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27/03/2013

Le vibrant hommage du cardinal Bergoglio aux prêtres et à l'évêque assassinés par la junte argentine

Une lumière de plus sur la pensée du pape François :



1. Site de la Conférence des évêques de France (ici) :

<< Le 18 juillet 1976, le Père Longueville était enlevé par la dictature militaire (1976-83). 34 ans après son martyre, Mgr Rodriguez, évêque de La Rioja (Argentine), a annoncé un processus de béatification.

Gabriel Longueville

Prêtre diocésain de Viviers, Gabriel Longueville est un prêtre « fidei donum » envoyé par son diocèse pour se mettre au service d'une Eglise soeur. Dans le cas présent, Gabriel partit en Amérique Latine, en se donnant totalement, pour de belles années de vie. Comme tant d'autres dans l'ensemble du continent, Gabriel s'est mis corps et âme au service de cette église de la Rioja dans le Nord Ouest de l'Argentine, à quelques 15 heures de bus de Buenos Aires. C'est bien la compréhension de l'Évangile qui a toujours poussé Gabriel vers les plus marginalisés de sa paroisse de Chamical. Il consacrait beaucoup de temps à tous les pauvres avec une patience extraordinaire. La formation qu'il leur donnait, pour qu'ils puissent s'en sortir eux-mêmes, et la conscience que ces derniers acquerraient, contribuèrent à soulever très vite une vague d'opposition et de protestations de la part de certains grands propriétaires terriens désireux de continuer à exploiter une population corvéable à merci, courbant l'échine, silencieuse face aux injustices subies.

Carlos Murias

Ce franciscain argentin, qui collaborait avec Gabriel, sentit lui aussi, très vite, certains appels très forts de l'Évangile - nous nous en souvenons bien ! - « heureux ceux qui ont faim, soif, sont sans vêtements, malades, emprisonnés, etc. » Carlos et Gabriel formèrent un tandem très vite repéré, dans cette région de Chamical où tout le monde se connaît.

« Il faut les éliminer »

La dictature militaire ne laissa que peu de temps à vivre à ceux qui étaient considérés comme des gêneurs pour leur travail en bas de la société. Mais il y avait plus que cela dans la décision de tuer ces deux prêtres : leurs opposants, eux aussi catholiques, avaient la certitude que ces prêtres étaient dévoyés dans le marxisme, perdus pour l'Église et qu'ils la trahissaient. Le cocktail de tous ces ingrédients permettait donc de passer au « nettoyage » ! Gabriel et Carlos savaient qu'ils mettaient leur vie en danger. Ils n'ont pas fléchi. Ils ont fait le choix en conscience de servir le Christ, dans leurs frères maltraités et démunis. Ils ne s'imaginaient pas que les choses iraient aussi vite et se dérouleraient comme cela s'est passé. Abattus comme des chiens, à quelques kilomètres de Chamical, ils sont restés fidèles au Christ qu'ils servaient dans le quotidien de leur existence. Wenceslao Pedernera, un laïc de la paroisse a subi le même sort. (au total dans le pays entre 1976 et 1983 : 2 évêques, plus de 100 prêtres, religieux et séminaristes et des MILLIERS de chrétiens engagés). Cette fidélité, aujourd'hui encore, impressionne beaucoup la population de Chamical qui garde un souvenir extraordinaire de ses pasteurs. Et ce souvenir donne l'occasion de célébrations, chaque année, à la date du martyre de Carlos et de Gabriel. Ce souvenir répété s'est concrétisé dans la mémoire de toute une région, au point qu'actuellement, le plus grand nombre de ceux qui participent à ces manifestations civiles et religieuses, ce sont les jeunes.

Enrique Angelelli

Mgr Enrique Angelelli, l'évêque du diocèse, a lui aussi été assassiné par les mêmes militaires, alors qu'il revenait de la paroisse de Gabriel, après avoir célébré les obsèques. Il avait avec lui toute une documentation sur la vie de ce dernier, sur ses engagements et son service des pauvres. Sa mémoire se perpétue et s'amplifie chaque année. Sur la route de Chamical à la Rioja, il y a maintenant un haut lieu de pèlerinage à l'endroit de l'assassinat camouflé en « accident ». Cette année 2006, après la reconnaissance officielle de l'assassinat (et non de l'accident) par l'Église d'Argentine, quelques jours avant les célébrations, l'Église de la Rioja a vu comme une reconnaissance, non seulement du martyre de son pasteur, mais aussi de la qualité de son engagement pastoral hors du commun (mais à l'époque, mal vu par ses frères évêques)... >>


2. Cet engagement était « mal vu » par des évêques argentins, mais non par le futur cardinal archevêque de Buenos Aires. Le 4 août 2006, pour le 30e anniversaire de l'assassinat de Mgr Angelelli par la junte, Mgr Bergoglio a prononcé dans la cathédrale de La Rioja une homélie où il a rendu un vibrant hommage à Mgr Angelelli, l'évêque assassiné, qu'il avait soutenu dès avant la dictature (quand il était provincial des jésuites) – ainsi qu'aux prêtres, religieuses et laïcs victimes de cette dictature [1] :

