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09/06/2011

Musulmans en Europe : ce qu'en pense l'Eglise catholique

2ème rencontre des délégués des conférences épiscopales pour les rapports avec les musulmans en Europe (Turin, 31 mai/2 juin) :


 

Organisée par le Conseil des conférences épiscopales en Europe (CCEE), cette rencontre était présidée par le cardinal Jean-Pierre Ricard, archevêque de Bordeaux et vice-président du CCEE. Y participait également le cardinal Jean-Louis Tauran, président du Conseil pontifical pour le dialogue interreligieux.

 

 CONSILIUM CONFERENTIARUM EPISCOPORUM EUROPAE CCEE

Communiqué

<< La rencontre des délégués des Conférences épiscopales d’Europe pour les rapports avec l’islam a apporté la confirmation de l’intérêt avec lequel l’Église catholique suit les dynamiques d’insertion des résidents et citoyens de religion musulmane dans le contexte européen, tant au niveau individuel que communautaire. Il s’agit d’un processus complexe qui n’est pas exempt de contradictions, où émerge le défi – qui est en train de devenir une réalité – de l’inculturation progressive de l’islam en Europe, avec une tendance à manifester davantage sa dimension religieuse et morale, que sa dimension politique. Toutes les initiatives culturelles et théologiques qui sont l’expression de ce qu’on appelle la « théologie de l’inculturation » sont suivies avec beaucoup d’intérêt, car elles instaurent et consolident des processus de participation positive à la vie sociale et culturelle des pays d’Europe dans un contexte pluraliste, ouvert au dialogue interreligieux et interculturel. C’est pourquoi l’Église suit avec intérêt les attentes et les initiatives qui se font jour au sein des communautés musulmanes en vue de fournir à leurs responsables religieux – imams ou enseignantsune formation théologique et culturelle leur permettant d’exercer convenablement leur rôle religieux dans le contexte européen ; elle formule le souhait que ces initiatives – y compris la création d’une chaire de théologie islamique dans les universités d'Etat des pays où la théologie est une discipline inscrite au programme des universités – pourront être organisées avec les adaptations voulues selon le modèle juridique des rapports existant entre l’État et l’Église.

Dans cette perspective, l’Église est favorable à ce que l’enseignement confessionnel de la religion dans les écoles publiques soit également accessible aux autres traditions religieuses, parmi lesquelles l’islam, tout en insistant sur le respect des conditions requises prévues par les différents États pour l’exercice de cette fonction.

En élargissant leur horizon à tout le bassin méditerranéen, les délégués des Conférences épiscopales participent avec sympathie aux expressions de désir de démocratie, de liberté, d’appel au respect de la dignité de la personne dont les jeunes de différents pays arabes se sont faits les promoteurs au cours de ces mois de grands changements politiques, et formulent le souhait que le processus en cours puisse conduire à l’établissement d’une vraie liberté de religion dans ces pays, de telle sorte que les Arabes chrétiens puissent jouir eux aussi de cette liberté dans le cadre d’une citoyenneté égalitaire.

Les délégués ont fait ensuite une évaluation critique du terme « islamophobie »utilisé pour décrire les réactions d’hostilité à l’islam apparues dans la société européenne, lui préférant plutôt ceux de « peur » et « hostilité ». En confirmant la volonté de l’Église de contribuer à surmonter ce genre de réactions qui conduisent à l’intolérance, ils exhortent les musulmans à nouer des relations positives et transparentes dans les différents contextes et de rejeter publiquement ces interprétations.

Enfin, les délégués ont exprimé une nouvelle fois leur conviction que l’Église catholique qui est en Europe poursuivra avec un engagement renouvelé le dialogue avec les musulmans à l’école du concile Vatican II et de l’enseignement de Benoît XVI, un dialogue dans lequel chrétiens et musulmans sont appelés à relever trois défis : le défi de l’identité (savoir et accepter ce que nous sommes) ; le défi de l’altérité (nos différences ne doivent pas nous conduire à la haine, mais devenir une source d’enrichissement mutuel) ; le défi de la sincérité qui implique d’exprimer sa foi sans l’imposer dans un contexte pluraliste et dans une perspective dialogique.>>


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Le Conseil des conférences épiscopales d’Europe (CCEE) réunit les présidents des 33 conférences épiscopales existant actuellement en Europe. Il est présidé par le cardinal Peter Erdő, archevêque d’Esztergom-Budapest, primat de Hongrie. Ses vice-présidents sont le cardinal Josip Bozanić, archevêque de Zagreb, et le cardinal Jean-Pierre Ricard, archevêque de Bordeaux.

