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31/01/2011

Choc égyptien dans l'islam ? 23 penseurs musulmans demanderaient un "aggiornamento" de la religion coranique

Le 24 janvier, le site égyptien Yawm al-Sâbi ("Le 7ème Jour") a publié un Document pour le renouvellement du discours religieux. Le jésuite Samir Khalil Samir a traduit et commenté le document sur le site Asia News (Missions Étrangères). Mais selon certaines sources, Al-Yawm Al-Sabi aurait un peu forcé la note  - voir ici les commentaires :



Parmi les signataires : Nasr Farid Wasel, ancien grand mufti d’Égypte ; Gamal al-Banna, frère du fondateur des Frères Musulmans ; l’imam Safwat Hegazi ; les professeurs Malakah Zirâr et Âminah Noseir ; l'écrivain Fahmi Huweidi ; les prédicateurs Khalid al-Gindi, Muhammad Hedâyah, Mustafa Husni. Traduction par le P. Samir :


<<   DOCUMENT POUR LE RENOUVELLEMENT DU DISCOURS RELIGIEUX

Le Caire, 24 janvier 2011



1. Réexaminer les recueils de Hadiths [phrases attribuées à Mahomet par la tradition] et les commentaires du Coran, pour les purifier.

2. Soumettre à une vérification le vocabulaire politico-religieux musulman, comme par exemple la jizya [impôt spécial demandé aux dhimmis, les minorités non musulmanes soumises à des restrictions].

3. Trouver une nouvelle formulation du concept de fraternisation entre les sexes.

4. Mettre au point la vision musulmane de la femme et trouver des formes convenables pour le droit du mariage.

5. L’islam est une religion de la créativité.

6. Expliquer le concept musulman de djihâd [la guerre sainte intérieure et extérieure] et clarifier les normes et obligations qui la régissent.

7. Bloquer les attaques contre les manifestations extérieures de piété et les pratiques étrangères provenant d’états voisins.

8. Séparer la religion et l’état.

9. Purifier le patrimoine des premiers siècles de l’islam (salafisme), en écartant les mythes et les attaques contre la religion.

10. Donner une formation adéquate aux prédicateurs missionnaires et, dans ce domaine, ouvrir les portes à ceux qui n’ont pas étudié à l’université Al-Azhar, selon des critères bien clairs.

11. Formuler les vertus communes aux trois religions révélées.

12. Donner des orientations en ce qui concerne les us et coutumes occidentaux et éliminer les comportements erronés.

13. Préciser la relation qui doit exister entre les membres des religions à travers l’école, la mosquée et l’église.

14. Rédiger de manière adaptée à l’Occident la présentation de la biographie du Prophète.

15. Ne pas éloigner les gens des systèmes économiques par l’interdiction de traiter avec les banques.

16. Reconnaître le droit des femmes à accéder à la présidence de la république.

17. Combattre les prétentions sectaires, [en soulignant] que la bannière de l’islam [doit être] unique.

18. Inviter les gens à aller vers Dieu par la gratitude et la sagesse, et pas par les menaces.

19. Faire évoluer l’enseignement d’Al-Azhar.

20. Reconnaître le droit des chrétiens à accéder à des fonctions importantes et [même] à la présidence de la république.

21. Séparer le discours religieux et le pouvoir et rétablir son lien avec les besoins de la société.

22. Améliorer le lien entre la dawah [l’appel à se convertir à l’islam] et la technologie moderne, les chaînes satellitaires et le marché des cassettes musulmanes. >>

 

Ces 22 points sont suivis d’autant de paragraphes de commentaires qui, d’après le P. Samir, laissent entrevoir une véritable révolution par rapport aux manières traditionalistes et puritaines de vivre l'islam qui ont été introduites dernièrement en Égypte et qui proviennent surtout d'Arabie Saoudite.

Le P. Samir considère comme important le point 8, qui propose de séparer la religion et la politique. Dans le commentaire joint – souligne-t-il – figure le mot "almaniyyah", laïcité. Un mot qui, dans les pays arabes, est généralement compris comme signifiant athéisme et qui est donc condamné par principe. Dans le cas présent, au contraire, les auteurs du document écrivent que la laïcité ne doit pas être considérée comme une ennemie de la religion, mais plutôt comme une protection contre l'utilisation politique ou commerciale de la religion : "Dans ce contexte – écrivent-ils – la laïcité se trouve en harmonie avec l'islam et par conséquent elle est juridiquement acceptable". Mais elle ne l’est pas si elle se transforme en un contrôle exercé par l’État sur les activités musulmanes. Commentaire du P. Samir : "Ce point, même s’il a fait l’objet de beaucoup de débats, est la preuve du fait qu’est en train de naître en Égypte le concept de société civile, qui ne coïncide pas immédiatement avec la communauté musulmane."

Le point 6 concernant la guerre sainte est également remarquable. Les auteurs du document n’admettent celle-ci que si elle est défensive et uniquement en terre musulmane. Il n’est jamais permis de tuer des gens désarmés, des femmes, des personnes âgées, des enfants, des prêtres, des moines. Il n’est jamais permis d’attaquer des lieux de prière. Les auteurs soulignent que cette doctrine est celle de l'islam depuis 1400 ans et que ceux qui la violent la trahissent gravement.

 

Benoît XVI avait affirmé le 22 décembre 2006 : "Le monde musulman se trouve confronté aujourd'hui de manière très urgente à une tâche très semblable à celle qui fut imposée aux chrétiens à partir du Siècle des Lumières et à laquelle le Concile Vatican II a apporté des solutions concrètes pour l’Église catholique au terme d’une longue et difficile recherche. D'une part, nous devons nous opposer à la dictature de la raison positiviste, qui exclut Dieu de la vie de la communauté et de l'organisation publique, privant ainsi l'homme de ses critères spécifiques de mesure. D'autre part, il est nécessaire d'accueillir les véritables conquêtes de la philosophie des Lumières, les droits de l'homme et en particulier la liberté de la foi et de son exercice, en y reconnaissant les éléments essentiels également pour l'authenticité de la religion. De même que dans la communauté chrétienne il y a eu une longue recherche sur la juste place de la foi face à ces convictions – une recherche qui ne sera certainement jamais conclue de façon définitive – de même le monde musulman se trouve également, avec sa tradition propre, face à la grande tâche de trouver les solutions adaptées à cet égard". >>

