07/03/2010
3ème conférence de Carême à Notre-Dame de Paris : Dieu dans l'histoire – et le chrétien face à la crise mondiale
Thème de ce dimanche : l'histoire du salut, Dieu dans l'histoire, le rôle de l'Eglise, et ce signe des temps pour aujourd'hui : le changement de société qui doit naître de l'échec du système néolibéral... Cela autour de deux axes de Vatican II : la constitution dogmatique Lumen gentium (le salut offert par Dieu), et la constitution pastorale Gaudium et spes (le salut reçu par les hommes, dans les conditions de notre temps) :
Le premier axe a été suivi par le P. Dominique de la Soujeole o.p. (auteur d'une Introduction au mystère de l'Eglise [1]). Le second, par Michel Camdessus.
Le P. de La Soujeole a développé la perspective de « la présence continue, dans la suite des générations », du Christ venu soulever le monde de l'intérieur et lui donner accès au Père. Dieu reste le Seigneur de l'histoire malgré l'accumulation des fautes humaines, a-t-il souligné : par le Fils, le Père et l'Esprit sont présents dans l'Histoire pour y garantir l'espérance. Dieu est le futur vers lequel tend toute la création rachetée, a dit le théologien dominicain : destinée à un auditoire particulièrement nombreux dans la cathédrale, c'était une vision holistique du salut, capable de guérir l'homme moderne de son individualisme prédateur; et une vision tendue vers l'avenir, qui guérit de toute nostalgie.
Michel Camdessus a notamment confronté l'espérance chrétienne avec la catastrophe déchaînée par la faillite du néolibéralisme : faillite qui rend inéluctable un changement radical de culture et de système, même si ce changement s'annonce difficile, laborieux, et freiné par la coalition des intérêts et des aveuglements... De la part de l'ex-directeur général du FMI, naguère persuadé des vertus absolues du marché, exprimer ce constat est une évolution appréciable (et un courageux témoignage) ; M. Camdessus a encore un effort à faire pour cesser de croire rétrospectivement à l'altruisme d'Adam Smith et à l'ouverture spontanée du capitalisme aux considérations sociales – mais sa conversion à l'économie solidaire est visiblement en marche. Outre son accent sur les urgences nouvelles [2], il a amorcé une repentance au nom de la classe des dirigeants économiques de la fin du XXe siècle : tous plus ou moins pris dans le néolibéralisme, a-t-il reconnu, nous avons livré le monde à la finance et au profit immédiat, ce dont les peuples subissent aujourd'hui les conséquences.
Conclusion de Michel Camdessus : il faut maintenant mettre en oeuvre les changements préconisés par Caritas in veritate, et instaurer le don au coeur de l'activité économique. Ce qui équivaut à quitter le néolibéralisme pour inventer une société nouvelle... Et c'est ce qu'a compris la foule réunie dans la cathédrale. Les conférences de Carême 2010 sont bel et bien un événement.
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[1] Parole et Silence, 2006.
[2] y compris celle de faire face « au changement climatique ».
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19:01 Publié dans Témoignage évangélique | Lien permanent | Commentaires (14) | Tags : christianisme
Commentaires
ALLELUIA
> Quant on sait l'icône qu'est Michel Camdessus chez nombre de catholiques bien-pensants,de ceux qui travaillent dans le monde des affaires notamment, j'ai bien envie d'anticiper Pâques et de chanter:"Alleluia!"
Donnons, oui, donnons:ce qui n'est pas donné est perdu. Message de la veuve de Sarepta, que saint Augustin rapproche admirablement du mystère de la croix. Inversion du rôle de la souffrance: quand elle nous refermait dans une attitude de douleur sur nous-même, comme pour ne pas laisser se répandre notre vie, s'écouler notre sang, Jésus crucifié renverse la malédiction du repli mortifère, narcissique,en bénédiction du don de soi:être écartelé afin que soit versée jusqu'à la dernière goutte d'amour.Dilatation jusqu'à la déchirure du Coeur adorable.Bienheureuse lance qui nous ouvre la porte de la miséricorde. La souffrance,occasion de tout donner. Et alors ô insondable mystère, ce n'est pas la mort mais la Vie nouvelle qui jaillit.