 

 

Commentaires

UN ACTE DU MAGISTÈRE

> La déclaration du CCEE n'est pas un texte de sous-commission reflétant un point de vue d'experts privés. Elle émane d'une réunion présidée par le cardinal Ricard en présence du cardinal Tauran, représentant le Saint-Siège. Un catholique qui récuserait ces directives, ou simplement voudrait les ignorer en leur préférant ses opinions de parti, tournerait le dos à l'Eglise 'mater et magistra'.
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Écrit par : PP / | 09/06/2011

PAN PAN

> Mais vous verrez qu'il y aura des dadais pour tancer les cardinaux en chantant 'Pan pan l'Arbi' !
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Écrit par : mouzaïa / | 09/06/2011

CONSCIENCE ET MAGISTERE

> On ne peut que souscrire à des directives d'une telle généralité et conformes à l'esprit évangélique... Néanmoins, il me semble qu'élargir à ce point l'obligation d'obéissance au magistère de l'Eglise revient à retomber dans un cléricalisme peu respectueux de la conscience des laïcs engagés en politique. A ce compte, à une autre époque, un catholique se serait senti tenu de s'engager dans la "croisade" franquiste... Je crois qu'il faut, pour lutter contre le national-catholicisme de certains, en revenir aux fondamentaux de l'Evangile (j'ai essayé modestement d'en rappeler quelques uns dans mon blog, à la suite d'un débat avec des tenants de ce national-catholicisme anti-immigrationniste sur le site de Liberté Politique à l'occasion de la sortie du livre "12 mesures pour 2012" calamiteux sur cette question) plutôt qu'à des déclarations trop souvent marquées par un certain irénisme vis à vis de l'Islam... Ouverture, oui, mais ouverture lucide. C'est d'ailleurs plus méritoire... Il faut seulement rappeler que la liberté religieuse ne se divise pas.


HH


[ De PP à HH - Le Saint-Siège n'a jamais envoyé l'un de ses cardinaux participer aux réunions de soutien à Franco pendant la guerre civile. D'autre part, tout catholique se doit d'être à l'écoute de son Eglise. Ce que disent les conférences épiscopales européennes réunies n'est pas matière à option : sinon, que signifierait l'appartenance à l'Eglise ?
Quant à la conscience des "laïcs engagés en politique", permettez-moi de sourire... On la voit à l'oeuvre : sauf rarissimes exceptions individuelles, c'est minable.]

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Écrit par : Hubert Houliez / | 09/06/2011

> Bien sûr que l'Eglise doit faire attention à ce que l'intolérance, l'ignorance et la haine soit combattues.
Quelques humbles interrogations cependant:
-L'Eglise doit-elle demander à ce que des chaires de théologie islamiques soient mises en place, sachant que la théologie islamique consiste en partie à dire que les Evangiles sont trafiqués, qui nie de manière affirmée l'incarnation, la passion, la résurrection ?
-L'Eglise doit-elle demander que l'islam soit enseigné dans les écoles, alors qu'il nie la séparation entre le pouvoir spirituel et temporel, ainsi que la liberté religieuse ?

L.


