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10/11/2012

"Elle, elle y a jeté toute sa vie !"

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Marc 12, 41-44 - Ayant critiqué l'insincérité des bien-pensants, Jésus admire l'élan de la veuve pauvre :



Dans le monde antique et particulièrement au Moyen-Orient, la veuve et l'orphelin sont une figure de la fragilité sociale : privés du chef de famille, souvent opprimés [1], ils ne peuvent vivre que d'aumônes - qui disparaissent en période de crise. D'où la dimension prophétique de l'épisode d'Elie chez la veuve de Sarepta (1 Rois 17,16), lu également ce dimanche dans les paroisses de l'Eglise catholique. Dans l'évangile selon Marc, Jésus au Temple regarde les gens jeter du billon dans le « trésor »... Il voit des riches en mettre « beaucoup », puis une « veuve pauvre » déposer ce qui pour elle est plus que beaucoup : λεπτά δύο, ὃ εστιν κοδράντης, « deux liards : c'est un quart de sou » (trad. soeur Jeanne d'Arc), « deux centimes : oui, un quart de sou » (Chouraqui), « un quart d'as » (BJ), « quelques centimes » (TOB), « deux piécettes » (trad. liturgique). Jésus est dans l'admiration : « tous ont jeté de leur abondance ; mais, elle, dans sa pénurie, y a jeté tout ce qu'elle avait, toute sa vie » (Chouraqui). [2]

Jésus n'encourage évidemment pas les miséreux à s'affamer. Son propos est autre : une leçon spirituelle. Quelques lignes plus haut [3], il critiquait durement les scribes, spécialistes du légalisme religieux et du ritualisme « de toujours » : scribes auxquels il reproche leur goût de la parade (allié au manque d'humanité des pharisiens, réseau militant du national-religieux) [4]. Maintenant Jésus admire l'élan spirituel d'une femme, ignorée – comme toute veuve pauvre – par la classe dominante... « Elle a fait un acte dérisoire aux yeux des hommes, mais pour elle lourd de conséquence, puisqu'elle se dépouille de ce dont elle a besoin. Jésus désigne cette attitude à ses disciples pour son impressionnante vérité. Ce n'est pas ce que les hommes voient qui a valeur aux yeux de Dieu, car Dieu ne juge pas à l'apparence, mais au coeur (1 Samuel 16,7 [5]). Jésus nous renvoie à nous-mêmes. Le salut n'est pas une affaire de réussite, encore moins de simagrées. Le salut exige de conformer ses actes à ses convictions. Et dans tout ce qu'il fait, surtout dans sa vie religieuse, l'homme devrait se rappeler toujours qu'on ne se moque pas de Dieu. Ne vous y trompez pas, dit saint Paul, on ne se moque pas de Dieu. Ce que l'on sème on le récolte » (Galates 6,7). Ce que le Seigneur demande c'est d'avoir un coeur pur, une foi vraie, une confiance totale... L'avenir de l'Eglise, notre avenir, à nous pour qui les apparences comptent tant, est entre les mains de ces vrais croyants. » [6]

 

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[1] « Tes chefs sont des rebelles, complices des voleurs. Tous ils aiment les présents, ils courent après les gratifications. Ils ne rendent pas justice à l'orphelin, et la cause de la veuve n'arrive pas jusqu'à eux » - « Ils écartent du tribunal les petites gens, privent de leur droit les pauvres de mon peuple, font des veuves leur proie et dépouillent les orphelins » ((Isaïe 1,23 – 10,2)... Quant à l'effet des crises sur les aumônes, il est de tous les temps : on le voit aujourd'hui avec l'assèchement budgétaire des associations caritatives.

[2]  Autres traductions : «  Il appelle à lui ses disciples et leur dit : 'Amen je vous le dis, cette veuve qui est pauvre a jeté plus que tous ceux qui ont jeté dans le Trésor ! Car tous ont jeté de leur surplus, mais elle, de son manque, toutautant qu'elle avait – elle a jeté, sa subsistance entière' » (soeur Jeanne d'Arc). « Elle, elle a pris sur sa misère pour mettre tout ce qu'elle possédait, tout ce qu'elle avait pour vivre » (TOB). « Elle, elle a pris sur son indigence... » (traduction liturgique).

[3] Mc 12, 38-40.

[4] Mc 1,22 : « ils étaient frappés de son enseignement, car il les enseignait en homme qui a autorité et non pas comme les scribes ». Mt 7,29 : « ...car il les enseignait en homme qui a autorité et non pas comme les scribes. » Ici, « avoir autorité » veut dire : ne pas se référer à la jurisprudence. La liberté de Jésus envers les normes du passé choque les scribes et les pharisiens. Sa liberté vis-à-vis du culte (il ne sacrifie pas) choque la caste du Temple. A force de se sentir choqués, on sait ce qu'ils feront : Jean 11, 46-57. La morale des bien-pensants est inhumaine.

[5] « L'humain voit de ses yeux, mais Adonaï voit au coeur » (Chouraqui).

[6] commentaire des frères de Taizé sur Marc 12.

 

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Commentaires

SAINT IRENEE

> "Le Seigneur regarde notre intérieur, et non ce qui apparaît extérieurement, pour accepter un sacrifice ou le condamner. La justice extérieure doit correspondre à la justice intérieure, et le sacrifice juste à un coeur juste. Dieu veut un coeur simple, non divisé, un coeur dont la manifestation visible aille de pair avec la disposition invisible...
Irénée met en avant l'histoire de Caïn pour démontrer l'élément essentiel du sacrifice. Le sacrifice extérieur n'a servi à rien ; seul le sacrifice intérieur aurait été agréable à Dieu, mais Caïn ne voulut pas le lui offrir. Les scribes et les pharisiens font preuve, dans leur conduite, de la même hypocrisie que Caïn. Ils ont traité le juste comme Caïn traita Abel. Ils n'ont pas sacrifié à Dieu avec un coeur simple, avec une droiture d'âme identique à celle de leur droiture cultuelle. Ayant reçu du Logos le même même conseil que Caïn, ils y ont répondu avec la même effronterie..."

(Antonio Orbe, 'Introduction à la théologie des IIe et IIIe siècles', tome 1, page 548. Cerf 2012.)
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Écrit par : PP / | 10/11/2012

COUPS DE TÊTE ?

> C'est ça qu'est bien chez vous et qui donne cette valeur sans pareille à tous vos coups de tête !

C.

[ De PP à C. - Vous êtes ironique ! ]

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Écrit par : Christine / | 10/11/2012

> Non, je suis sincère et amicale.
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Écrit par : Christine / | 10/11/2012

Les commentaires sont fermés.