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02/06/2010

"1940, si la France avait continué la guerre" (livre impressionnant, chez Tallandier)

dewoitine520-Big.jpgUne "simulation" réaliste, par une équipe internationale de chercheurs en stratégie autour de l'économiste Jacques Sapir. Oui, l'armistice de juin 1940 fut un crime : car voici ce que le gouvernement français aurait pu et dû faire...


 

Dans sa préface, Laurent Henniger [1] explique que cet ouvrage d'hypothèses est « un exercice de travaux pratiques ». D'où son intérêt. Avec une méthode rigoureuse et une information aussi ample que précise (et technique), ce livre montre que  l'armistice de juin 1940 n'était pas inéluctable. Si le gouvernement Reynaud avait tenu bon, la conquête du territoire français aurait demandé aux Allemands cinq semaines de plus. Le temps de transborder en Afrique du Nord le gouvernement, 500 000 hommes et 350 000 tonnes de matériel : la garantie de tenir jusqu'à l'arrivée des productions de l'arsenal américain. « Tenir » : c'est-à-dire passer à l'offensive contre les forces italiennes en Libye et en Méditerranée, tandis que la Luftwaffe était prise par la bataille d'Angleterre... 

51GHVS%2BQ4eL._SS500_[1].jpgÀ partir de là, l'ouvrage bâtit un étonnant kriegspiel où l'on constate, chiffres et données en main, que les Franco-Britanniques avaient (notamment sur le plan naval) de quoi chasser les Italiens d'Afrique du Nord en quelques mois, et s'emparer de plusieurs îles, dont la Sardaigne elle-même, mal défendue, qui pouvait devenir avec la Corse une base de bombardements à long rayon d'action pour l'armée de l'air et la RAF ! La face de la guerre était changée. L'avenir aussi. Surtout pour la nation française, qui sauvait son âme en s'épargnant Vichy. Henniger écrit : « C'est donc avec mélancolie qu'on lit cet ouvrage, mais aussi avec une passion fébrile, tant il est vrai que ce récit haletant est écrit de telle façon que le lecteur ne pourra le refermer avant d'en avoir achevé la dernière page. » « Une description à vous mettre les larmes aux yeux de la Seconde Guerre mondiale telle qu'elle aurait dû être », écrit un lecteur américain.

Quel aurait pu être le déroulement de la guerre (et, en pointillé, les conséquences après guerre) si, en juin 1940, le gouvernement français avait, malgré la défaite militaire sur le continent, refusé la défaite politique et continué la lutte ?

Pour proposer une réponse, les chercheurs ont évalué « l'enveloppe des moyens » techniques (niveaux de production, capacités logistiques, « quels matériels étaient disponibles, à quelles dates, à quel coût en matières de temps de travail et de ressources ») afin de déterminer une « enveloppe des possibles » ; ils ont évalué aussi les systèmes de prise de décision de chaque pays... Procédure de simulation réaliste (« constamment rapportée à des opérations similaires ayant eu lieu à des périodes identiques de la guerre dans la trame historique »), ce kriegspiel a été construit depuis 2004 par le directeur d'études à l'EHESS Jacques Sapir, le spécialiste des jeux de simulation Frank Stora et l'ingénieur informaticien Loïc Mahé, avec un réseau de chercheurs et d'enseignants en stratégie français, américains, britanniques, italiens, allemands, russes et japonais ; nom de code de ce chantier de recherche : « FFO », France fights on. Le livre est structuré comme une chronologie au jour le jour. L'« effet de réel » est impressionnant.

Parmi les leçons qui s'en dégagent, celle-ci, soulignée par Sapir : l'élite politique française – de gauche et de droite – était défaitiste depuis Munich ; ce défaitisme lui venait d'une fausse perpective, persuadée qu'elle était d'une « incompétence française » à laquelle était censée s'opposer « une compétence et une rationalité toutes allemandes ». (Lourde méprise sur le système hitlérien, pathologiquement irrationnel). [2]

Si cette erreur et ce défaitisme n'avaient affecté qu'une minorité de l'élite française, l'hypothèse du livre aurait pu se réaliser. Vers le 20 juin 1940, la Wehrmacht avait logistiquement besoin d'une pause de dix jours avant de poursuivre son offensive vers le sud [3] : ce qui voulait dire une arrivée allemande sur la côte méditerranéenne pas avant le 7 août, à condition que l'armée française ait résisté. Et cette résistance pouvait être obtenue : à condition que le gouvernement se soit ressaisi... Sursaut politique et résistance qui auraient donné le temps de réaliser, en bon ordre, le transbordement politico-administratif et militaire vers les grands ports d'Alger, Oran et Bône.

Mais au lieu de cela, les défaitistes ont prévalu ! « On comprend, écrit Sapir, pourquoi Hitler se jette littéralement sur l'offre d'armistice de Pétain. Il faut ici lire soigneusement l'ouvrage de William L. Shirer [4]. Journaliste accrédité à Berlin, il a accompagné les dirigeants nazis. Il était présent lors de la signature de l'armistice à Compiègne... Il note qu'Hitler refuse à Mussolini la plupart de ses exigences, car il craint qu'elles ne poussent les Français à refuser l'armistice et continuer la guerre. Cette crainte indique bien que si l'avance allemande a été spectaculaire, elle est fragile ». La crainte d'Hitler montre aussi en quoi le défaitisme des élites françaises s'apparenta à une trahison, comme le déclara de Gaulle – et comme le rugit Bernanos.

D'autant que la simple existence du gouvernement de Vichy allait rendre un service insigne à l'Allemagne, comme le souligne aussi Shirer : « Finalement, Hitler laissa au gouvernement français une zone non occupée au sud et au sud-est. C'était un tour astucieux. Non seulement il divisait ainsi la France géographiquement et administrativement, mais il rendait difficile, sinon impossible, la formation d'un gouvernement français en exil, et empêchait des hommes politiques de Bordeaux de transporter le siège du gouvernement en Afrique du Nord française – projet qui fut près de réussir, ruiné au dernier moment non par les Allemands, mais par les défaitistes français : Pétain, Weygand, Laval et leurs partisans. »

 

 _________

[1] Institut d'études stratégiques de l'Ecole militaire.

[2] Lire à ce sujet les ouvrages de Ian Kershaw. (Les incohérences stratégiques du IIIe Reich dès 1939 auraient pu éclairer les dirigeants français. Ce ne fut pas le cas).

[3] La bataille de France a causé autant (voire plus) de pertes dans les rangs allemands que franco-britanniques. La logistique allemande n'était pas en mesure de mener une offensive prolongée. Le 20 juin 1940, les lignes de communications de la Wehrmacht sont distendues aux limites de la rupture, son matériel est usé dans des proportions considérables, et elle se trouve hors de sa couverture aérienne. (Les Me 109 et Ju 87 ayant une autonomie de vol limitée).

[4] Le Troisième Reich, vol. 2, Stock 1961, p. 129.

 

16:29 Publié dans Histoire | Lien permanent | Commentaires (48) | Tags : 1940

Commentaires

AU NIVEAU

> Et oui, en 1940 on était au niveau en matériel et hommes. A l'image de ce magnifique Dewoitine 520 qui arriva trop peu et trop tard pour juin 40 mais qui aurait été imparable si l'on avait continué le combat (un aviateur français a descendu 6 avions italiens lors du même affrontement sur un D520). En 1940, l'armée française était plus mécanisée que l'armée allemande. On souffrait d'une aviation en retard mais un retard qui se comblait vite. Nos chars étaient meilleurs et nos navires supérieurs aussi. Nos hommes étaient motivés et courageux ainsi que compétents (relisez ce qu'en disait le général Leclerc). Il n'y avait que les dirigeants qui étaient inférieurs. Oui, l'armistice fut un crime et Pétain aurait du être fusillé pour trahison, mais on aurait du fusiller toute la clique politique parisienne de l'époque. Mais, même si c'est passionnant de refaire l'Histoire, cela ne reste qu'un jeu bien mélancolique.
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Écrit par : vf / | 02/06/2010

LE DEWOITINE 520

> Bravo d'avoir mis en illustration le Dewoitine 520, excellent avion français de 1940 qui volait à 540 km/h : plafond 11 000 m, rayon d'action 1 250 km , un canon de 20mm, quatre mitrailleuses de 7,5mm !
Par comparaison, le Messerschmitt 109 : rayon d'action 571 km , 2 mitrailleuses de moins. Et il était moins maniable que le Dewoitine.
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Écrit par : marin / | 02/06/2010

DEJÀ

> Les historiens en ont déjà beaucoup parlé : le choix de la continuation du combat aurait du être fait dès le mois de Mai 1940 et il n'était plus une option en Juin.
Comment déplacer 500.000 hommes en pleine débâcle du haut-commandement français et de toute la chaîne de commandement d'ailleurs ?
Fin Juin, pause opérationnelle ou pas pour la Wehrmacht, la victoire était acquise. L'armistice concédé par l'Allemagne à la France était d'ailleurs le fruit d'une volonté politique nazie plutôt que résultat des armes.
Mais il aurait tout de même fallu poursuivre le combat... ce qui n'aurait pas vraiment changé la situation militaire sur le Front de l'Ouest et peut-être même entraîner de vrais désastres comme l'invasion de la Zone Libre, la saisie de la flotte française (ou son sabordage précoce), l'occupation de l'Afrique du Nord française, la prise de Gibraltar, etc.
G.

