps à corps a résulté dans un syndrome de stress post-traumatique à la fois parmi les vétérans britanniques et argentins. Plus de militaires britanniques se sont suicidés depuis la fin de cette guerre que ne furent tués pendant la guerre. Selon l’organisation des vétérans South Atlantic Medal Association, 264 vétérans britanniques se sont donnés la mort en 2002 contre 255 victimes durant la guerre elle-même. Selon un film de 2006, le nombre de suicidés argentins est de 454.
Le Parti travailliste fut également responsable de la popularité politique de Thatcher après la victoire des Falklands.
Foot, un vétéran pacifiste et membre de la campagne pour le désarmement nucléaire, avait été élu à la tête de ce parti en 1980. Ceci avait été la conséquence de la répulsion ressentie au sein du parti sur la manière avec laquelle le gouvernement travailliste de James Callaghan avait, de par ses attaques contre la classe ouvrière, ouvert la voie à l’accession au pouvoir de Thatcher. Foot a trahi ce sentiment et fait en sorte que Thatcher remporte un deuxième mandat. Lors de l’élection générale de juin 1983, les tories remportèrent plus de 40 pour cent des votes, en n’enregistrant qu’une faible diminution. Les travaillistes ne remportèrent que 27,6 pour cent des voix, une baisse de plus de 9 pour cent, en cédant la plupart des votes perdus à l’Alliance formée par les libéraux et les sociaux-démocrates, la scission droitière survenue au Parti travailliste en 1981.
Grâce également aux travaillistes, la victoire de Thatcher en 1983 ouvrit la porte aux attaques contre les conditions de vie des travailleurs qui connurent leur point culminant avec la défaite des mineurs après un an de grève et la privatisation des services essentiels.
Voilà les termes dans lesquels Thatcher mesure le succès du conflit des Malouines. A partir de la première parade de victoire quand il fut interdit aux vétérans défigurés d’y participer, son manque de respect à l’égard de ceux qui se sont battus pour lui conférer cette victoire était évident.
Aujourd’hui, le Parti travailliste a une fois de plus rejoint les tories pour chanter les louanges du conflit des Falklands, mais cette fois en tant que gouvernement au pouvoir avec Thatcher dans le rôle de la femme d’Etat vieillissante. Leurs motifs ne sont pas simplement la justification d’un crime passé, mais la défense des crimes commis aujourd’hui et planifiés pour demain.
Dans son discours d’anniversaire, Thatcher a rappelé son affirmation barbare du colonialisme comme une « grande lutte nationale ». Elle mit en garde qu’il n’y a « pas de victoires finales, car la lutte contre le mal dans le monde est sans fin. La tyrannie et la violence portent de nombreux masques. Pourtant, nous pouvons tous aujourd’hui tirer espoir et force de la victoire des Falklands. »
Quant au premier ministre, Tony Blair, il saisit l’anniversaire des Falklands pour associer ses propres guerres en Irak et en Afghanistan à cette prétendue lutte passée contre la « tyrannie ». Avant de participer aux célébrations officielles, Blair a diffusé un podcast sur le site web de Downing Street reproduisant une interview accordée à l’historien Simon Schama. En réponse à une affirmation de Shama selon laquelle la décision de faire la guerre avait été « un pari très risqué » de la part de Thatcher, Blair répondit que cela représentait et avait exigé « beaucoup de courage politique ». Et lui aussi aurait fait la même chose que son idole politique parce que « c’était la bonne chose à faire… pour des raisons qui n’affectaient pas seulement la souveraineté britannique, mais aussi parce je pense qu’un principe était en jeu. »
Lorsque Blair parle de faire la « bonne chose » et cite Thatcher comme son modèle, ceci devrait servir d’avertissement et inciter à traiter le mélange malsain de la propagande et de la nostalgie qui entoure la guerre des Malouines avec le mépris qu’il mérite. "
Source : WSWS
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Écrit par : luça / | 10/04/2013
ELEMENTS DE LANGAGE
> Tombé dans ma boîte mail hier :
« Cité du Vatican, 9 avril 2013 (VIS). Le Pape François a fait parvenir un message au Premier Ministre britannique à la suite du décès hier à 87 ans de Mme Margaret Thatcher, qui occupa son poste de 1979 à 1990. Il y évoque les valeurs chrétiennes qui présidèrent à son action politique et à sa défense de la liberté entre les peuples. Il confie l'âme de la défunte à la miséricorde de Dieu, assurant sa famille et le peuple britannique de ses prières, invoquant aussi l'abondance des bénédictions divines sur tous ceux qui ont croisé son chemin. »
Je me bornerai à deux constatations.
Oui, il a sans doute existé un reste et un fonds de « valeurs chrétiennes » dans la politique conduite par Mme Thatcher.
