01/12/2010
Le pape et le préservatif : une avancée du Magistère
02:57 Publié dans Témoignage évangélique | Lien permanent | Commentaires (19)
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Commentaires
CHÈCHE
> D'où le tombereau d'insultes stupides déversées contre ce journal par les sites à chèche.
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Écrit par : morok/ | 01/12/2010
AVANCEE
> Pourquoi parler d'avancée du Magistère alors que ça n'en est pas une ? Déjà parce que le Magistère n'a pas pour vocation à traiter des cas particuliers mais à montrer la voie. Ensuite parce que le Saint-Père n'a rien dit de nouveau.
Si donc il y a avancée, c'est plutôt au niveau de la communication du Saint-Père. Là, il semblerait effectivement qu'il y ait évolution. Benoît XVI a décidé, au cours d'un entretien privé, de traiter un cas particulier de casuistique montrant par là que les questions de morale sont plus compliquées qu'il n'y paraît et que cette complexité est connue de l'Église et prise en compte par elle. En effet, c'est une nouveauté de voir le Saint-Père s'exprimer à ce sujet. Mais rappelons tout de même que ce livre n'a rien d'une déclaration officielle du Magistère. Il s'agit juste d'un livre d'entretiens et il faut arrêter d'en faire une sorte d'encyclique sur la question.
Bref, je trouve que beaucoup font de ce livre une sorte de mini révolution dans la doctrine de l'Église ce qui me semble être une ineptie. S'ils connaissaient mieux la doctrine de l'Église, ils verraient que Benoît XVI n'a fait que dire ce qui se fait déjà depuis des siècles en matière de casuistique. Et le fait qu'un pape le dise, au cours d'un entretien privé rappelons-le, n'a rien de sensationnel.
X.
[ De PP à X. - Je vous suggère de lire la note de Guillaume de Prémare (Urgence Com'catho) et l'article de Jean Mercier dans 'La Vie'. Il y a indiscutablement une avancée. La suffocation de certains suffirait à le montrer. Et pourquoi tiquer devant le mot "avancée" ? La pensée de l'Eglise ne cesse d'avancer depuis deux mille ans. L'Eglise est immuable, pas immobile. ]
réponse adressée au commentaire
Écrit par : Xavier / | 01/12/2010
CLARIFICATION
> Eh oui, les voilà d'accord avec Ecône plus qu'avec le pape, même s'ils n'osent pas le dire clairement. Les choses se clarifient. A force de ramener le christianisme à des questions de morale (et quelle morale !), on finit par trahir le Christ. Et par dire le contraire du Magistère, tout en prétendant parler comme lui voire mieux que lui. Comme disait l'an dernier Michou Pursayeux : "Le pape consulte-t-il notre site ?"
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Écrit par : Bernard Gui / | 01/12/2010
COMPLEXE, OUI, MAIS...
> "Indiscutablement", pouvons-nous dire cela sur un sujet aussi complexe ?
Première remarque : en ce qui concerne la morale, il n'y a pas un langage unique pour dire les choses ; on peut viser la même chose avec des langages différents, toujours imprécis, ce qui n'est pas très étonnant quand on se souvient que la morale est la science de la liberté.
Deuxième remarque : le Magistère est prophétique, il dit des choses justes mais parfois mal fagottées (Humanae Vitae, dont JPII partageait les vues mais pouvait regretter des justifications qui auraient pu être mieux venues).
En l'occurrence, les justifications données par MM. de Prémare et Mercier s'appuient sur une casuistique. C'est une voie possible et légitime.
Mais d'autres langages sont possibles et éclairent les choses un peu autrement, en utilisant le langage de l'objet de l'acte (langage de la partie III du CEC, n°1750 par exemple).
L'avantage de ce langage est de ne jamais voir l'acte réduit à sa matérialité. L'objet de l'acte est indissociablement matériel ET spirituel : l'acte, en quelque sorte, un corps (sa matérialité) et une âme (son intention). L'objet est aussi appelé objet moral, pour bien voir qu'il n'est pas un objet seulement matériel.