[ De PP à G. - Oui, ce sont les thèses classiques. Mais jJe vous suggère de lire le Sapir : il remet en cause ces thèses de façon impressionnante. Et il répond autrement aux questions que vous jugez résolues. ]

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Écrit par : Guillaume / | 02/06/2010

A QUOI BON

> Pour faire le procès de Vichy, il faudrait aussi faire celui de l'âme humaine. retarder la conquête ne signifie pas l'empêcher, donc l'occupation se serait faite, et avec elle toute la veulerie humaine qu'on nous raconte... Alors à quoi bon ce genre d'élucubration? Après tout, finalement, le bien a triomphé, et nous, qu'aurions-nous fait à la même époque, à peine sortis des souffrances de 14-18?
CH


[ De PP à CH - Je vous conseille de lire ce livre. ]

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Écrit par : Christ Hope / | 02/06/2010

UN SITE

> Au fait, en cherchant les références du livre, je suis tombé sur un site: www.1940lafrancecontinue.org/index.htm.
vf


[ De PP à VF - Oui, c'est eux. ]

Écrit par : vf / | 02/06/2010

DEWOITINE ET MESSERSCHMITT

> Deux mitrailleuses de moins mais un canon de 20 en plus ! Le Dewoitine est un adversaire dangereux pour le 109E mais il ne le domine pas.
Pour bénéficier de la qualité de ces matériels (on peut citer aussi l'Arsenal VG33, l'Amiot 354, LeO 451, Breguet 691, Bloch 174-175...) il aurait fallu les dégager et les rapatrier en Afnord, ou bien réussir à les faire mettre en production hors métropole. Pas simple.
En revanche leur existence prouve que la France est en plein réarmement; elle l'est depuis le Front populaire INCLUS; elle n'est pas inactive. Mais la modernisation est censée s'achever début 1941...
C.

[De PP à C. - Mais le D 520 lui aussi est équipé d'un canon (HS 404) de 20mm dans l'axe, ce qui le met sur ce plan (canon) à égalité avec le Me 109. Le rayon d'action du Me est très inférieur à celui du D. Le seul atout du 109 est sa vitesse supérieure.]

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Écrit par : Cuchlainn / | 02/06/2010

MEDIOCRES

> Comme le dit vf, « Il n'y avait que les dirigeants qui étaient inférieurs ». Comme en 1870, alors ? et en 1914-1918, nous avons été à deux doigts de perdre, du fait de la médiocrité de nos généraux. L’histoire se répète.
B.

[ De Pp à B. - Sans compter, selon Galtier-Boissière, la "tradition de la trahison chez les maréchaux de France". ]

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Écrit par : Blaise / | 02/06/2010

LE CHRETIEN ET LA GUERRE

> Plus sérieusement, comment concilier pratique de la guerre et foi chrétienne? Lorsque, pour la première fois, j'ai entendu parler d'un évêque aux armées, je suis tombé des nues. Un homme qui embrasse la carrière des armes, s'engage dans une voie qui devrait le conduire logiquement à la damnation. Alors, pourquoi un évêque aux armées?
Un de mes oncles a fait la guerre d'Algérie. Il n'en est pas revenu convaincu de l'élévation morale du militaire. Mais il a pu se faire une idée assez précise du quotidien d’un soldat : tortures, exécutions sommaires, assassinats dans l’affrontement armé. Et ces genres de choses, on les retrouve dans toutes les guerres.
Lorsque sur le champ de bataille, un homme tue son adversaire, qu’il devrait pourtant considérer comme son frère en Christ, il s’agit bien d’un meurtre. Mais par pudeur on change l’étiquette. Alors, je pense à mes ancêtres morts dans de telles conditions, à Quiberon comme durant la 1re guerre. Quel était leur état d’esprit juste avant le moment fatal ? Ont-ils eu le temps de se confesser pour avoir tué leur prochain, dans une guerre supposée légitime ?
Cette question est d’autant plus douloureuse pour la guerre de 1939-1945. Il fallait se battre pour mettre les nazis hors de nuire, puis contenir l’avancée soviétique. Mais se battre, c’est entrer dans la spirale du mal ; c’est rejeter consciemment l’amour de Dieu et renoncer à sa destinée surnaturelle.
Donc, nous sommes dans un cul de sac. Comment pouvons-nous être chrétiens jusqu’au bout ?
L’Eglise parle de guerre juste ; mais pour moi, cela demeure un mot creux puisqu’il y a atteinte à l’intégrité des personnes.
______

Écrit par : Blaise / | 02/06/2010

ANACHRONISME

> Jeu intéressant mais anachronisme !
Comme les auteurs le soulignent, mais on le savait depuis longtemps (cf l'étrange défaite de M. Bloch), les élites (la trahison des clercs de Benda n'avait que quelques années) n'étaient pas en mesure de résister à l'Allemagne. D'où la défaite.
En d'autre terme, si la mentalité avait été différente, le plan décrit par ces historiens n'aurait pas été nécessaire, puisqu'il n'y aurait pas eu de raison de subir une telle défaite devant l'armée allemande.
Mais surtout, la question à se poser est la suivante: est-ce que ce défaitisme a quitté nos élites, qui ne croient plus en la France, mais sont les apôtres d'un multiculturalisme mondialisé.
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Écrit par : Ludovic / | 02/06/2010

FANTOCHES

> Passionnante uchronie !
Malheureusement, même si le gouvernement avait pris la route de l'Afrique du Nord, on eût pu imaginer que les Allemands aient trouvé plutôt facilement des opportunistes prêts à collaborer qui leur eussent servi de gouvernement de rechange.
Ils n'auraient pas eu, certes, la "légitimité" de Pétain aux yeux du peuple.
JG


[ De PP à JG - Vous avez raison, et justement le livre en parle : il étudie ce qui se serait passé avec un gouvernement fantoche (Laval-Doriot-Déat) à Paris. ]

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Écrit par : JG / | 03/06/2010

REFAIRE L'HISTOIRE ?

> Refaire l'histoire est un exercice intellectuel passionnant et cet article est très convaincant. Mais peut-être peut-on aussi remonter aux causes antérieures à la défaite de 40 : et s'il n'y avait pas eu le front populaire ? Et si l'on avait pas désarmé ni saboté les usines d'armement pendant que l'Allemagne tournait à plein régime ? Et si le parlement n'avait pas confié les pleins pouvoirs au Maréchal ? Et si le Maréchal avait eu 40 ans de moins ? Et si ma tante en avait... ;-)
Selon le moment de l'histoire à partir duquel l'on échafaude des hypothèses, il me semble que les scénarios sont infinis et ne remplaceront pas l'analyse des faits.
x.

