22/11/2011
Le colloque : 9 pistes issues de l'intervention d'Olivier Rey
...auteur du livre Une folle solitude – Le fantasme de l'homme auto-construit (Seuil) :
<< La cure de désastre risque d'être brutale, et la détresse accompagnant le naufrage, brutale. Mais les changements sont promesse d'une vie meilleure : cette idée nous aidera à traverser la crise dure. >>
<< On se trompe en déclarant qu'une chose est fausse parce que nous préférerions qu'elle ne soit pas vraie. >>
<< Une vie plus sobre sera meilleure. La cause de nos souffrances actuelles est l'artificialisation de l'existence. >>
<< Les problèmes engendrés par la croissance augmentent plus vite que les moyens pour les résoudre. >>
<< Selon Léopold Kohr, père de l'idée du développement endogène, aucune société ne peut vivre correctement au dessus de 15 millions de membres. La pensée de Kohr a influencé celle de Schumacher [*], l'auteur de Small is beautiful ; selon Kohr ce qui compte est moins le « petit » que le « proportionné » : la taille la plus appropriée pour l'épanouissement d'une société humaine. >>
<< Le grec a deux mots pour signifier « mesure » : le « metron » (mesure quantitative), et le « kairos » (mesure qualitative fondée sur les proportions). La société moderne ne connaît que le metron. Mais pour que ses promesses soient tenues, la condition à respecter serait la proportionnalité entre les moyens et les fins, l'outil et les facultés humaines, etc. >>
<< Nous nous sommes mis dans la situation d'attendre les catastrophes comme seules capables de nous imposer le sens des limites que nous avons perdu. >>
<< Dans le livre de la Genèse, l'arbre qu'Adam ne doit pas s'approprier signifie la volonté de tout connaître et de tout dominer. Le serpent vient tenir à Adam le discours de l'illimité. >>
<< Le sens des proportions est une condition d'exercice de l'intelligence. >>
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[*] Ernst Friedrich Schumacher : économiste germano-britannique, converti au catholicisme par la lecture des encycliques sociales - et auteur du célèbre livre Small is beautiful (1973), un des ouvrages de référence de l'objection de croissance.
Cf wikipedia :
<< Ce livre a mis les critiques de l'économie occidentales par Schumacher à la portée du grand public pendant le premier choc pétrolier et la reprise de la mondialisation. Il a été traduit dans plus de 100 langues. The Times Literary Supplement l'a listé parmi les 100 livres les plus importants publiés depuis la Seconde Guerre mondiale[2]. Une deuxième édition commentée fut publiée en 1999[3]. Les principaux thèmes évoqués sont :
- L'importance de l'échelle humaine,
- L'idée de capital naturel, de traiter la nature comme un capital et non comme un revenu,
- L'introduction du souci des travailleurs et de l'intégrité environnementale dans les décisions commerciales,
- L'économie de la permanence, basée sur l'utilisation soutenable des ressources naturelles,
- Le décentralisme et la foi dans l'autosuffisance communautaire.
Le livre est contemporain des œuvres de Ivan Illich La convivialité, de Dennis Meadows et alii Halte à la croissance ?, et de Nicholas Georgescu-Roegen The Entropy Law and the Economic Process, qui abordent également l'un ou l'autre des thèmes évoqués dans Small is Beautiful.
Le titre principal[4] a été choisi par l'éditeur dans le chapitre sur la technologie à visage humain. Schumacher envisageait plutôt "Economie Chestertonienne", faisant référence au penseur du Distributisme. >>
notes :
- Littéralement : "Ce qui est petit est bel et bon : une étude de l'économie comme si les gens importaient"
- The Times Literary Supplement, 6 octobre 1995, p. 39
- ISBN 0-88179-169-5) Les commentaires sont signés notamment de Robert Bateman, David Brower, Herman Daly, David Ehrenfeld, Paul Hawken, Hazel Henderson, Wes Jackson, Jane Jacobs, Winona LaDuke, Amory Lovins, David Morris, David Orr, Kirkpatrick Sale, Nancy Jack Todd, Susan Witt. Schumacher, E. F.; Small Is Beautiful: Economics As If People Mattered : 25 Years Later…With Commentaries (1999). Hartley & Marks Publishers (
- Leopold Kohr, le mentor de Schumacher, selon sa notice nécrologique [archive] dans le New York Times. "Small is beautiful" est une phrase de
- R. H. Tawney, historien de l'économie, critique social, membre de la Société des Fabiens et militant de l'éducation des adultes.
15:22 Publié dans Chrétiens indignés, Ecologie, Idées, La crise | Lien permanent | Commentaires (8) | Tags : décroissance, olivier rey
Commentaires
TERRITOIRES
> Small is beautiful...que penser alors de cette mode des "territoires de proximité" défendue par le nouveau maire de Neuilly, JC Fromentin ?
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Écrit par : Charles Vaugirard / | 22/11/2011
DEBAT ?
> Si j'ai beaucoup aimé le reste de cette intervention, la citation de Léopold Kohr m'a surpris.
