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23/01/2011

Alerte à la crise alimentaire provoquée par la spéculation – Oui à la "gouvernance mondiale de l'agriculture et de l'alimentation" réclamée par le pape


 

Par Vittorio de Filippis, ce dossier d'alerte à lire in extenso. Extraits :


<<  ...Blé, maïs, café, sucre, huile de palme… La plupart des matières premières agricoles voient leurs cours s’envoler. Le blé a plus que doublé depuis la fin juin, il se rapproche de son plus haut historique de 300 euros la tonne, atteint pendant l’été 2008. La hausse s’est accéléré l’été dernier, comme si les opérateurs sur les marchés de Chicago et de Londres […] pariaient sur une augmentation imminente des cours mondiaux des produits agricoles. Des comportements qui ont suivi l’envolée du cours du blé dans le sillage des incendies en Russie cet été. […] «Les conditions d’une nouvelle crise alimentaire sont réunies, insiste Olivier de Schutter [FAO]. D’autant plus que, comparé à 1990, le nombre de pays dépendants des importations de matières premières agricoles n’a cessé d’augmenter. Depuis 1990, la quarantaine de pays les moins avancés a vu le total de ses importations de produits agricoles multiplié par six… Il est temps de mettre le paquet sur le développement des cultures vivrières.»

...La spéculation financière qui n’a pas fini d’enfler depuis le début des années 2000. A l’époque, producteurs et consommateurs de matières premières agricoles sont rejoints sur les marchés de Chicago ou de Londres par de nouveaux acteurs : les investisseurs institutionnels. Ce sont eux, fonds de pensions et autres banques d’affaires, qui ont découvert qu’ils pouvaient placer leurs formidables avoirs monétaires sur le blé, la viande, le pétrole, le sucre, le riz… Ce qui en fait des responsables idéaux ? «Non, ces investisseurs ne sont pas responsables de cette envolée des prix, car la spéculation est nécessaire, notamment pour se protéger des aléas», affirme l’économiste Philippe Chalmin. Ce à quoi répond Olivier de Schutter : «Mais quand un fonds britannique peut à lui seul parier 1 milliard d’euros sur le marché du cacao, espérant ainsi pousser à la hausse les cours de la fève et empocher la différence entre le cours d’achat d’aujourd’hui et le cours de vente de demain, alors là c’est de la pure spéculation, Or, cette finance-là pèse pour plus de la moitié des opérations financières liées aux matières premières.» [1]

Cette année, la France, à la présidence du G20, brandira une fois de plus sa «moralisation» de la finance mondiale. «Il nous faudra convaincre de la nocivité des produits dérivés sur les marchés des matières premières agricoles, confie un haut fonctionnaire qui planche sur le dossier. Quand les prix augmentent, à cause de cette spéculation purement financière, certains producteurs font tout pour contenir leur offre espérant ramasser encore plus demain, lorsque les prix seront plus élevés. Les dérivés sont un amplificateur de volatilité des cours. Personne n’y gagne, si ce n’est ceux qui font de la spéculation pour la spéculation.»  >>


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[1] De Schutter rive son clou à Chalmin. Mais une fois de plus, c'est le catho français de service qui sert d'avocat aux fonds spéculatifs ! Quand ces cathos-là se lasseront-ils de dire le contraire du Magistère ? Et quand cesseront-ils de nier la réalité ? On attend des "Observatoires socio-politiques" qui naissent dans des diocèses qu'ils ajustent enfin le discours franco-français à la parole de l'Eglise, sans hésiter à rompre (enfin) avec le bla-bla catho-libéral rabâché depuis trente ans.

 

 

L'interview du directeur scientifique de l'Inra (par Vittorio de Filippis) :

 

<< Directeur de recherche, Hervé Guyomard est aujourd’hui directeur scientifique «agriculture» à l’Institut national de la recherche agronomique (Inra). Il a participé à l’étude Agrimonde  : scénarios et défis pour nourrir le monde en 2050, qui vient d’être publiée aux éditions Quae.