[ De PP à X. - Je ne peux que vous conseiller de lire cet ouvrage. Ce n'est pas une élucubration. C'est un kriegspiel géostratégique : un série d'hypothèses à partir des données matérielles, historiques, les plus concrètes (paramètres industriels, etc). Que se serait-il passé si, en fonction de ces données, d'autres choix avaient été faits ? ]

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Écrit par : xav007 / | 03/06/2010

SHIRER

> Shirer, comme bcp d'historiens britanniques, ne cesse de dire que les Français auraient pu continuer la lutte pour mieux mettre en valeur le fait que la Grande Bretagne, elle, l'a continuée. (en oubliant que si la GB n'avait pas été une île, elle aurait été balayée).
Le reste : avec des "si" ...
Z

[ De PP à S. - Shirer n'était pas anglais mais américain, et surtout témoin oculaire. D'autre part, le travail de l'équipe Sapir est une simulation géostratégique réalisée par des spécialistes, avec une rigueur de protocole remarquable : ce n'est pas un "avec des si" ! Autrement je n'en parlerais pas. Je vous en conseille la lecture. ]

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Écrit par : zorglub / | 03/06/2010

OBJECTIVES

> On a des raisons objectives d'être défaitiste quand son armée n'existe plus que sur le papier (et encore, on devait même manquer de papier).
Profitant du "répit" de Dunkerque, l'armée française s'était réorganisée sur une ligne défensive. Ca n'a fait illusion que quelques jours.
On se serait donc réorgnanisé une deuxième fois profitant d'un deuxième répit.
Avec les débris des débris d'une armée, dans un chaos total.
Avec des canons, des chars et des munitions abandonnés 200 km plus au nord au bord d'une route.
Et on aurait gagné là où on a perdu avec une armée en bien meilleur état et soutenue par les Anglais ?
On peut toujours fantasmer cinquante ans après derrière son écran d'ordinateur.
Lucio


[ De PP à L. - Ce n'est pas ça du tout qu'envisage le livre de l'équipe Sapir. Lisez-le et dites-nous ce que vous en avez pensé. ]

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Écrit par : Lucio / | 03/06/2010

70 ANS

> L'armistice ? les Français le voulaient et matériellement, ils en bénéficient encore : ils sont bien contents d'avoir eu moins de destruction que le reste de l'Europe, la France est le pays où le plus grand nombre de Juif a survécu...
Les Français actuels sont les bénéficiaires de l'armistice qui leur a évité de faire la guerre, permis de se faire libérer par les autres.
70 ans après évidemment c'est courageux de dire qu'il aurait fallu continuer la lutte.
Bref, je ressens un certain dégoût à voir ce peuple, le mien, cracher sur Vichy qu'il a acclamé, à voir les stratèges à posteriori qui font la leçon, etc
Un peu de pudeur... les vrais résistants comme mon grand-père ne jetaient pas si facilement la pierre.
On ne peut pas, comme le fait notre société, chanter les louanges des mutins de 1917 et condamner l'esprit pacifiste de Munich.
Z


[ De PP à Z. :
Désolé, mais les historiens sont en désaccord avec ce que vous affirmez ici.
- Par exemple, les juifs en France n'auraient pas été aisément raflés sans la police et la gendarmerie de Vichy. (Et en général, police + administration françaises ont déchargé l'Allemagne d'une tâche très lourde d'administration-répression directes qu'elle n'aurait pu assumer efficacement, surtout après 1941).
- Par exemple aussi, les mutins de 1917 n'ont pas été ce que vous semblez croire (cf note sur ce blog : http://plunkett.hautetfort.com/archive/2008/05/12/le-mutin-avait-la-croix-de-guerre.html - Enfin, le pretium doloris moral de Vichy (un pouvoir "légitime" cautionnant l'inacceptable) fut immense. Les Français souffrent encore de cet abcès à l'âme. Et ils sont les seuls dans ce cas en Europe. ]

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Écrit par : zorglub | 03/06/2010

CURIEUX

> Je serais curieux de lire cet auteur sur la défaite de Dien Bien Phu, le manque de démarches pour récupérer les prisonniers de guerre français et les autochtones fidèles à la France servant sous notre uniforme (les USA là dessus n'ont pas le monopole de la lacheté diplomatique), je serais curieux de savoir si mon grand-oncle est bien dans la tombe fleurie par mon grand père (et pas le cadavre d'un autre même pas de chez nous).
La manipulation des masses, si c'est là le discours recherché sur 40, vous ne découvrez rien, ni ce chercheur. C'est vieux comme Hérode si j'ose dire. Maintenant l'intérêt du temps qui passe, c'est que la classe dirigeante de cette époque s'éteint de manière naturelle, ôtant par là même l'ambiance suspicieuse qui plane sur la République. Mais un tel livre ne doit être intéressant à mon sens que par le nécessaire questionnement de ce que chacun est prêt à accepter ou à couvrir de son indigence morale volontaire ou paresseuse, et ce de nos jours mêmes. Alors on verra le peuple retourner aux urnes plus massivement et cesser de lire les sondages comme un horoscope décérébrant.
Une thèse historique? Soit. Je préfère le côté plus social de l'individu et de ses actes, de Pétain jusqu'à la France de base, hier et aujourd'hui, et compte tenu de l'affirmation des nationalismes depuis la Révolution et les derniers grands conflits de frontières (Campagnes napoléoniennes, 1870, 14-18, conférence de Berlin 1884-1885 pour l'Afrique) , mais aussi compte tenu du pacifisme lié aux boucheries successives et des fascismes, comble du patriotisme mais aussi comble de l'humiliation populaire par le vainqueur orgueilleux... Vichy c'est le fruit de tout ça, le cynisme diplomatique, militaire, les querelles de l'ombre entre francs-maçons, communistes, pacifistes de tous poils, patriotisme teinté de religieux... hommes d'ambition, et comme soulignait David Galula, une minorité contre une autre minorité s'affrontant pour le pouvoir, avec au milieu la majorité silencieuse qui subit, mais ne prend pas parti non plus. Là est la grande leçon, la seule, et elle est purement objective, politique, de constat, plutôt que spéculation de chercheur, même avec des documents (on en trouve d'autres chez d'autres auteurs). Bien amicalement.
CH


[ De PP à CH - On ne peut comparer une guerre coloniale (Dien Bien Phu) au désastre essentiel de 1940-1944. Relisez Bernanos... ]

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Écrit par : Christ Hope / | 03/06/2010

A Blaise:

> "j'ai entendu parler d'un évêque aux armées, je suis tombé des nues." Je comprends ta réaction, mais un de mes amis diacre ad presbyterum aux armées te dirait que c'est là que prend aussi tout son sens d'être dans le monde mais hors du monde, pour témoigner au pire instant de la présence de Jésus-Christ et de son Evangile, ce qui va au-delà de la question que tu abordes ensuite sur le Vatican et la guerre juste, qui est une question différente.

A PP: "Que se serait-il passé si, en fonction de ces données, d'autres choix avaient été faits ?" Je comprends votre interrogation, en toute rigueur intellectuelle je me suis déjà posé ce genre de questions. D'autres aussi, et certains proposent même une approche purement juridique en faveur d'un gouvernement sur le sol français plutôt qu'en afrique du nord ou à Brazzaville (capitale de la France Libre, je vous le rappelle, d'où des liens encore très fort entre le Congo et la France avec la case De Gaulle); cette approche consiste simplement sur le fait que pour revendiquer l'autorité sur un territoire, et son peuple, ses ressources, il faut la continuité de l'exercice effectif du pouvoir et que ce soit un exercice sur place. D'où la présence militaire sur l'îlot de Clipperton au (grand) large du Mexique, ou sur les Territoires austraux et arctiques francais. Cela aurait pu validement se faire en Algérie, département français donc. Le souci était de savoir si l'Afrique du Nord n'allait pas être envahie rapidement; les Italiens ont donné raison dans un premier temps, puis tort, malgré l'appui de Rommel... Brazzavile étant siège d'un gouverneur de l'Afrique équatoriale française pro De Gaulle et pro résistance (Félix Eboué si ma mémoire est bonne), s'est trouvée à la fois éloignée de toute conquête raisonnable et dotée d'un port à Pointe Noire pour accueillir des batiments de guerre, enfin ce qu'il en restait ^^. Cette décision de se ranger aux côtés de De Gaulle pour les généraux d'Afrique n'allait pas de soi entre l'obéissance à la hiérarchie, donc le chef de l'Etat, et la théorie des baïonnettes intelligentes, qui dicte de savoir suivre sa conscience quand cela semble opportun. Pétain chef des armées et une tactique d'un côté, De Gaulle colonel(!) et une autre tactique de l'autre. Fait général, il devient apte à commander juridiquement des armées, pas avant, et pour ce faire, il a fallu rallier d'autres commandants militaires... L'armée américaine, tel ou tel gouverneur ou général ont fini par choisir et faire pencher la balance. Mais pas avant 1942 à proprement parler. Pendant ce temps les troupes dont mon grand-père et ses frères s'organisaient militairement, quoique sans objectif officiel clair. Un vieux général qui a grandi au Maghreb me disait dernièrement que l'histoire rendrait raison à Pétain, pas nécessairement à tout point de vue, mais au sens où on comprendrait la grâce accordée par De Gaulle à Pétain; les ordres étaient clairs selon lui, résister à tout prix, et commencer par préparer la reconquête depuis l'Afrique justement et ses richesses, ses bataillons de tirailleurs sénégalais, ses ports de Casablanca et Pointe Noire (nos deux ports en eaux profondes et ils sont rares sur cette côte atlantique d'afrique).
Bref pour toutes ces raisons je crois que le débat d'intellectuels est relativement stérile, alors que la leçon majeure est quelle attitude de conscience les hommes ont adopté et pourquoi? Ensuite, sommes-nous aujourd'hui en conscience à l'abri des erreurs et lâchetés du passé, plutôt que des seules questions stratégiques et politiques? Ca je n'en suis pas du tout sûr... Ne peut-on être élu aujourd'hui à coup de promesses sécuritaires et de fichiers informatiques, d'idées de prévention par l'internenemnt de gens susceptibles d'être des délinquants. Toutes ces idées sont d'énoncé électoraliste récent... Pöurtant la France et notamment ses catholiques ont voté comme un seul homme pour un tel homme. J'attends toujours d'en voir les bienfaits. En attendant, le fichier génétique, digital, le fichage de tout élu ou ancien candidat aux côtés de syndicalistes... et le fichier judiciaire, ça me fait vomir, car je vis en plein dedans, pas y a 70 ans en arrière.
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Écrit par : Christ Hope / | 03/06/2010