 

sources : Asia news et Sandro Magister

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Commentaires

IMPRESSIONNANT

> Impressionnant et même stupéfiant ! On voit combien Benoit XVI avait raison et opportunément dans son discours de Ratisbonne.
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Écrit par : anne-catherine / | 31/01/2011

LES CRETINS

> et combien avaient tort les crétins qui l'avaient insulté à ce moment-là. Crétins de la presse occidentale. Presse dont le mensonge crétin ("le pape s'en prend à Mahomet") a incendié l'opinion musulmane, avec pour conséquence l'assassinat d'une religieuse au Soudan !
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Écrit par : Laurent Ligeard / | 31/01/2011

A UN DETAIL PRÈS

> A un détail près, le point 15 sur les banques. Si les masses musulmanes savaient à quel point l'anathème sur les banques américaines peut les protéger !!!
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Écrit par : nadine bouk/ | 31/01/2011

EN PLEIN

> Nous sommes en plein dans cette "crise de la représentativité" que j'évoquais il y a peu... Et dans les réponses innovantes -et porteuses d'avenir- qui réinterprètent la notion islamique d'ijmâ' : comme pour la "Lettre des 138", comme pour l'appel lancé par des musulmans français sur Respect Mag, nous voilà face à un texte qui s'appuie sur la garantie de co-signatures islamiques. Rien ne dit que cette méthode remportera la "bataille" ; mais la moindre des choses serait d'en prendre acte, indépendamment des idées reçues de certains sur ce que serait "l'essence de l'Islam en vérité"...
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Écrit par : Ren'/ | 31/01/2011

BON COURAGE

> Oui assez enthousiasmant, mais si les musulmans commencent maintenant, il en ont au bas mot pour plusieurs septenaires d'années avec des soubresauts et des "hérésies" à la clé. Bon courage !
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Écrit par : Roque/ | 31/01/2011

AUX MUSULMANS

> Ren' évoque les "idées reçues de certains sur ce que serait l'essence de l'Islam en vérité". Difficile en effet de faire la part des choses. Des spécialistes non musulmans s'y attellent. Cette vision extérieure est souvent instructive mais forcément partielle : pour comprendre une religion, rien ne remplace l'expérience religieuse vécue de l'intérieur. C'est donc d'abord aux musulmans de valider de l'intérieur "l'essence de l'Islam en vérité", ou encore "l'essence de ce que devrait ou pourrait être l'Islam", quoique l'absence de dogmatique et de magistère suprême rende la tâche incertaine. Comment appréhender cette liste des 22 points ? Une réinterprétation de l'Islam à la lumière de toute la tradition islamique (écartant son expression dominante d'aujourd'hui) ? Une réinterprétation de l'Islam à lumière des Lumières (donc l'injection d'éléments exogènes) ? Ou encore, non pas une réinterprétation mais bien davantage une (r)évolution profonde de l'Islam en le confrontant, peut-être pour la première fois dans l'histoire (de manière significative), aux catégories de la raison ?
Difficile de répondre... En attendant, que pouvons-nous faire face aux peurs qui nous taraudent ? Peut-être une analyse lucide du "tronc commun" du droit positif musulman là où il est majoritaire (donc se baser sur ce qui objectif, actuel et factuel et non sur ce que "pourrait être" ou "devrait être" l'Islam) ; une réflexion prospective sur les hypothèses d'évolution de l'Islam (dans le bon et le mauvais sens) ; maintenir le contact, un dialogue là où c'est possible, tout en reconnaissant que c'est extrêmement fragile, comme le montre la rupture unilatérale du dialogue par l'université Al-Azhar, pourtant réputée comme "navire amiral" de l'Islam de dialogue. J'ai tendance à croire que la traditionnelle distinction binaire Islam/islamisme est une catégorie dépassée. Il faut peut-être aller beaucoup plus loin dans la réflexion car les choses sont manifestement infiniment plus complexes. Au demeurant, l'appel des 23 est un signe encourageant et peut-être tout à fait nouveau. Un regret : que ne soit pas affirmé le droit pour un musulman de changer de religion. Mais c'est peut-être encore un peu tôt pour en arriver là du côté des modérés... Espérons que tout cela n'arrive pas trop tard...
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Écrit par : Guillaume de Prémare / | 01/02/2011

LA ROUTE EST ENCORE LONGUE

> Très bonne nouvelle, réjouissante.
La route reste encore longue cependant, avec une absence fondamentale par exemple, celle de la liberté religieuse.
Mais la question de fond que pose cette initiative est la suivante: est-il possible de réformer l'Islam en faisant en sorte que l'Islam reste l'Islam ? En d'autre terme, comment reformer l'Islam sans introduire des facteurs exogènes, qui sont tirés du christianisme en fait.
Mon idée personnel est que ce n'est pas vraiment possible, car on va buter sur certains points sur des contradictions avec les textes fondateurs.
Ceci-dit la démarche est très bonne et il faut bien essayer pour voir s'il est possible de faire quelque chose. Quelque soit le résultat, cela ne peut être que positif (à condition de toujours rester très clair sur les limites de l'exercice).
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Écrit par : ludovic / | 01/02/2011

LE POINT INTERESSANT

> Ludovic, le premier point de ce texte appelle clairement à la révision d'une partie des textes fondateurs... Et c'est l'un des aspects qui le rend intéressant. Maintenant, il ne faut pas non-plus oublier notre esprit critique : certains des points listés ci-dessus ne sont pas forcément "positifs" (comme ce "Rédiger de manière adaptée à l’Occident la présentation de la biographie du Prophète" ...hum.)
Mais ce qui m'intéresse le plus -je le disais dans mon commentaire précédent- c'est la démarche "collégiale" adoptée.
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Écrit par : Ren'/ | 01/02/2011

CHARLES DE FOUCAULD

> Source : http://www.algerie-online.com/litterature/516-que-pensez-vous-de-cette-lettre-ecrite-par-le-pere-charles-de-foucauld-en-1907-a.html
1. Que pensez vous de cette lettre écrite par le père Charles de Foucauld en 1907?
Clairvoyance incroyable de cette personne que l'on soit croyant ou athée ....