<< ...Tel est le dialogue d'un pasteur avec son peuple que j'avais découvert ici à La Rioja, un dialogue chaque jour plus persécuté, une Eglise martyrisée, une Eglise répandant son sang comme Wenceslao [Pedernera], Gabriel [Longueville], Carlos [Murias], témoins de la foi qu'ils proclamaient et qui offrirent leur sang pour l'Eglise, pour le peuple de Dieu, pour l'annonce de l'Evangile, et qui finalement s'incarne dans son pasteur. Il fut un témoin de la foi en versant son sang. Ce jour-là, sans doute, quelqu'un [2] fut très heureux, croyant en son triomphe, mais c'était une déroute... Le sang de ces hommes qui offrirent leur vie pour l'annonce de l'Evangile est un véritable triomphe qui, aujourd'hui, plaide pour la vie, la vie de cette Eglise de La Rioja qui en est aujourd'hui dépositaire. La mémoire de Wenceslao, Carlos, Gabriel et de l'évêque Enrique n'est pas un simple souvenir dans une vitrine ; c'est un défi qui nous est lancé aujourd'hui, à regarder le chemin de ces hommes qui n'avaient d'yeux que pour l'Evangile, des hommes qui avaient librement accueilli l'Evangile. C'est ce que la patrie attend de nous aujourd'hui, d'être des hommes et des femmes libres de tout préjugé, de tout compromis, de toute ambition, de toute idéologie, des hommes et des femmes de l'Evangile. Rien que l'Evangile, auquel il n'y a pas d'autre commentaire à ajouter que celui qu'apportèrent Wenceslao, Carlos, Gabriel et l'évêque : le commentaire de leur propre vie. >>

Extrait de Seul l'Amour nous sauvera, éditions Parole & Silence.

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[1] Prêtres, religieuses et laïcs couramment présentés comme des « marxistes » par la presse bien-pensante à Paris depuis trente ans. Cette presse n'a pas les mêmes affinités que l'ex-archevêque de Buenos Aires.

[2] Satan, que le pape François a mentionné dans sa première homélie à la Chapelle Sixtine.


 

Commentaires

DOUBLE CAMPAGNE DE PRIÈRE

> Lançons une double campagne de prière pour la béatification de deux évêques assassinés par des dictatures d'extrême droite : Mgr Angelelli en Argentine, et Mgr Romero au Salvador.
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Écrit par : sept-épées / | 27/03/2013

QUESTIONS

> Beaucoup de questions reviennent à l'esprit d'un ancien lecteur de la presse bien-pensante de l'époque:
Quel a été le mécanisme qui a fait présenter comme "marxistes" des hommes d'Eglise qui ne l'étaient pas ?
La dérive révolutionnaire, si elle a été réelle, a-t-elle été marginale ou massive?
Y a-t-il un lien entre l'échec de cette dérive suite à l'échec du "socialisme réel" et le développement de la théologie de la prospérité et l'extension des courants évangéliques?

PH


[ De PP à PH :
- La dérive a été réelle chez un certain nombre de prêtres. Elle a eu pour conséquence une déspiritualisation qui allait provoquer, par contrecoup, le reflux de masses populaires frustrées vers les évangéliques D'où les décisions de JP II.
- Mais les problèmes posés par la théologie de la libération (iniquités sociales, oligarchie, main-mise américaine, etc) étaient réels.
- Et il n'était pas nécessaire de s'inféoder au guévaro-castrisme pour combattre l'oligarchie : cf Mgr Angelelli, Mgr Romero, etc.
- D'où le document Ratzinger de 1991, légitimant une théologie de la libération qui ne puiserait que dans l'Evangile (mais qui est encore à construire aujourd'hui... et face à des résistances "chrétiennes" que l'on pourrait plutôt qualifier de "front de l'aveuglement" ! ]
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Écrit par : Pierre Huet / | 27/03/2013

SOUS LA LUNE

> Incroyable.
Et dire que certains promoteurs français du "national-catholicisme" qu'il ne vaut pas la peine de citer soutenaient à l'époque le grand Videla...
Les Grands Cimetières sous la lune : décidément, l'histoire se répète pour la bourgeoisie catholique.
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Écrit par : JG / | 28/03/2013

