21/05/2010
Florence Aubenas : « est-ce cette société-là que nous voulons ? »
Dans 'Le Quai de Ouistreham' (L'Olivier, février 2010), la journaliste met en lumière la précarité sociale... qui guette désormais l'Occidental moyen, livré à un capitalisme misanthrope où même la croissance – quand elle est là – ne garantit plus l'emploi :
La journaliste Florence Aubenas explique son enquête comme travailleuse précaire à Caen :
<< Je me suis inscrite comme demandeuse d'emploi dans une ville moyenne sous mon nom, mais avec sur mon CV le baccalauréat et aucune expérience professionnelle. En fait, je n'ai pas vu une crise en train de naître, mais une précarité installée, des difficultés présentes depuis des années... Je me disais que je trouverais du travail parce que j'étais prête à faire n'importe quoi, je découvre qu'on rame longtemps pour obtenir ce n'importe quoi et qu'une vie peut être installée durablement dans le n'importe quoi, comme avoir quatre CDD dans la journée de deux heures chacun...
Le métier qu'on m'a proposé est spécifiquement féminin. Mais, surtout, la précarité a un sexe : huit précaires sur dix sont des femmes ; huit personnes sur dix qui gagnent moins que le Smic également...
C'est un milieu rude où l'on parle crûment et où l'on est en compétition pour les mêmes boulots. Mais comme tous sont dans le même bateau, quand je cherche une voiture pour me rendre sur le ferry, j'en trouve une dans l'après-midi et on me la répare quand elle tombe en panne. Tous savent que c'est vital pour trouver du travail (des heures en fait), et que si leur voiture lâche, je les prendrai avec moi...
Le propre de la précarité est l'angoisse du lendemain : aurai-je encore ce boulot ou vais-je être virée ? Louer un appartement, obtenir un crédit, tout devient compliqué...
Syndicats, prudhommes, inspection et médecine du travail existent, mais n'ont pas de prise : on ne poursuit pas son employeur pour deux heures non payées, les syndicats recrutent difficilement parmi des personnes qui ne travaillent que quelques heures sur un site. Les précaires pensent aussi que leur situation est transitoire, qu'elle va déboucher sur une vie plus correcte. Ils font profil bas en se disant qu'ils auront plus de possibilités d'être intégrés. C'est illusoire : il ne s'agit plus d'un sas, mais d'un statut définitif...
Le marché du travail est composé à 80 % de CDI et à 20 % d'emplois précaires dont l'importance va croissante et ronge l'autre partie très rapidement. En 2000, un contrat en intérim était d'une durée moyenne de six mois. Elle est actuellement d'un mois et demi. Il faut savoir si nous voulons cette société-là. >>
(TGV-Magazine, mai 2010).
10:20 | Lien permanent | Commentaires (5) | Tags : social
Commentaires
LARROUTUROU
> Pierre Larrouturou, dans sa contribution aux travaux préparatoires des Etats-généraux du renouveau (juin, Grenoble) :
"Le changement fondamental vient de la révolution que nous avons connue en matière de gains de productivité. Grâce aux robots, grâce aux ordinateurs, nous avons réalisé plus de gains de productivité sur les 40 dernières années que sur les deux siècles précédents. Aux Etats-Unis comme ailleurs, on peut produire plus sans que l'économie ait besoin de plus de travail. Voilà pourquoi, avant même que n'éclate la crise des subprimes, le lien croissance-emploi était de plus en plus distendu. Et plus on attend le retour de la croissance, plus la précarité augmente, plus il y a de petits boulots et de petits salaires... Pour toutes ces raisons, il faut construire un nouveau pacte social et écologique. Créer massivement des emplois sans croissance est possible... Sans attendre le retour de la croissance, nous pouvons créer des centaines de milliers de vrais emplois, utiles, durables et non délocalisables."
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Écrit par : Ned / | 21/05/2010
A QUI PROFITE LE CRIME ?
