20/04/2009
"Ultramontains" ? "conservateurs" ? qu'est-ce que ça veut dire ? pas grand'chose en 2009...
'Golias' m’oblige à lui en parler... D'où aussi (de fil en aiguille) un débat entre vous sur la droite, la gauche et le catholicisme :
Je ne fais pas ma lecture ordinaire de Golias. Mais j’apprends que ce site a jugé bon (à propos d’un article du Monde) de me qualifier de « conservateur » et d’ « ultramontain ». Ce qui prouve que les mots gagneraient à être définis.
En effet :
1. Que veut dire « conservateur » ?
- Si c’est sur le plan économique et social, Golias se trompe à notre propos. Je lui conseille de regarder notre blog. Il verra que des positions radicales peuvent être le fruit d’une foi catholique sans réticences.
- Si c’est sur le plan religieux que Golias m’appelle « conservateur », ce reproche n’a aucun sens. On ne peut être chrétien que si l’on tient (ou « conserve ») la Révélation dans sa plénitude. Ne pas « conserver » celle-ci, c’est… ne pas être chrétien. Je conseille à Golias de se mettre au clair avec lui-même, au lieu d’entretenir une ambiguité terminologique qui ne plaît qu’aux bobos néolibéraux – aux yeux desquels le label « conservateur » résume toutes les vulgarités dans tous les domaines.
2. « Ultramontain » (« partisan de l’au-delà des Alpes ») est un vieux mot du jargon catholique du XIXe siècle. On ne l’emploie plus beaucoup en 2009. Quand on le fait, c’est pour accuser quelqu’un d’écouter le Vatican plutôt que les évêques du pays – comme si cette opposition avait un sens dans l’Eglise catholique. Ai-je cette attitude ? Pas du tout : je fais régulièrement écho aux documents et déclarations de la CEF. On ne trouvera jamais dans mon blog les pointes qu’on trouve dans Golias - ou symétriquement chez les ultras – contre tel ou tel évêque français.
Dans la période 1970-1990, la crise spirituelle hexagonale a conduit un certain nombre de croyants français à se tourner vers l’Italie : l’aliment religieux leur paraissait manquer souvent de notre côté des Alpes. Mais c’est du passé. Les catholiques français n’auraient aucune raison, en 2009, d’être « ultramontains ». Sur aucun plan. Y compris celui de la doctrine sociale : naguère (par exemple) Jean-Paul II s’évertuait seul à signaler aux catholiques la menace mondiale sur l’environnement ; en 2008, les évêques français ont publié un document très complet sur ce sujet.
Conclusion : les catholiques français [1] sont de moins en moins enfermés dans les catégories mentales du siècle dernier. Faisons tous un effort pour regarder ensemble cette réalité, et cessons d’agiter des étiquettes bonnes pour le musée Grévin.
09:53 Publié dans Eglises | Lien permanent | Commentaires (26) | Tags : christianisme
Commentaires
FAUSSE POLEMIQUE
> Le chant du cygne de Golias ? Je me demande s'il survivra longtemps à la fausse et furieuse polémique sur le préservatif en Afrique. Le mur de Berlin construit par les libéro-libertaires bobos serait-il éventré ?
Écrit par : B.H. | 20/04/2009
BOURGEOIS
> Golias perpétue la mentalité Louis Philippe. Un roi bourgeois, qui pour complaire à quelques bourgeois a déplu au peuple.
Écrit par : Annie | 20/04/2009
QUI LIT ENCORE CA ?
> Est-ce vraiment nécessaire de commenter les commentaires de Golias? Dans un sens oui, puisque grâce à cette prose j'aurai appris ce que signifie ultramontain (ç'aurait été encore plus rigolo de vous traiter d'ultra-mondain; peut être une prochaine fois?). Plus globalement, à part un pouvoir de nuisance découlant du fait que la soi-disant grande presse continue de lire Golias en la trouvant avant-gardiste et constructive, ladite revue n'a aucun écho dans le monde catholique. Qui la lit encore, à part quelques accros aux années 70 et à leurs messes qui ont fait fuir tant de chrétiens des églises de France?
natalie
[ De PP à N. - Vous n'imaginez pas à quel point les stéréotypes ont la vie dure, spécialement dans le clergé français ! (Dont font généralement partie les lecteurs de Golias). Evidemment je ne parle pas ici du jeune clergé. ]
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Écrit par : natalie | 20/04/2009
PLUS COMPLEXE
> C'est vrai que c'est assez pénible d'être toujours caractérisé par des étiquettes, conservateurs, libéraux, conciliaire, néoconservateurs, tradis,...