Couper une jambe n’est pas en soi un objet moral: sauver quelqu’un en lui coupant la jambe est un objet moral (amputation médicale, bonne) ; mutiler quelqu’un en lui coupant la jambe est un autre objet moral (mauvais). La même matérialité peut correspondre à plusieurs objets moraux, qui dépendent de l’intention du sujet agent.
La contraception, comme le magistère l’a discerné dès Humanae Vitae, est un objet moral intrinsèquement mauvais.
Le préservatif n’est pas en lui-même un objet moral. Pour éviter la confusion, les papes n’en ont donc parlé que parcimonieusement.
- son utilisation peut être contraceptive (objet moral) et le Magistère s’est alors prononcé une fois pour toutes contre ;
- son utilisation peut ne pas être contraceptive : c’est évidemment le cas dans l’exemple du prostitué mâle. Le Magistère relatif à la contraception n’est alors pas concerné. Le cinquième commandement s’applique : tu ne tueras point. Je fais le mal dans la fornication : je n’y ajoute pas le mal de la mise en danger d’autrui.
Reste que le préservatif est si peu fiable et est un tel véhicule idéologique qu’il cause globalement un grand nombre de victimes. Mais dans un cas particulier, il peut éviter une victime supplémentaire.
Réfléchir à l’objet moral (qu’est-ce qui est objectivement voulu quand je fais ce que je fais) est difficile et indispensable, car, selon la doctrine constante, la conscience a le double devoir de suivre sa conviction et d’éclairer celle-ci, notamment par l’écoute des préceptes de l’Eglise.
Le pape nous invite par conséquent à approfondir notre réflexion, pas à nous jeter des anathèmes dans un domaine aussi délicat.
Et tous, nous sommes invités à dépasser la lettre, la matérialité des choses.
J.
[ De PP à J. - Vous avez sûrement raison, mais la théorie ne résoud pas le problème. L'espèce de panique qui a saisi certains milieux catholiques devant un passage de "Lumière du monde", comme devant un passage de "Caritas in Veritate", montre qu'il y a aujourd'hui quelques désinfections à faire sur quelques attitudes. C'est la condition pour pouvoir reprendre tous ensemble la marche en avant. Ne nous le cachons pas : on ne guérit pas un abcès en énonçant des théorèmes. ]
réponse adressée
Écrit par : Jean / | 01/12/2010
@ Bernard Gui
> Vous dites "les voilà d'accord avec Ecône".
Je pense qu'il y a une distinction à faire :
- Ecône a clairement faire savoir son désaccord avec le fond des propos du pape, sans non plus en faire un "casus belli".
- D'autres catholiques sont davantage gênés qu'opposés. Ils sont d'accord sur le fond des propos, mais ils auraient préféré le maintien du statu quo antérieur qui établissait la frontière parole publique/conseil privé. C'était la ligne de JPII... BXVI est passé outre ce statu quo, à mon avis librement et consciemment, parce qu'il a jugé cela nécessaire. L'affaire est encore tout chaude : peut-être faut-il un peu de temps, tout simplement ?
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Écrit par : Guillaume de Prémare / | 01/12/2010
à Guillaume de Prémare
> Sans aucun doute. Faisons confiance à l'Esprit Saint. Cependant je constate que certains ont réagi de travers aux propos du pape, comme vous le soulignez vous-même, en semblant crispés possessivement sur ce combat piteux contre la capote... combat dont ils ont peur d'être dépossédés... combat qui n'en est même pas un d'ailleurs, plutôt une réunion entre amis et clones, loin de la population qui se sert de la capote... Ils feraient mieux d'évangéliser, et ce n'est sûrement pas sur ce terrain-là qu'ils y arriveraient si ça les intéressait. Mais évangéliser ne les intéresse pas car ça éloigne de ce qu'ils prennent pour de la politique.
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Écrit par : Philippe Jan / | 01/12/2010
CEUX QUI...
> Remarquez que ceux qui essaient de minimiser le propos du pape sont aussi ceux qui voudraient qu'on ne parle plus des prêtres pédophiles, ou qui auraient même voulu qu'on n'en parle jamais. Sans voir que cette affaire a été un ravage dans l'opinion mondiale. Le pape, lui, le voit. Et il en parle et en reparle, à des cardinaux qui auraient mieux aimé eux aussi qu'on enterre le problème !