Lettre du Père Charles de Foucauld adressée à René Bazin, de l'Académie française, président de la Corporation des publicistes chrétiens, parue dans le Bulletin du Bureau catholique de presse, n° 5, octobre 1917 :
"Ma pensée est que si, petit à petit, doucement, les musulmans de notre empire colonial du nord de l'Afrique ne se convertissent pas, il se produira un mouvement nationaliste analogue à celui de la Turquie : une élite intellectuelle se formera dans les grandes villes, instruite à la française, sans avoir l'esprit ni le coeur français, élite qui aura perdu toute foi islamique, mais qui en gardera l'étiquette pour pouvoir par elle influencer les masses ; d'autre part, la masse des nomades et des campagnards restera ignorante, éloignée de nous, fermement mahométane, portée à la haine et au mépris des Français par sa religion, par ses marabouts, par les contacts qu'elle a avec les Français (représentants de l'autorité, colons, commerçants), contacts qui trop souvent ne sont pas propres à nous faire aimer d'elle.
Le sentiment national ou barbaresque s'exaltera dans l'élite instruite : quand elle en trouvera l'occasion, par exemple lors de difficultés de la France au dedans ou au dehors, elle se servira de l'islam comme d'un levier pour soulever la masse ignorante, et cherchera à créer un empire africain musulman indépendant.
L'empire Nord-Ouest-Africain de la France, Algérie, Maroc, Tunisie, Afrique occidentale française, etc., a 30 millions d'habitants ; il en aura, grâce à la paix, le double dans cinquante ans. Il sera alors en plein progrès matériel, riche, sillonné de chemins de fer, peuplé d'habitants rompus au maniement de nos armes, dont l'élite aura reçu l'instruction dans nos écoles. Si nous n'avons pas su faire des Français de ces peuples, ils nous chasseront. Le seul moyen qu'ils deviennent Français est qu'ils deviennent chrétiens.
Il ne s'agit pas de les convertir en un jour ni par force mais tendrement, discrètement, par persuasion, bon exemple, bonne éducation, instruction, grâce à une prise de contact étroite et affectueuse, 1/2uvre surtout de laïcs français qui peuvent être bien plus nombreux que les prêtres et prendre un contact plus intime.
Des musulmans peuvent-ils être vraiment français ? Exceptionnellement, oui. D'une manière générale, non.
Plusieurs dogmes fondamentaux musulmans s'y opposent ; avec certains il y a des accommodements ; avec l'un, celui du « Medhi », il n'y en a pas : tout musulman, (je ne parle pas des libre-penseurs qui ont perdu la foi), croit qu'à l'approche du jugement dernier le Medhi surviendra, déclarera la guerre sainte, et établira l'islam par toute la terre, après avoir exterminé ou subjugué tous les non musulmans. Dans cette foi, le musulman regarde l'islam comme sa vraie patrie et les peuples non musulmans comme destinés à être tôt ou tard subjugués par lui musulman ou ses descendants ; s'il est soumis à une nation non musulmane, c'est une épreuve passagère ; sa foi l'assure qu'il en sortira et triomphera à son tour de ceux auxquels il est maintenant assujetti ; la sagesse l' engage à subir avec calme son épreuve; " l'oiseau pris au piège qui se débat perd ses plumes et se casse les ailes ; s'il se tient tranquille, il se trouve intact le jour de la libération ", disent-ils.
ils peuvent préférer telle nation à une autre, aimer mieux être soumis aux Français qu'aux Allemands, parce qu'ils savent les premiers plus doux ; ils peuvent être attachés à tel ou tel Français, comme on est attaché à un ami étranger; ils peuvent se battre avec un grand courage pour la France, par sentiment d'honneur, caractère guerrier, esprit de corps, fidélité à la parole, comme les militaires de fortune des XVIe et XVIIe siècles.
mais, d'une façon générale, sauf exception, tant qu'ils seront musulmans, ils ne seront pas Français, ils attendront plus ou moins patiemment le jour du Medhi, en lequel ils soumettront la France.
De là vient que nos Algériens musulmans sont si peu empressés à demander la nationalité française : comment demander à faire partie d'un peuple étranger qu'on sait devoir être infailliblement vaincu et subjugué par le peuple auquel on appartient soi-même ?
Ce changement de nationalité implique vraiment une sorte d'apostasie, un renoncement à la foi du Medhi..."
Charles de FOUCAULD Medhi = Le Bien-aimé = le Sauveur de l'Islam
Charles de Foucauld a été canonisé (c'est devenu un Saint) , le 13 novembre 2005

J.

[ De PP à J. - Le P. de Foucauld avait raison. C'était en 1907. Nous sommes en 2011, et la question de l'évangélisation se pose sur des bases entièrement différentes : la France et le reste de l'Europe sont déchristianisées, et les musulmans y sont nombreux. La tâche de l'Eglise vis-à-vis d'eux est difficile et complexe : devoir de charité et témoignage de foi trinitaire doivent aller de pair, sachant que les conversions ne s'obtiennent que par le témoignage d'amour fraternel concret. ]

réponse au commentaire

Écrit par : jean / | 02/02/2011

PAS SI CLAIR QUE CA

> Ayant enfin trouvé un peu de temps pour creuser le sujet, et faire quelques vérifications, j'ai été voir l'avis (toujours bien informé) de Sami Aldeeb... Cette fameuse liste n'est en réalité pas si claire que ça : http://blog.sami-aldeeb.com/2011/01/31/22-points-pour-reformer-lislam-document-falsifie-selon-ses-signataires/
Le journal Al-Yawm Al-Sabi a bien cherché à apporter sa contribution à cette nouvelle pratique du consensus par co-signatures islamiques, mais ne semble en réalité pas être parvenu à son but...
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Écrit par : Ren' / | 02/02/2011

VIOLENCE

> Le point 11 propose : Formuler les vertus communes aux trois religions révélées.
Ne faudrait-il pas un point 11 bis : Débarrasser les trois religions de la plus épouvantable de leurs croyances communes, la croyance en une prétendue "bonne" violence "voulue par Dieu" et qu'il faudrait "savoir bien situer et bien interpréter" ?
Je rappelle que, dans l'Eglise catholique, en la réinscrivant dans le Nouveau Catéchisme c'est le futur pape Benoît XVI qui l'a réanimée, et qui a confirmé qu'il faut la transmettre aux générations futures.