Et en même temps c'est parfois difficile de faire autrement pour caractériser des groupes.
Mais je suis bien d'accord que la réalité est souvent beaucoup plus complexe.
Écrit par : Marc | 20/04/2009
BIGRE
> Les lecteurs de Golias seraient majoritairement des clercs ? Bigre...(comment le sait-on, d'ailleurs ?)
Feld
[ De PP à F. - Relisez "L'imprécateur". Qui serait intéressé par des ragots d'entreprise, en dehors de l'entreprise ? ]
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Écrit par : Feld | 20/04/2009
A GAUCHE ON SAIT DE QUOI IL RETOURNE
> Si ça peut vous rassurer, ça fait longtemps que, même parmi les cathos qui se revendiquent de gauche et qui sont vraiment catholiques (comprendre: pas uniquement pour le CSA lors des enquêtes d'opinion régulières), ou du moins qui essayent de vivre vraiment en catholiques, on sait de quoi il en retourne concernant Golias. Et encore plus quand on connaît Christian Terras.
Sur les stéréotypes qui ont la vie dure, il y en même qui ont la vie dure concernant les catholiques pratiquants "de gauche"... Si si, je vous promets...
[Signé] Une catholique qui vote à gauche, qui en a plus que marre des étiquettes, et qui aimerait bien qu'on juge les propos sur ce qu'ils disent vraiment et non sur les étiquettes qu'on colle à ceux qui les tiennent.
Écrit par : Mahaut | 20/04/2009
PRECISEMENT ?
> Mais quel clergé précisément lit ce journal ? Certainement pas celui de nos paroisses, dont l'attachement au Pape, aux évêques, à la foi de l'Eglise est à mille lieues de la mentalité infantile de Golias.
Peut-être, dans ce cas, un tel lectorat se recrute-t-il dans certains ordres religieux ... ou dans les maisons de retraite ?
Blaise
[ De PP à B. - Il y a des lecteurs ailleurs que dans les maisons de retraite. J'en connais personnellement. (Je ne donnerai évidemment pas d'exemples pour ne pas déclencher de polémiques personnelles ; mais songez à certaines réactions haineuses envers Benoît XVI, de la part de clercs actuellement en fonctions...). ]
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Écrit par : Blaise | 20/04/2009
FRANCE MANIAQUE
> La France est un pays qui aime les étiquettes, voir l'Etiquette (pour rassurer ceux qui n'en ont pas ou faire oublier les grosses à ceux qui en ont de trop). C'est un pays qui aime accrocher des étiquettes et des casseroles aux gens. D'où son avance sur l'affichage des prix. C'est plus pratique pour la corruption.
L'affaire des fiches du général André jusqu'au nombre pléthorique de fichiers témoigne d'un comportement de maniaque.
http://fr.wikipedia.org/wiki/Fichage_en_France
Écrit par : Annie | 20/04/2009
Question à Mahaut :
> La gauche française étant foncièrement antichrétienne et anticléricale, pour de multiples raisons historiques et idéologiques, comment parvenez-vous à résoudre le dilemme qui se présente nécessairement à vous à chaque élection ?
Je vous rassure tout de suite : je m'estime "orphelin politique" jusqu'à nouvel ordre et en tire logiquement les conséquences dans l'isoloir.
Écrit par : Thomas | 20/04/2009
PAS TOUS BIEN SUR
> Je connais un vieux curé breton (+ de 80a) qui trouve l'action de cette revue destructrice pour l'Eglise.