> Les parallèles avec le système politique de la Rome antique (clientélisme, démagogie, "apartheid" social strict...) me font espérer que tout cela finisse par péter car visiblement notre infime minorité de possédants n'a aucune envie d'entendre parler de quelconques réformes. Voir l'article consacré par Libé hier à un bel exemple d'ordure, pardon, ancien-sénateur :
http://www.liberation.fr/politiques/0101636665-ancien-senateur-evade-fiscal-et-fier-de-l-etre
Écrit par : Pierre-Aelred / | 21/05/2010
CONTRE LE FATALISME
> Parce qu'on nous a demandé notre avis? Non, mais on nous a expliqué que c'était le mouvement inéluctable de l'histoire, du progrès,et que c'était même une faute de chercher à s'y opposer. Et aujourd'hui quand on lance le débat dans une discussion, très vite le sujet est clos par une remarque du genre:"Qu'est-ce-qu'on y peut?". Aussi lutter contre le fatalisme en montrant que c'est de fait du collaborationnisme,reconquérir dans les esprits et les coeurs notre avenir, que personne n'a le droit d'écrire à notre place!,ou bien tous les beaux discours sur les droits de l'homme ne sont que pipi de chat,telle est la priorité.
L'avenir n'est écrit nulle part,(et le fatalisme est un défaut de vision qui fait voir l'avenir derrière nous et nous mène effectivement droit dans le mur), il est tellement plus ouvert, avec de l'imagination, de la volonté et de la solidarité, que ceux qui profitent du système voudraient nous le faire croire! Le socialisme soviétique est mort parce que plus personne ne croyait au grand soir,et que les peuples se sont réappropriés leur histoire: il est temps d'en faire autant avec le libéralisme matérialiste, de dénoncer la propagande en la confondant par les faits. Oui, mais les Etats soviétiques avaient un modèle alternatif tout trouvé,quand nous n'en avons plus? Et bien cherchons, dans notre histoire, dans les terres reculées des campagnes indiennes ou de la forêt amazonienne, des foyers de résistance,inculturons-y la doctrine sociale de l'Eglise, et de ces villages de gaulois, non mais!démoralisons les modernes légions romaines par notre joie de vivre et notre rusticité revendiquées.
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Écrit par : Josnin / | 21/05/2010
AU BOUT DE LA LOGIQUE LIBERALE MERCANTILE
> Nous arrivons au bout de la logique libérale et mercantile. Nous avons la production que le marché n'arrive plus à absorber... Et pour cause, un chomeur ou un précaire, pas plus qu'un smicard ne sont des consommateurs corrects.
Les économistes libéraux avaient sans doute pensé pouvoir se passer de consommateurs... cruelle désillusion.
L'occident s'enfonce dans la crise, l'Afrique y reste désespérément, et les chinois et autres "émergents" ne consommeront que timidement la production d'une machine devenue folle.
Et nous ne parlons pas de l'épuisement des ressources ni de la pollution de notre terre.
Ne rêvons pas avec un hypothétique retour de la croissance, même en période de croissance, il est vrai que ne se recréeront jamais les postes disparus - ou à tout le moins jamais au même niveau - de salaire ou de compétence.
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Écrit par : franz / | 21/05/2010
MARGES
> Sur le plan écologique, celui de l'écologie humaine et sociale de l'Eglise, j'ai été frappé par la faculté de méconnaissance ou d'oubli généralisée des acteurs publics à l'égard de certaines dispositions légales anciennes ou récentes.
Exemple type alors que je "fouinais" ce weekend sur la question des régies municipales...
Code Général des Collectivités Territoriales, article L 2221-15, à propos des REGIES AYANT POUR OBJET DE COMBATTRE LES PRIX EXCESSIFS DES DENREES ALIMENTAIRES DE PREMIERE NECESSITE (issues du décret du 30 octobre 1935 article 1er).
"Lorsque les régies à caractère commercial ont pour objet de combattre les prix excessifs des denrées alimentaires de première nécessité, leur création et leur fonctionnement sont réglés par les dispositions de la présente section"
article L 2221-16: "la régie est créée par délibération du conseil municipal. Celui-ci établit son règlement intérieur."
article L 2221-17: "Après la délibération du conseil municipal, le maire ouvre une enquête sur le projet.
Le commissaire enquêteur reçoit les observations des habitants.
S'il y a des oppositions, le conseil municipal délibère à nouveau."
Voilà qui ressemble d'assez prêt aux difficultés soulevées sur les prix d'achat par les producteurs agricoles et les marges "injustes" des secteurs de la distribution finale... Reste à pouvoir convaincre un maire de se positionner en faveur de ses administrés, en l'occurrence les plus défavorisés et les classes moyennes fragilisées. ^^ Mais l'opinion publique et le buzz font bon ménage semble-t-il!
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Écrit par : Christ Hope / | 31/05/2010
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