PR


[ De PP à PR - Intéressante idée. Puis-je vous demander de l'étayer un peu ? ]

réponse au commentaire

Écrit par : Pierre Régnier/ | 02/02/2011

à Patrice de Plunkett

> C'est sans doute dans cet article (que n'ont pas voulu publier Caroline Fourest et Fiammetta Venner) que j'ai le mieux "étayé" :
http://www.centpapiers.com/contre-la-violence-religieuse-pourquoi-si-peu-dexigence/18143
Mais je peux résumer en reproduisant les dernières lignes, adressées à Elie Barnavi après lecture de son livre "Les religions meurtrières", que j'ai beaucoup reproduites par la suite sous cette forme :

NEUF PROPOSITIONS POUR SORTIR DE LA VIOLENCE RELIGIEUSE

1/ La violence religieuse effective est toujours à la fois épouvantable ET BANALE puisque les religions continuent d'enseigner que Dieu la commande ou l'a commandée

2/ Ce sont les institutions religieuses qui continuent de croire FONDAMENTAL de maintenir INTEGRALEMENT sacrés leurs textes contenant les bases de la violence religieuse

3/ La nécessaire désacralisation de la violence religieuse suppose une radicale révision, PAR LES INSTITUTIONS RELIGIEUSES, de leur propre interprétation de leurs propres textes sacrés

4/ Le maintien de la conception criminogène de Dieu, jadis sacralisée, et celui de la théologie criminogène qui la dogmatise ne sont nullement fatals

5/ La paix et la protection des Droits de la personne humaine sont impossibles sans le rejet de la théologie criminogène

6/ Les sociétés défendant les Droits humains doivent exiger des institutions religieuses qu'elles rejettent officiellement et sans ambiguïté la théologie criminogène

7/ Le combat pour la désacralisation de la conception criminogène de Dieu N'EST PAS un combat CONTRE LE TOUT des religions

8/ Le CHOC DES CONCEPTIONS (pacifiste et criminogène) AU SEIN DES RELIGIONS est le plus sûr moyen d'éviter le CHOC DES CIVILISATIONS

9/ C'est en exigeant d'abord la désacralisation de la violence dans leur propre religion que les croyants pourront entraîner les pacifistes des autres religions dans la même exigence.

Pierre Régnier, décembre 2006


[ De PP à PR - Oui, à ceci près : l'Eglise catholique ne prône pas la violence ! J'aimerais que vous nous disiez pourquoi vous croyez le contraire...]

réponse au commentaire

Écrit par : Pierre Régnier / | 03/02/2011

@ Pierre Régnier

> Vous avez raison d’aborder cette question importante et très actuelle de la violence religieuse. Permettez-moi d’apporter quelques éléments d’éclairage. En aucun cas le Catéchisme de l’Eglise catholique (CEC) ne justifie une quelconque violence religieuse voulue par Dieu. En matière de violence, le CEC aborde deux choses : la légitime défense et le recours à la guerre.
LA LEGITIME DEFENSE - Point 467 du compendium du CEC
« Par la légitime défense, on fait le choix de se défendre et de mettre en valeur le droit à la vie, la sienne propre ou celle d’autrui, et non le choix de tuer. Pour qui a la responsabilité de la vie d’autrui, la légitime défense peut être aussi un devoir grave. Toutefois, elle ne doit pas comporter un usage de la violence plus grande que ce qui est nécessaire. »
LE RECOURS A LA FORCE MILITAIRE – Point 483
« Le recours à la force militaire est moralement justifié par la présence simultanée des conditions suivantes : la certitude d’un dommage subi grave et durable; l’inefficacité de toute solution pacifique; les conditions sérieuses d’un succès; l’absence de maux plus grands, étant bien considérée la puissance actuelle des moyens de destruction. »
Et le point 484 pose la question : « En cas de menace de guerre, à qui appartient-il d’apprécier de manière rigoureuse de telles conditions? » La réponse : « Cela appartient au jugement prudent des Gouvernants. »
Vous noterez que ces repères ne concernent en rien la violence religieuse mais au contraire la vie civile. Et si vous prenez l’exemple de la guerre, l’Eglise ne se pose pas en autorité pour trancher absolument du bien-fondé ou non de telle ou telle guerre, elle fixe 4 critères de discernement. Mais c’est l’autorité civile qui tranche, pas l’Eglise. Pourquoi ? 1. Parce que dans notre religion, le spirituel et le temporel sont distincts. 2. Parce que l’Eglise enseigne des repères moraux, mais l’acte appartient à la liberté humaine, à la conscience de l’homme. Dans notre religion, l’homme est libre et sa conscience ne saurait être contrainte par l’autorité religieuse ni par quiconque.
Pour ce qui est des textes sacrés, vous dites vous-même dans votre intéressant article que l’Evangile ne contient rien qui puisse objectivement être interprété comme une justification de la violence religieuse. Quant à l’ancien testament, il est vrai plus dur à cet égard, il est interprété par l’Eglise à la lumière du nouveau. L’Eglise n’a donc nul besoin de « désacraliser » ses textes pour se « guérir » de la violence religieuse, comme vous le suggérez dans votre article, mais au contraire de constamment se ressourcer à ses textes et à sa doctrine la plus ancienne (pères de l’Eglise) qui n’introduit pas de justification de la violence religieuse.
Si je regarde l’histoire, je pense qu’il faut reconnaître que l’Eglise a déjà résolu pour elle-même la tentation de la violence religieuse. C’est bien pour cela qu’elle est tête de pont dans la prise de conscience par les religions du nécessaire rejet de la violence religieuse : voir Assise 1, Assise 2 et bientôt Assise 3. Ce n’est pas parce qu’il existe aujourd’hui encore des violences religieuses qu’il faut mettre toutes les religions sur le même plan, ce que vous semblez faire dans votre article en les renvoyant dos à dos. Tout n’est pas équivalent, toutes les religions n’en sont pas au même point.
Une dernière remarque : l’idée que les motifs religieux soient les plus grands moteurs de violences et de guerres ne correspond pas à ce qui s’est passé au 20ème siècle, siècle des idéologies athées meurtrières. Quant au 21ème siècle, l’Eglise multiplie les efforts de dialogue pour qu’il ne soit pas un siècle de violence religieuse. Et elle persévère toujours, même, par exemple, quand les portes de l’université Al-Azhar se ferment unilatéralement.
Bien cordialement,
GP
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Écrit par : Guillaume de Prémare / | 03/02/2011