Thierry
[ De PP à T. - Bien sûr ! Ce n'est pas parce que la plupart de ses lecteurs sont âgés, que tous les gens âgés sont ses lecteurs ! ]
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Écrit par : Thierry | 20/04/2009
IMPROBABLE CAMP CONSERVATEUR
> C'est utile de définir les termes vagues qu'on lit et entend à la radio et dans les journaux. "Conservateur" : vous entendez ce mot sans arrêt, pour parler des révolutionnaires islamistes Frères Musulmans (oui, ce sont des "conservateurs") autant que des gens en France qui ne souhaitent pas le mariage gay ! En fait le seul point commun c'est l'affaire du mariage gay.
Car les questions de comportement sexuel sont les seules et uniques aujourd'hui, tout le reste est broutille ! D'un côté le camp du bien pour l'évolution des moeurs, de l'autre tous ceux qui ne sont pas d'accord, réunis en un camp "conservateur" improbable.
Écrit par : Txotxo | 20/04/2009
A GAUCHE, ET POURQUOI
@ Thomas
> Si je continue à être engagée à gauche et à apporter ma voie aux candidats de gauche, c'est parce que j'ai grandi dans un milieu où être catholique/chrétien et de gauche n'a jamais été une contradiction. Il est vrai que j'ai rencontré de nombreuses personnes qui avaient une vision pour le moins caricaturale de la religion, mais ça serait un très mauvais service à rendre à des idées que je crois juste de déserter ce milieu sous prétexte que les catholiques y sont mal vus. Et j'ai eu la chance de rencontrer de très bon amis, athées, pour qui ma foi catholique n'a jamais posé problème, au contraire.
Pourquoi voté-je et suis-je engagée à gauche? Parce que je crois que les propositions économiques et sociales de gauche sont celles qui, sur la scène politique actuelle, qui se rapprochent le plus de la doctrine sociale de l'Église, et qu'il est vain d'espérer appliquer la doctrine morale de l'Église dans une société dont les valeurs économiques et sociales sont à mille lieues de ce que demande l'Église. C'est bien beau de défendre les liens familiaux mais le stress au travail et les rythmes de vie effrénés auxquels nous sommes soumis dans une société (ultra)libérale ne sont pas étrangers, par exemple, au taux de séparation/divorce en France, et particulièrement en région parisienne, où le rythme de vie est particulièrement intense et où un couple sur deux se sépare.
Revenir à une société plus humanisée, où l'homme est pris en compte dans toute sa dignité et dans toute son intégrité, ne pourra se faire qu'avec une modification radicale du cadre socio-économique dans lequel nous vivons. De là découlera naturellement l'application d'un certain nombre de points de la doctrine morale de l'Église.
Si je voulais vraiment développer tout ça, il faudrait plus qu'une réponse à ce billet.
@Txotxo
Euh, oui, je veux bien, mais le camp (abusivement) dit "conservateur" nous rend souvent bien la pareille. Certains n'ont que la question des moeurs à la bouche pour juger (de quel droit?) de la catholicité de leur semblable et votent sans aucun état d'âme pour les candidats les plus libéraux économiquement qui soient, tout en traitant de "gauchistes" (ce qui est rarement sympathique dans leur bouche ou sous leur plume) ceux qui ont des considérations sociales plus développées et qui pensent que ça fait aussi du devoir d'un catholique de se préoccuper de ces sujets-là. Les clichés, les préjugés, les catégorisations hâtives ont la vie dure de partout.
Écrit par : Mahaut | 20/04/2009
ULTRAMARIN
> Il faudrait peut-être conseiller à Golias d'être un peu ultra marin pour entendre le président Compaore qui disait en se moquant gentiment et ne les prenant pas trop au sérieux: ah ces français ils aiment polémiquer.
Écrit par : jean-michel varcher | 20/04/2009
CA NE TOUCHE PAS LES JEUNES
> Les critiques (injustes) de Golias sur l'évêque de mon diocèse ont été recopiées texto dans le canard local, et ça a fait du bruit dans les chaumières. Mais bon, ça ne touche pas les jeunes.