Gens d'Occident,quand serons-nous assez pauvres et impuissants pour comprendre qu'il nous faut tout donner? Il était facile de croire en la "main invisible" de la Providence,avec Monsieur Smith, quand on tenait fort contre son coeur de boursicoteur gagnant un confortable portefeuille, mais croire en la Providence quand on a les mains ouvertes, qui ne retiennent plus rien mais laissent s'échapper jusqu'au dernier pain, avant de se laisser mourir, soi et son enfant,c'est là qu'il nous est demandé de croire,quand tout échappe...
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Écrit par : Josnin / | 08/03/2010
CAMDESSUS INEDIT
> Belle conférence de Carême. Claire et vive. Avec un Michel Camdessus inédit. Léger et incisif. Comme s’il s’était enfin débarrassé du poids d’une vie professionnelle plutôt soumise à ce veau d’or que fut le marché, dont nos grands décideurs, très « religieusement », pourrait-on dire, nous garantissaient les « vertus ». Eh oui, tous ces messieurs avaient Foi dans le Marché. Grâce à Dieu, les masques tombent. Dans le texte de M. Camdessus, quelques passages sont importants :
– la dénonciation « d’un système économique s’affranchissant de façon de plus en plus radicale, à l’opposé des enseignements du concile, de toutes les considérations morales suspectées d’entraver la “maximation” immédiate du profit » ;
– la mise en cause du « gagner plus pour consommer plus », un rappel bienvenu de ce « plus-plus » (« travailler plus pour gagner plus ») qui a connu - certes brièvement - une certaine fortune politique (le temps d’une élection présidentielle) ; comme dit M. Camdessus, « la cupidité » devenue « politiquement correcte » ;
Cependant, je ne puis suivre M. Camdessus lorsqu’il absout dans une certaine mesure ces dirigeants politiques et économiques, tous ces MM. « Plus-Plus » justement, en les fondant dans une faillite morale collective. Ainsi déclare-t-il dans sa conférence : « Le fait que notre monde se soit installé ainsi dans l’ “irrationnelle exubérance”, le fait qu’aucune résistance sociétale ou citoyenne suffisamment vigoureuse ne se soit organisée, le fait que des dirigeants responsables se soient laissés emporter dans ce dérapage collectif, soulèvent une question que j’ai retournée cent fois : comment cela a-t-il été possible ? Il fallait pour cela que les comportements de tous les acteurs s’enracinent dans un contexte culturel où la séduction de l’argent soit telle qu’elle entraîne un aveuglement collectif et que toutes les vigilances soient désarmées (…) » ; on le voit bien dans l’énumération de M. Camdessus, cette faillite morale collective, c’est 1/ « “l’irrationnelle exubérance” de notre monde (une sorte d'émanatisme youp'la boum !) ; 2/ l’absence de résistance “sociétale ou citoyenne” face aux dérives (ce qui est très vite dit – et en l'occurrence compter pour rien la parole de l'Eglise) ; 3/ (eh oui, seulement en 3e position) : « le fait que des dirigeants responsables » se soient laissés « emporter dans le dérapage collectif ».
Je conteste pour ma part cette vision des choses, auto-absolutoire, me semble-t-il, de la part de l’auteur de cette conférence, où le dirigeant politique ou économique n’aurait pas d’éthique ou de vision à produire, où ce dirigeant ne serait que le produit d’une matrice supérieure, la société irrationnelle ou aveuglée et son « contexte culturel », présentés comme la source de tous nos maux.
[ De PP à D. - Je suis en accord avec vous. ]
Écrit par : Denis / | 08/03/2010
STIGLITZ FACE À CAMDESSUS
> Il y aurait beaucoup à dire sur le sujet. Que les droites et les gauches mondiales furent séduites par le néo-libéralisme est une évidence. Ils étaient tous libéraux de gauche ou de droite.