à Patrice de Plunkett

> Merci tout d'abord d'accepter que soit exposée ici une opinion "non catholiquement correcte", et de permettre ainsi une véritable réflexion sur ce qui est aujourd'hui, selon moi, le problème le plus grave porté par les religions rassemblant "les enfants d'Abraham".
Cette attitude n'est pas courante dans les milieux catholiques ou sympathisants du catholicisme. Le plus souvent, comme les théologiens, les membres de la hiérarchie de l'Eglise ou les simples croyants, les journalistes de la presse chrétienne s'enferment dans le déni de réalité sur le problème posé.
Il y a une exception : les intégristes catholiques reconnaissent et assument la croyance de leur Eglise dans la "bonne violence voulue par Dieu". Ils pensent que Dieu est effectivement intervenu dans l'histoire humaine en commandant des "bons massacres", des massacres qui "étaient nécessaires". Très logiquement ils concluent alors que, face aux persécutions subies de nos jours par les chrétiens d'Orient, entre autres, il faut une nouvelle guerre de religions conduisant les juifs et les chrétiens à combattre physiquement les musulmans violents.
Je ne suis pas de ceux qui attendent beaucoup du "dialogue interreligieux". Je pense comme Jean-Marie Muller qui en dit ceci : "Je dois avouer que j’ai très peur que le dialogue interreligieux se fourvoie dans un œcuménisme de complaisance mutuelle dans lequel la question essentielle, centrale, de la violence se trouve occultée" (p. 589 de son livre, selon moi de la plus grande importance, Désarmer les Dieux, éd. du Relié 2009).
La solution est ailleurs : reconnaître la réalité du DOUBLE discours de l'Eglise actuelle, totalement incohérent parce qu'affirmant deux positions contradictoires absolument incompatibles, et EXIGER que l'Eglise CHOISISSE, entre ces deux conceptions, celle qui ne trahit pas Jésus et son message d'amour universel et de paix. Qu'elle choisisse d'affirmer haut et fort que Dieu N'A JAMAIS COMMANDE aux hommes de commettre des maltraitances, des meurtres individuels, des massacres massifs, un génocide au moins, celui des cananéens.
Dans l'article auquel renvoyait mon commentaire précédent j'avais déjà répondu à votre seconde question : l'Eglise dit seulement que Dieu n'appelle PLUS à la violence. Mais est-ce suffisant dès lors qu'elle confirme qu'il A APPELE à commettre des "bons" massacres ? On voit bien que, pour amener les musulmans pacifiques à se débarrasser de leurs propres bases de la violence ce n'est nullement suffisant. Ce sont au contraire les islamistes meurtriers qui peuvent s'appuyer sur la position de l'Eglise, très semblable, quoi qu'on en dise, à celle de leur Coran.
Dans cet autre article, plus récent, j'ai explicité cela : confirmation de la "bonne" violence (ancienne) "de Dieu" dans le Nouveau Catéchisme et, dans la Bible de Jérusalem annotée (postérieure) AGGRAVATION par la prétendue "bonne interprétation" de cette horreur théologique :
http://www.centpapiers.com/benoit-xvi-premier-responsable-de-la-violence-religieuse-1/38279
Je précise que je regrette maintenant le titre provocateur donné à cet article. J'ai constaté que, loin d'amener les catholiques à le lire, comme je l'avais voulu, ce titre a contribué à les en détourner.

PR


[ De PP à PR :
- Ne me remerciez pas ; la vocation de ce blog est de discuter avec l'immense majorité des gens d'aujourd'hui, qui regardent de travers le catholicisme pour des raison dont les catholiques sont parfois les premiers responsables.
- Si je comprends bien, vous posez que l'Eglise catholique, sans prôner la violence pour aujourd'hui, a tort de justifier les violences narrées dans la Bible.
Est-ce fondé ?
L'Eglise catholique depuis longtemps (bien avant Vatican II) condamne les violences ; en l'an 2000, le pape Jean Paul II a solennellement fait repentance pour les violences exercées dans le cadre catholique au cours des siècles passés. (Il faut par ailleurs étudier historiquement ces violences, qui ne sont pas toutes à mettre au compte de l'Eglise-institution : cf les guerres de religion françaises par exemple).
Mais il serait inexact de dire que l'exégèse moderne maintient pour aujourd'hui le potentiel de violence de la Bible. C'est le contraire ! L'exégèse moderne restitue les violences bibliques :
a) à leur contexte historique, totalement intransposable aujourd'hui ;
b) à leur genre littéraire, sachant que nombre de ces "carnages" sont des allégories.
J'ajoute que les grands récits mythologiques polythéistes abondent en tueries de masse, et que personne ne songe à le leur reprocher...
ps / Vous parlez du cas de ceux que vous appelez "les intégristes catholiques" ; je me permets de vous faire observer que leur vision des choses n'est pas celle de l'Eglise, en ce domaine comme en d'autres. ]

réponse au commentaire

Écrit par : Pierre Régnier/ | 03/02/2011

LE DIVIN DEPASSE LES LIMITES

> Merci à Pierre Régnier pour cette réflexion sur la proposition du rejet officiel de la violence par les religions.
Je pense que, sur le plan intellectuel, philosophique, les religions pourraient aussi s'accorder sur l'interdiction pour quiconque de déposer d'une manière ou d'une autre un "droit exclusif de propriété du divin".
En effet elles sont je crois toutes conscientes de ce que le divin dépasse les limites de nos connaissances humaines, que les mots n'en donneront jamais qu'une approche imparfaite, quand bien même ils seraient sacrés notre compréhension en reste restreinte par nos conditionnements, bref que le divin se donne à contempler gratuitement, dans la mesure où nous le cherchons dans un esprit de renoncement et de pauvreté, mais se refuse à qui cherche à se l'approprier pour servir sa petite cause.
Ce serait d'ailleurs un signe clair pour tous de distinction entre secte et religion que ce renoncement officiel à prétendre "posséder Dieu". Ce pourrait être par ricochet une manière d'échapper au "tout marchandisable" dont souffre notre monde, les religions retrouveraient leur vocation sociale de contre-pouvoir aux puissances terrestres, rappelant que l'homme ne vit pas seulement sur le mode de l'avoir et de la possession mais d'abord sur le mode de l'être et du don.
Et que Dieu bénisse ces courageux frères "penseurs" musulmans!
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Écrit par : Anne Josnin/ | 03/02/2011