Depuis les émeutes de la faim de 2008, rien n’a changé. Pourquoi ?

La crise alimentaire de 2008 a fait prendre conscience que nourrir la planète n’est pas simple. Néanmoins, les déclarations politiques de 2008 pleines de bonnes intentions n’ont pas été suivies d’actes à la hauteur du problème, le monde ayant été emporté dans la crise financière, bancaire et économique. Il reste une divergence profonde entre, d’un côté, ceux qui pensent que le marché peut tout, et, de l’autre, ceux qui estiment qu’il est impossible de nourrir toute la planète tant que nous n’aurons pas mis en place une régulation digne de ce nom.

...C’est principalement un problème d’accès aux denrées alimentaires, donc lié à la pauvreté et exacerbé lorsque les prix des produits agricoles s’envolent, comme ce fut le cas en 2008.

Quelle régulation défendez-vous ?

Celle qui limite la volatilité excessive des prix agricoles. Car une telle volatilité présente des inconvénients pour tout le monde : trop élevés, les prix pénalisent les consommateurs ; trop faibles, ils appauvrissent les producteurs et découragent les investissements nécessaires en agriculture.

...Il existe bien des stocks de céréales, de viandes ou encore de produits laitiers dans certains pays. Mais pas encore de système coordonné de stockage mondial des produits agricoles pour faire face aux situations d’urgence et répondre aux besoins des pays les plus pauvres quand les prix agricoles s’envolent. […] On pourrait mettre en place une sorte de banque centrale mondiale des denrées alimentaires, indépendante des Etats et qui déciderait de son propre chef quand, où et comment intervenir, avant que les crises ne soient là.

Ce qui suppose une gouvernance mondiale…

Oui, c’est une condition nécessaire. Il faut une coopération des principales puissances agricoles et, bien sûr, des ressources budgétaires suffisantes.

Quoi qu’il en soit, il faudra augmenter la production mondiale…

Nous serons 9 milliards en 2050, et nous sommes déjà 7 milliards aujourd’hui. Nourrir ces 9 milliards de personnes est possible sous quatre conditions. Primo, ne pas généraliser le modèle occidental de consommation alimentaire à toute la planète et notamment réduire les 25 % de pertes et de gaspillages à la distribution et consommation finale. Secundo, augmenter la production agricole tout en respectant l’environnement ; dit autrement, mettre en place une agriculture à la fois productive et écologique. Tertio, augmenter les échanges agricoles, en provenance d’Amérique latine, d’Amérique du Nord et d’Europe, à destination de l’Asie et l’Afrique. Ces deux continents où les augmentations de population seront élevées auront besoin d’importer pour se nourrir. Il faudra donc, et c’est la quatrième condition, sécuriser ces échanges. On en revient alors à la nécessaire mise en place d’une gouvernance mondiale de l’agriculture et de l’alimentation. >>

 

Commentaires

DE SCHUTTER OUI, BOUTIN BOF...

> Olivier de Schutter est un type passionnant !
Hélas, il prêche dans le désert. Encore un dangereux 'gauchiste'.
Pendant ce temps, Christine Boutin rend son rapport sur la mondialisation.
Je l'ai entre les mains, et c'est... bien plat et consensuel : aucune voix divergente.
Pour que tout change, ne changeons rien.
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Écrit par : PMalo | 23/01/2011