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Écrit par : Fanch / | 01/12/2010
@ Jean
> Je précise que je n’ai pas voulu faire un traité de théologie sur la question, je n’en suis pas capable. Vous dites : « En l'occurrence, les justifications données par MM. de Prémare et Mercier s'appuient sur une casuistique. C'est une voie possible et légitime. »
En fait c’est le pape qui, semble-t-il, amorce une démarche casuistique, souhaitant peut-être ouvrir un chemin. Peut-être que le pape souhaite rendre communicable ce qui, en l’état actuel des choses, ne l’est pas. La casuistique est une chose très communicable. En revanche, si vous voulez rendre communicable le « langage de l’objet et de l’acte », c’est plus compliqué. Cela n’exclut pas que des théologiens travaillent sur le « langage de l’objet et de l’acte », cela n’exclut pas de « réfléchir à l’objet moral ».
Dernier point : vous écrivez « Le pape nous invite par conséquent à approfondir notre réflexion, pas à nous jeter des anathèmes dans un domaine aussi délicat. » Je suis d’accord.
NB : J’ai entendu quelqu’un évoquer une autre piste : appliquer l’ancienne « doctrine de tolérance ». Qu’en pensez-vous ?
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Écrit par : Guillaume de Prémare / | 01/12/2010
PARDON...
> L'article de M. Mercier est intéressant mais, pardon, rien dans les réponses de Mgr Burke ou du Père Anatrella ne laissent à penser que ceux-ci seraient mal à l'aise ou en porte à faux avec le Saint Père sur cette question. Citer deux phrases de la longue interview donnée par le P. Anatrella, dont les réponses sont parfaitement claires, pour tenter de mettre au jour un désaccord qui n'existe pas est vain.
En outre, il faudrait arrêter de brandir la loi de gradualité comme une sorte de "joker". Il convient de l'énoncer de façon juste puisqu'elle a trop souvent été comprise, malheureusement, comme la gradualité de la loi. En tout cas, son corollaire n'est évidemment pas de mettre en évidence une "faille dans le système" du Magistère (curieuse formulation pour un croyant) !
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Écrit par : Thomas / | 02/12/2010
à Guillaume de Prémare
> En quoi consiste cette "doctrine de tolérance"?
Il me semble, à moi qui n'y connais rien en théologie, que Benoît XVI remet en perspective la loi par rapport à sa finalité: le service de la vie. Il se trouve que beaucoup de catholiques fidèles l'ont été en se raidissant sur la lettre, pour ne pas "tomber" dans le péché, avec un scrupule stérilisant parfois leurs inclinations naturelles, que ce soit le désir amoureux, la pitié, le bon sens, présupposés pourtant je crois dans l'approche traditionnelle de la morale chrétienne, mais on n'en parlait même pas tellement c'est évident. Sauf que cela ne l'était plus du tout. Moi qui vis à titre personnel un échec familial, l'évangile de ce jour de la maison bâtie sur le roc me travaille ô combien depuis quelque temps déjà. Je vois dans le petit monde des catholiques "fidèles" nombre de familles imploser, et pourtant tout, dans les formes, avait été respecté, très scrupuleusement. Où est ce roc sur lequel tout le monde désire bâtir sa vie? En tous les cas pas dans un Christ désincarné et intellectualisé, rationalisé grand juge universel( ce qui a "fabriqué" des milliers de chrétiens à l'attitude infantile, attendant tout des décisions d'une Eglise tutélaire et de ses représentants parfois auto-proclamés, qui aille jusqu'à leur dire quel film regarder le soir à la télé.... Peut-être est-ce la conséquence de cette dérive que Tocqueville voyait dans la démocratie, qui se serait répandue dans l'Eglise ? Servir la vie signifie aussi permettre à chacun de prendre très concrètement sa vie en main, en adulte, avec au coeur cette certitude, non que nous ne nous trompions guère (cela c'est l'idéal orgueilleux de Descartes, évacuer l'erreur), mais que le Christ, au travers son Eglise, nous fait confiance.