PR à PP

Si, je vous remercie, car il y a ici possibilité d'échange réel et c'est bien rare sur les sites catholiques ou sympathisants.
Ce que je dis des intégristes catholiques c'est que, sur le problème précis que je soulève ce sont eux, justement, qui assument la position officielle de l'Eglise. Celle-ci la réaffirme clairement mais ne la met pas en avant, elle la cache parce qu'elle la sait très choquante, incompatible avec le "jésuïsme" (la conception de Jésus) que tout le monde confond avec le catholicisme (la conception de Jésus PLUS le maintien - incompatible - de la croyance dans la violence ancienne de Dieu, bien située dans son contexte et "bien interprétée").
Le Catéchisme dit clairement, même si c'est indirectement, que "les carnages" attribués à Dieu dans l'Ancien Testament NE SONT PAS seulement "des allégories" mais qu'ils sont "conformes à la volonté de Dieu" (passage 106). Dans le second article dont je vous ai proposé la lecture j'explicite pourquoi, selon moi, les passages suivants du catéchisme et, pire encore, les annotations de la Bible de Jérusalem (de 2001) sont une intolérable "tricherie supplémentaire".
Les haineux antisémites du Hamas, du Hezbollah, du pouvoir iranien actuel, d'Al Qaïda… et ceux qui, à droite ou "à gauche" se font en France leurs complices seraient ravis d'utiliser cette "bonne interprétation" catholique s'ils la connaissaient car elle confirme que le Coran, dans sa culture de haine et de violence "justifiée par Dieu" contre les mécréants, les juifs et les chrétiens N'EST PAS PIRE que la culture des Pères de l'Eglise, antérieure à celle de l'islam mais maintenue, et même réanimée dans l'Eglise actuelle. Heureusement, les antisémites qui veulent la disparition de l'état d'Israël sont avant tout intellectuellement paresseux et leur haine des juifs suffit à les satisfaire.
Tous les gens pacifiques se demandent aujourd'hui comment la violence islamique va pouvoir être effacée de l'avenir du monde. Beaucoup, musulmans ou pas - Hans Küng les rejoint - se dépensent énormément dans la recherche d'une "bonne interprétation" des appels à la violence contenus dans le Coran (dont ils veulent absolument faire croire qu'il est un livre pour la tolérance, l'amour et la paix). Ils sont, bien intentionnés ou tricheurs conscients, inutiles puisqu'ils ne sont pas dans le réel.
Je crois qu'il n'y a que deux moyens, complémentaires, à mettre en œuvre pour arriver, à terme, à faire disparaître la violence islamique. Les pays démocratiques, a fortiori ceux qui sont, comme la France, laïcs et républicains, doivent cesser de violer leurs propres lois pour plaire aux islamistes et les calmer (en se rassurant provisoirement à bon compte mais en condamnant au pire leurs enfants et petits-enfants) : renoncement à faire rejeter officiellement la loi islamique sur l'apostasie lors de la création du CFCM, condamnation des français refusant chez eux le prosélytisme dans leurs activités commerciales (cas de Fanny Truchelut), acceptation de l'occupation des rues à l'heure de la prière, entrée de la nourriture halal dans les cantines de l'école publique, détournements de fonds publics pour la construction de mosquées etc… Voir ici :
http://www.agoravox.fr/tribune-libre/article/vouloir-identitaire-aboulie-64509
http://www.mediaslibres.com/tribune/post/2010/03/11/Le-triomphe-planetaire-de-la-violence-religieuse-Part-2
L'autre moyen à mettre en œuvre - et je suis convaincu que c'est à terme le plus efficace même si c'est le plus difficile - est du devoir des croyants des quatre monothéismes "enfants d'Abraham" (j'inclue la Foi bahaïe) : exiger de leurs institutions qu'elles rejettent très clairement et très officiellement l'attribution à Dieu des appels à la violence contenus dans leurs textes sacrés.
Il est bien évident que c'est extrêmement difficile pour les juifs et les musulmans. Aussi, plus que tous les autres les chrétiens, et parmi eux plus encore les catholiques doivent se fixer cet objectif. Parce que ce sont eux qui sont les plus nombreux. Parce que ce sont eux qui ont le plus de moyens de se faire entendre (leur structure hiérarchique leur donne un porte-parole écouté sur toute la planète)… Parce que, surtout, ils ont en Jésus de Nazareth un véritable modèle à donner en exemple à tous ceux qui veulent la pacification des religions. Tout spécialement à ceux des musulmans qui sont individuellement pacifiques, et qui sont, j'en suis convaincu, très nombreux.
Il est urgent que le "jésuïsme" devienne enfin la véritable religion des catholiques.

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à Guillaume

J'ai déjà été très long et je crois que, dans ma réponse à PP je vous réponds un peu aussi. En tous cas je vous remercie pour vos compléments sur les autres points du Catéchisme. Je ne crois pas que ces points sur la légitime défense et le recours à la force militaire soient incompatibles avec ce que je demande. Il faut différencier la confirmation, la culture, la transmission d'une (selon moi) "très mauvaise croyance sur le long terme" et la nécessité de la défense occasionnelle de ceux qui sont menacés ou persécutés. Je suis par ailleurs évidemment d'accord avec vous sur les idéologies meurtrières du 20e siècle.
Mais c'est certain, vous l'aurez remarqué : je nie très fortement que, comme vous le dites, "l'Eglise multiplie les efforts pour que le 21e siècle ne soit pas un siècle de violence religieuse". Ce n'est pas vrai. Elle ne se soucie que des apparences et reste installée dans la négation de ce qui, en elle, CULTIVE, même si indirectement, la violence. Sur le dialogue interreligieux je suis encore plus sévère que Jean-Marie Muller qui en dit ceci : "Je dois avouer que j'ai très peur que le dialogue interreligieux se fourvoie dans un oecuménisme de complaisance mutuelle dans lequel la question essentielle, centrale, de la violence se trouve occultée" (dans "Désarmer les dieux", un livre de la plus grande importance, éd du Relié 2009)

Bien cordialement

Pierre Régnier

Écrit par : Pierre Régnier / | 04/02/2011

@ Pierre

> Si je comprends bien votre argumentation, pour que le catholicisme puisse, selon vous, fondamentalement et définitivement condamner la violence au nom de Dieu, il faudrait que l'Eglise renie l'Ancien Testament en raison de la violence "justifiée par Dieu" qui y est présente ? C'est bien cela ? Et en se fondant uniquement sur le Nouveau Testament, nous serions "dans les clous" ?
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Écrit par : Guillaume de Prémare/ | 07/02/2011

