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04/10/2011

Pascal Bruckner : l'écologie c'est mal, parce que c'est... l'idée chrétienne du péché

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<  Pascal Bruckner (à droite sur la photo).

 

 
 

 

Ce matin à France Inter, l'essayiste sarkozyen se ridiculise en direct :


 

Pascal Bruckner publie chez Grasset  Le fanatisme de l'Apocalypse. Non, ce n'est pas un plagiat du grand classique de feu Norman Cohn, Les fanatiques de l'Apocalypse (Payot 1983) ! On ne peut pas confondre l'historien Cohn et le polygraphe Bruckner. Ni leurs livres... Spécialiste des courants révolutionnaires du XIe au XVIe siècles, Cohn (traduit en dix langues) possédait son sujet. Dénonciateur (sur commande) de l'écologie contemporaine, Bruckner raconte n'importe quoi. Il s'est d'ailleurs fait remonter les bretelles ce matin par les auditeurs de France Inter, à la grande gêne des animateurs du 7-9. [1]

Mais le grand grief de Bruckner envers l'écologie, c'est –  dit-il – qu'elle nous « culpabilise » et qu'elle réintroduit ainsi la notion « chrétienne » du péché. Economiser l'eau au robinet pour ménager les nappes phréatiques, c'est (selon lui) le retour de « l'ascétisme » chrétien. Conseiller aux gens le vélo dans les Cévennes plutôt que le Boeing pour les Caraïbes, c'est le retour de l'intolérance. Etc.

Bruckner est-il paresseux ? Visiblement il n'a pas étudié le sujet dont il prétend parler. Confondre les objecteurs de croissance et la deep ecology, c'est énorme [2]. Accuser les écologistes radicaux de poser de vastes problèmes et de n'apporter que de petites solutions, c'est inepte [3]. Répéter (vingt ans après Luc Ferry) des slogans écolophobes qui étaient déjà inexacts en 1992, c'est révélateur.

En effet : si le pamphlet de Bruckner sonne faux, c'est que son livre est – visiblement – une commande d'éditeur selon le réflexe commercial du mimétisme : « tiens, si on refaisait le coup de X. ? », ou : « si on refaisait le coup de Z. ? »  Plusieurs bides ont eu lieu en 2010-2011 pour avoir voulu « refaire le coup d'Allègre ».

En écoutant les boniments de Bruckner ce matin, on avait aussi (hélas) l'impression de lire telle ou telle publication catholique française, encore rivée au libéralisme économique et prenant l'écologie pour la cour de Belzébuth... Un de ces articles, ou de ces livres, qui n'étudient jamais les dossiers d'environnement ni les responsabilités humaines, mais noient le poisson en invoquant la Gnose et le Millénarisme – comme si ces coquecigrues avaient un rapport avec le sujet. Bruckner applique le même procédé : il cherche à impressionner avec de grands mots vagues (« Apocalypse » [4], « catastrophisme », « adorateurs de la Terre »), sans leur donner la moindre substance ni prouver qu'ils concernent la question.

Mais Bruckner est tout de même plus cohérent que les écolophobes catholiques. Libéral antichrétien, il accuse l'écologie de nous culpabiliser et de restaurer la morale du péché : Bruckner est logique quand il rejette les responsabilités de l'homme au nom de l'hédonisme du consommateur. Mais les cathos écolophobes sont illogiques – voire suspects – quand ils font la même chose. Un chrétien catholique sait que l'homme a été constitué responsable de la Création par le Créateur, qu'il n'a pas le droit d'exténuer la planète (se mettant ainsi lui-même en danger), et qu'il doit donc modifier son système économique. C'est d'une simplicité biblique et facile à comprendre ; tellement facile qu'on s'étonne de voir certains regarder ailleurs dès qu'on leur en parle.


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[1] Ceux-ci lui ont fait remarquer qu'il se contredisait. Bruckner traite les écologistes de « pétainistes », mais leur interdit de le qualifier, lui, de « négationniste » dans le domaine écologique ! (Son argument : le mot « négationnisme » ne peut s'appliquer qu'à 1940-1945. Mais pas le mot « pétainistes » ?) -- Autre contradiction : tantôt Bruckner se pose en héraut de la dérégulation universelle et du consommateur sans frein, tantôt il fait semblant de critiquer les marchés. Ce n'est pas sérieux.

[2] La deep ecology, idéologie ultra-minoritaire (et combattue par les objecteurs de croissance) tend à résorber l'humain dans le non-humain. L'objection de croissance, au contraire, met en lumière la responsabilité humaine : d'où sa critique politique du productivisme capitaliste. (L'objection de croissance rejette spécialement le malthusianisme de la deep ecology. Mais ce malthusianisme n'est pas propre à la deep ecology : partagé par toute notre époque, il existe dans les milieux les plus anti-écologiques).