Oui, et ce n’est pas de l’humour noir, « tous ceux qui ont croisé son chemin » ont certainement besoin des « bénédictions divines », pour bénir celle qui, tout comme eux, attend tout de la miséricorde divine. Plutôt que la maudire… ce qui serait tout autre chose que de dire la vérité sur les ravages de sa politique, comme vous le faites, ici, cher PP.
Denis
[ De PP à D. - C'est le message de condoléances que le Saint-Siège envoie systématiquement dans ces cas-là : les "éléments de langage", comme on dit dans les ambassades, consistent à faire comme si le défunt avait été un grand ami de l'Evangile (même quand tout le monde sait que ce n'était pas le cas). Ces coutumes diplomatiques peuvent difficilement changer. Et François - pape argentin - aurait eu mauvaise grâce à ne pas s'y plier, s'agissant précisément de Thatcher !]
réponse au commentaire
Écrit par : Denis / | 10/04/2013
à Blaise
> C'est vous qui êtes indécent. Thatcher est beaucoup plus que ce que vous dites, un minimum d'informations économiques, sociales et politiques vous l'apprendrait. Il n' y a aucune "curée", à part le beuglement de Mélenchon qui gueule sur tous les sujets.
Les faits sont là, même si les catholiques voudraient que les faits ne comptent pas ni leurs conséquences, les victimes pouvant toujours crever.
Vu de l'extérieur comme c'est mon point de vue, le judéo-christianisme est une machine à justifier l'injustice et la violence des puissants en promettant le Ciel aux faibles une fois qu'ils seront morts. Vous êtes un exemple de cette vieille chanson.
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Écrit par : myriam / | 10/04/2013
L'ARGENT
> Oui il y avait failli avoir un accord sur les Malouines mais à partir d'un principe qui laisse rêveur : le gouvernement britannique trouvait que ça coûtait trop cher.
Et on reproche aux Français de dire que dans la culture anglo-saxonne tout est argent... même l'indépendance américaine, montrée comme une épopée de liberté, n'est à l'origine rien qu'une affaire d'argent.
Céder les Malouines en leasing...
ça rappelle ceux qui ont dit aux Grecs qu'ils "n'avaient qu'à " vendre plusieurs îles du Dodécanèse et/ou ... le Parthénon !
"la Grande Bretagne n'a pas d'amis, elle n'a que des intérêts permanents"
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Écrit par : E Levavasseur / | 10/04/2013
LE COÛT HUMAIN
> Les condoléances officielles de la reine expriment parfaitement ses sentiments pour madame Thatcher: "la reine a été triste d'apprendre la nouvelle du décès de la baronne Thatcher. Elle enverra un message de condoléances privées à sa famille". On a connu réaction plus personnelle face à un décès.
Comme tous les humains, Margaret Thatcher mérite des prières pour le repos de son âme. Elle fait maintenant face à son Créateur. Mais on peut aussi comprendre la réaction de ceux qui ont offert la tournée générale en apprenant sa mort. Mme Thatcher n'a pas redressé le Royaume-Uni, elle a redressé la City et Londres en sacrifiant les anciens bassins industriels et sa politique a eu un prix humain effroyable. Comment peut-on dire froidement que sacrifier des vies humaines, les détruire et les pousser au désespoir est nécessaire pour que vive l'économie? Ces gens qui se sont réjouis lundi ont terriblement souffert des années Thatcher et continuent encore à en payer les conséquences. Nous ne pouvons pas penser à Margaret Thatcher sans penser à eux, sans penser à Bobby Sands, sans penser aux 323 morts du Belgrano.
Une citation résume bien sa pensée: "Nobody would remember the Good Samaritan if he had only good intentions. He had money as well."
(Personne ne se souviendrait du bon samaritain s'il avait eu seulement de bonnes intentions. Il avait aussi de la monnaie.)
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Écrit par : Mahaut / | 10/04/2013
Chers tous,
> Peu d'entre nous ici sommes d'accord avec la politique conduite par Madame Thatcher, mais tout comme Blaise, il me semble que le respect du aux morts, quels qu'ils soient, veuille qu'on fasse taire les polémiques pendant la période de deuil qui affecte les proches du défunt. Seule une réserve digne par rapport aux hommages de ses partisans est acceptable de notre part.
C'est pour cela que je ne dirais rien d'autre que "paix à son âme", même si je meurs d'envie de commenter le post de PP.
Quant à l'Angleterre, n'oublions pas, Français ingrats, qu'elle fut aussi le secours et l'abri de la France libre dans les heures sombres de la défaite. Dans les conditions qu'on connait, oui, je suis au courant. Pas de polémique.