LEGERS

...Et le Christ qui ne prenait pas le temps de manger tant il était accaparé par des foules affamées de sa Présence était considéré comme fou par sa famille (Evangile d'avant-hier): bousculer les traditions pour répondre aux urgences d'aujourd'hui, quitte à passer pour fou par les siens, what else? On n'a pas idée de ce que l'on peut être taxé de "déséquilibré(e)" parce qu'on ne respecte pas les codes alimentaires implicites de notre tribu, et pourtant combien d'enfants et adultes à "appétit de moineau" en excellente santé, quand même un léger surpoids peut entraîner des ennuis de santé: n'ayons pas peur dans nos pays de manger moins, de redécouvrir la faim joyeuse, de retrouver le goût des saveurs simples du pain, des fruits,du lait et du miel! Dans le film "Into the wild" (excellente cure de désintoxication consumériste), le monologue du héros avant de croquer sa pomme: à voir et revoir...
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Écrit par : Anne Josnin/ | 23/01/2011

CONTRE LE GASPILLAGE OCCIDENTAL : LE LIVRE DE VADROT

> Avez vous lu le livre "Des fraises en hiver" de Claude Marie Vadrot ?
C'est un tour d'horizon assez spectaculaire. Après, vous ne mangez plus de certains poissons, vous épluchez les étiquettes de provenance, il est très instructif.
Je travaille dans le secteur de l'horticulture et ce qui est dit dans le chapitre sur cette question est vrai, alors sans doute le reste aussi. Le gaspillage que nous faisons à tous les stades (production, commercialisation, puis jetage dans nos poubelles) est tout simplement abominable. On aurait les moyens dès aujourd'hui de nourrir tout le monde.
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Écrit par : FL/ | 24/01/2011

> Une présentation du livre par l'auteur
http://www.wwf.fr/s-informer/actualites/des-fraises-en-hiver2
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Écrit par : FR: | 24/01/2011

SINON

> c'est pourquoi les Européens ne doivent pas renoncer à une politique agricole commune comme le voulait l'Allemagne (qui n'est pas une puissance agricole et trouve que cela coute cher) car alors ns serions dépendant de nos importations. Celui (les USA soyons francs)qui nous vendra notre nourriture nous mènera par le bout du nez.
Une gouvernance mondiale sur ce point, oui. Une vraie. Indépendante. Celle à laquelle appelle le pape.
Il faudrait être très attentif à ce que cela ne soit pas, ne devienne pas, une gouvernance de grands groupes, ou alors une gouvernance US ou bien chinoise ou autre, sous couvert d'une instance mondiale. Si c'est pr avoir une Union Européenne à l'échelon mondial, un Barroso mondial, non merci !
L'idée est excellente alors raison de plus pr être attentif à ce que ce soit elle qui soit mise en place et pas un camouflage.
En effet, depuis qq tps, on assiste à une manoeuvre très habile d'habillage de mots écolo de pratiques ultra libérales. Il ne faut pas se payer de mot et être très attentif.
Il est grotesque de faire de la pub sur le côté bio de la production de fraises chiliennes vendues en France ! certes elles sont bio, mais elles n'ont pas voyagé jusqu'ici en bateau à voile !
Non au faux-bio !
Le faux bio qui est une variante de surconsommation. le vrai bio c'est consommer avec raison. Est-il raisonnable de consommer autant de fruit en hiver qu'en été ?
Non aux ampoules basse conso, aux panneaux solaires fabriqués... en Chine! ds des conditions merdiques pr les ouvriers, polluantes et acheminées jusqu'à nous par bateaux pourris !
Sinon, j'ai proposé à ma boite de diminuer le nombre d'entrées et desserts au choix ds mon resto d'entreprise... pas de réponse.
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Écrit par : zorglub/ | 24/01/2011

GREENWASHING

> Le bio de grande surface est la nouvelle version du "greenwashing" ou de ce que l'on pourrait aussi appeler "la moralisation de la grande distribution". La production, pour respecter vraiment l'environnement doit être saisonnière et locale. Mais le pic de pétrole risque de changer la donne dans peu de temps. A moins qu'on en rajoute une couche dans la destruction avec le gaz de schiste.
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Écrit par : vf/ | 24/01/2011

> Bref, non au greenwashing (Dédé pour les intimes).
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Écrit par : PMalo/ | 24/01/2011

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