[ De PP à L. :
- Cet enseignement se met en place qu'on le veuille ou non, du seul fait de la présence de nombreux musulmans en France, de plus en plus souvent de nationalité française.
- Quand l'Eglise parle des autres religions, il s'agit bien de religions "autres", qui par définition ne croient pas en l'Incarnation de la deuxième personne de la Sainte Trinité. (Sinon ce seraient des confessions chrétiennes et la question n'existerait pas).
- Enfin, le problème politique de l'islam relève des pouvoirs publics français, non de l'Eglise... ]

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Écrit par : ludovic / | 09/06/2011

NON

> Mais c'est cette même commission, ces mêmes évèques qui appelaient jadis à voter "oui" en 2005 au traiter d'Amsterdam...
Nous en voyons aujourd'hui les résultats !
PS : Un point important à souligner : l'immigration massive que les français subissent depuis tant d'années, est en train de détruire notre pays ( violences, problêmes culturels, démographiques et sociaux, islamisation des banlieues, des us et coutumes...). Les français s'en inquiètent, car ils voient bien le sort cruel réservé , dans les pays musulmans, aux non musulmans : viols, meurtres etc.... il ne s'agit donc pas d'une opinion politique mais d'un simple constat lié aux réalités du constatées sur le terrain. Je me permets de vous faire remarquer que nous n'avons pas ces problêmes avec les communautés asiatiques. étonnant? non?
islam , religion de paix et d'amour.....

F.

[ De PP à F.
- Erreur : le Conseil des conférences épiscopales européennes n'est pas la Comece, simple commission technique sans autorité. Vous confondez deux organismes différents.
- Vous êtes libre de contredire le cardinal Ricard, le cardinal Tauran et tous les épiscopats d'Europe. ]

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Écrit par : froissart / | 09/06/2011

@ PP:

> Soit. Reste toutefois l'incertitude sur la façon dont l'(les)islam(s) d'Europe reçoi(ven)t une telle démarche.

G.


[ De PP à G. - C'est ce qu'indiquent les évêques dans leur communiqué; ]

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Écrit par : grzyb / | 10/06/2011

DEUX MANIERES DE LIRE CE TEXTE

> Je crois qu'il y a deux manières de lire ce texte: la mauvaise, c'est un doux irénisme déconnecté de la réalité (en quelque sorte le fameux réalisme athée), et l'autre, c'est un "progamme" de sainteté. Suivre vraiment le Christ est alors aussi un véritable programme politique puisque la foi oriente nos actions et nos pensées. L'attention et les respect portés aux autres, les musulmans en l'espèce, n'empêchent pas d'avoir conscience, en même temps, que cet objectif ne sera sans pas atteint en ce monde (la faute en revenant aux deux parties, que ce soit de façon volontaire ou non). A chaque instant, il faut oeuvrer dans cette direction, corriger le tir humblement et recommencer.
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Écrit par : Benoit C / | 10/06/2011

@ Benoit C :

> c'est effectivement la deuxième lecture qui est la seule possible pour un chrétien. Mais elle est (très) difficile, les exigences de la sainteté nous font généralement plutôt reculer... Par ailleurs que nous ayons (et ayons eu) des torts est une chose mais je ne crois pas qu'aujourd'hui "la faute en revienne aux deux parties" en tout cas certainement pas de façon égale. Y aura-t-il un jour un "Conseil des Imams d'Europe" (je ne sais si cela existe) pour produire un texte similaire, dans l'esprit de celui de nos évêques ?
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Écrit par : grzyb / | 10/06/2011

Cher Patrice,

> Merci pour votre réponse, mais cette fois-ci je dois avouer ne pas être totalement convaincu :
-le fait que la présence de musulmans entraîne l'enseignement de l'Islam est vrai. Mais la question est de savoir si l'Eglise doit encourager ou bénir cela. Et ma réponse serait plutôt non.
-non justement du fait de la nature particulière de l'Islam, qui n'est absolument pas une religion autre comme une autre. Si on compare par exemple avec le boudhisme: Le boudhisme ne nie pas l'incarnation comme l'Islam le fait. Le boudhisme ignore plus l'incarnation qu'il ne la nie. D'ailleurs le Dalai Lama dit aux chrétiens d'être chrétiens. Pour l'Islam, c'est très différent. L'Islam est fondamentalement un post-christianisme (et même un anti christianisme). Il s'est construit en négation du christianisme. C'est sa réalité historique et théologique. Aucune autre grande religion n'est dans ce cas (hormis les religions séculières comme le communisme et la nazisme que l'Eglise a précisément dénoncés avec vigueur). Ce point est central. Tant que l'on ne l'a pas pris en compte pour parler de l'Islam en tant que chrétien, on fait une omission qui nuit à la vérité du dialogue et du discours.
-le problème politique de l'Islam est du ressort de l'Etat. Je tout à fait d'accord avec vous sauf que 1) l'Eglise peut s'exprimer sur la liberté religieuse 2) c'est le texte même de la conférence qui dit que l'Islam peut être enseigné dans les écoles publiques.
Vous l'aurez compris, c'est mon deuxième point qui est central. La nature toute particulière de l'Islam par rapport au christianisme.(anti christianisme).
Soyons clairs: contrairement à d'autres qui dénoncent l'Islam, je ne dis pas que le peuple musulman est moins bon que le peuple chrétien. Il est claire qu'il y a une pratique religieuse chez beaucoup de musulmans qui est admirable.
Mon sujet n'est pas là. Il est sur la doctrine. Et c'est pour cela que je me pose la question de savoir pourquoi l'Eglise encourage son enseignement ?