On peut lire sur le sujet un rapport du Sénat français de 1996 (= la droite française) qui vante les réformes ultra-libérales des socialistes néo-zélandais: http://www.senat.fr/ga/ga-027/ga-0272.html
On peut lire un excellent article de l'Express où la gauche britannique vante les réformes libérales de la droite anglaise: http://www.lexpress.fr/actualite/monde/europe/le-spleen-des-gauches_497991.html?p=3
On y devine entre les lignes que c'est bien la potion qu'on essaye de nous faire avaler en France; on dessine les pointillés sur lesquels il n'y aura plus qu'à donner un coup de ciseaux le moment venu. (Par exemple on change le statut d'un établissement public en société anonyme avant de prévoir sa privatisation future; les néo-zélandais ont excellé en la matière; c'est dans le rapport du Sénat précité)
Quant à Michel Camdessus il revient de loin; dans la Grande Désillusion (2003) Joseph Stiglitz, prix Nobel d'économie 2001 , (qui est devenu depuis membre de l'Académie pontificale des Sciences sociales http://www.vatican.va/roman_curia/pontifical_academies/acdscien/own/documents/rc_pa_acdscien_doc_09111999_academicians_social_en.html ) en fait un portrait peu flatteur : « Ecouter les réflexions des « pays clients » sur des sujets comme la stratégie du développement ou l’austérité budgétaire n’intéresse pas beaucoup le FMI. Trop souvent, il s’adresse à eux sur le ton du maître colonial. Une image peut valoir mille mots, et une photo saisie au vol en 1998 et montrée dans le monde entier s’est gravée dans l’esprit de millions de personnes, en particulier dans les ex-colonies. Le directeur général du FMI, M. Michel Camdessus, un ex-bureaucrate du Trésor français, de petite taille et bien vêtu, qui se disait autrefois socialiste (2), se tient debout, regard sévère et bras croisés, au-dessus du président indonésien assis et humilié. Celui-ci, impuissant, se voit contraint d’abandonner la souveraineté économique de son pays au FMI en échange de l’aide dont l’Indonésie a besoin. Paradoxalement, une bonne partie de cet argent n’a pas servi, en fin de compte, à aider l’Indonésie mais à tirer d’affaire ses créanciers - qui appartenaient au secteur privé des « puissances coloniales » (...). Camdessus affirme que la photo est injuste : il ne s’était pas rendu compte qu’on la prenait. Mais c’est bien la question : dans les contacts ordinaires, loin des caméras et des journalistes, c’est exactement l’attitude qu’adoptent les agents du FMI, du directeur général au plus petit bureaucrate. (...) L’attitude du FMI, comme celle de son chef, était claire : il était la source vive de la sagesse, le détenteur d’une orthodoxie trop subtile pour être comprise dans le monde en développement. Ce message, il ne l’assenait que trop souvent. Dans le meilleur des cas, il y avait un membre de l’élite (...) avec lequel le FMI pouvait, éventuellement, avoir un dialogue sensé. Hors de ce cercle, il n’était pas question ne serait-ce que d’essayer de discuter : cela n’avait aucun intérêt. (...) »
(c'est à lire là http://www.monde-diplomatique.fr/2002/04/STIGLITZ/16370 )
Il paraît que depuis Stiglitz et Camdessus se seraient réconciliés. Si Camdessus est en train de faire le chemin que vous décrivez, on ne peut dire qu'une chose: que le Seigneur est grand!
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Écrit par : ND / | 08/03/2010
IL Y A QUELQUES ANNEES
> Je me souviens d'avoir assisté, il y a quelques années, à un enseignement donné par Michel Camdessus, lors d'une session organisée par une grande communauté charismatique. Je n'ai plus le thème exact en tête mais je me souviens m'être dit : cet homme ne sortira pas entier de la salle ; il va se faire écharper. Et là, surprise : aucun murmure, aucune question... je dois reconnaître que cet événement n'avait pas été pour rien dans ma décision de prendre du recul par rapport à la dite communauté.
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Écrit par : Feld / | 08/03/2010
CAMDESSUS ET LE NEOLIBERALISME
1. Un système de faussaire
"Paradoxalement, une bonne partie de cet argent n’a pas servi, en fin de compte, à aider l’Indonésie mais à tirer d’affaire ses créanciers" nous dit Stiglitz, cité par ND.
Ce n'est pas un paradoxe mais le coeur du système : un amas de dettes enchevêtrées dans une interdépendance explosive. Toutes les mesures de sauvegarde consistent par conséquent à "sauver les créanciers" pour éviter l'effet domino. Jusqu'à quand la fuite en avant où l'on fait de la dette sur la dette pour sauver la créance ?
Le vrai paradoxe de notre système, c'est son double aspect libéral et collectiviste. L'Etat providence consiste aujourd'hui à distribuer de "faux droits" ("faux" parce qu'en réalité ils ne sont pas financés et sont donc appelés à s'éteindre) et le système financier consiste à injecter dans les tuyaux du "faux argent" (celui de la dette et de la spéculation). Et l'Etat providence, qui ne sait déjà plus garantir les droits sociaux, se met de surcroît à garantir les créances douteuses spéculatives. Voilà ce qu'est le capitalisme financier : un système de faussaire qui, virtuellement, est déjà mort. C’est comme pour Madoff, un jour ça s’arrête et on ne sait pas vraiment pourquoi ce jour plutôt qu’hier ou demain.