Écrit par : pierre | 20/04/2009
A Mahaut :
> Je ne vois vraiment pas pourquoi on ne pourrait pas être à la fois catholique et "de gauche", comme l'on dit. De toutes les personnes que j'ai rencontrées et qui étaient proches du PS ou du PC, beaucoup professaient, en matière sociale, des idées très proches de la doctrine sociale de l'Eglise. Je ne suis pas loin de penser que beaucoup de gens, anticléricaux et éloignés de l'Eglise, sont en réalité très proches de Dieu, sans le savoir. Comme le répète à l'envi M. de Plunkett, il ne faut pas limiter l'action évangélisatrice à "nos milieux catholiques" (le microcosme libéralo-catho- bourgeois). Non, la droite, ce n'est pas nécessairement "le respect de la Vie" (entendu de la part d'un ami catho...de droite).
D'ailleurs, l'Eglise, corps mystique du Christ, n'a pas besoin de racines séculières pour être pleinement elle-même. C'est une putain lavée dans le sang de l'Agneau, certes, mais une putain qui n'a pas besoin de souteneur(s).
Feld
[ De PP à F. - D'accord avec vous et avec Mahaut sur ces problèmes. Et vous avez raison de vous étonner qu'un de vos amis puisse dire : "la droite, c'est le respect de la vie". Où ? Quand ? Certainement pas en Europe occidentale, alors que (par exemple) le PP espagnol a fini par rompre avec les catholiques : beau résultat de plusieurs années de méga-manifs pour la famille... Quant aux USA, se rappeler que Bush n'a rien fait qu'en paroles, l'avortement n'étant pas un domaine fédéral... GWB ne risquait donc rien, et pouvait payer de mots ses supporters évangéliques. Lesquels ont fini par s'en apercevoir et par protester dans un livre terrible, qui a eu du succès.]
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Écrit par : Feld | 20/04/2009
à Mahaut,
> Je vous remercie pour votre réponse argumentée.
D'abord, ne pas voir une contradiction ne signifie pas qu'elle n'existe pas.
La proximité avec la gauche française (cette précision a son importance) n'est certes pas toujours associée à ce laïcisme radical et sectaire que l'on connaît que trop bien mais il sévit bien souvent, tout de même, dans ces milieux politiques.
Je suis plus que sceptique sur votre appréciation portée sur les "propositions économiques et sociales de gauche" soi-disant à même de modifier radicalement le "cadre socio-économique". Cette vue m'apparaît naïve. Car enfin, qu'ont fait de décisif, dans ce domaine, les Mitterrand, Jospin et autres Rocard par le passé ? On pourrait y associer Chirac tant ce dernier n'aurait pas fait tache au PS, surtout durant sont dernier mandat.
La gauche française a depuis longtemps embrassé d'autres causes au rang desquelles figure en bonne place la promotion des nouvelles moeurs et des transgressions éthiques.
Enfin, pour reprendre votre exemple, si je souscris totalement à l'idée selon laquelle l'ultra libéralisme marchand et donc moral est un facteur de délitement du lien familial et conjugal, il est tout aussi vrai que les politiciens (de gauche comme de droite) ne s'en émeuvent pas le moins du monde. Comment un politicien pourrait-il déplorer les taux de divorces dans notre société tout en considérant que ledit divorce, moderne donc bien, constitue un progrès majeur, un droit irréfragable, et une conquête "libératrice" ?
Écrit par : Thomas | 20/04/2009
GALLICANS ?
> Je voudrais apporter une précision. Dans la langue théologique du XIX° siècle, on oppose "ultramontain" à gallican qui est devenu aujourd'hui l'esprit de chapelle franco-français on en a le triste témoignage après plusieurs semaines!!!