[3] Les écologistes radicaux (objecteurs de croissance) n'apportent pas de « petites » solutions, c'est le moins qu'on puisse dire : ils militent pour une économie autre que le productivisme capitaliste. Autrement dit une révolution ! Bruckner n'est pas dans ces idées-là. Mais Cohn-Bendit non plus, ni la majorité des politicards d'EE-LV.

[4] « Apocalypse » ne veut d'ailleurs pas dire « fin du monde », mais « révélation » ; Bruckner n'a pas l'air de le savoir.

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Commentaires

FENETRE

> Il est vrai que l'écologie pose à nouveau la question de l'ascèse qui a disparu de nos sociétés (et même de l'Eglise) depuis plusieurs dizaines d'années.
Le Ramadan, d'une certaine façon, fait un peu la même chose, mais dans une perspective spirituelle lui. Dans une société qui pousse aux addictions, il est une petite fenêtre vers un autre monde.
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Écrit par : B.H. / | 04/10/2011

JE DOUTE

> "Economiser l'eau au robinet pour ménager les nappes phréatiques, c'est (selon lui) le retour de
« l'ascétisme » chrétien"; En effet je suis d'accord avec lui sur ce segment de phrase. Cependant, je doute que lui et nous, catholiques, mettions la même chose derrière le mot ascétisme...
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Écrit par : Gégé / | 04/10/2011

COIFFEUR

> ils ne vont jamais chez le coiffeur ces gars là ?
Honnêtement, rien d'autre à dire, trop consterné.
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Écrit par : zorglub / | 04/10/2011

PAS LE SEUL

> Ce qui m'a fait le plus bondir c'est quand il dit "qu'[il a] été élevé dans la religion catholique alors bien sûr la culture du péché originel,[il] connaît" ! Donc si je comprends bien sa connaissance du péché originel se base sur de vieux souvenirs de catéchisme...
Malheureusement il n'est pas le seul à être persuadé de bien connaître la religion catholique alors qu'il n'en a qu'une connaissance partielle (et biaisée...). Je trouve que c'est un défaut trop répandu (y compris chez les pratiquants d'ailleurs).
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Écrit par : alma / | 04/10/2011

METACAPITALISME ET CONFUSION

> En effet, c'est tout à fait dans la logique de prétendue surhumanité du "métacapitalisme" actuel de ne plus se poser de question sur la place l'homme dans la création et des limites qui s'imposent à lui.
Sur ce qui est de la confusion avec la deep ecology malthusienne, elle est courante dans la presse et je me suis longtemps laissé impressionner. Que ce Bruckner s'y laisse prendre semble indiquer que son livre n'est qu'une revue de presse?

PH


[ De PP à PH - ...de la presse d'il y a vingt ans ? ]

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Écrit par : Pierre Huet / | 04/10/2011

DEBRAY AUSSI

> C'est Régis Debray qui, je crois, a écrit un livre du même tonneau. S'inquiéter outre mesure du réchauffement climatique consisterait à retomber dans des irrationalités religieuses heureusement dissipées, avait-il déclaré à la radio. Lui aussi dénonçait le "retour" de l'Apocalypse dans les discours des climatologues.
Bref : si vous jugez "grave" la situation écologique de notre chère planète, vous tombez dans l'excès et par conséquent dans le délire (= la foi religieuse)!
Et cela enrobé dans une conversation onctueuse; Régis Debray est par excellence l'homme du juste milieu, ennemi décidé du radicalisme; celà jusque dans son anticléricalisme poli. Elle est oubliée depuis longtemps, son escapade auprès du petit boucher de la Cabaña !

BJP


[ De PP à BJP - Regis Debray porte sa tête comme le Saint-Sacrement, ce qui est le comble pour un cathophobe. ]

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Écrit par : Blaise Join-Lambert / | 04/10/2011

PATHOLOGIQUE BRUCKNER

> C'est une obsession chez Pascal Bruckner !
Il s'agit bien de l'auteur de "La tyrannie de la pénitence"!
D'un livre à l'autre : la même réaction infantile qui consiste à ne pas vouloir reconnaître ses torts, à se montrer incapable d'assumer la moindre parcelle de responsabilité collective... jusqu'à se réfugier dans le déni et le mensonge s'il le faut.
Son cas est pathologique.
L'Eglise nous invite heureusement à une attitude plus saine : "Je confesse devant mes frères que j'ai péché..."
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Écrit par : Blaise Join-Lambert / | 04/10/2011