2. Responsabilité collective
Entièrement d'accord avec Denis !
Entrer dans une cathédrale pour faire l'examen de conscience collectif de ses voisins... franchement... ça rappelle le temps des absolutions collectives où l'on confessait les "péchés de la communauté" en disant « Seigneur ne regarde pas le péché de ton Eglise mais vois plutôt ma foi personnelle… »
La dimension collective du péché (ce qu'on appelle aujourd'hui "structures de péché") n'est pas ce que décrit ce monsieur. Le péché est avant tout personnel. Et le péché personnel entraîne d'autres péchés, et entraîne d'autres personnes à pécher, de plus en plus nombreuses, jusqu'à créer un contexte de vice, c'est-à-dire une disposition habituelle au péché, entraînant de plus en plus de péchés personnels etc.
Et ce monsieur a le toupet de dire, à propos de la sous-culture de la consommation : "Elle nous habitait tous, dirigeants et simples particuliers". Ce n'est pas vrai : pas tout le monde. Ce « personne ne savait » est pervers.
Cela dit, d'accord pour souligner aussi les aspects positifs : ça bouge !
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Écrit par : Guillaume de Prémare / | 09/03/2010
@ Feld
> Pouvez-vous nous en dire un peu plus ? Non pas sur la communauté elle-même (peu importe laquelle) mais sur ce qui, en susbstance, aurait mérité une réaction de la salle ?
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Écrit par : Guillaume de Prémare / | 09/03/2010
PAS SERIEUX
> C'est l'esprit du monde. On l'applaudit quand il se trompe. On l'applaudit quand il dit :"je me suis trompé". Ceci n'est pas sérieux ! Les gens ont besoin de gourous : on leur en donne. Rebâtissons le monde: mais sur Jésus Christ. Le grand hic, en plus, c'est que Michel Camdessus dit : "j'ai suivi Gaudium et spes et je me suis trompé". Aïe, aïe, aïe. Il faut revenir à la Réalité. Et détricoter ce monde de transhumances financières, migratoires et autres folies prométhéennes.
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Écrit par : Lumineux / | 09/03/2010
PASSER AUX ACTES
> Vos correspondants ont raison de souligner que Michel Camdessus exagère quand il dit que "tous" se sont fourvoyés ou qu'il n'y a pas eu de "résistance".
Ceci dit, il faut avoir conscience que la remise en cause du système implique :
- de mettre fin à la liberté de circulation des capitaux, de réguler ou de sur-taxer les spéculations ;
- de rétablir des barrières douanières (peut-être selon des critères de protection des droits de l'homme, des droits sociaux, du bilan environnemental, etc.)
- de faire stopper l'émigration économique, de favoriser le développement auto-centré des pays délaissés afin de réduire d'abord chez eux les inégalités, de favoriser le développement des systèmes universitaires locaux au lieu d'accepter des étudiants étrangers qui ne repartent pas dans leurs pays;
- de mettre un coup d'arrêt donc au trop et mal fameux "consensus de Washington"...
Allons-nous aussi, nous catholiques, accepter de ne pas nous soumettre au diktat de l'argent dans nos vies personnelles ? Allons-nous donner le goût de Dieu à ceux qui cherchent loin de lui, mais avec sincérité, notamment dans la jeunesse, à bâtir un monde plus juste ?
L'Eglise a tout à gagner à cesser de présenter la foi comme une réduction à la morale (Benoît XVI vient de le dire aux prêtres de Rome : "le christianisme n'est pas un moralisme"). Et à prendre la tête de l'appel à la Justice sociale. Qui défendra les pauvres et les petits si l'Eglise ne le fait pas ? Plus les partis gauchistes, ils sont moribonds.
Il faut aller plus loin dans la dénonciation de la course à l'argent et passer aux actes par de vraies réformes morales à l'égard de la dictature actionnariale.
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Écrit par : Lumineux / | 09/03/2010
CEUX QUI RENONCENT
> D'accord avec Guillaume de Prémare
Tous n'adhéraient pas au système, seulement le propre d'un système clos, totalitaire, c'est qu'il ne compte pas ceux qu'il exclu ou qui s'excluent d'eux-mêmes: de facto ils cessent d'exister comme humains.