A Pierre et Guillaume,

> veuillez me pardonner d'intervenir dans un débat très intéressant, mais il me semble qu'en tant que chrétiens, nous recevons l'Ancien Testament au travers du Nouveau Testament. Par exemple l'épisode de la femme adultère qui aurait été lapidée selon la loi de Moïse mais qui fut sauvée par le Christ qui transfigure cette même loi. Ou l'épisode de la possibilité de répudier sa femme et l'explication que le Christ donne de la loi de Moïse à cette occasion. a mon sens, le Christ relis l'Histoire du peuple hébreux au travers du filtre de l'Amour et la loi hébraïque en est transcendée, remplaçant la violence et le jugement par l'Amour et le pardon. Mais ce n'est qu'une lecture personnelle de ce thème de la loi et de la violence dans les textes sacrés que j'ai au travers de discussions avec des amis athées. Si l'on met l'Evangile en premier, il me semble très difficile, voire impossible, de défendre toute thèse de " bonne violence" religieuse.
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Écrit par : vf / | 07/02/2011

A Pierre, Guillaume et VF

> Mais comment peut-on prétendre que la violence est le monopole des monothéismes ? C'est totalement faux et numériquement insignifiant par rapport à ce qu'on trouve chez les polythéismes et les cultes cosmogoniques. Voyez les sacrifices humains aztèques, cette industrie de la mort : épouvantables carnages de masse accompagnés de cannibalisme rituel, pour abreuver le dieu Soleil et empêcher la terre de disparaître. Les empereurs chinois faisant massacrer des populations entières. Les horribles jeux du cirque de l'empire romain, ciment de la religion impériale ! Ah ils sont charmants les paganismes et leurs "identités" que les monothéismes auraient odieusement liquidées !! A côté de ça, l'Inquisition c'est le Tribunal pénal international de La Haye. Vraiment il faut relativiser les idées toutes faites et regarder l'ensemble des civilisations, ça change les perspectives.
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Écrit par : Maxime / | 07/02/2011

@ Vf et Pierre

> Oui, c'est bien ainsi que je serais tenté d'expliquer les choses à Pierre : nous lisons et interprétons l'Ancien Testament à la lumière du nouveau. Il me semble que la révélation en Jésus-Christ change tout : "Le peuple qui marchait dans les ténèbres a vu se lever une grande lumière."
A ce sujet, il se trouve que l'abbé de Tanouarn livre un débat contradictoire demain soir à Paris avec Jean-Pierre Castel, auteur de "Le déni de la violence monothéiste".
http://ab2t.blogspot.com/2011/02/demain-mardi-un-debat-contradictoire.html
ça tombe bien car j'ai l'impression que Castel se situe sur un registre proche de Pierre qui nous interpelle sur ce blog. Dans sa note, Tanouarn dit qu'il espère qu'il n'y aura pas que des catholiques...
Pierre : voulez-vous y faire un saut et nous proposer un débrief ?
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Écrit par : Guillaume de Prémare/ | 07/02/2011

@ Maxime

> Votre commentaire me paraît juste, et il est utile de rappeler son contenu de temps en temps, ce qu'on ne fait sans doute pas assez. Cependant, bien que s'adressant à moi, entre autres, il ne me concerne pas spécialement car je ne suis pas de ceux qui "prétendent que la violence est le monopole des monothéismes".

@ vf

> A contrario votre dernière ligne résume bien mon sujet de préoccupation (et d'indignation, sentiment qui, concernant la religion, m'envahissait bien souvent avant qu'il soit devenu à la mode : lire et écouter Finkielkraut en ce moment là-dessus). J'attire simplement votre attention sur le fait que l'Eglise D'AUJOURDHUI, bien que "mettant l'Evangile en premier" trouve tout à fait possible de défendre la thèse d'une "bonne violence voulue par Dieu" puisque C'EST CE QU'ELLE FAIT.
Elle le fait très officiellement et très clairement, certes sans le proclamer, presqu'en le cachant, dans la gêne et la honte, parce qu'elle sait très bien que c'est une épouvantable, une indéfendable aberration. Mais elle le fait. Le passage 106 du Nouveau Catéchisme est explicite : TOUT le contenu de l'Ancien Testament est, selon l'Eglise actuelle, "conforme au désir de Dieu". Elle assume cette position dans les passages suivants, en expliquant qu'il faut "bien interpréter" cette conviction.
Plus encore que ces passages, la Bible annotée de Jérusalem, postérieure au Nouveau Catéchisme, assume et explicite cette "bonne interprétation". Pour prendre l'exemple le plus écoeurant : DIEU A BIEN COMMANDE AU MOINS UN GENOCIDE, celui des cananéens… mais ça s'explique très bien.
Dans le dernier des textes dont je proposais plus haut la lecture je dis pourquoi, selon moi, cette vieille habitude de vouloir défendre l'indéfendable par une "bonne interprétation" - contre ceux qui font une "mauvaise lecture" des Ecritures - est une monstrueuse tricherie supplémentaire. Mais c'est un fait que, en matière religieuse, les croyants, aussi bien que les "bouffeurs de curés" qui les accusent des plus grands maux acceptent depuis toujours sans broncher cette horrible malhonnêteté des théologiens. Elle fait en quelque sorte partie du "mystère" religieux, lequel permet ce qui ne serait pas toléré dans la vie profane.
Allez par exemple, dans un meeting ou sur sur les tracts d'une campagne électorale, transposer et assumer une trilogie comparable à la trilogie criminogène des religions : 1/ Untel est l'homme politique qui pense juste. 2/ Il appelle (ou a appelé) explicitement les adeptes de sa doctrine à massacrer des gens (en allant jusqu'à les désigner clairement). 3/ Il faut obéir à ce politicien qui pense juste. Vous savez comme moi que, même s'il ajoutait qu' "il faut bien interpréter" ses consignes ce politicien tomberait immédiatement sous le coup de la loi, serait arrêté et sévèrement jugé.