L.


[ De PP à L. - Ayons confiance en l'Eglise à laquelle nous appartenons. Le magistère voit plus loin et plus net que nous. Et ça ne date pas d'hier.]

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Écrit par : ludovic / | 10/06/2011

AUTRE EPOQUE

> La malveillance permanente de certains envers les positions de "l'Eglise officielle" avait un sens à l'époque où ces gens agissaient pour rabattre une partie du public vers le lefebvrisme, le lepénisme ou les deux à la fois. Mais aujourd'hui où le lefebvrisme est rance et où le lepénisme devient la cinquième roue de la laïcité, une telle attitude n'a plus de sens.
On a changé d'époque, même si ces gens sont inaptes à le comprendre (certains croient encore que la France est menacée par "le communisme", j'ai lu ça sur un site paléolibéral).
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Écrit par : alasbar / | 10/06/2011

SAVOIR DE QUOI ON PARLE

> Un beau texte! Et pour être en relation avec l'islam, il faut le connaître, et connaître la diversité du Coran et des exégèses qui en ont été faites, ainsi que les disputes théologico-politiques qui en ont découlé. Malheureusement, nombre de catholiques ont une vision réductrice de l'islam et font circuler les mêmes versets du Coran (selon les milieux) en ignorant les autres, qui les contredisent parfois.
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Écrit par : Mahaut / | 10/06/2011

cher grzyb,

> Je ne m'aventurai pas à chercher la proportionnalité des responsabilités de chacun ni leur variation au cours des temps. Elles existent (c'est déjà trop), c'est humain. Qui veut faire l'ange fait la bête; même quand on veut bien faire, on peut se prendre les pieds dans le tapis, de façon volontaire ou non. Il faut en avoir conscience ainsi que des difficultés inhérentes à l'islam.
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Écrit par : Benoit C / | 10/06/2011

à mouzaïa :

> je préfère chanter "zidou el goudem"

@ alasbar :

> je ne pense pas non plus que le communisme soit la première menace pour notre pays mais les idées qu'il a longtemps véhiculées et qui imprègnent encore bcp les penseurs autoproclamés, rejoignent dans le domaine moral, celles véhiculées par le libéralisme pour former le nouveau "libertarisme".
Si Dieu n'existe pas tout est permis.
Ces penseurs s'opposant au vilain satan américain accablé de tous les défauts, ils ont souvent une image de générosité et de désintéressement. Sauf que je n'en connais aucun qui vive ds la simplicité ...

Les évêques exposent la situation, ils ne l'encouragent pas. Le but est d'évangéliser; but impossible si l'on nie l'évidence : il y a ds musulmans nombreux et pratiquants.
Présenter l'islam ne signfie pas y convertir.

Si l'on présente objectivement aux élèves les différentes religions, en expliquant pourquoi elles réagissent de telle ou telle façon, le christianisme a tout à y gagner. Pourvu que la présentation soit honnête.
Par ailleurs, tous les musulmans qui se convertissent ont en commun de l'avoir fait justement après avoir étudié, réfléchi sur leur foi au lieu de l'appliquer mécaniquement.