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Écrit par : Anne Josnin / | 02/12/2010
DOCTRINE DE TOLERANCE
De saint Thomas d’Aquin :
« La loi humaine régit une société dont beaucoup de membres n'ont guère de
vertu ; or elle n'a pas été faite seulement pour les gens vertueux. La loi ne peut donc réprimer tout ce qui est contraire à la vertu, elle se contente de réprimer ce qui tendrait à détruire la vie en commun ; on peut dire qu'elle tient tout le reste pour permis, non qu'elle l'approuve, mais elle ne le punit pas » (Somme Théologique, IIa IIae, q. 77, a. 1, 1um).
« Le droit positif vise à titre principal le bien commun de la multitude. Or il arrive
parfois que si quelque mal est empêché, il en résulte un très grand dommage pour la communauté, et c'est pourquoi le droit positif permet parfois une chose par égard pour l'ensemble, non parce qu'il serait juste d'agir ainsi, mais pour que la communauté n'en souffre pas un plus grand détriment » De Malo, q.13, a.4, 6um. (cf. aussi Somme Théologique, Ia IIae q. 91, a.4, c. 4° ; q. 78, a. 1, 3um).
« La loi humaine ne peut exiger des hommes une vertu parfaite, qui ne serait le fait que d'une élite, et qu'on ne pourrait trouver dans le peuple si nombreux que la loi doit contenir » (Somme Théologique, IIa IIae, q. 69, a.2, 1um ; cf. Ia IIae, q. 96, a.3, 1um).
Remarque : cette doctrine s’applique aux politiques publiques. Le pape s’est situé sur le terrain d’un cas particulier. Mais l’ancienne doctrine de tolérance peut faire réfléchir sur la manière dont l’Eglise appréhende les politiques publiques de prévention du Sida. Et cette question de la prévention la regarde de près (1 malade sur 4 soigné dans une institution catholique).
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Écrit par : Guillaume de Prémare / | 02/12/2010
@ Philippe Jan
> Les nombreux échanges que j’ai eus ces derniers jours avec des personnes aux réactions diverses m’ont convaincu que nous avons besoin de parler et de réfléchir ensemble, pas nécessairement de créer deux camps.
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Écrit par : Guillaume de Prémare | 02/12/2010
A GDP :
> j'ignorais cette doctrine de St Thomas d'Aquin, mais j'y retrouve les fondements même de la réflexion développée par Maritain à propos de la démocratie. C'est extrêmement éclairant, me semble-t-il, sur la manière dont nous pouvons aborder notre implication "en chrétiens" en politique. Car si l'on dépasse les questions de moeurs pour se concentrer sur le seul "vivre ensemble" et sur le "bien commun" dans un contexte de déchristianisation avancée, il semble que les pistes proposées par une certaine gauche radicale (objection de croissance, écolos, parti de gauche etc...) soient celles qui, actuellement, correspondent le mieux à la Doctrine Sociale de l'Eglise et à l'esprit évangélique.
Pour le reste, c'est-à-dire, comme le dit St Thomas, "la vertu", elle n'en est pas moins un idéal pour tout chrétien, idéal qu'il s'agit moins d'imposer que d'exposer aux autres, notamment par la belle pédagogie de l'exemple. Et cela relève moins du projet collectif que du chemin individuel.
La vertu doit être désirée et non subie, quand la recherche de l'accomplissement du bien commun au plan humain justifie certainement parfois l'usage de moyens plus coercitifs ainsi que certaines compromissions...
Cette doctrine est également un excellent outil pour renouer avec les racines d'une laïcité bien comprise (laïcité qui, il est malheureusement souvent nécessaire de le rappeler, est un concept que l'activité théologique séculaire, seule, a pu permettre de formuler...).
Quoiqu'il en soit, merci à GDP pour nous rappeler la grande modernité de la pensée de ce grand Docteur de l'Eglise.