Comment laisser entendre qu'une société humaine de plus de 15 millions de membres n'est pas viable? N'est-pas aussi un acte de rationalisme froid que décréter cela?
La France compte 65 millions d'habitants: que doit-on faire?
-la dépecer?
-en piquer ou fusiller cinquante millions (cf: "La guerre de Vendée et le principe de dépopulation" de Baboeuf)
-ou bien recréer du lien social, redonner une culture à cet ensemble Ô combien irrationnel, mais qui a le tort ou le mérite, peu importe, d'exister?
PH
[ De PP à PH - Tout argument est le bienvenu dans un débat, sauf celui qui consiste à prêter une intention homicide à l'interlocuteur ! D'autant que l'hypothèse serait particulièrement absurde dans le cas de Kohr, Schumacher et Rey,
En revanche, l'idée du "kairos" à 15 millions est loin d'être absurde dans le contexte d'une société post-capitaliste et relocalisée par la force des choses, si (quand) le système actuel vient (viendra) à s'effondrer. ]
réponse au commentaire
Écrit par : Pierre Huet / | 22/11/2011
@ PP
> Ce n'est que de l'humour provocateur. Loin de moi de prêter cette idée à Léopold Kohr et encore moins à Olivier Rey! c'est juste une énumération des possibilités de parvenir à ce si rationnel réajustement.
On ne peut s'empêcher d'être perplexe quand on entend ce genre de propos de nature à nuire à la cause qu'ils défendent. Après, vous vous indignerez que les écologistes soient traités de Khmers Verts? Sans faire du marketing, il faut quand même un minimum de bon sens dans la communication de ses idées.
Dans le réel, en France, comme dans d'autre pays, nous DEVONS faire avec une communauté bien plus nombreuse.
PH
[ De PP à PH - Mais qui vous dit que des communautés "bien plus nombreuses" seront encore viables si le système économique s'effondre ? On ne doit pas exclure l'idée que les sociétés de demain puissent être radicalement autres que celles dont nous avions l'habitude, et que les notions classiques n'y soient plus d'aucune utilité. ]
réponse au commentaire
Écrit par : Pierre Huet / | 22/11/2011
@ PP
> Ce qui est sur, c'est qu'on a rarement vu des pays se dissocier pacifiquement, cela ne paraît pas à priori un bon remède. Il se peut qu'une période d'anarchie et de misère nous ramène à la population du 10ème s, mais est-ce à rechercher?
Et imagine-t-on des familles dispersées entre plusieurs régions d'un même pays résignées à se retrouver dans des sociétés différentes ?
Des sociétés nombreuses ont fonctionné avant le capitalisme actuel (France, 18ème S.: 25 millions d'habitants)pourquoi ne fonctionneraient-elles pas après?
Pourquoi la transition énergétique et la crise financière changeraient-elles la nature humaine?
Et nous voici ramené à la questions des limites !
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Écrit par : Pierre Huet / | 22/11/2011
RABHI
> Une campagne, ni présidentielle, ni publicitaire, ni médiatique, avec Pierre Rabhi :
http://www.touscandidats2012.fr/
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Écrit par : Guillaume de Prémare / | 22/11/2011
LA QUESTION DU NOMBRE
> Ces 9 points me semblent tout simplement de bon sens.
Pour la question du nombre, n'oublions pas que, dans une nation, il y a des communautés naturelles, des corps intermédiaires, des régions etc. Dans une société décentralisée et subsidiaire, la logique de "relocalisation" est peut-être possible. N'oublions pas qu'en France par exemple, la dimension régionale est fortement ancrée dans l'histoire (mais aussi les "pays"), et elle n'est pas contradictoire avec l'échelon national comme réalité politique, culturelle, linguistique, qui fédère et maintient la cohérence d'un ensemble multiforme, sans que Paris impose sa loi du nord au midi.
Cela nous semble difficile à appréhender aujourd'hui car nous sommes imprégnés par l'idée moderne de nation : une et indivisible, où tout est réglé pour l'ensemble du territoire, avec les mêmes lois partout, une égalité d'individus considérés hors de tout lien autre que le lien citoyen-nation. C'est à réfléchir.
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Écrit par : Guillaume de Prémare / | 22/11/2011
"LES PEUPLES" DE FRANCE
> C'est à réfléchir, en effet. La France ne fut pas toujours jacobine et centralisée, et ce n'était pas "inscrit dans ses gènes" (cf. les Girondins, et le roi qui s'adressait - sous l'Ancien Régime - "à mes peuples"). Comparaison n'est pas raison et les histoires respectives sont différentes, mais l'Allemagne fédérale et ses Länder ne fonctionne pas trop mal (en ce qui concerne son fédéralisme, je précise). Le modèle suisse est également intéressant (un peu moins en ce qui concerne son secteur bancaire ;-)
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Écrit par : J. Warren / | 23/11/2011
A J Warren:
> So corsu e ne so fieru ;-)
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Écrit par : VF / | 23/11/2011
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