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28/08/2009

'Caritas in Veritate' est une encyclique ''antilibérale''

... se félicite L'Homme Nouveau :


 

Dans son numéro du 298 août, sous la plume de son président-directeur Denis Sureau, L'Homme Nouveau présente l'encyclique en des termes auxquels nous ne pouvons qu'applaudir. (Joie de voir des « papistes » français réellement en phase avec le pape !). L'article s'intitule « Et si on écoutait enfin l'Eglise ? » Extraits :

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<< Une encyclique antilibérale - […] Benoît XVI sape ici les fondements du libéralisme. Il ne se contente pas de rappeler que le marché doit être soumis aux principes de la justice commutative, distributive et sociale. La justice se rapporte à toutes les phases de l'activité économique, précise-t-il. Le pape va plus loin encore, et ce point a été justement relevé par de nombreux commentateurs : le principe de gratuité et la logique du don « peuvent et doivent trouver leur place à l'intérieur de l'activité économique normale » (n. 36). L'éloge de « l'étonnante expérience du don » (n. 34) est plus proche des travaux d'Alain Caillé et du Mauss que des considérations d'un Hayek hostile à l'idée même de justice sociale...

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<< On trouvera une autre illustration de cette approche dans l'évaluation de la « finance éthique », en particulier à travers l'investissement socialement responsable ou le microcrédit. Ces expériences louables et qu'il faut encourager sont aussi parfois détournées et demeurent insuffisantes car il faut que « toute l'économie et toute la finance soient éthiques et le soient non à cause d'un étiquetage extérieur, mais à cause d'exigences intrinsèques à leur nature même » (n. 45)...

 

<< Animées par une « classe cosmopolite de managers » obéissant aux seuls actionnaires (n. 40), les multinationales ne respectent pas les droits des travailleurs. Elles délocalisent, affaiblissant les réseaux de protection sociale (n. 25)...

 << S'inscrivant pleinement dans le sillage du catholicisme social, le pape ne voit pas dans l'entreprise capitaliste le seul modèle d'organisation possible, ni l'Etat comme le seul garant de la solidarité. « Le binôme exclusif marché-Etat corrode la socialité » (n. 39). « La prééminence persistante du binôme marché-Etat nous a habitués à penser exclusivement à l'entrepreneur privé de type capitaliste, d'une part, et au haut fonctionnaire, de l'autre. En réalité l'entreprenariat doit être compris de façon diversifiée. »



<< Un accueil contrasté - ...Du côté des libéraux, on hésite entre deux attitudes. Soit faire carrément la grimace. Soit tenter de se livrer à une récupération analogue à celle qui avait été élaborée après Centesimus Annus (1991) en ne retenant que des extraits utilisables. L'entreprise s'avère cependant encore plus difficile que pour l'encyclique de Jean-Paul II. Jean-Yves Naudet, président de l'Association des économistes catholiques et libéral modéré, tend à limiter le projet de Benoît XVI à une sorte de « moralisation du capitalisme » (Le Figaro, 10 juillet). Quitte à minimiser l'introduction du don et de la gratuité demandée par le pape au coeur même de l'activité économique, requête radicalement irrecevable pour un libéral conséquent... [A gauche en revanche], Denis Clerc, fondateur de la revue Alternatives économiques, souligne que l'encyclique a une tonalité « bien plus critique » que Populorum Progressio... A propos du marché, le journaliste salue le renversement de la problématique libérale : « Chez Adam Smith, l'intérêt général résulte de la somme des intérêts particuliers, tandis que chez Benoît XVI, c'est le souci de l'intérêt général qui engendre la prospérité privée... Comment ne pas partager ces orientations ? » (La Croix, 9 juillet). >>


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> Doté d'une forte fibre  catholique sociale et d'un oeil de véritable journaliste, Denis Sureau (qui anime par ailleurs Chrétiens dans la cité) dit avec une claire exactitude des choses que d'autres tentaient d'embrumer. Merci à lui.


> Après sa parution au seuil des vacances d'été, l'encyclique doit maintenant être « relancée » dans le public. Ce sera réussi si tous les catholiques français s'y mettent. D'abord en se procurant le texte : chez Téqui (préface de Mgr Marc Aillet, clés de lecture de Denis Sureau) – ou chez Bayard-Cerf-Fleurus-Mame (préface de Mgr Jean-Charles Descubes) – ou chez Parole et Silence, coll. Collège des Bernardins). Ensuite en l'étudiant crayon en main, et en en parlant autour d'eux. Si l'on veut que les gens cessent de croire que « l'Eglise ne parle que du préservatif », il serait temps de ne plus se taire !

 

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Commentaires

OUI, MERCI

> Merci à "L'Homme Nouveau", prescripteur chez les catholiques de tradition. Puisse cette lecture en vacciner certains contre le virus libéralo-droitier qui les intoxique depuis des années. D'abord en leur ouvrant les yeux sur leur contradiction : se dire les hommes du pape en se bouchant les oreilles quand le pape parle. (d'autre chose que de morale familiale).