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Écrit par : blanche / | 02/12/2010
@ Guillaume de Prémare
> Dans le champ de la personne, la doctrine de tolérance (normalement plutôt applicable au champ politique) pourrait se relier par exemple à l'évangile du bon grain et de l'ivraie. La frontière entre le bon grain et l'ivraie passe par le coeur de chacun, la loi n'est pas faite pour couper la seconde au risque du premier. Dans l'éducation, nous appliquons assez spontanément ce principe : l'intériorisation de la loi passe par l'expérience personnelle, et nous laissons facilement des enfants « faire leurs expériences » -quand cela ne les met pas en danger.
Nous devons faire l'expérience d'une liberté que la loi vient secourir comme une ligne de vie aide le montagnard dans le danger, et non celle de l'obligation extérieure et incompréhensible. Dieu nous donne une vie entière pour comprendre cela. Il me semble ainsi que la doctrine de tolérance est rattachable à la miséricorde, à l'amour rédempteur, au coeur de la foi chrétienne.
Le premier principe de Don Bosco était de toujours désigner le bien, afin que ses jeunes puissent avoir toujours une espérance, prendre confiance. Saint Jean Bosco, qui n'a jamais désespéré d'aucun enfant, est me semble-t-il un exemple intéressant de tolérance.
Ce n'est pas ainsi que le mot tolérance s'emploie couramment aujourd'hui ; suivant les cas, il s'applique :
- à la conscience moderne, pour laquelle la norme de la tolérance s'incarne en elle-même ;
- à l'indifférence (fais ce que tu veux, je suis tolérant, et je me félicite moi-même de mon ouverture et me lave les mains, puisque tu es libre : la jeune génération commence à entrevoir que le refus de l'exigence de la part des parents n'est pas, loin de là, toujours signe d'amour de leur part).
Revenons au coeur du sujet : est-ce vraiment "plus compliqué de rendre communicable le langage de l'objet de l'acte" ? L'intériorité nous serait donc terra incognita, et nous aurions besoin de grilles extérieures ?
Il me semble que le langage de l'objet de l'acte, qui reconnaît la double nature de l'acte (corps et âme), est au contraire plus intuitif qui celui de la casuistique, qui est plus conceptuel.
A cinq ans, l'enfant sait bien la différence entre avoir fait exprès ou non. Il a fait l'expérience que son acte est l'expression de son intériorité.
A douze ans, celui qui a vu Ben-Hur comprend très facilement la question : s'il n'a pas fait exprès de faire tomber la tuile, il n'est simplement pas un meurtrier.
Que le CEC ait parlé en termes d'objet de l'acte n'est pas un hasard, et peut-être pas une erreur de communication. Réfléchir à l'acte en ces termes nous aide à comprendre mieux ce que nous sommes nous-mêmes en tant qu'hommes ("un et duel", dit Deus caritas est), et le mystère de l'incarnation. Voilà pourquoi c'est le langage à mon sens privilégié quand nous voulons aider, par exemple, des enfants à grandir, pour devenir des "coeurs qui voient".
Ce langage a également le mérite de ne jamais occulter la possibilité toujours offerte de faire le bien, c'est-à-dire qu'il ne signifie à personne que le bien est hors de sa portée. Dieu se met toujours à notre portée : le bien est toujours possible, le mal, même moindre, jamais nécessaire.
Pourquoi insisté-je sur quelque chose qui pourrait n'être que façon de parler ? Parce qu'il me semble discerner que les « deux camps » (ceux qui disent qu'il y a une avancée et ceux qui disent que le pape n'a rien dit) partent subrepticement du même principe (comme le capitalisme et le communisme partaient subrepticement du principe matérialiste, bien que le capitalisme soit né dans des états de droit, ce qui a limité un certain temps ses dégâts).
Ce principe consiste à parler en termes de matérialité (en utilisant le terme « préservatif »), en mettant chacun derrière un objet moral différent. Le débat pourrait durer indéfiniment.
Le pape a bien raison de pousser les consommateur addictifs que nous sommes à la réflexion. Ainsi que les journalistes anglais l'ont constaté avec surprise, il est l'un des seuls à oser le faire. Cela fait des remous.