Bernard
[ De PP à B. - Le gallicanisme du XIXe était un écho de l'Ancien Régime (on ne peut plus gallican) et un effet indirect de la situation héritée du Concordat. Au XXe, on ne peut plus parler de gallicanisme : le mobile "national" s'évanouit et l'idéologie devient une sorte de modernisme sans frontières. Au XXIe, ne restent de tout cela que des vestiges des haines des années 1970-1980 (les affres de la crise pseudo-postconciliaire). Les réactions stridentes de quelques clercs contre Benoît XVI le mois dernier en sont une trace. 'Golias' en est une autre trace. Qualifier "Golias' de gallican semblerait inadéquat ]
Certte réponse s'adresse au commentaire
Écrit par : Bernard | 21/04/2009
PLUS AUCUN SENS
> Ajoutons que l'ultramontanisme aussi est une conséquence du Concordat : puisque l'Empire s'était rallié les les gallicans, les légitimistes se tournaient vers Rome. D'où la symbiose entre drapeau du pape et nostalgie du drapeau blanc pendant une partie du XIXe, cf. les zouaves pontificaux. Cette gémellité provisoire a cessé avec Léon XIII (d'où la haine des intégristes d'alors à son égard : "Pecci a péché, Pecci paiera". Mais elle s'est prolongée dans le micro-milieu ultra-traditionaliste, jusqu'à n'avoir plus aucun sens en 2009. Mais n'est-ce pas, quand on refuse de penser et qu'on veut tout voir comme arrière-grand-papa (parce que la famille c'est sacré)...
Écrit par : Szbrodj | 21/04/2009
@ Thomas
> Sur les questions éthiques, je n'ai jamais affirmé être en total accord avec les toutes les idées présentées à gauche, mais il existe sur certains sujets un consensus assez large, qui est aussi largement présent à droite qu'à gauche, pour tout envisager sous l'angle de l'émotion, du court terme et de la souffrance, de préférence étalée à la télévision, et non avec une vue un peu plus à long terme.
Je souscris évidemment entièrement à ce que dit Feld "Je ne suis pas loin de penser que beaucoup de gens, anticléricaux et éloignés de l'Eglise, sont en réalité très proches de Dieu, sans le savoir."
Quand je parle à mes amis et proches de gauche de la doctrine sociale de l'Église, par exemple, ils y sont beaucoup plus réceptifs que les libéraux athées et anti-cléricaux de droite de mon entourage qui semblent avoir leur propre personne et leurs pulsions sexuelles comme seul intérêt.
Sur le divorce, il me semble que, comme sur beaucoup de sujets, la réflexion gagnerait à ne pas être manichéenne sur l'air de "soit on est contre le divorce, soit on est pour le délitement de la famille". L'expérience (comme sur d'autres sujets sensibles tels que l'IVG, l'homosexualité, etc..., bref, tous les thèmes que d'aucuns confondent avec le christianisme) montre que la vie est parfois un tout petit plus compliquée ça. Le manichéisme est la plaie des débats d'idées en France, mais c'est malheureusement assez répandu, toutes tendances politiques confondues.
Écrit par : Mahaut | 21/04/2009
LE BAS CLERGE
> Il y a encore une autre raison à l'ultramontanisme. Le concordat accordait un pouvoir sans précédent aux évêques (tout en les tenant en laisse). D'où la tentation chez le bas clergé, qui vivait mal cette situation, de jouer le pape contre leur évêque. Ce n'est pas un hasard si une grande part des lecteurs de L'Univers était constitué de simples curés.
Écrit par : Blaise | 21/04/2009
LE CATHOLIQUE ET LA POLITIQUE
> Le choix du catholique dans un élection est un superbe débat. Merci à Mahaut de l'avoir initié et à Feld, comme à Patrice de l'entretenir.
Même si je l'ai fait, je ne me détermine plus de façon partisane.
Effectivement pourquoi un catholique devrait-il être de droite ?
A-t-il d'ailleurs besoin de se situer ou dire qu'il est de gauche ?
Le croyant a une conscience religieuse qui s'ajoute à sa conscience politique. Elle n'ont pas à se confondre. Au contraire. La foi participe à faire un choix plus mesuré, plus réfléchi, plus raisonnable, à l'aune du bien et du juste. C'est un avantage.
Peut-on d'ailleurs parler de conscience politique ? Il semble plus juste de parler d'intérêt politique, puisque l'action publique se mesure en gains et en coûts, en ressources et en résultats, en victoires et en défaites, d'alliances ou de calculs. Von Papen illustre la distinction entre une conscience religieuse et l'intérêt politique. Il était catholique, mais son intérêt politique l'a conduit à l'oublier, le renier.