Les évêques combattent le rejet des musulmans et en même temps, responsabilisent les musulmans en leur demandant d'avoir une attitude claire. Trop souvent en effet c'est le gd silence de leur part.
Il y a peu, j'ai entendu Boubakeur sur Radio ND sur l'attitude à l'égard des anciens musulmans convertis au christianisme : un parfait exemple de langue de bois !

Les évêques ne disent pas d'ouvrir en grand les portes de l'immigration, celle-ci doit être conforme au Bien Commun, mais disent que les imams doivent s'ouvrir à la culture européenne pour y amener les musulmans déjà installés.
Il s'agit en fait d'une responsabilisation des musulmans.
D'un autre côté souvenons-nous que l'Eglise demande au cathos de s'activer et à l'Europe de redécouvrir sa richesse culturelle (laquelle est essentiellement chrétienne ; donc juive, le terme judéo-chrétien est un pléonasme en fait).
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Écrit par : zorglub / | 10/06/2011

REALISME ET ESPERANCE

> Si Jésus avait agi par "lucidité", il n'aurait choisi dans ses apôtres, en particuliers, ni Pierre ni Judas. La lucidité n'est pas une vertu chrétienne, mais bien souvent un argument défaitiste. Jésus a agit par Espérance. C'était la seule façon de donner à chacun sa chance de Salut.
Il n'y a pas de principe plus réaliste que l'Espérance chrétienne. Parce qu'Elle libère l'avenir. A chaque instant. "Pierre, m'aimes-tu?" Question non pertinente, après la trahison, c'est clair que non, enfin! "Pierre, m'aimes-tu?"...jusqu'à l'ouverture du coeur de Pierre...
Par ce texte nos évêques nous invitent à cette même attitude, qui n'est pas naïveté, mais profond réalisme! Il n'y a pas d'autre voie que la confiance en l'autre si nous voulons en espérer le meilleur, tandis que la méfiance enferme l'autre dans son jeu d'adversaire, et alors l'avenir sera effectivement, sans surprise, une confrontation violente.
Les troi défis, identité, altérité, sincérité: une belle description de la laïcité comme valeur pour une société pluri-culturelle!
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Écrit par : Anne Josnin / | 10/06/2011

MAGISTERE, ISLAM ETC

> L'infaillibilité du "magistère" n'est pas engagée dans ce document. Ce document n'est pas dogmatique mais pastoral et il n'a pas prétention à ne pas évoluer puisqu'il est lui-même l'objet d'une forte évolution en lien avec les évènements du Moyen-Orient (persécutions, synode, Ratisbonne, évolution de l'islam en Europe). Les évêques et les cardinaux se renseignent auprès des spécialistes et des personnes au plus près des réalités qu'ils expriment. Ces personnes qui réfléchissent, étudient et vivent des relations avec les musulmans ou avec l'islam doivent continuer à réfléchir et transmettre leurs vécus et leurs réflexions.
Néanmoins, Concile Vatican II est incontournable pour un catholique et le refus du dialogue, de la liberté religieuse sont contraires à l'enseignement «ex cathedra» du Magistère.
Je suis d'accord avec ce texte:
1) l'inculturation progressive de l'islam en Europe est positive car la confrontation de l'islam avec une société où la liberté d'expression et de conscience existe est salutaire.
2) La formation d'imams en Europe est préférable à la venue d'imams des pays arabes ignorant la
langue du pays d'accueil et ayant une pensée wahhabite.
3) Le souhait d'une société où l'islam commun accepte l'égalité des droits est légitime. L'avis de nos frères vivants sous le joug musulman semble avoir de plus en plus de poids dans l'évaluation de l'islam par l'épiscopat.
4) Mais la plus grande évolution se situe dans le souhait de l'épiscopat d'un dialogue qui se situe dans les défis de «se mettre d'accord sur nos désaccords» avec les musulmans et de sortir de ce que le Père Jourdan appelle le «bal masqué».
Les dernières phrases du document expriment le désir de l'épiscopat de sortir de la confusion et d'avoir un dialogue en vérité avec les musulmans. Ce dialogue en vérité est absolument nécessaire si nous voulons être des artisans de paix car la peur peut produire 2 attitudes extrêmes: faire l'autruche face à la montée de l'islamisme en Europe (cf les propres craintes de Dalil Boubakeur, ou de Mr Gaci président du CRCM à Lyon) ou refuser la liberté religieuse aux musulmans de France en faisant obstacle à la construction de mosquées dont ils ont besoin. Ces 2 attitudes (plutôt musulman que mort, ou le refus de la liberté religieuse) sont dangereuses. L'attitude munichoise laissera l'islamisme s'installer en le niant et quand la prise de conscience aura lieu, il y aura de grandes douleurs. L'attitude anti-islam systématique ralentit l'évolution spirituelle de l'islam et alimente le communautarisme et le discours victimaire des musulmans qui s'en nourrissent pour justifier leur propre racisme.
L'Eglise est non seulement consciente de la nécessité de combattre l'idéologie islamo-fasciste, mais Elle sait aussi respecter ses propres principes de liberté religieuse et de dialogue avec les personnes différentes.