TERRORISME D'ETAT

> Rappelons que les enlèvements, le terrorisme d'Etat, ont commencé dès l'époque d'Isabel Peron avec son ministre, Lopez Rega, qui en fait s'en servait pour éliminer ceux qui lui faisait de l'ombre au sein même du parti.
Il y a chez Lopez Rega un côté Martin Bormann très prononcé.
Des centaines de personnes, essentiellement péronistes au départ, disparaissent et d'autres sont inquiétées notamment les Kirchner qui se présentent aujourd'hui comme des martyrs (en réalité victimes de rivalités internes au parti justicialiste).
Depuis le début des années 70, des groupes terroristes maoïstes, trotskystes, commettaient attentats et assassinats ; le gouvernement répond hélas non par des réformes sociales et conformément au droit mais par ce qu'on a appelé ensuite le "terrorisme d'Etat" et frappe tous azimuts car on pratique l'amalgame : les adversaires au sein de parti sont confondus avec les terroristes, les syndicalistes avec les révolutionnaires. On tape sur tout ce qui bouge.
Il suffit d'être étudiant, les cheveux un peu plus longs que la moyenne, d'avoir une activité sociale en dehors des cercles prévus à cet effet par le gouvernement, pour être suspect.
Au sein de ces groupes maoïstes ou trotskystes, bcp d'anciens péronistes (Montoneros) déçus.
Videla prend le pouvoir et, il faut le dire, il est soutenu par les classes populaires car on croit qu'il va mettre fin au désordre et tout le monde est inquiet de la situation économique.
Ce pouvoir a besoin d'un complot à dénoncer pour être fort ; il ne va pas s'en priver.
En 76, le terrorisme maoïste ou trotskyste était vaincu mais les disparitions se poursuivent et même, leur nombre augmente.
Ce n'est qu'à partir de 83 que le grand public argentin entend parler des disparus.
Auparavant, ceux qui en avait souffert n'osaient en parler. Seuls des Argentins en voyage à l'étranger s'entendaient demander : "alors ? Et les disparus ?" Mais de quoi parlez vous ?
Aujourd'hui bon nombre d'anciens du terrorisme (maoiste ou d'Etat d'I Peron) dénoncent les exactions de la dictature 76/83 mais c'est pour faire oublier celles qu'ils ont commises ou laissé commettre avant.
Notons que Lopez Rega était "ministre du Bien Être social" : un intitulé de ministère qui fleure bon son 1984.
C'est toujours comme cela quand une politique prétend recréer le paradis terrestre : ça sombre dans la catastrophe car seul Dieu pouvant le faire, le prétendre c'est se prendre pour Dieu.
En effet, Mgr Romero n'a RIEN A VOIR avec la Théologie de la Libération mais les théologiens de la libération essaient de le faire croire oour se servir de lui et les libéraux aussi pour l'en blâmer.
Mensonge, mensonge !
On sait qui guide celui qui ment.
Prêtre catholique romain, Mgr Romero ne se prenait ni pour Che Guevara, ni pour le pape. Il n'avait rien d'un progressiste et était proche de l'Opus Dei.
Soucieux des pauvres, il était apôtre. Catholique, apostolique, romain… et saint ?
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Écrit par : E Levavasseur / | 28/03/2013

@ JG et Pierre Huet

> Il y a malheureusement encore mais c'était encore plus fort à l'époque, un côté confortable, mondain, sociologique, habituel, au fait d'appartenir au clergé argentin. Un clergé trop riche qui ne veut pas se fâcher avec la dame qui invite à prendre le thé, un haut clergé trop souvent issu de classes sociales élevées qui n'a pas confiance ds les classes modestes :
Inconsciemment, il pense que le "peuple doit être dirigé" (c'est le même dédain que chez les progressistes et leur suppression du caté, leur attachement à des phrases compliquées, leur mépris de la piété populaire au profit d'un conceptualisation de Dieu, d'un détachement du réel).
Cette vision d'un peuple immature qui a besoin d'être dirigé est conforme au péronisme : syndicalisme oui mais ds le syndicat prévu à cet effet par le péronisme ; action sociale : oui mais ds la structure prévue; Eglise ? oui mais obéissante au parti.

@ JG
Videla était populaire dans les classes modestes ! notamment quand elles étaient anticléricales. Le péroniste EST bouffeur de curé.

@ Pierre Huet

cette tendance à présenter comme marxiste un homme qui ne l'est pas existe encore : voyez Bergoglio présenté comme un "homme de gauche" parce qu'il se préoccupe des pauvres alors qu'il est simplement successeur des apôtres.Soucieux des âmes, il s'occupe aussi des ventres : qui peut le plus peut le moins.
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Écrit par : E Levavasseur / | 28/03/2013

à Eric Levavasseur

> Ce qui a été condamné sous JP II n'est pas la notion de "théologie de la libération" (avec action pour changer les structures), mais le christo-marxisme !
Le document Ratzinger de 1991 fait très clairement cette distinction, et explique ce que doit être une théologie de la libération légitime, qui ne puiserait que dans la nature humaine et l'Evangile.
Chacun doit lire ce document, indispensable si l'on veut connaître la position de l'Eglise sur cette question.
(Position qui fut occultée jusqu'à maintenant par les catho-libéraux et par les vieux progressistes, éternels complices objectifs).

réponse au commentaire

Écrit par : PP / | 28/03/2013

> Je sais.
D ailleurs le christianisme EST une theologie de la liberation.
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Écrit par : E Levavasseur / | 28/03/2013

> Ajoutez "soi-disant" devant "theologie de liberation" svp.
Comme cela ce sera bien clair.
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Écrit par : E Levavasseur / | 28/03/2013

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