Le socialisme et le communisme répondent mieux dans les apparences à la justice sociale prônée par l'Eglise. Mais dans les faits, ces deux idéologies sont l'expression d'un même matérialisme que l'on retrouve dans le capitalisme. Une partie de la gauche parle même à leur sujet de "capitalisme d'Etat".
Le matérialisme mercantile de droite et son folklore nationaliste (le nationalisme et l'antisémitisme sont de gauche à l'origine) sont suffisamment critiqués ici pour savoir qu'ils ne correspondent pas à l'idéal chrétien.
De gauche ou de droite, les matérialistes sont des orphelins de Dieu. Ils ne connaissent pas l'amour désintéressé – pour l'avoir rejeté . Cette exclusion de principe fait la difficulté du catholique à se déterminer dans ses choix.
Les matérialistes ont inventé des ersatz qui n'ont que l'apparence.
La solidarité n'est pas la charité. Parce que la solidarité n'est pas un élan qui vient du coeur mais un principe abstrait qui ne se vit pas au quotidien mais dans des structures et le soutien d'institutions. On évoque la solidarité en cas de problème. Ce mot sert souvent à exprimer un manque quand la charité agit tous les jours.
L'étude du discours est un préalable indispensable, mais il n'est pas l'essentiel. L'idéologie doit être ramenée à ce qu'elle est de plus en plus souvent et se prévenir des sirènes "humanistes", abstraction fourre-tout ayant justifié la Terreur. L'idéologie est souvent un prétexte à un buffet tout aussi indigeste. Beaucoup de gens viennent pour le buffet et ne retiendront que cela de la soirée.
L'essentiel est de s'intéresser au candidat, à sa personne, ce qu'il est, ce qu'il a fait, comment il se comporte. L'apprécier au regard d'une "common decency".
http://www.pileface.com/sollers/article.php3?id_article=753
C'est donc sur la personne que doit s'attarder le chrétien.
Je vote donc selon la personne, au cas par cas. Je l'apprécie sur sa sincérité bien plus que sur sa compatibilité avec ma foi. Respect de la laïcité. Apprécier César dans ce qui revient à César, et laisser à Dieu ce qui est à Dieu.
Je ne limite pas mon appréciation à ce qu'il a fait de bien. Ce qu'il a fait de mal peut aussi être pris en compte dans la mesure où il l'assume et a su relever ce défi. Une telle méthode modère la portée des ragots.
Je me méfie des premiers de la classe. J'ai rencontré des candidats estampillés "catholiques" dont le discours et le comportement étaient assez peu orthodoxes ;-) Les références confessionnelles ne valent pas mieux que les déclaration idéologiques.
Il m'arrive de voter pour des candidats de listes opposées selon qu'il s'agit d'un scrutin local, régional ou national.
Pas de discipline de vote.
S'il y a une discipline dans la politique, elle doit régner dans le comportement individuel des mebres d'un parti ou chez les candidats. Elle n'a pas à être attendue des électeurs pour cautionner des stratégies ou des comportements ineptes. Cf. Isocrate déjà cité plusieurs fois
Les électeurs votent en leur âme et conscience. Les politiques n'ont qu'à agir de même
J'attends du candidat de tenir des propos sensés, y compris sur la religion dans verser dans la démagogie ou des prises de positions opportunistes à propos du préservatif rendent son auteur rhédibitoire.
Quand je n'ai aucun candidat qui me plaît je vote blanc, ou pour le pape ou le roi (on en a encore un ici, c'est utile). J'ai voté une fois "Jean Paul II - seul un miracle peut nous sauver". Ca a du marcher. La Belgique existe encore ;-)
Je vote assez souvent pour de nouveaux candidats.
Des petites listes.
Des vieux candidats font état de leur expérience pour perpétuer un système de relations et un phénomène de cour qui les portent à se représenter. Ils ne font plus de politique mais de l'épicerie, puisqu'on parle alors de "clientèle". Le mot résume la dynamique des prises illégales d'intérêts, des trafics d'influence, des passe droit, de la corruption, ...