DISCUSSION

> Quand je parle des mutins de 1917, je parle de l'état d'esprit avec lequel on acclame leur rebellion (et pas leur sacrifice, justement). Pour ce qui est de leurs mérites au front, vous parlez à un converti. Je trouve d'ailleurs que logiquement, on aurait dû fusiller le criminel Nivelle.
Le reste est discutable et discuté.
Pour le coût moral de Vichy, je ne me rappelle pas avoir chanté les louanges de ce régime. je dis qu'il est facile de dire maintenant que ce n'était pas bien, de dire "ouh là là ! comme j'ai honte ! ah ben oui ma pauv' dame". Vous croyez vraiment que bcp de Français se préoccupent de ça ?
Dire de l'Indochine comme guerre coloniale est un raccourci, c'est un peu plus complexe. Des Américains faisaient le parallèle avec la Corée.
Z

[ De PP à Z. :
- Bernanos écrivait en 1940, non 70 ans après.
- J'ai fait le choix de prendre Bernanos comme référence éthique. Chacun est libre d'en prendre d'autres... ]

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Écrit par : zorglub / | 03/06/2010

@ Blaise :

> quand des soldats sont venus voir st Jean Baptiste et lui ont dit : "et nous, que devons-nous faire?" il a répondu de ne faire de tort à personne et de se contenter de sa solde, Il n'a pas dit de quitter l'armée.
"heureux les pacifiques" ne signifie pas "heureux les pacifiSTES". Apporter la paix, la justice, la vérité, c'est quelquefois lutter pour elle.
Ce n'est pas vouloir "avoir la paix"... à tous prix, en abandonnant les autres, donnant raison à l'injustice, etc
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Écrit par : zorglub / | 03/06/2010

@ PP :

> Où parlez-vous de Bernanos ? D'ailleurs si c'est un grand écrivain, ce n'est pas un tacticien. Ce que j'espère c'est qu'il n'a pas fait comme cet écrivain qui a écrit une ode à Pétain puis qq années après, une autre à De Gaulle. Si les points de suspension se voulaient ironiques ou désobligeants, je pense qu'Amouroux n'a rien d'une référence tendancieuse.
Dans un post on parle de trahison : dans son livre-interview, Alexandre de Marenches parle des archives de la Gestapo concernant la France qui étaient entreposées ds les locaux du SDECE (aujourd'hui DGSE) ; il les a compulsées et a vu des noms d'hommes politiques, payés dès les années 30 par l'Allemagne...
Z

[ De PP à Z. :
- Où je parle de Bernanos : dans ma note ci-dessus, avant-dernier paragraphe, dernière ligne. Et dans ma note de ce jeudi matin, où je lui laisse la parole.
- Sur l'attitude de Bernanos pendant la guerre : tranquillisez-vous, il n'a pas fait comme Claudel mais juste le contraire : contre Pétain à fond, en bloc et dès le premier instant !
ps / Il n'y a aucune intention ironique dans les points de suspension, c'est juste de la typo. ]

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Écrit par : zorglub / | 03/06/2010

LE PCF

> La position du parti communiste durant le pacte germano-soviétique était de nature à ralentir considérablement les opérations de repli et production militaire (voir les tracts ordonnant aux ouvriers: "[P]ar tous les moyens appropriés, en mettant en oeuvre toutes vos ressources d'intelligence, empêchez, retardez, rendez inutilisables toutes les fabrications de guerre."
Je ne sais pas si le livre - que je vais certainement acheter - aborde ce sujet, mais il me semble être un paramètre sérieux à prendre en compte dans la simulation proposée.
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Écrit par : Jean de Valvinaud / | 03/06/2010

PAS TORT

> Tu n’as pas tort, Christ Hope ! je te rejoins entièrement. Et c’est vrai que les soldats ont bien besoin de cette présence réconfortante, eux qui se savent guettés par la mort.
De toute façon, je ne suis pas « antimilitariste », n’ayant pas d’hostilité particulière pour les hommes et les femmes qui embrassent la carrière des armes. Au contraire, je suis tout près à admirer leur esprit de sacrifice au service de l’Etat. Mais leur dévouement est orienté vers le champ de bataille, des crimes légitimés, une habituation au mal… Les plus grands honneurs qu’ils peuvent espérer, c’est en tuant qu’ils les obtiendront. Aussi est-il essentiel que l’Eglise soit à leurs côtés.
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Écrit par : Blaise / | 03/06/2010

@ Zorglub

> Je pourrais vous suivre lorsque vous dites : Apporter la paix, la justice, la vérité, c'est quelquefois lutter pour elle. »
Bien sûr ; le dévouement pour la paix, la justice et la vérité doit primer dans nos actions. Mais… doit-on cesser d’être moral pour autant ?
Vous vous placez au niveau des généralités ; mais la guerre concrètement, elle est vécue non par des nations, non par une armée, mais par des personnes. Et comment la relation de ces personnes à Dieu n’en serait-elle pas gravement atteinte par leur action dans le combat, volontaire ou forcée ? parce que la guerre, c’est l’orchestration du crime à grande échelle en vue d’atteindre un bien supérieur. J’ai été marqué par ma lecture de Veritatis Splendor, où le pape affirme hautement que la fin ne justifie pas les moyens utilisés. Ce qui est vrai par exemple pour l’avortement devrait l’être également pour la guerre. Au nom de quoi devrions-nous discriminer ?
De plus, le combat qu’ont exalté les premiers chrétiens, c’était l’offrande de soi par fidélité envers la vérité, à la suite du Christ. Or le martyre et le combat où l’on tue son prochain me semblent antinomiques. Dans ce sens précis, je comprends qu’il faille « lutter » pour la paix, la justice et la vérité. Mais lorsqu’on fait le mal, fut-ce pour atteindre un bien, on a déjà tranché en faveur du mal, et on est en état de péché.
Je pense à ce militaire gradé de la guerre d’Algérie, qui a pratiqué la torture pendant le conflit. Il raconte que pendant des années il n’a pu communier. Il avait une pleine conscience de l’antinomie entre sa foi et ce qu’il faisait. Il a pourtant toujours affirmé que ce qu’il avait fait il avait eu raison de le faire : car il avait choisi son camp, celui du diable.
Ce qui pose problème dans la guerre juste, c’est qu’elle pose des conditions et des limitations au mal, tout en le permettant. Que deviennent les personnes ?
Je ne suis pas un doctrinaire pacifiste. J’expose un problème de conscience impliquant chaque conscience, et qui m’obsède depuis tout enfant. Car le soldat est quelqu’un qui choisit (lorsqu’il n’est pas un appelé) la séparation éternelle d’avec Dieu en vue d’un bien collectif, qui n’est pas toujours évident.
Représentez-vous assassinant votre « ennemi » dans un combat légitimé par des Etats. Croyez-vous pouvoir soutenir un seul instant devant Dieu que vous êtes innocent ? que vous n’avez tué personne et que votre conscience est nette ? moi, je ne pourrais pas. C’est pourquoi l’angoisse des soldats à leur dernière heure doit être atroce. Et je pense particulièrement aux membres de ma famille morts en 14/18. Je pense à leur souffrance de patauger dans le crime.
En fait, en parlant ainsi j’engage d’abord ma conscience. Je ne me prononce pas sur la guerre proprement dite et sur sa légitimité. Il s’agit de simples interrogations, qui n’aboutissent à aucune réponse satisfaisante. Alors, si vous remarquiez des contradictions entre mes différents commentaires ne soyez pas étonnés !
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Écrit par : Blaise / | 03/06/2010