En l'occurence depuis combien de temps ne regardons-nous plus dans les yeux ceux qui mendient notre charité? Les pauvres, ce sont les pauvres dans ce qu'ils ont de dérangeants que nous refusons de regarder,achetant notre bonne conscience et notre paix à coup de politiques sociales déshumanisantes.Or c'est parmi eux qu'il y a toujours eu les vrais opposants au système,et notre société a su beaucoup plus efficacement que les geôles et hôpitaux psychiatriques des systèmes communistes les lobotomiser, les pousser à la folie, les "suicider" socialement et humainement.Dans nos asiles,dans nos rues,(mais aussi dans nos monastères, et qui se reconstruisent, ou dans des sectes hélas, et qui s'enfoncent encore)combien de professeurs qui se sont "explosés" la cervelle et le coeur à considérer en face la folie de nos pédagogues travailler l'âme de nos enfants,enfants cibles privilégiées des publicitaires;combien d'honnêtes gens qui ne se sont pas remis des pratiques déshumanisantes de nos entreprises en recherche frénétique, compulsive,de profit ;combien d'artistes dévorés par leurs visions épouvantables de notre monde,cauchemars apocalyptiques, Jérôme Bosch ou Alien, en extra-lucides qu'ils sont, ...?
Smith lui-même le reconnait, il y a une exception à son(notre) système basé sur l'égoïsme:le mendiant:
"Il n'y a qu'un mendiant qui puisse se résoudre à dépendre de la bienveillance d'autrui".
Voilà pourquoi nous aurons toujours des pauvres, non par inéluctable malédiction, mais parce qu'ils nous sont vitaux pour nous rappeler que, fondamentalement, ce qui fait tenir une société, ce n'est pas le marché et les échanges commerciaux, mais la charité et les échanges de regard, main dans la main, coeur à coeur qui caractérisent toute relation d'amitié.
Nous ne nous en sortirons que dans la mesure où nous ferons des pauvres d'aujourd'hui, comme l'a fait Yunus au Bangladesh, nos maîtres.
Monsieur Camdessus, vous parlez bien,tant mieux tant mieux: laissez-là toutes vos richesses, ne restez pas tout triste avec vos grands biens, partez, à la suite de Jésus qui vous appelle dans ses pauvres, à la découverte de la vraie richesse! Le pouvoir, la richesse, appartiennent à ceux qui y renoncent...
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Écrit par : Josnin / | 10/03/2010
DISCERNER
> D'accord avec Josnin. Mais attention à bien discerner.
Comme l'a dit avec insistance Benoït XVI dans Caritas in veritate; on a beaucoup trafiqué le commandement de la Charité. On en a fait un générosisme universel qui a donné ce que M. Camdessus a cru et dont il découvre la faillite. Theresa de Calcutta le disait : les pauvres sont à vos portes. Inutile d'aller au bout du monde. Et il faut aider les Français avant d'aller aider une immigration économique en folie qui, en plus, n'aime ni ne respecte la France.
Lumineux
[ De PP à L. - Mais pour continuer à citer Benoît XVI : référez-vous à ce qu'il ne cesse de dire au sujet des migrants économiques. Il ne parle pas de "folie"... ]
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Écrit par : Lumineux / | 10/03/2010
Cher Patrice de Plunkett,
> C'est, me semble-t-il, un point essentiel qui mérite d'être examiné en détail. En effet, il va de soi que tout homme doit être traité avec respect sinon avec amour. Les documents pontificaux le disent abondamment. Et, moralement, ils ne sauraient être contestés. Il n'en reste pas moins que l'appel au respect du migrant ne peut pas ne pas tenir compte de la souffrance de celui-ci, dans la dimension non pas de l'accueil mais du déracinement (de son pays, de sa famille, de sa culture, etc.). Les textes épiscopaux et pontificaux le signalent aussi parfois. Alors se pose la question : ne serait-il pas plus respectueux pour eux de les aider à rester chez eux, donc de favoriser le développement des pays d'origine ? Vaste question ? Il me semble que la réponse qui est apportée le plus souvent n'est pas pertinente : on prône alors une aide financière dont chacun voit que depuis des décennies elle n'a pas abouti à grand chose, en tous cas pas à stopper ni même freiner ces "flux" migratoires. Aussi, me semble-t-il, devons nous nous demander si ce n'est pas le "modèle" économique mis en place sur la base de la pensée anglo-saxonne ou des Lumières qui induit ces déséquilibres : Riccardo, Smith, Hobbes même, etc. ont postulé une société qui chercherait son bonheur sans Dieu et par le développement économique seul (matérialisme théorique, devenu pratique). C'est dans cette société que nous vivons. Et c'est ce modèle politico-économique que nous admettons. Sans le remettre en cause. En nous contentant de prétendre l'aménager. Or, il se passe de Dieu. Pouvons-nous nous contenter de cela ? Si nous ne redonnons pas place à Dieu dans la société, nous nous mentons à nous mêmes quand nous prétendons respecter l'homme. Donc, par exemple, les "migrants". Avant d'écoper, il faut faire cesser l'entrée d'eau. Ceci n'a bien sûr rien à voir avec l'asile politique, qui est un devoir.