La menace que ferait peser l'autogestion sur l'avenir d'un tel « marketing politique » serait-elle la raison de l'embastillement des petits épiciers de Tarnac ?
Le plus important semble donc d'affirmer la liberté de vote des catholiques parce qu'avec la laïcité il n'y a plus de vote catholique. Le catholique se caractérise par une pratique religieuse pas par des options politiques.
L'Eglise prône l'importance du libre arbitre permettant à l'homme d'accéder à la grâce. Ce même libre arbitre l'éclaire naturellement dans son vote.
Par nature, le catholique se place idéalement dans ce qui s'analyse comme le « vote flottant ».
Il n'est pas indécis. Il reconsidère son choix à chaque élection.
Aux candidats d'aller à la pêche. Elle ne saurait être miraculeuse pour ceux qui n'y croient pas.
Il ne faut pas laisser l'Eglise se laisser prendre en otage par le politique comme dans le passé avec le concordat ou le gallicanisme. Une telle situation est contraire à la foi parce que le discours de l'Eglise est justement d'enseigner à l'homme la liberté. Le chrétien ne peut donc pas se laisser réduire à des considérations politiques. Il est bien au-dessus de tout cela. Ses préoccupations ne se limitent pas qu'à la seule politique - comme beaucoup s'en contentent de nos jours. Ce qui peut expliquer que la misère et la souffrance persévèrent.
Ite missa est.
J'ai retouvé sur le net le texte de l'enseignement de Ieschoua de Cl. Tresmontant. C'est à discuter.
http://docteurangelique.free.fr/livresformatweb/theses/tresmontant/enseignement_de_Ieschoua.htm
Je vous invite aussi à écouter la conférence de Giorgio Agamben sur "L'Eglise et le royaume" donnée à Notre Dame de Pars dans le cadre du Carême 2009 dont j'ai relevé ce passage :
" A l'éclipse de l'expérience messianique de l'accomplissement de la loi et du temps, correspond une hypertrophie inouïe du droit, qui prétend légiférer sur tout mais qui trahit par un excès de légalité la perte de toute légitimité véritable. Je le dis ici et maintenant en mesurant mes mots : aujourd'hui il n'y a plus sur terre aucun pouvoir légitime et les puissants duu monde sont tous eux mêmes convaincus d'illégitimité. La juridicisation et l'économisation intégrale des rapports humains, la confusion entre ce que nous pouvons croire, espérer, aimer et ce que nous sommes tenus de faire ou de ne pas faire, de dire ou de ne pas dire, marque non seulement la crise du droit et des Etats, mais aussi et surtout celle de l'Eglise".
http://catholique-paris.cef.fr/935-2-Conferences-de-M-Giorgio.html
Écrit par : Annie | 21/04/2009
A Mahaut,
> J'ai parfaitement compris que vous n'étiez pas en phase avec toutes les thèses promues par la gauche française mais je dis simplement que les offensives de cette dernière sur les questions éthiques et morales, d'une part, et son laïcisme militant souvent borné et sectaire, d'autre part, justifient, à mon avis, un "non possumus" radical de la part des croyants. Et c'est justement à cause du large consensus dont vous parlez que je ne me fais aucune illusion sur la droite !
J'apprends qu'adhérer, même sans le savoir, aux propositions de la doctrine sociale de l'Eglise et aux principes fondamentaux qui la régissent, rendrait proche de Dieu. Est-ce suffisant ? Cette proximité intellectuelle sauve-t-elle ? Ouvre-t-elle la voie au pardon des péchés ? Crée-t-elle une union intime avec Dieu ?
La comparaison avec les réactions des libéraux athées et anti-cléricaux de droite (les pauvres) de démontre rien, à mon avis.
Enfin, sur le divorce vous m'avez mal compris. Point de manichéisme dans mon raisonnement. Je cherchais simplement à souligner l'impossibilité pour un politicien de soulever le problème du taux élevé de divorce sans, dans le même temps, remettre en cause le bien-fondé de celui-ci (conquête salvatrice, heureux pas en avant dans la modernité après des siècles de patriarcat et bla bla bla) : position inconfortable qui exposerait aux critiques assassines (rétrograde, archaïque...) de ses pairs, de ses concurrents et de la classe médiatique.