PLUSIEURS CHOSES

> Je crois qu'il faut distinguer plusieurs choses malgré tout: Vichy et Pétain ne sont pas irréductibles l'un à l'autre, encore moins l'esprit de collaboration et le collaborationnisme. De ce fait, faire l'éloge de Pétain homme providentiel à Verdun et au moment voulu, n'est pas se faire le chantre du collaborationnisme de Laval, ce qui suppose également de réduire la collaboration voulue par Pétain à ce fameux collaborationnisme... Echec politique de Pétain sans doute, stratégique, et c'est là l'objet principal de votre note, c'est très discutable.
Pour Dien Bien Phu, guerre coloniale, mais guerre nationale aussi; l'impérialisme porte en germe celui des nationalismes. Et surtout cette guerre c'est celle d'une guerre nouvelle mode, l'insurrection armée, face à des dirigeants non préparés à cela d'une part, et qui s'interrogeait déjà face aux questions indépendantistes des peuples qui "alimentaient" nos troupes coloniales (troupes d'élites et monte-au-front par ailleurs, encore aujourd'hui pour les régiments "héritiers") C'est bel et bien une gurre des nationalismes et la question de l'aptitude des politiques à la gérer qui se pose comme pour 40. L'idée de l'opinion publique n'est pas loin non plus et l'idée qu'on voulait qu'elle s'en fît de cette guerre est apparue avec une acuité particulière pour les USA au Vietnam.
Songez un peu qu'avec l'histoire récente des guerres françaises depuis Napoléon, chaque génération connaissait des combattants morts ou estropiés...
Mon grand père fut mobilisé comme diéséliste en 39, pour 2 ans, avant la guerre. Ses deux frères militaires de carrière le rejoignirent depuis leur affectation d'infanterie de la Garde Républicaine basée à Paris au Maroc (suivant en cela les directives hiérarchiques). Ils ont enchaînés en Provence et en Allemagne avec la 3ème armée de Patton. Puis ce fut l'Indochine, l'un fut porté disparu et honoré pour cela outre des faits d'armes sur sa canonière, l'autre enchaina sur l'Algérie, dont il fut "libéré" en 62, pour regagner sa garnison parisienne et obtenir la retraite peu après... 39-62; sur vos 3 fils trois se battent, dont l'un meurt et l'autre passera sa jeunesse au front (soit 23 années permissions comprises)... Allez expliquer aujourd'hui à ces familles qu'on aurait pu faire autrement, qu'il y a eu des "trahisons" (le grand mot laché pour dire qu'on était d'une autre option tactique ou qu'on en a inventé une sur ordinateur... la belle affaire), que des français ont été de belles ordures à vendre leur prochain qu'ils jalousaient aux allemands... Pacifisme, je dirais qu'ils en ont ras le bol en fait. Peu importe les raisons ou les échecs, ou les révisionnismes de tous poils. Ils ont cotoyé l'horreur, la honte, et la peur d'être vendu, en plus de celle de perdre des proches qui se sont engagés (pas qu'au sens de la carière militaire). On a plus une autocritique généralisée à faire comme le souligne Bernanos que vous citez, et à balayer devant notre porte même aujourd'hui qu'à fantasmer sur hier ou avant-hier.
C'est pourquoi j'évoquais les travers sécuritaires et les tentations lombrosiennes du candidat sarkozy ou d'autres, de fichage (pour tout connaître, même des suppositions ou des fantasmagories sur chacun ayant eu des velléités de pouvoir ou de service, tout simplement).
C'est avec d'autres ouvrages qu'on peut confronter utilement qu'il ressort une éducation à la vigilance, pas dans un procès à succès garanti fut-il historique et de recherche excusez-moi. ex: Histoire de Vichy, Jean-Paul Cointet, éd France Loisirs. Sans complaisance ni acharnement, descriptif des mentalités, de leur genèse, des luttes de pouvoir en Europe et en interne, développement de l'esprit de résistance et de la tournure qu'il prit... Sans complaisance pour Pétain, ni pour Laval, et encore moins pour lui, ni pour les Mitterrand ou autres Papon.
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Écrit par : Christ Hope / | 03/06/2010

A Zorglub :

> si vous voulez savoir pourquoi les juifs français ont été moins déportés que les Juifs du reste de l'Europe, je vous conseille l'excellent ouvrage d'Edwin Black, "IBM et l'holocauste", qui démontre que c'est en partie à cause de la pénurie de machines à carte d'International Business Machines, ancêtres de l'ordinateur, que la France n'a pas pu ficher tous ses juifs assez rapidement.
Ce livre démontre d'une part l'active collaboration d'IBM (société américaine) avec le Reich nazi avant et pendant la guerre (les cartes étaient exclusivement fabriquées aux USA et vendues aux filiales allemandes et européennes) ; en second lieu que sans l'usage d'une technique de pointe, l'holocauste n'eût pas eu lieu dans ces proportions : et enfin il met en lumière un incroyable héros français de l'ombre, René Carmille, officiellement chef du service national de statistiques de Vichy, et en réalité résistant, qui manipula les fiches des machines IBM de façon à les rendre inutilisables, empêchant ainsi le recensement scientifique des juifs de France. Sa science statistique permit à l'inverse à de Gaulle de lever en deux mois une considérable armée en Afrique du Nord fin 42. Tout cela le conduisit entre les mains du tortionnaire Barbie à Lyon, puis à Dachau où il mourut en 1944.
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Écrit par : JG / | 03/06/2010

CLAUDEL ET PETAIN

> Paul Claudel s'est exprimé lui-même sur cette fameuse Ode au Maréchal;la référence est « Paul Claudel : Une visite à Brangue (Conversation avec Jacques Madaule et Pierre Schaeffer en février 1944) », Paris, Gallimard, 2005, p. 39-40.

« Paul Claudel. – Il faudra qu’on sache que tout le monde n’a pas accepté l’attitude des gens comme le cardinal Gerlier, disant à Pétain : « Pétain, c’est la France et la France, c’est Pétain. » (Rires.)

Jacques Madaule. – Réduire la France à Pétain…

P C. – En 1940, ça pouvait se comprendre… mais maintenant. Pensez que moi, j’ai fait tout un poème pour le maréchal Pétain…

J. M. – Je l’ai lu depuis, votre poème, il est très beau.

P. C. – Il est très beau, oui. Il s’explique. J’ai écrit ça trois jours après que je savais qu’il avait renvoyé Laval et qu’il l’avait arrêté. Alors, je me suis dit : ça y est. D’ailleurs, Pétain portait beau. Il avait pris des mesures que j’approuvais ; ces choses contre le divorce, contre l’alcool, contre les francs-maçons même, tout ça, je trouvais ça très bien, les lois contre les congrégations, etc. Enfin je suis un naïf, quoi, je me suis laissé griser. Et puis alors, il n’y a pas eu moyen de se tromper, surtout au moment de l’affaire de Syrie. Il y a eu la lettre de Basdevant… A partir de ce moment-là, il n’y avait plus à se tromper.

J. M. – Et en même temps la cession de l’Indochine…

P. C. – La cession de l’Indochine, alors…

J. M. – Car ç’a été presque contemporain…

P. C. – Oui, oui…

J. M. – On se défend en Syrie contre les Anglais, mais on cède l’Indochine.

P. C. – Oui. Alors à ce moment-là, il y avait vraiment pas moyen de se tromper. J’avais un document juridique, moi… Je suis tout de même un fonctionnaire ; j’attache beaucoup d’importance à la question Droit. La lettre de Basdevant discutait à fond la question Droit de Pétain. Elle montrait qu’il commettait une forfaiture. C’est une lettre écrasante sous laquelle un Pétain restera toujours écrasé. »
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Écrit par : Blaise / | 03/06/2010

BADERNES

> Le Front populaire n'avait pas désarmé la France, contrairement à ce qu'a raconté la propagande vichyssoise. Ce qui a fait la catastrophe de 1940, c'est la stupidité des badernes militaires. Un état-major de débiles : De Gaulle le constate dans ses Mémoires de guerre.
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Écrit par : Ned / | 03/06/2010

LE FAUX BOUCLIER

> Les travaux des historiens depuis 30 ans ont établi que Pétain n'avait pas été le "bouclier" prétendu après coup ("Pétain le bouclier et de Gaulle l'épée"). Pétain fut l'ambiguité, la zone grise qui permit à la collaboration de faire des ravages à l'abri des étoiles du "Vieux Chef". Sans lui, la collaboration n'aurait eu aucun impact. C'est ce que Bernanos a vu le premier de façon foudroyante.
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Écrit par : clerus / | 03/06/2010

