09/10/2010
Les évangéliques en octobre 2010
Du phénomène Marina Silva à la rencontre mondiale du Cap :
La Croix, 8 octobre :
<< Alors que 4 000 leaders évangéliques de 200 pays se retrouveront au Cap (Afrique du Sud) du 16 au 25 octobre pour le 3e congrès international sur l’évangélisation mondiale, enquête sur le succès de ces « super-pasteurs » pentecôtistes
Postées dans l’auditorium, des caméras filment la prédication retransmise sur des écrans géants à l’intention des retardataires massés dans les salles annexes. Ce mercredi soir, 1200 fidèles participent au séminaire organisé par « Impact Centre Chrétien », une église évangélique implantée à Boissy-Saint-Léger (Val-de-Marne).
Le prédicateur invité, Mamadou Karambiri, vient du Burkina Faso. Bible dans une main et micro dans l’autre, gestuelle étudiée et voix impérieuse, il tient en haleine son auditoire, à 99% d’origine africaine. Sans avoir la notoriété des célèbres télévangélistes américains Billy Graham ou Rick Warren, Mamadou Karambiri, 62 ans, est pourtant, selon les organisateurs, « une star dans le milieu ». Comprenez la mouvance évangélique pentecôtiste issue du protestantisme, qui met l’accent sur la conversion personnelle, sur une lecture fondamentaliste de la Bible, sur le caractère festif du culte et sur l’engagement missionnaire.
Religieux, éducation, médias, politique : ils sont sur tous les fronts
Gigantesque avec près de 400 millions de croyants dans le monde, cette galaxie est loin d’être une nébuleuse sans visage… Elle s’organise au contraire autour de grandes figures : des « super-pasteurs » aux commandes d’églises aux dimensions impressionnantes, les megachurches, ou des télévangélistes qui prêchent des millions de téléspectateurs. Le magazine américain Time dresse régulièrement le palmarès des plus influents de ces hommes et femmes. La plupart sont américains, mais tous les continents ont aujourd’hui leurs pasteurs vedettes.
Une destinée commune ? L’âme d’entrepreneurs, ils sont souvent « partis de rien », disent avoir reçu un appel divin – accompagné souvent d’une vision ou d’une guérison miraculeuse –, inauguré leur ministère avec une poignée de fidèles et connu en l’espace de quelques années une croissance exponentielle. Jusqu’à bâtir, pour certains, de véritables empires à l’échelle mondiale.
Des success stories que ces businessmen de Dieu attribuent à l’action de l’Esprit Saint, mais qui doivent aussi à leur capacité à maîtriser l’art de la communication, à rejoindre leur public dans ses aspirations les plus concrètes et à séduire la classe politique… Du religieux à l’éducation en passant par les médias et la politique, ils sont sur tous les fronts et parcourent la planète de séminaires en croisades d’évangélisation.
"À chacun de montrer de quoi il est capable"
Si beaucoup sont très respectés, d’autres ont connu des dérapages spectaculaires. Certains ont été poursuivis pour fraude et blanchiment d’argent comme Edir Macedo au Brésil ou épinglés pour des scandales portant sur leur comportement. Les critiques visent aussi le recours de certains à la théologie de la prospérité (« Donnez de l’argent et Dieu vous bénira ») et aux fausses prophéties, comme le très controversé Benny Hinn, ou leurs prises de position virulentes contre l’avortement et l’homosexualité.
Mais le plus frappant dans cette galaxie est son extrême diversité et son renouvellement permanent. « Même quand elles sont des success stories, ces “églises” sont provisoires, destinées comme toute entreprise à changer, à scissionner, ou à fermer pour être remplacées par d’autres du même type, adaptées aux nouvelles données sociopsychologiques de l’époque suivante », analyse le journaliste Patrice de Plunkett, qui leur a consacré une longue enquête (1) : « Rien à voir avec l’univers catholique ou orthodoxe, qui repose sur la transmission et la durée. À chacun de montrer de quoi il est capable, y compris dans le domaine de l’entreprise religieuse. »
Pour preuve, le virage amorcé par les nouvelles générations de leaders évangéliques, davantage engagées dans le champ social que leurs aînés. Ainsi de Franklin Graham, que les télévisions montrent plus souvent arpentant les camps de réfugiés que prêchant, bible à la main, comme son père.
Les "super-pasteurs" éclipsent d’autres figures à la postérité plus durable
« Depuis 2007 monte aux États-Unis un “évangélisme de gauche” », souligne Patrice de Plunkett. Un évangélisme de proximité, également, avec l’influence croissante de centaines de milliers de pasteurs militants sud-américains et africains, très actifs localement mais moins connus mondialement.
De fait, les « super-pasteurs » ont tendance à éclipser d’autres figures évangéliques « dont la postérité théologique sera plus durable », estime Christophe Paya, professeur à la faculté de théologie protestante de Vaux-sur-Seine (Yvelines). Ainsi du Français Henri Blocher, de l’Ivoirien Tite Tiénou, de l’Anglais John Stott ou de son successeur Christopher Wright. « Ils sont moins strass et paillettes, mais ils sont ce que le mouvement évangélique peut faire de mieux. »
Céline HOYEAU
(1) Les évangéliques à la conquête du monde, Perrin, 2009.
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11:41 | Lien permanent | Commentaires (1)
Commentaires
EVOLUTION
> L'évolution de protestants évangéliques va dans le bon sens : découplage d'avec le post-bushisme américain, prise de conscience des luttes de l'hémisphère Sud, remise en cause du matérialisme mercantile.
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Écrit par : philémon / | 12/10/2010
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