@ Guillaume

C'est donc bien vous qui résumez (presque) correctement, dans votre commentaire du 7 février, le problème que je pose, et l'objectif que je propose.
"Presque" seulement, parce que vous n'utilisez pas le bon terme : pour les catholiques il ne s'agit pas de "renier" l'Ancien Testament, il s'agit d'obtenir des institutions dirigeant l'Eglise qu'elles cessent de stigmatiser "ceux qui en font une mauvaise lecture" et qu'elles reconnaissent que ce sont elles, les institutions dirigeantes, qui doivent changer leur manière de voir (points 2 et 3 de mes 9 propositions de décembre 2006, voir ci-dessus).
C'est la conception de la "Parole de Dieu" qui est mauvaise. Les chrétiens devraient considérer que, dans leurs écrits sacrés, elle n'est QUE dans les appels faits aux hommes à réaliser, à épanouir, à servir ce qu'ils ont de meilleur en eux-mêmes, pour eux-mêmes - en termes catholiques : afin de réaliser leur salut individuel - et pour le "vivre-avec-les-autres". La "Parole de Dieu" n'est évidemment pas dans l'appel à massacrer les cananéens ; Dieu n'est pas content quand, "pour plaire à Dieu" le bon prophète Elie égorge 450 faux prophètes, etc…
Mais cela n'implique pas nécessairement de "renier" l'AT. Les chrétiens peuvent parfaitement continuer de le considérer comme partie intégrante de leurs Ecritures sacrées, CONTENANT LUI-MÊME des progrès importants, significatifs, vers "l'ultime message" du plus merveilleux des prophètes juifs, Jésus (qu'ils peuvent parfaitement continuer de considérer qu'il est lui-même "Dieu fait homme"). Par exemple, dans le Décalogue Yahvé se déclare par la voix de Moïse "un Dieu jaloux, châtiant la faute des pères sur les fils, sur la troisième et sur la quatrième génération" (Ex 20). Mais plus tard Jérémie (Jr 31, 29) et surtout Ezéchiel (Ez 18 et 33,10) modifient cette conception et établissent la nouvelle règle, celle de la "rétribution personnelle", inclue dans la Nouvelle Alliance: "Qu'avez-vous à proférer ce dicton en terre d'Israël: "Les pères mangent du raisin vert, et les dents de leurs fils sont agacées" ? …/… La personne qui pèche c'est elle qui mourra" (Ez 18).
C'est là une avancée importante des "chercheurs de Dieu", dont il faut enfin reconnaître la véritable nature, le véritable statut. Ils ne sont absolument pas, comme le dit le Catéchisme, "ces auteurs humains qui, dans leurs écrits, parce qu'ils sont inspirés par Dieu, enseignent sans erreur la vérité salutaire, tout ce qui était conforme au désir de Dieu ET CELA SEULEMENT".
On peut le dire autrement (c'est-à-dire aussi, j'en suis bien conscient, de manière plus brutale, plus "insupportable" encore pour de nombreux chrétiens) : Les croyants doivent délibérément détruire leur vieille trilogie de base, divinisation / sacralisation / dogmatisation de pensées et d'actes à caractère humain contenus dans leurs textes sacrés.
Car c'est cette trilogie qui a engendré tous les désastres à base religieuse depuis les débuts du monothéisme jusqu'à nos jours. Et, contrairement à une vieille certitude (que leurs institutions religieuses se plaisent à conforter), ce sont d'abord les croyants qui, aujourd'hui comme hier, ont en quelque sorte "des comptes à rendre à la société profane" et non pas l'inverse. La société profane, qui inclut tous les humains, qu'ils soient athées, agnostiques, croyants ou indifférents en matière religieuse se trouve aujourd'hui devant la violence islamique comme devant une impasse. Pour qu'elle cesse d'en être une il faut reconnaître qu'elle a bien pour base le texte sacré de l'islam MAIS AUSSI, que celui-ci n'est que la forme la plus aboutie et la plus terrible de la théologie criminogène.
C'est donc celle-ci qu'il faut combattre DANS TOUTES les religions si on veut avoir une chance de la faire disparaître de celle qui entend la mettre en application jusqu'à la domination d'Allah sur la terre entière.
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Écrit par : Pierre Régnier/ | 08/02/2011

LE CROYANT EST INFANTILE, INTOLERANT ETC

> quelle est l'utilité de ressusciter les morts?
le dieu des musulmans et celui des chrétiens ou des juifs est mort et bien mort.
Ces combats d'arrière-garde pour prolonger des dogmes stupides et médiévaux, par nature aliénant et infantilisant l'homme, sont du temps de perdu...
les monothéismes, par nature intolérants, vont disparaître.
Mais le croyant, qui est un enfant qui ne peut vivre sans son papamamandieu, s'accroche à ses hochets pour ne pas être abandonné, car il a fondamentalement peur de la solitude.
L'univers est indifférent à l'homme (pas hostile nécessairement, mais indifférent): comme il l'a été aux dinosaures, maîtres de la planète il y a 65 millions d'années.

MG


[ 15 h 15 - De PP à tous :
1. Qui d'entre nous se reconnaîtrait dans ce portrait du croyant ?
2. Mais comme il n'y a pas d'effet sans cause, qu'est-ce qui - dans certaines façons de se dire chrétien - a pu créer cette image du croyant ? ]

réponse au commentaire

Écrit par : MG / | 30/03/2012

> De PP à MG - 15 h 30 - Ne vous étonnez pas que votre second message soit allé à la corbeille : il était d'un niveau à me faire regretter d'avoir publié le premier. En outre, je vous trouve bien impatient pour un ami des dinosaures.
______

Écrit par : PP à MG / | 30/03/2012

IMMENSE DECALAGE ENTRE LE CORAN ET LA BIBLE

> Il est intéressant de redécouvrir ce document après la si triste affaire de Toulouse!
Ce qui frappe en en lisant le Coran, ce n'est pas d'abord la violence, car, de fait, il y en a dans l'Ancien Testament, et en particulier dans le Pentateuque, la seule partie de l'AT dont il se réclame, même s'il cite David et Salomon perdus dans une distorsion du temps 14 siècles, puisqu'il assimile Marie (Myriam), la soeur de Moïse et d'Aaron avec Marie mère de Jésus.
Non ce qui nous choque par différence avec la Bible, c'est sa sècheresse:
-abondance du vocabulaire de rétribution : récompense et châtiment,
-abondance du vocabulaire de crainte et de terreur,
-abondance du vocabulaire de dénonciation,
-différence dans le vocabulaire exprimant la bonté, de Dieu ou des hommes : le Coran met l’accent sur l’indulgence (l’emploi du mot miséricorde étant voisin dans le contexte) de Dieu, le NT sur la grâce,
-faible considération de la création : vocabulaire botanique et animalier réduit,
-faible considération de l’activité humaine : peu de références aux métiers, à la musique,
-moindre considération des relations entre les hommes, parenté et convivialité, le paradis est un lieu de délice solitaire ou l’élu se fait servir et non les retrouvailles d’une noce autour du Seigneur.
Il y a un immense décalage entre les deux visions des relations entre Dieu et les hommes, et entre les hommes.
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Écrit par : Pierre Huet / | 30/03/2012

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