Est-ce vraiment de la théorie ?
Il me semble que la théorie, c'est de dire ou laisser dire sans plus d'examen que mettre le préservatif protège du sida.
Scientifiquement, cela paraît incontestable : en effet, pour un acte sexuel à risque donné, le préservatif réduit ce risque.
Ce qui est scientifique peut-être en réalité insensé, quand on l'applique à un "objet non scientifique" : tel est le cas de l'homme, puisque qu'il est libre. Dans la pratique, il se produit un effet de compensation lié à la déresponsabilisation qu'engendre la mentalité contraceptive/safe sex . Cet effet de compensation est bien plus ample que le risque initial.
Prenons les chiffres de Wikipedia : "réduction de 85 % du risque de transmission du VIH en cas d'utilisation correcte et systématique de préservatifs" (c'est l'un des chiffres les plus favorables au préservatif). Aucun procédé industriel n'autoriserait un taux d'échec aussi délirant !
Et l'on suggère qu'il faudrait conseiller à ses enfants de faire "ce qu'ils veulent" -qui n'est parfois rien d'autre que ce que nous voulons qu'ils veuillent pour justifier nos propres comportements. C'est absolument criminel et c'est la position de tout le monde, sauf de l'Eglise et des promoteurs de la politique ABC (1-Abstinence, 2-Be faithful, 3 seulement -Condom).
Je ne crois pas qu'il s'agisse d'un problème théorique que de donner aux chrétiens les outils pour l'intelligence, afin de comprendre les enjeux, et de nous réconcilier parce que je vous assure qu'aussi narrow-minded que puissent être à certains égards certains chrétiens, on ne peut se défendre de penser que l'intégrisme se trouve actuellement bien plus répandu en dehors du catholicisme que dedans. Notamment chez ceux ceux qui se pensent tolérants quand il tolèrent toutes les opinions, sauf cette qui pense que l'homme peut marcher vers la vérité.
C'est une question concrète de vie et de mort. Il me semble bien.
Il est bien dommage de faire intervenir Luc Ferry, qui ne connaît pas mieux qu'un autre la pensée chrétienne. Il vaut mieux l'interroger sur la pensée moderne qu'il a pour le coup bien assimilée.
Premier exemple : il parle du "moins pire", qui est un concept tout à fait récusé par le catholicisme, pour lequel il est d'une part toujours possible de faire le bien et jamais licite de faire le mal même dans l'espoir d'un plus grand bien (la fin ne justifie jamais les moyens).
Second exemple : l'idée d'une "avancée millimétrique" est hors de propos ; puisque l'exemple pris par le pape n'est clairement pas un cas de contraception, rien n'est modifié dans ce domaine. Rien non plus n'est modifié dans le domaine du respect absolu de la vie : il a toujours été évident pour le catholicisme qu'il ne faut jamais ajouter un mal au mal : si vous avez décidé d'avoir une relation avec un prostitué, n'ajoutez pas par-dessus le marché le mal d'une contamination. Les évêques français l'avaient dit, mais c'était une évidence, et ils savaient bien que cette position était en plein accord avec Rome.
Le pape dit donc :
- la mentalité pansexuelle que véhicule le préservatif est une mentalité qui a tendance à étendre la maladie (dire par exemple à des jeunes que puisqu'il existe le préservatif, ils peuvent avoir des relations sexuelles, c'est irresponsable, ne serait-ce que parce que le préservatif est assez peu fiable - cf. son indice de Pearl, qui montre l'ampleur du problème ; étendre notre modèle sexuel aux pays pauvres à travers le tourisme sexuel, les médias est également irresponsable : cela fait des victimes) ;
- dans le cas où l'on a une relation sexuelle dans un cadre commercial ou paracommercial (prostitution, etc.), il convient d'éviter la propagation de la maladie.
Ce n'est qu'en tenant ces deux aspects qu'on limitera la propagation de la maladie.
On a tendance à confondre la matérialité de l’acte avec son objet moral.
Je crois que c’est ce que l’on fait quand on dit s’arrêter à C.