Écrit par : Rembar, | 28/08/2009

LORS DES SERMONS

> Tout à fait d'accord, en particulier avec la conclusion. Vu l'importance du thème, chaque catholique doit lire cette encyclique, et bien y réfléchir ... Je me demande en fait combien vont réellement le faire ? quelques pourcents ? Depuis deux mois je n'en n'ai jamais entendu parler lors des sermons ... Curieux non ?

Écrit par : BCM, | 28/08/2009

TOUS S'Y METTRE

> "Tous s'y mettre" : aller en parler au curé de la paroisse voisine et à l'équipe d'animation ! Et s'ils n'ont pas l'air très motivés, les motiver quand même ! Je ne vois pas au nom de quoi on pourrait faire l'impasse sur un sujet pareil, alors que l'encyclique est saluée par tous les organismes catholiques de l'HN au CCFD ! Si des paroisses roupillent qu'elles ne s'étonnent pas de se vider !

Écrit par : Mado, | 29/08/2009

LA TELE

> Ceux qui ont l'air de "roupiller" sont quelquefois en fait coincés par quelque chose.
Je parlais de l'encyclique à quelqu'un comme ça en juillet. Sa réponse a été : "Après ce
que Benoit XVI a dit contre le préservatif je ne veux plus entendre parler de lui, j'attends
le suivant". Il a fallu un quart d'heure de discussion pour que la personne reconnaisse qu'elle ne savait pas très bien en fait ce que le pape avait dit "sur le préservatif". Le drame, c'est la télé. Derrière elle c'est tout un travail pour amener les choses à l'esprit des gens avec qui
on discute.

Écrit par : Aurélie, | 29/08/2009

LIBERAL EN QUEL SENS

> Lu ce texte de L'Homme Nouveau avec intérêt et sympathie, mais je suis toujours un peu gêné par l'usage fait par les médias du mot "libéral", qu'ils limitent exclusivement à la sphère économique. D'où bon nombre de malentendus entre Français et Américains, car ces derniers réservent le terme aux moeurs, notamment familiales. Est libéral celui qui est pour le mariage gay et l'avortement, pour faire court. Ce qui unit les deux acceptions, c'est un ensemble de propositions philosophiques fondant le bien commun sur la somme des volontés individuelles, au moyen d'un jeu de la concurrence toujours jugé positif, y compris dans des domaines comme les moeurs, l'éducation ou la religion. Ce qui donne en penser qu'en 2009, tout le monde ou presque est libéral, chacun appliquant son libéralisme à des objets différents. Bien sûr, l'Eglise est anti-libérale, c'est même sans doute la seule institution à l'être si pleinement. C'est pourquoi son discours a toujours des chances d'être mal reçu, car les libéraux sont partout, même (surtout?) à gauche. Tout libéralisme soumet en effet le jugement moral à la seule volonté individuelle, et exprime le désir de l'homme de se faire dieu ... Dans l'intro de Caritas in Veritate, Benoît XVI souligne d'ailleurs la cohérence entre les encycliques sociales des papes et les encycliques de morale familiale et sexuelle, toutes issues d'une unique vérité en Jésus-Christ. Le libéral, au fond, c'est un Pilate (qu'est-ce que la vérité?) qui peut à tout moment se faire accusateur ... si sa morale personnelle est menacée.
Olivier C.

[ De PP à OC - Dans le texte de l'HN comme dans les notes de notre blog, "libéral" est employé au sens français économique. Aucune raison de lui donner son sens américain.
Cela dit, et comme Marx l'avait vu dès l'époque du Manifeste, le libéralisme dans les moeurs (sens dérivé) est un sous-produit du libéralisme économique : puisque tout doit devenir marchandise, y compris les désirs, il faut supprimer toustes les normes morales qui feraient perdre des marchés... Là est le point d'origine des "nouvelles moeurs".
Les catho-libéraux refusent avec obstination de reconnaître ce lien de cause à effet.
Ils veulent croire que le capitalisme est "conservateur", alors qu'il est déstabilisateur par nature (ce dont Marx le complimentait). C'est leur problème : ils sont mal-comprenants. ]

Cette réponse s'adresse au commentaire

Écrit par : Olivier C. | 31/08/2009

> Bien d'accord avec vous !

Écrit par : Olivier C. | 31/08/2009

MARCEL MAUSS

> A propos des travaux des travaux d'Alain Caillé et de Jacques Godbout et du "Mauss" (en hommage à l'essayiste éponyme) sur la gratuité et la logique du don, voir un article très intéressant publié par "La Vie" cet été (en juillet, je n'ai pas la référence exacte).

Écrit par : Michel de Guibert | 01/09/2009

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