Écrit par : Thomas | 21/04/2009
@ Thomas
> Votre raisonnement sur le divorce :
Il est difficile de comprendre un politicien s'efforçant de dire des choses qu'il ne pense pas - pour plaire à des gens qui ne l'apprécient pas - au risque de froisser les gens qui pensent comme lui.
Personne ne l'oblige à crier avec les loups.
On peut très bien alimenter un débat et faire valoir ses arguments - pour initier une réflexion responsable - sans se placer dans l'opposition radicale ou l'adhésion aveugle.
Sur le divorce : les difficultés des enfants de divorcés, la souffrance des enfants de divorcés, la démission de la responsabilité de parent dans le divorce, l'égoïsme des parents sur l'équilibre de l'enfant (deux adultes qui se marient et font des enfants ont un engagement moral supérieur au code civil vis-à-vis des enfants qu'ils feront naître), etc. Ces questions peuvent être soulevées sans remettre en cause le divorce, ne serait-ce que pour responsabiliser les futurs parents et leur faire sentir l'importance de leur engagement. Un parent responsable transfère son égoïsme sur ses enfants, il ne veut plus ce qu'il y a de mieux pour lui, mais pour eux.
Ce genre de discours n'est jamais tenu et les enfants de divorcés continuent à jouer les intermittents du mariage, les nomades de la multiparentalité, les désoeuvrés de l'affection, les bricolés de l'emploi du temps, les cabossés de l'amour. L'enfant de divorcé est orphelin qui connaît ses parents qui à se regarder de trop n'ont pas le temps de se préoccuper de lui. D'où les dérives qui vont de l'échec scolaire à la délinquance. Ce n'est pas général. Mais c'est un phénomène suffisamment important pour qu'on s'interroge sur la dimension d'un égoïsme d'adulte immature qui s'exprime dans le divorce. Pourquoi ont-ils fait des enfants pour les mépriser en les privant de l'équilibre affectif qu'ils leur doivent ?
On peut développer un débat identique sur l'avortement. La question n'est pas de remettre en cause un comportement critiquable puisqu'il répond à une volonté légale, mais d'amener les consciences à mesurer la nocivité d'une telle dérive à la facilité. L'avortement n'est pas une conquête pour la femme, mais bien plus pour les hommes qui peuvent continuer à se décharger de leur responsabilité sur les femmes. Combien d'hommes oseraient parler de liberté s'ils devaient eux se faire cureter le sexe ?
L'euthanasie masque trop de considérations financières qui ne sont jamais abordées, et dont les défenseurs soulèvent paradoxalement des arguments moraux qu'ils rejettent dans toute discussion relative à l'avortement ou au divorce.
La réflexion chrétienne est suffisamment riche pour occuper le grand vide laissé en permanence entre la gauche et la droite, l'opposition et la majorité, les pro et les contre, ... La religion n'est pas une idéologie, elle ne vise pas au pouvoir, elle n'a donc pas à se revendiquer d'un bord ou d'un autre ni se laisser récupérer. Mais elle doit participer au débat pour inverser une tendance qui aboutit à la disparition de toute démocratie.
La conception simpliste "ON-OFF" du débat public appauvrit le débat, favorise l'arbitraire du slogan. Comme s'il n'existait rien entre les forces du bien ou l'axe du mal. C'est noir ou blanc, comme s'il n'y avait plus de couleurs.
C'est ainsi que je comprends PdP quand il dit qu'il n'y a pas de catholique conservateur ou progressiste, de gauche ou de droite. Le catholique, par nature, ne peut pas s'inscrire dans les limites d'un débat minimaliste, égocentrique, efficace, utile, rentable, à court terme.
Écrit par : Annie | 21/04/2009
Annie,
> Bien vu. Je souscris sans hésitation à votre analyse.
Cordialement.
Écrit par : Thomas | 22/04/2009
> Moi aussi.
Écrit par : Feld | 22/04/2009
> A Annie: vous avez tout dit. Je vous approuve à 100%.
Écrit par : vf | 23/04/2009
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