Pour la doctrine catholique, seul un objet moral (i.e. matérialité ET intention, ce qui est voulu, le volitum) peut être intrinsèquement désordonné.
Couper une jambe n’est pas un objet moral: sauver quelqu’un en lui coupant la jambe est un objet moral (amputation médicale, bonne) ; mutiler quelqu’un en lui coupant la jambe est un autre objet moral (mauvais). La même matérialité peut correspondre à plusieurs objets moraux, qui dépendent de l’intention du sujet agent.
La contraception, comme le magistère l’a discerné dès Humanae Vitae, est un objet moral intrinsèquement mauvais.
Le préservatif n’est pas en lui-même un objet moral. Pour éviter la confusion, les papes n’en ont donc parlé que parcimonieusement.
- son utilisation peut être contraceptive (objet moral) et le Magistère s’est alors prononcé une fois pour toutes ;
- son utilisation peut ne pas être contraceptive : c’est évidemment le cas dans l’exemple du prostitué mâle. Le Magistère relatif à la contraception n’est alors pas concerné. Le cinquième commandement s’applique : tu ne tueras point. Je fais le mal dans la fornication : je n’y ajoute pas le mal de la mise en danger d’autrui.
Reste que le préservatif est si peu fiable et est un tel véhicule idéologique qu’il cause globalement un grand nombre de victimes. Mais dans un cas particulier, il peut éviter une victime supplémentaire.
Réfléchir à l’objet moral (qu’est-ce qui est objectivement voulu quand je fais ce que je fais) est difficile et indispensable, car, selon la doctrine constante, la conscience a le double devoir de suivre sa conviction et d’éclairer celle-ci, notamment par l’écoute des préceptes de l’Eglise.
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Écrit par : Jean / | 02/12/2010
FERME
> Le cardinal Ratzinger s'est toujours montré ferme face aux abus sexuels. Qui en avait douté une seule minute ? sinon les habituels représentants de la classe "pipoliticomédiatique" qui ont main mise sur les médias !
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Écrit par : Lucien / | 03/12/2010
VINGT ANS
> Je ne sais si vous avez écouté l'entretien du Cardinal sur RND mais il ne parle pas du tout d'avancée; il dit même que Benoit XVI répète ce que le cal Ratzinger avait dit il y a vingt ans.
C.
[ De PP à C. - Relisez les livres du cardinal Ratzinger : il avait vingt ans d'avance. ]
réponse adressée au commentaire
Écrit par : Caillaud / | 03/12/2010
IMMOBILISME
> C'est curieux comme le mot "avancée" irrite certains. Ils confondent vérité et immobilité.
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Écrit par : Nathalie / | 03/12/2010
@ Jean
Oui, vous avez sans doute raison de dire que "l'objet et l'acte" sont communicables. Ce que je voulais dire, c'est qu'en parlant de cas concrets, on comprend encore mieux et c'est encore plus communicable au grand public.
Par exemple, lorsque vous écrivez "celui qui a vu Ben-Hur comprend très facilement la question : s'il n'a pas fait exprès de faire tomber la tuile, il n'est simplement pas un meurtrier" ; vous dites la même chose que quand vous écrivez "La même matérialité peut correspondre à plusieurs objets moraux, qui dépendent de l’intention du sujet agent." Il est évident qu'un langage est plus accessible que l'autre.
Je ne voulais pas dire beaucoup plus que cela : le pape a bien fait de parler "comme dans Ben hur". Tout le monde a compris. On ne peut pas dire que, jusqu'ici, le discours moral de l'Eglise était bien compris. Il y a du boulot, et le pape ouvre une voie : un peu plus de simplicité et de bon sens.
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Écrit par : Guillaume de Prémare / | 04/12/2010
PAS SUR LE FOND
> Si évolution il y a, c'est dans la communication et surement pas en effet sur le fond, je me permets de renvoyer à mon blog: cet article et le précédent:
http://l.oiseau.sur.la.branche.over-blog.com/article-contraception-preservatif-qu-enseigne-vraiment-l-eglise-catholique-62326179.html
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Écrit par : Hubert Houliez / | 04/12/2010
Les commentaires sont fermés.