27/09/2008
La crise économique, la justice, la vigne, le royaume, Jean le Baptiste, Jésus et les notables
Sur Matthieu 21, 31-32, évangile de ce dimanche :
« Jésus leur dit :
Amen je vous le déclare,
les publicains et les prostituées
vous précèdent dans le royaume de Dieu
car Jean-Baptiste est venu à vous, vivant selon la justice,
et vous n’avez pas cru à sa parole ;
tandis que les publicains et les prostituées y ont cru.
Mais vous, même après avoir vu cela,
vous ne vous êtes pas repentis
pour croire à sa parole. »
Jésus parle ici « aux chefs des prêtres et aux anciens », c’est-à-dire aux dirigeants de la société judéenne. Il vient de leur proposer la parabole des deux fils : celui qui répond oui à son père mais ne va pas à la vigne, et celui qui dit d’abord non, puis se repent et y va.
Jésus enchaîne sur l’apologue des publicains et prostituées, capables de repentir, alors que « vous » (les gardiens du socialement correct) n’en êtes pas capables.
Comment les publicains et les prostituées se sont-ils repentis ?
En voyant le Baptiste « vivre selon la justice », aux deux sens du mot : a) « juste » par la grâce de Dieu, b) donc « juste » envers ses frères et manifestant cette justice dans sa façon prophétique de vivre. Prophétie qui le mène à reconnaître le Sauveur et à le présenter comme tel à la foule (Jean 1,26-34). La façon de vivre du Baptiste inclut la critique sociale au nom de la foi : « Produisez donc des fruits dignes du repentir… Que celui qui a deux tuniques partage avec celui qui n’en a pas, et que celui qui a de quoi manger fasse de même… » (Luc 3,8-11). Aux publicains repentants, il dit : « N’exigez rien au-delà de ce qui vous est prescrit. » Aux soldats : « N’extorquez rien, contentez-vous de votre solde. » (Luc 3,12-14). Car « tout arbre qui ne produit pas de bons fruits, sera coupé et jeté au feu. » (Matthieu 3,10). Le fruit (les œuvres) est inséparable du repentir (la foi) : d’où l’inconséquence d’opposer la foi et les œuvres, comme on le fit au XVIe siècle pour des raisons circonstancielles qui n’auraient pas dû dégénérer en antithéologie. Les œuvres naissent de la foi. Mais même des œuvres sans foi intentionnelle peuvent mener à Dieu (« j’étais nu et vous m’avez vêtu », Matthieu 25,36-40). Et ne pas faire d’œuvres bonnes, ou en faire de mauvaises, peut faire perdre le salut que Jésus a acquis aux hommes sans mérite de leur part. Se croire « assuré du salut » quoi qu'on fasse, est une présomption humaine sous apparence de foi.
Autre leçon de ces textes : les repentants acceptent de partager leurs biens. Les notables, non. Sans exagérer le parallèle, demandons-nous s’il n’y a pas un écho de cela aujourd’hui. La pauvreté et l’angoisse frappent à la porte. Y aura-t-il des notables pour les éconduire en disant : « Nous sommes trop occupés à combattre le socialisme fiscal » ? Ce qu’on entendait avant-hier au Congrès de Washington y ressemblerait assez... Mais comme dit Jean le Baptiste : « Engeance de vipères, qui vous a suggéré d’échapper à la Colère prochaine ? » (Luc 3,7).
10:49 | Lien permanent | Commentaires (4) | Tags : christianisme, crise financière
Commentaires
"QU'ON NE VIENNE PAS ME DIRE...."
> Bien vu. Je suis écoeurée d'entendre de grands bourgeois de famille notoirement catho, plaider inflexiblement pour plus de profits et plus de dérégulation. Et que personne ne vienne me dire qu'en parlant de bourgeois je suis une vilaine méchante satanique. Jésus en a parlé le premier, et il faut voir comment ! Et il n'a jamais dit : "Heureux les aveugles et les sourds".
Écrit par : Edna | 27/09/2008
> Non, mais il est venu pour que les aveugles voient et que les sourds entendent !
Écrit par : Michel de Guibert | 27/09/2008
> C'est bien mon idée. Donc entre autres ne pas être aveugles et sourds en face de réalités sociales qui composent notre quotidien, qu'on le veuille ou pas. Relisons saint Paul : il passe une partie de son temps à mettre en garde ses ouailles des diverses cités contre leurs réflexes de milieu et leurs habitudes mentales. Les Corinthiens, par exemple. Donc relire Paul avant de crier au socialisme dès qu'un frère chrétien tient compte de questions sociétales dans ses analyses.
Écrit par : Edna | 27/09/2008
> Il a dit aussi : "Heureux ceux qui ont faim et soif de la justice : ils seront rassasiés (...) Heureux ceux qui sont persécutés pour la justice, le Royaume des cieux est à eux."
Écrit par : Michel de Guibert | 28/09/2008
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