Le document du "Magistère" en ce qui concerne le dialogue interreligieux est "Dialogue et annonce". Celui-ci dit § 31 que malgré des valeurs positives, l'islam est une religion humaine et qu'il est donc marqué par le péché et par le mal. Mais que la conscience aide de nombreux musulmans à trouver un chemin de paix intérieure dans l'islam.

Par contre, je pense que l'islamisme politique violent qui séduit des musulmans a sa source en Satan. Cet islamisme, au contraire de l'islam commun, ne pourra survivre à quelques décennies, vu son extrême violence, comme les autres idéologies, le communisme et le nazisme, .

Dieu a permis à l'islam de survivre 14 siècles. Si l'islam correspondait à l'islamisme fasciste que nous pouvons rencontrer aujourd'hui, il aurait été irrémédiablement détruit par les autres cultures depuis 14 siècles.

L'islam commun "discrimine" alors que l'islamisme "tue". L'islam commun fait des chrétiens des citoyens de seconde zone, alors que l'islamisme fasciste les assassine au nom de la purification religieuse. Mais la limite entre l'islamisme fasciste et l'islam n'est pas nette, surtout, quand l'islam est en position de dominer. Gardons-nous d'un islam en position de dominer en maitrisant l'immigration.

Nous faciliterons l'émergence d'un islam pacifié par ces attitudes envers nos proches musulmans:
1) le dialogue amical et le vivre ensemble,
2) l'évangélisation; la prière pour les conversions; et l'accueil, l'accompagnement et la protection des convertis de l'islam,
3) la reconnaissance de valeurs et de pratiques positives musulmanes,
4)la critique vigoureuse de ce qui est contraire aux Droits de l'Homme.
5) la prudence, la vigilance et la résistance par rapport à l'intolérance islamiste,
6) l'accord sur nos désaccords et nos différences

En écoutant, le Père Jourdan, il semble que la priorité pour les chrétiens, c'est de sortir de la confusion sur l'islam. Le livre du Père Jourdan, "Dieu des chrétiens, Dieu des musulmans", permet aussi de sortir de cette confusion.

J'invite aussi à lire "Dialogue et annonce. Réflexions et orientations concernant le dialogue interreligieux et l'annonce de l'Evangile." du Conseil pontifical pour le dialogue intereligieux et de la Congrégation pour l'évangélisation des peuples. Ce document date de 1991, mais il ne vieillit pas.

http://www.le-sri.com/DialogueAnnonce.htm

Dans tous les ces, l'annonce de l'évangile est positive.
Des musulmans attendent notre annonce de Jésus car ils ne sont pas heureux en islam. D'autres y perdent leur âme dans la haine et nécessitent notre prière fervente.
Enfin, d'autres trouvent la Paix dans l'islam grâce à l'Esprit-Saint qui éclaire et guide leur conscience de l'intérieur et leur permet de discerner le bien et le mal, et d'entrer en relation avec Dieu. L'annonce de l'évangile ne peut que les aider à discerner le bon du faux. Concile Vatican II dans Gaudium et Spes (22, 5) dit: "nous devons tenir que l’Esprit Saint offre à tous, d’une façon que Dieu connaît, la possibilité d’être associé au mystère pascal."