REFUSER L'IDEE DU PECHE ORIGINEL MÈNE À S'EN PRENDRE À AUTRUI

> Dommage de ne pas reconnaître le péché originel :
- le péché originel est selon la lumineuse remarque de Kolakowski, qui va dans le sens d'observations que même Michel Foucault a pu émettre, est la seule réalité qui permet d'éviter les massacres totalitaires. Car dans un monde sans rien en dehors de l'homme et sans péché originel, la seule explication du mal c'est autrui (puisque on est soi-même toujours innocent). Il suffit donc d'éradiquer autrui et vivent les lendemains qui chantent. Avec le péché originel, je sais que la frontière entre le bien et le mal passe par moi. Résoudre le problème du mal, c'est alors d'abord apprendre moi-même le bien, l'amour.
- dommage aussi son ignorance de la notion si libérante de péché. Ce n'est pourtant pas compliqué de se rendre compte de la différence entre faute morale (conceptuelle, et qui une fois commise l'est pour l'éternité) et péché (qui en tant qu'offense faite à un coeur qui sait pardonner est non seulement effaçable, mais paradoxalement lieu de croissance de l'amour). La faute est irrémissible ; le péché non. Ca change beaucoup, non ? Mais peut-être Bruckner confond-il péché et ex-morale laïque ?
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Écrit par : Jean / | 04/10/2011

GONFLANT

> là où Bruckner est gonflant, c'est quand il ressort (comme ce matin) le refrain sur les écologistes censés "ne pas tolérer la moindre attaque". Ca c'est le stéréotype du Méchant Ecolo Khmer Vert qu'on retrouve dans toute la littérature néolibérale, libre-échangiste, mondialiste et aussi (mais que viennent-ils faire dans cette galère) chez les catho intégristes.
En fait l'insulte, l'accusation hystérique etc ne sont pas les armes des écolos mais de leurs adversaires, le recordman du genre étant Claude Allègre.
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Écrit par : Amicie T. / | 04/10/2011

@ Jean,

> Merci de rappeler la source des grands massacres du XXème siècle dans ce refus du péché originel. Puis-je ajouter que ce refus aboutit à considérer que l'adversaire politique, considéré comme adversaire du bien, est donc soit un non-homme, puisque l'homme ne peut que vouloir le bien, ou au au moins un sous-homme, Untermensch disait les nationaux- socialistes, soit un malade mental comme dans le système répressif soviétique des années 70.
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Écrit par : Pierre Huet / | 04/10/2011

COMBIEN

> j'en entends combien qui me disent : "oui mais j'étais catholique d'origine maintenant je n'y suis plus pour telle et telle raison..."
et moi d'ajouter, eh bien vous faites bien de la critiquer cette religion, car je suis tout à fait d'accord avec vous, moi qui suis catholique, en effet ce que vous critiquez n'est PAS DU TOUT CATHOLIQUE !
"Père pardonne leur, ils ne savent ce qu'ils font"...l'ignorance est la source d'immense péché.
Ici le mélange de ce monsieur, sous prétexte qu'il ait été catholique petit enfant (quelle rigolade....), affirme qu'être écologiste c'est un relent de culpabilité catholique, pourrait faire sourire si ce monsieur n'était pas un être....humain.
Il n' y a pas besoin d'être catholique pour s'apercevoir que notre nature change sous les coups de boutoirs de notre industrialisation mondiale.
Franchement, considérer qu'il faut être catholique pour s'en accuser, c'est vraiment nous faire trop d'honneur, notre religion est vraiment au dessus de toute intelligence. Je l'en remercie! et pourtant notre vrai fonds de commerce est l'Amour, donc sur ce sujet, l'Amour de la création et de notre Créateur, donc des hommes à venir au nom de la douce charité.......commerce simplement gratuit!
Qu'il se méfie, ce monsieur, Dieu est promesse, et Lui se souvient des promesse de son baptême.......sa conversion risque de détonner un jour qui sera L’aujourd’hui de Dieu.
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Écrit par : jean christian / | 05/10/2011

UN PAUVRE LIVRE

> " L'objection de croissance rejette spécialement le malthusianisme de la deep ecology. Mais ce malthusianisme n'est pas propre à la deep ecology : partagé par toute notre époque, il existe dans les milieux les plus anti-écologiques. "
A propos du malthusianisme de la deep ecology, voici un nouveau livre qui fait un tabac dans l'Eglise catholique française selon les chrétiens engagés dans l'écologie réunis par Pax christi et la CEF le 24/09/11 dernier... son auteur était encore invité jour de la st françois D'assise à l'espace georges bernanos à paris et il est invité prochainement à un débat avec la célèbre journaliste Marie Monqiue ROBIN (Documentaire ARTE sur les poisons dans notre assiette) à l'église de la Trinité :
'Les Contrevérités de l'écologisme' de Stanislas de Larminat
Il réduit toute l'écologie semble -t-il au refus de nouvelles naissances. De quoi saper tous nos efforts à nous qui essayons de faire avancer la sensiblité et l'action écologique dans l'Eglise? Quand donc cessera ton de caricaturer les militants écologistes sous prétexte d'écologie humaine ?

P.

[ De PP à P. - Livre pitoyable, en effet, mais salué à grands cris joyeux par les bien-pensants... qui guettent toute occasion de tourner le dos à la pensée de "leur" pape sur ces questions. Mais ne nous exagérons pas l'étendue du dégât : auteur chic pour gens chics, ça ne va pas très loin. ]

réponse au commentaire

Écrit par : Priscille / | 07/10/2011

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