OUI MAIS

> Un « état-major de débiles », d’accord. Mais cela ne suffit pas pour excuser les hommes politiques en place. Ce sont d'ailleurs ces derniers qui ont livré la France à l'Allemaqne.
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Écrit par : Blaise / | 03/06/2010

@ Blaise

> Point 2264 du catéchisme de l'Eglise catholique :
"L’amour envers soi-même demeure un principe fondamental de la moralité. Il est donc légitime de faire respecter son propre droit à la vie. Qui défend sa vie n’est pas coupable d’homicide même s’il est contraint de porter à son agresseur un coup mortel : Si pour se défendre on exerce une violence plus grande qu’il ne faut, ce sera illicite. Mais si l’on repousse la violence de façon mesurée, ce sera licite... Et il n’est pas nécessaire au salut que l’on omette cet acte de protection mesurée pour éviter de tuer l’autre ; car on est davantage tenu de veiller à sa propre vie qu’à celle d’autrui (S. Thomas d’A., s. th. 2-2, 64, 7)."
Point 2265 :
"En plus d’un droit, la légitime défense peut être un devoir grave, pour qui est responsable de la vie d’autrui. La défense du bien commun exige que l’on mette l’injuste agresseur hors d’état de nuire. A ce titre, les détenteurs légitimes de l’autorité ont le droit de recourir même aux armes pour repousser les agresseurs de la communauté civile confiée à leur responsabilité."
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Écrit par : Guillaume de Prémare / | 03/06/2010

CURIEUX

> C'est curieux, cette irritation de certains à l'idée que la France aurait pu continuer à se battre en 1940. Seraient-ils comme les Flamands de la chanson de Brel ?
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Écrit par : tyl / | 03/06/2010

DE GAULLE

> "De Gaulle le constate dans ses Mémoires de guerre"
J'aime beaucoup De Gaulle personnellement, un homme charismatique. De là à oublier que c'est le même De Gaulle de l'"algérie-française-indépendante"... ^^
Juste un détail: De Gaulle s'écrit sans particule; ce type de nom se trouve en Flandres et Wallonie. De Beers par exemple. On croit souvent que c'est un noble, ce n'est pas le cas, tout au plus un bourgeois et un ancien haut fonctionnaire devenu Président. Mais Giscard d'Estaing, oui.^^
CH


[ De PP à CH - Moi aussi j'aime de Gaulle, mais tous comptes faits, et politiquement
plus que personnellement. Dans ce que vous nous dites là , j'entends comme un écho
de la gaullophobie de la droite traditionnelle ! En effet 1961-1962 n'enlève rien à 1940-1944.]

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Écrit par : Christ Hope / | 03/06/2010

L'INTERET

> Drôle de jeu, quand-même que ce "si on faisait comme si..." Quel intérêt ? Notre époque où la démission n'a jamais été aussi forte, où chacun ne pense qu'à soi a beau jeu de relire éternellement les responsabilités de uns et des autres.
Il est beaucoup plus facile de décrypter à postériori les incohérences des gens du passé que de voir les siennes. C'est un bon moyen de les masquer également. (la paille et la poutre ?)
franz
Les leçons du passé devraient permettre d'éviter de reservir les mêmes plats... il n'en est malheureusement rien.
Pour pouvoir réellement dire : j'aurais fait ceci ou celà, il faudrait pouvoir se remettre VERITABLEMENT dans l'état d'esprit des gens de l'époque, au moment où tout s'écroule.
Il en est de même pour le martyre : qui peut dire "moi, je tiendrai" ?
Tout le monde peut le dire, mais pour le faire ?
Ne jugeons pas trop vite, surtout le passé.
franz



[ De PP à F. :
- Connaissez-vous Jacques Sapîr ? Il est économiste et militant, au premier rang de la bataille contre le néolibéralisme et le libre-échangisme dans la crise mondiale. Si quelqu'un se bat contre les incohérences d'aujourd'hui, et prend ses responsabilités au présent, c'est bien lui. D'où l'intérêt de le voir s'intéresser aussi à ce qui s'est passé en 1940 !
- Vous n'avez pas lu ce livre. Donc c'est vous, pardon, qui jugez trop vite. Il s'agit d'un travail de recherche et d'hypothèses remarquable, qu'on ne doit pas écarter a priori sous prétexte que ça agace. Vous faites un mauvais procès à l'équipe Sapir. ]

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Écrit par : franz / | 03/06/2010

HITLER ET NOTRE TEMPS

> J'ai peine à comprendre le sens de toutes ces discussions sur la possibilité ou non de poursuivre la guerre en mai/juin 40. Il est pourtant évident que, de toutes manières, Hitler a gagné la paix, certes à titre posthume et au prix de quelques ajustements ; il a fallu faire preuve de patience mais les faits sont là.
Hitler avait commis deux erreurs : une approche beaucoup trop provinciale (ces histoires de races et d'hégémonie allemandes ne pouvaient lui assurer le succès) et un excès de précipitation (des méthodes trop brutales par rapport aux moyens dont il disposait). Les nazis n’avaient pas compris qu’il est beaucoup plus facile de mettre en œuvre leur programme dans une société d’abondance, de consommation de masse, car l’instinct de survie et l’esprit de résistance y sont émoussés. Néanmoins, le Führer avait parfaitement anticipé la nécessité d’éliminer tous ceux qui sont à charge, sans utilité sociale ou dont la qualité de vie est insuffisante. Dans les années 30 et 40 on ne disposait pas encore des outils génétiques permettant d’effectuer ces opérations aux premiers stades de la vie ; aujourd’hui inutile de procéder par rafles et coûteuses usines de mort, les hôpitaux et même des produits chimiques d’usage simplifié assurent ces tâches à l’échelon des individus donc sans effets de masse (qui impressionnent toujours fâcheusement les individus sensibles – Hitler et Goebbels auraient dit : « les curés et les vieilles filles »). La brutalité peut à présent être réduite au strict nécessaire car il suffit désormais de s’appuyer sur les médias : au lieu de forcer les gens, on peut aujourd’hui les convaincre de faire eux-mêmes le travail ; ainsi, pour résoudre la question des retraites, il suffit d’appuyer sur le sentiment d’inutilité et d’isolement des personnes âgées. Celles-ci conviendront volontiers que le moment est venu de passer la main (il est temps de songer à partir a dit récemment un médecin hospitalier à ma voisine de 86 ans un peu diminuée mais encore capable de se déplacer).
En ce qui concerne l’éducation, l’observateur le plus impartial devra admettre que sport et propagande sont les deux piliers du système scolaire actuel comme ils l’étaient dans l’Allemagne du 3° Reich. Signalons en passant une remarque de l’un des promoteurs du projet d’interdiction de la fessée : la loi sera appliquée en incitant les enfants à dénoncer les parents qui auraient la main trop vive. A cet égard, la destruction méthodique de la famille traditionnelle dans nos sociétés du XXI° siècle présente une évidente parenté avec les perspectives d’un Himmler.
On pourrait s’imaginer que l’antisémitisme des nazis établit une différence incontestable avec notre époque. Bien entendu il n’en est rien, sauf la brutalité et le provincialisme évoqués plus haut. L’hostilité d’Hitler à l’égard des juifs tient à leur prétention à se réclamer du peuple élu de Dieu. On conviendra que le principe de non discrimination et celui d’égalité rendent cette prétention tout aussi insupportable à notre modernité. Néanmoins, nul besoin ici de procéder à des exterminations ; il suffit de favoriser la sécularisation du judaïsme pour neutraliser cette référence intempestive de la transcendance.
On sait que Hitler envisageait après la guerre de traiter définitivement le problème de l’Eglise catholique (« on leur réglera leur compte à ceux-là quand on en aura fini avec les juifs »). Manifestement, le programme prend ici plus de temps qu’on n’aurait pu l’espérer dans les années soixante ou soixante dix ; il semble que le mouvement de sécularisation adopté avec enthousiasme par une grande partie du clergé a fait long feu. Il devient plus difficile de trouver des relais à l’intérieur de l’institution en raison du vieillissement de ce clergé 5° colonne. En revanche, les médias jouent un rôle essentiel de neutralisation et surtout de discrédit de l’Eglise catholique ; à cet égard, on a récemment reconnu le rôle précurseur de Goebbels dans l’exploitation de scandales impliquant des ecclésiastiques. Grâce aux bandes dessinées, romans et films dépeignant des ecclésiastiques corrompus et hostiles à la démocratie (le coup du moine – ou du cardinal - vicieux ou meurtrier donne toujours d’excellents résultats), une grande partie de la jeunesse a une vision très négative de l’Eglise catholique. Or, une fois celle-ci marginalisée et inaudible, rien ne s’opposera plus à un avenir radieux où le clonage (esprit de Mengele, es-tu là ?) nous assurera une quasi-éternité.
Alors, Dewoitine ou Messerschmitt ? Qu’importe !
XB