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Écrit par : Clément Cassiens / | 10/04/2013
"AUCUN RAPPORT"
> "Quant à l'Angleterre, n'oublions pas, Français ingrats, " etc,etc.
Cher ami cela n'a aucun rapport et personne n'a dit le contraire.
Pour aimer il faut reconnaître les défauts.
Ce pays (et son enfant l'Amérique en a hérité), est imprégné depuis 500 ans (un demi-millénaire !) de l'idée que la foi est au service du gouvernement.
Or, ds la culture anglo-saxonne ce gouvernement, le gouvernement officieux mais quasi-officiel**, ce sont les marchands (la City, Wall Street).
Conséquence 1 : l'argent est le vrai gouvernement et la religion donc la morale sociale doit en soutenir l'idée.
Conséquence 2 : l'américanisation véhicule des "valeurs" (pour le coup le mot est juste) matérialistes.
Le problème ce n'est pas la GB ou l'Amérique en tant que telles mais qu'un poison matérialiste s'y est répandu, que nos faiblesses, notre honte à être nous-mêmes, lui ouvrent la porte, que quand nous prétendons vaguement y répondre c'est uniquement par les bêtises des lumières.
GB et Amérique sont des pays malades. Mais l'Amérique a une force que n'a pas la GB : la culture anglo-saxonne est plaquée sur ce peuple d'immigrés, il ya bcp de contestations (et de catholiques !)
** et les anglo-saxons s'en glorifient comme une preuve de "pragmatisme" et de "neutralité"
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Écrit par : E Levavasseur / | 10/04/2013
@ Mahaut
> " Mme Thatcher n'a pas redressé le Royaume-Uni, elle a redressé la City et Londres "
Exactement.
Pur produit de l'histoire anglaise (dont elle se réclamait) , M Thatcher était d'une part d'un individualisme forcené, focalisé sur la Grande Bretagne et d'autre part, elle assimilait "Grande Bretagne" avec "City".
M Thatcher est l'aboutissement d'une dérive anglaise commencée à la fin du Moyen Age, accrue au XVIe siècle, aggravée au 18e, définitivement (?) installée au 19e.
On ne peut pas condamner la politique de Mme Thatcher et admirer celle de la Gde Bretagne ds les siècles passés : misère ouvrière de l'ère victorienne, interventionnisme "mercantilo-militaire" (comme les Etats-Unis aujourd'hui)...
Le constater n'est pas nier le courage de nos frères d'armes britanniques pendant la guerre.
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Écrit par : E Levavasseur / | 10/04/2013
ABSENCE
> Elle a été accusée d'être sans empathie. Je crois c'est une vérité. J'ai le souvenir de l'avoir entendue dire que les lois économiques sont comme les lois de la gravitation. Il faut s'y soumettre. C'est le réalisme néolibéral tel que je le comprends.
De là, l'empathie, la pitié, la compassion deviennent des mots vides de sens. Ils n'ont simplement plus cours. Les "réformes structurelles courageuses" en deviennent des nécessités inéluctables. Pour les appliquer, un autocrate éclairé, genre Lumière voltairienne, devient nécessaire. L'absence de tout état d'âme est une nécessité pour être un "bon" chef d'état.
Dans ce rôle, elle s'est montrée parfaite.
Elle est morte. Ses héritiers sont au pouvoir. Nous sommes dans le temps de l'espérance.
DF
[ De PP à DF - C'est la reine qui l'avait accusée d'être "sans empathie". Elizabeth n'étant pas elle-même très extravertie, ça donne la mesure du problème Thatcher. ]
réponse au commentaire
Écrit par : DidierF / | 10/04/2013
@ Pdf et PP
> le tas de chair étai-il donc désincarné ?
Je me souviens quand elle a renvoyé au Vietnam 51 boat people réfugiés à Hong Kong ....
Ils ont dû aller directement dans des camps
C'était sous-prétexte qu'il n'y avait pas de place.
ici un vieil article du Soir : http://archives.lesoir.be/boat-people-renvoyes-les-boat-people-encore-une-fois-vi_t-19891213-Z026WX.html
EL
[ De PP à EL - L'affaire des boat people montre ce ce que valait le soi-disant "anticommunisme inflexible" de Maggie - qui émeut encore aujourd'hui les nostalgiques de la guerre froide. ]
réponse au commentaire
Écrit par : E Levavasseur | 10/04/2013
PRIVEES
> au fait : des obsèques nationales, c'est de l'argent public, non ?
c'est pour cela qu'elles sont privées ?
oui bien sûr
EL
[ De PP à EL - Privées ? au fait, oui : la cathédrale St Paul (où se déroulera la cérémonie) et l'armée de Sa Majesté (qui rendra les honneurs) ont dû être privatisées. ]
réponse au commentaire
Écrit par : E Levavasseur / | 10/04/2013
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