E.


[ De PP à E. - Si les catholiques ne devaient suivre que les définitions dogmatiques infaillibles promulguées par le pape ex cathedra, il n'y aurait plus de catholicité universelle, ni de doctrine sociale, etc. ]

réponse au commentaire

Écrit par : elkana / | 10/06/2011

CE QUIL Y A À DIRE

> "et formulent le souhait que le processus en cours puisse conduire à l’établissement d’une vraie liberté de religion dans ces pays, de telle sorte que les Arabes chrétiens puissent jouir eux aussi de cette liberté dans le cadre d’une citoyenneté égalitaire."

"une évaluation critique du terme « islamophobie »"

"ils exhortent les musulmans à nouer des relations positives et transparentes dans les différents contextes et de rejeter publiquement ces interprétations."

Ce texte dit ce qu'il a à dire, poliment mais franchement. Un peu comme le pape lors de son discours de Ratisbonne. Certains le trouvent trop mièvre mais nul doute que d'autres penseront "de quoi ils se mêlent à donner des leçons à l'Islam?" Pour ma part, j'en reviens à Chesterton: si les critiques à l'encontre de l'Eglise viennent de gauche comme de droite, c'est bien la preuve qu'elle est au juste milieu :)
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Écrit par : luc2 | 10/06/2011

@ Anne Josnin

> Il y a tout de même, je pense, un cas où la lucidité est une vertu chrétienne: quand elle porte sur soi-même. Mais alors, on parle plutôt d'humilité :)
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Écrit par : luc2 / | 10/06/2011

@ Anne Josnin:
> l'expression "société multicurelle" me laisse toujours dubitatif. Si dans "culture" on reste à un niveau folklorique comme cuisine, musique ça peut exister, mais si on prend le mot au sens fort hérité de l'Allemand (telle l'expression Kulturkampf) comme il est souvent employé, on ne peut pas faire une société avec des valeurs de civilisation différentes. Et dire qu'on y arrive par la démocratie suppose déja la reconnaissance de celle-ci et l'appartenance à un Démos commun, donc une volonté de vivre ensemble.
@ Mahaut
> Pour des raisons familiales, je relis attentivement le Coran. Oui, il se contredit souvent, tant sur des règles juridiques que sur les rappels de l'ancien testament dont il se réclame (induement, je pense) mais ce qui est constant c'est la relation en Dieu et l'homme, juridique et implacable, sans amour. Dans les 99 noms de Dieu donnés par le Coran, ne figurent ni Amour, ni Père.
@ PP
>Et de cela résulte une conception de l'homme et de la société. Les idées religieuses ont toujours un lien avec la vision de la politique, même lorsqu'on reconnait l'autonomie des deux autorités.
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Écrit par : Pierre Huet / | 12/06/2011

QUESTIONS SUR LE CORAN

> L'inculturation de l'annonce chrétienne n'a jamais été sans difficultés alors qu'après un débat plutôt vif les apôtres avaient distancié l’Eglise naissante des règles juives: "Juifs avec les Juifs, Grecs avec les Grecs". Il est vrai que les nations chrétiennes ont ensuite développé leurs propres cultures, autour de cette imprégnation religieuse et qu’il était tentant voire naturel de les exporter en même temps que l’Evangile.
Alors que dire de l'islam ! Il s'est d'emblée placé dans la posture inverse, la séparation d’avec les « négateurs, les associateurs, les idolâtres et les dissociateurs » et le contrôle social de ses fidèles, par l’instauration de diverses règles, en particulier alimentaires et purificatoires, et des pratiques empruntées au christianisme copte, mais pas les pratiques de tout le monde ! celles des monastères : déchaussement dans les lieux de cultes, prières des heures, jeûne du lever au coucher du soleil. Une partie importante du Coran lui-même est constituée de prescriptions, comme un nouveau Deutéronome, instauré par un nouveau Moïse. Du reste, les prophètes de l’Ancien Testament dont il se réclame sont les conducteurs de tribu puis de peuple, pas les poètes mystiques. A tel point qu’on peut se demander si le mystérieux auteur du Coran visait à l’universalité de la révélation qu’il disait porter.
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Écrit par : Pierre Huet / | 14/06/2011