[ De PP à XB :
- Intéressante démonstration par le paradoxe ! Mais quand même, ne réduisez pas notre discussion à une comparaison des mérites aéronautiques de deux chasseurs légers...
- Hitler voulait-il détruire le peuple juif pour une raison d'élection divine ? C'est discutable, dans la mesure où le "Dieu" d'Hitler n'était pas celui de Moïse. Il n'y avait donc pas concurrence. On ne connaît de cas de racisme "biblique" que chez les puritains d'Amérique et les théoriciens de l'apartheid sud-africain. ]

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Écrit par : xb / | 03/06/2010

PAS D'ACCORD

1) Avec des "si", on mettrait Paris en bouteille...
2) Il est injuste de faire de Weygand un défaitiste.
MG


[ De PP à MG - Vous m'obligez à vous répondre :
a) que votre jugement du "si" et de la bouteille n'est pas au niveau de l'ouvrage en question. Vous devriez commencer par en prendre connaissance.
b) Sur Weygand, relisez donc Bernanos, qui savait de quoi il parlait. (cf 'Le Chemin de la Croix des Ames'). ]

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Écrit par : Michel de Guibert / | 03/06/2010

DROITE INCURABLE

> Pour une certaine frange de la droite, 1961-1962 aggrave 1940-1944. De Gaulle est considéré comme un traitre abandonnant lâchement son pays; les résistants sont pris globalement pour des assassins, tandis qu'on affirme que Weygand préparait la revanche contre l'Allemagne. Enfin, l'Angleterre qui a détruit notre flotte est encore plus détestée que les Allemands. A dire vrai, cette mentalité a de quoi attrister quand on connaît intimement les personnes qui tiennent ce genre de discours.
Mais bon! cela doit être lié aussi à une génération traumatisée par la débâcle. Pourtant, le déchaînement de haine que peut susciter De Gaulle, encore en 2010, est assez surprenant.
Bien sûr, je ne vise pas du tout Christ Hope. Il n'y a aucun amalgame à soupçonner de ma part.
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Écrit par : Blaise / | 03/06/2010

DEFAITISME DE NOTRE ELITE

> D'où vient ce défaitisme récurrent de notre élite? Ne vient-elle pas au fond de sa peur du peuple français, dont elle est issue mais qu'elle renie,et qui se traduit en haine, aujourd'hui, en fascination pour les Etats-Unis? La révolution de 1789 n'a-t-elle pas été "volée" au peuple par la bourgeoisie, d'où la conscience barbouillée de celle-ci?. Et en effet, l'obsession de la bourgeoisie à se distinguer du reste du peuple, en dressant sans cesse de nouvelles barrières culturelles et économiques, sa fascination pour la noblesse dont elle épouse les rejetons ruinés et malformés, achète le titres à rallonge,est symptomatique de son besoin à justifier son "usurpation" du pouvoir; de même sa grande peur de toute agitation populaire, le soin qu'elle met à l'empêcher de devenir trop vigoureux,trahit sa crainte qu'un jour il ne cherche à aller au bout de la logique révolutionnaire et devienne incontrôlable, ce qui serait grandement nuisible aux affaires, même si, n'est-ce-pas, une telle tentative serait vouée à l'échec, le peuple au fond n'étant pas attiré par le pouvoir,mais pouvant faire monter les enchères au nom d'un idéal de justice sociale dont la classe dirigeante ne veut pas entendre parler, voire, pourquoi pas?, rétablir une forme de monarchie. Une victoire contre les Allemands grâce au peuple français? Qui coûterait combien? Alors qu'il y a tellement à apprendre de la prospérité économique de l'Allemagne nazie? Nos dirigeants ont saigné le peuple en 14( et ce qui restait de noblesse ,surreprésentée dans l'armée mais empêchée de prendre aucune décision,écartée des Etats-majors pour les raisons que l'on sait), humilié en 40,tenu aujourd'hui par la peur du chômage et des délocalisations...Il semble qu'il y ait eu une possibilité de changer la donne avec De Gaulle et les héros de la résistance, en réintroduisant des valeurs aristocratiques, voire une monarchie constitutionnelle... Relire l'article"Paix" de l'Encyclopédie: c'est une dénonciation sans appel de la guerre au nom d'une conception du bonheur....très bourgeoise, où il n'est jamais question de grandeur ni d'honneur(certes de liberté...du commerce en vérité), mais de prospérité économique. Avec de tels arguments, les Russes n'auraient jamais arrêté Napoléon, non plus les Nazis, mais les Américains qui ont le sens des affaires ont bien fait d'attendre avant d'intervenir.
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Écrit par : Anne Josnin / | 03/06/2010

@ PP

> Bernanos écrivait avec sa fougue habituelle peu après l'armistice de 1940 et mettait tout Vichy dans le même sac.
Je le crois injuste à l'égard de Weygand, appelé beaucoup trop tard après l'éviction de Gamelin et dont on sait le rôle éminent par la suite dans la reconstruction de l'armée d'Afrique ; ce n'est pas l'attitude d'un défaitiste ou d'un dégénéré !
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Écrit par : Michel de Guibert / | 03/06/2010

LE POUVIONS-NOUS ?

> Je n'ai pas lu le livre de Sapir mais je pense que l'exercice de simulation qu'il a pratiqué doit être utile pour éclaircir cette pèriode après coup.
On sait aussi depuis "guerre et paix" de Tolstoï qu'il y a ceux qui font la guerre et ceux qui la racontent et souvent ceux ne sont pas les mêmes.
Je crois, comme beaucoup de monde sûrement, à la vérité des faits.
Pour m'être un peu intéressé à cette pèriode, je pourrais en citer beaucoup qui ne seraient pas tous politiquement corrects.
Deux faits me viennent à l'esprit :
- Le premier : Henri Amouroux dans l'un de ses livres raconte que De Gaulle devenu secrétaire d'Etat à la Défense, ordonne, en pleine débâcle, à Darlan alors à la tête de la Marine, , de prépositionner le nombre de navires suffisant pour être en mesure d'embarquer 100 000 hommes de troupe de Bordeaux vers l'Afrique du Nord. Darlan déjà fort occupé par d'autres opérations et ne croyant pas du tout au réalisme de cette idée dans ces circonstances fulmine mais s'exécute et place un premier groupe de navires adaptés en temps voulu et à l'endroit voulu. Malheureusement, De Gaulle ne fut pas en mesure de mettre les troupes prévues en face...
Le deuxième se passe au début de l'offensive allemande et j'ai de bonnes raisons de dire que ces faits sont exacts. Il est fait ordre à une escadrille de bombardement de se rendre en un point précis à un rendez-vous avec autant d'avions anglais pour aller de concert bombarder les troupes allemandes. L'escadrille française se rend au rendez-vous mais là, pas d'anglais : elle continue seule, accomplit sa mission, mais seule la moitié des avions français revient.
Il y a eu faute militaire dans cette guerre et c'est une évidence : à mon avis Gamelin étant le chef à ce moment-là, c'est à lui et lui seul qu'on la doit : c'est trop facile de se ratrancher derrière des tas d'excuses.
Mais quant à dire que continuer le combat en Afrique du Nord était sûrement la bonne solution : la plus flatteuse pour l'esprît sûrement, mais le pouvions-nous? Acheminer 500 000 hommes avec leur matériel, en pleine débâcle, de la métropole vers l'Afrique du Nord, c'est sûrement facile sur le papier mais plus dur dans la réalité.
OLP


[ De PP à OLP - D'où l'intérêt du travail de l'équipe Sapir, qui étudie tous les paramètres de ce problème... et conclut à la faisabilité technique de l'opération. ]

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Écrit par : olivier le Pivain / | 03/06/2010

COMMUNISTES

> Je me fais le même genre de remarque que Jean de Valvinaud. Le livre prend-il en compte les actions de sabotage des communistes qui n'ont cessées qu'à la rupture du pacte germano-soviétique ?
Rupture du pacte germano-soviétique qui aurait pu, par ailleurs, être sérieusement retardée si l'Allemagne s'était embourbée sur le front ouest. On peut donc penser que la résistance communiste à la résistance française contre l'Allemagne aurait entravé plus durablement encore les efforts français.
Je demande donc juste si ce livre prend en compte cette dimension particulière de la guerre « qui aurait pu être menée » ?
Th.