Cette "piste" intellectuelle a été brillamment exposée par Cavanaugh, par exemple, dans "Eucharistie et mondialisation" dont l'approche est un peu contradictoire, sinon avec l'esprit, du moins avec le résultat des aspirations nées chez des hommes comme Camdessus de "Gaudium et spes".
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Écrit par : Lumineux / | 11/03/2010
D'accord avec Josnin
> Deux exemples : dans les rues de Paris abondent les mendiants professionnels, qui se refilent les places, après avoir écartés les vrais pauvres par la menace. Deuxio : dans des mouvements "philanthropiques" (dans Deus caritas est, Benoît XVI avait bien tenu à marquer que la charité n'est pas la philantropie), parfois cautionnés par l'Eglise, on trouve la logique d'exclusion de celui qui cherche à vivre la charité vraie, laquelle a presque toujours quelque chose de subversif. "Les pharisiens dirent à ses disciples : "votre maître fait bon accueil aux pécheurs", tandis que ces mouvements prônent l'efficacité. Or, la charité est un don sans retour. Un don gratuit. Elle seule peut changer le monde d'aujourd'hui. Elle seule nourrit l'âme. Car "celui qui aime connait Dieu".
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Écrit par : Lumineux / | 11/03/2010
HOLISME
> Enfin, il faut se méfier du "holisme" (vous utilisez ce mot) pour lequel le tout l'emporte sur la partie. La logique de l'amour est plus folle, puisque le Bon Pasteur abandonne 99 brebis pour chercher celle qui est perdue. C'est que l'individu est plus important que le groupe. Ou du moins, pour le dire, en termes évangéliques, que nous n'avons pas à proposer un contre-système "global" à nos sociétés, mais à les aimer, à y mettre cet amour qui est le levain dans la pâte. Pas au-dessus. Pas contre. Pas sans. Dans. Cf. les développements de Benoît XVI sur le prêtre qui ne peut rester sur l'Elysée. Sur l'Olympe, mais doit être un homme pleinement homme. Immergé dans la société. Portant, comme le Christ, avec le Christ, les souffrances du troupeau. Ce monde est à aimer. Pas à critiquer sans cesse, sans amour. Osons la rencontre personnelle avec les non-croyants, souvent bien plus receptifs que ce que la vision de lui que nous donnent les médias laisserait croire. Et ne tombons pas dans le piège du "moralisme". "Le christianisme n'est pas un moralisme" a dit, dans ce même texte pas assez diffusé et à recommander à tous les prêtres que nous connaissons, Benoît XVI.
L.
[ De PP à L. - Pourquoi dire que le holisme consiste à soumettre la partie au tout ? Cette idée n'est pas impliquée dans la notion. Ce qui est impliqué, c'est que le tout est autre chose que la somme de ses parties ! et c'est la définition du bien commun selon Aristote... D'où l'idée que le destin de l'humanité et celui de la planète sont un "bien commun", qui demande à être servi par une autorité mondiale comme le dit Benoît XVI. ]
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Écrit par : Lumineux / | 11/03/2010
PAS CONFORMES ?
> "Pourquoi dire que le holisme consiste à soumettre la partie au tout ? Cette idée n'est pas impliquée dans la notion. Ce qui est impliqué, c'est que le tout est autre chose que la somme de ses parties ! et c'est la définition du bien commun selon Aristote... D'où l'idée que le destin de l'humanité et celui de la planète sont un "bien commun", qui demande à être servi par une autorité mondiale comme le dit Benoît XVI."
Ces dernières phrases ne sont pas conformes à l'enseignement de l'Eglise !
Artes
[ De PP à A. - Vous êtes bien péremptoire en la matière, pour quelqu'un qui ne lit pas les encycliques. Encore un petit inquisiteur anonyme et privé ? (privé... d'information : c'est un genre assez répandu en France). ]
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Écrit par : Artes / | 13/03/2010
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