LUCIDES

> J'ai écrit qu'il fallait être lucide sur l'Islam et je lis plus bas que la lucidité n'est pas une vertu chrétienne. Dans ce cas, il faut revoir tout le traité des vertus... L'autre nom de la lucidité - qui consiste à voir les choses dans la lumière - c'est la prudence dont l'exigence première est de voir les choses telles qu'elles sont, en pleine lumière. J'ai sur mon blog commencé une réflexion sur la place de cette vertu qui est pleinement chrétienne.
Le contraire de la lucidité, c'est l'aveuglement. L'amour chrétien n'est pas aveugle, il est lucide. Le Christ est parfaitement lucide sur Pierre et Judas: si je ne m'abuse, ils font partie des rares apôtres à qui le Christ prédit leur comportement, en l'occurrence leur trahison. Il fait néanmoins le pari de les appeler quand même.
Quand j'écris qu'il faut être lucide sur l'Islam, je veux dire par là qu'il ne faut pas s'abuser sur la capacité de l'Islam à s'accommoder des valeurs de l'humanisme chrétien qui, même dévoyé, sous tend encore notre culture.
Je ne veux pas dire qu'il faut se barricader chez soi: c'est injuste et, soyons lucides ;) , parfaitement illusoire. Jamais dans l'histoire une frontière n'a arrêté des flux migratoires.
Mais tout en respectant les droits des personnes, il faut regarder en face ce fait de la difficulté habituelle de l'Islam à accepter la distinction de ce qui est à César et de ce qui est à Dieu, à accepter l'égale dignité de l'homme et de la femme, à accepter le principe de la liberté religieuse. Nous ne pouvons rejeter un immigrant au prétexte qu'il est musulman mais nous devons tenir compte de ces difficultés car comme l'a justement souligné Pierre Huet, une société multiculturelle ne peut perdurer contrairement à ce que prétend l'idéologie libérale. La neutralité éthique des lois et de l'Etat est impossible. Ou bien les lois prônent l'égalité des sexes, ou bien la soumission de la femme. Ou bien les lois prônent la liberté religieuse ou bien elles mettent une religion en avant, ou bien encore les écrasent TOUTES sous le laïcisme. Ou bien elles se soumettent à la charia, ou bien elles s'accomodent du principe de tolérance systématisé par Thomas. Donc ou bien nous adaptons notre loi à l'Islam, ou bien les musulmans s'adaptent aux fondamentaux de notre culture... il faut voir cela en face, ce n'est pas un petit problème:
Puisqu'il est illusoire de stopper les flux migratoires et puisque la démographie est ce qu'elle est, il nous faut être lucides: ce qui signifie nous devons retrouver les bases métaphysiques de nos valeurs (voir le dernier ouvrage de Rémi Brague) et surtout évangéliser.
On ne règle pas politiquement un problème spirituel. Ce que veut faire ce que j'appelle le national-catholicisme...
En gros, pour moi être lucide, c'est accepter le constat que l'Islam n'est pas - dans son état actuel - compatible avec les valeurs auxquelles nous tenons. Etre lucides, c'est d'ailleurs aussi constater que le catholicisme a eu un difficile chemin à parcourir pour se purifier de la tentation du césaro-papisme. Néanmoins je crois que le christianisme portait en lui cette évolution, j'en suis moins sur en ce qui concerne l'Islam.
Mais être lucides, c'est aussi constater que fermer les frontières et bafouer les droits des migrants ne fait qu'aggraver les problèmes.
Je reproche à notre épiscopat, non ses conclusions et orientations - auxquelles je souscris - mais les présupposés iréniques qui président à la réflexion menée et qui risquent de masquer la difficulté des choses et de conduire au découragement voire à un virage à 180° qu'on observe déja chez certains clercs.
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Écrit par : Hubert Houliez / | 15/06/2011

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