[ De PP à Th. - Le livre rappelle que le PCF était hors la loi depuis 1939. Le problème dont vous parlez peut être envisagé, mais à sa place qui est relative. On ne doit pas l'exagérer, en dépit de la vulgate de droite qui a eu cours pendant plusieurs dizaines d'années : ainsi j'ai entendu parler dans mon enfance de "sabotages de chars", voire des chars "livrés sans tourelles" ; mais, vérification faite, l'autorité militaire n'avait relevé aucun cas de ce genre en 1939-1940.
Rappelons aussi que le pacte germano-soviétique avait semé un malaise dans l'esprit de nombre de militants du PCF, viscéralement "antifascistes", qui se trouvaient être les plus activistes (Brigades internationales etc). On les imagine mal auxiliaires actifs de la Wehrmacht en 1940. ]

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Écrit par : Thomas / | 04/06/2010

ANTIGAULLISTES

> Au sujet de 61-62. Beaucoup d'antigaullistes forcenés détestent le Général a cause de cette période et cela les a poussé à démolir ce qu'il a fait en 40-44. Si il y a encore des vichystes aujourd'hui c'est en partie par réglement de compte sur l'Algérie.
Très honnêtement sur l'Algérie j'attend de sérieux travaux d'historiens pour me faire une opinion. Cette période est peu étudiée, elle soulève des passions effroyables et génère des polémiques monstrueuses. Or ce n'est que dans la sérénité que vient la vérité. Je pense notamment, au sein même de l'Eglise, aux querelles sur la béatification d'Edmond Michelet. Sur ce dernier, des recherches sont d'ailleurs en cours.
Enfin, le contexte de la France lors de la guerre d'Algérie était celui d'un pays fragile, avec une armée forte, frustrée des pertes coloniales et très anticommuniste. En étant l'homme providentiel des militaires en 1958, de Gaulle a évité à la France d'avoir a sa tête un "Franco" français. Cela valait peut-être un "je vous ai compris"...
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Écrit par : Damien Etienne Thiriet / | 04/06/2010

A Anne Josnin:

> ce que vous dîtes m'évoque des choses. "le peuple au fond n'étant pas attiré par le pouvoir,mais pouvant faire monter les enchères au nom d'un idéal de justice sociale dont la classe dirigeante ne veut pas entendre parler, voire, pourquoi pas?, rétablir une forme de monarchie."
Je crois que vous avez raison sur cette attente profonde d'un leader, une sorte de messie tel saint Louis ou cet autre, le seul roi répondant effectivement et strictement à cette attente populaire d'un leader, "le roi des Français", Louis-Philippe, surnommé Egalité si je ne m'abuse. Souvenons-nous a contrario des rois DE FRANCE de l'absolutisme, et des Présidents DE LA REPUBLIQUE FRANCAISE (habile tentative langagière). Le dernier régime qui s'est réclamé des français de manière ostentatoire et visiblement populiste, ce fut l'Etat français justement. Le patriotisme y a montré toute sa grandeur et sa faiblesse. (CS Lewis a un ouvrage intéressant abordant entre autres cette forme de l'Amour: Les 4 Amours)
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Écrit par : Christ Hope / | 04/06/2010

@ PP :

> à vrai dire je ne pensais pas à Claudel mais à un autre (qui s'est littéralement déchaîné contre Vichy ... ds les années 50!) mais c'est un fait peu connu et dire son nom lancerait une polémique.
Pr le reste : tant mieux et poignée de main

@ JG :

> des membres de l'administration française (donc de Vichy si l'on veut) il y en a eu un bon nombre à avoir caché des juifs et des résistants. Si ! si ! Dénoncé car membre de l'Armée Secrète du général Delestraint (un vrai héros catholique mort en déportation celui-là), mon brave grand-père en a caché des juifs, et même une famille entière; ma mère jouait avec eux ds la cave de la maison.
A la fin de la guerre ,mon grand père est revenu, semblable à un squelette vivant; celui qui l'a dénoncé a fait une belle carrière au Ministère de l'Intérieur. Comme il en savait long sur les agissements de pseudo résistants communistes du Limousin (bandits de grand chemin qui réglaient des comptes personnels, qui suprimaient ceux qui pourraient être des opposants politiques) on a cherché à l'accuser et à le faire fusiller ; c'est un rabbin qui a témoigné pour lui et l'a sauvé , cela a eu plus d'influence que les membres de son réseau.
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Écrit par : zorglub / | 04/06/2010

LE 520

> Le Dewoitine 520 était tellement bon qu'il a servi (et a été très apprécié) dans la Luftwaffe, après 40...
http://www.paulstamm.eu/france/start.php?d_37185.php
(en bas de la page)
Trop peu, trop tard... J'espère qu'on ne dira jamais la même chose de notre Rafale.
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Écrit par : Feld / | 11/06/2010

LE RAFALE

> Je n'ai rien dit sur le D520... mais si vous lancez le débat sur le Rafale !
Autres temps, autres moeurs. Dans les années 40, un avion était opérationnel 18 mois après les premiers coups de crayon sur la planche à dessin. Le Rafale a été imaginé dans les années 80, conçu dans les années 90, ne devient opérationnel que dans les années 2000. 20 ans, c'est très long, dans un monde qui change si vite ; notre bon Rafale est donc complètement bâtard, imaginé pour des missions qui n'existent plus, conçu pour d'autres autant dépassées, et personne ne sait ce qu'il en sera dans 10 ans. Un vrai casse-tête. Et 20 ans d'études et de mises au point à rentabiliser, ça coûte très cher, notre si bel avion est donc invendable.
Pardon pour cette parenthèse !
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Écrit par : PMalo / | 12/06/2010

OBSOLESCENCE

> D'ailleurs, à l'heure des drones et des missiles de croisière, on se demande si un tel avion de combat est encore utile. C'est la même chose que pour les porte-avions dont les USA sont en train de réaliser l'obsolescence au moment ou les Russes mettent en service des missiles tactiques anti-porte-avions ainsi que des torpilles a grande capacité dans le même but. La tactique d'emploi des porte-avions date des années 40. Les situations et les moyens ont changé depuis.
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Écrit par : vf / | 12/06/2010

A PMalo et vf

> Effectivement, si ma mémoire est bonne, le démonstrateur du projet Rafale a volé pour la première fois en 1986. Mais le développement d'un avion de combat - et c'est particulièrement vrai pour un aéronef à vocation polyvalente comme le Rafale- est un processus itératif. Rappelons que nous en sommes au troisième standard (le "F3"). En l'espèce, on ne peut donc pas parler de risque d'obsolescence.
A mon sens, l'enjeu de ce programme pour la France est très important : avec le Rafale, on est un des derniers pays au monde à pouvoir construire un avion de A à Z. En matière de souveraineté, une telle spécificité n'a pas de prix. Reste à décrocher un premier contrat export, afin de faire baisser les coûts et de permettre à nos forces d'être équipées dans de bonnes conditions...
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Écrit par : Feld / | 13/06/2010

A feld:

> je comprends parfaitement la nécessité de fabriquer des armes pour se défendre mais j'ai du mal à accepter qu'on les vende et ceci autant pour des raisons de principe que de stratégie (il est débile à mon sens de vendre à l'étranger une technologie de pointe qui doit servir à notre défense. cf les transferts de technologie annoncés en cas de vente du rafale au Brésil et qui peuvent finir chez je ne sais quelle dictature).
En ce qui concerne le coût des programme, il faut aussi se demander si la difficulté à en supporter le poids ne vient d'une mauvaise gestion des budgets (sans parler de la volonté de certains politiques d'abandonner au secteur privé les prérogatives de l'état). La nation doit faire un effort pour sa défense sinon elle se condamne à abandonner sa liberté.
P.S: je suis conscient de la disproportion des budgets entre la défense et l'EN. Mais je rappelle que je fais partie de ceux qui ne réclament pas plus de moyens mais qu'on vire les psycho-pédago qui ont détruit l'école.
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Écrit par : vf / | 13/06/2010

Cher vf

> La décision de vendre un armement sophistiqué à un pays étranger me paraît relever du risque calculé. C'est d'ailleurs bien pour cela que nous avons en France un système de contrôle des exportations d'armement très "regardant" (CIEEMG, ...), que d'aucuns trouvent particulièrement lourd.
Et de toute façon, en cas de conflit, il vaut mieux avoir à faire à sa propre haute technologie, dont on connaît les forces et les faiblesses, qu'à celle des autres...
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Écrit par : Feld / | 17/06/2010

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