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05/08/2008

L’année saint Paul : de quoi déblayer les faux problèmes entre protestants et catholiques

A lire, un numéro spécial « paulinien » de L’Homme nouveau :


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La note du 3 août (Quiproquos anachroniques) et ses commentaires parlent d’attaques « antiromaines » dans des milieux évangéliques. Naviguer sur certains sites (1) permet de lire ces attaques. Elles sont hors sujet. (Un catholique formé s’étonnera de constater à quel point !). Au pire, ce sont des coquecigrues dignes de conspirationnistes américains (2). Au mieux, on y retrouve des griefs du XVIe siècle, du style : « la foi mais pas les œuvres » (ne sait-on pas depuis longtemps que c’est un faux problème ?). Ou : « le ritualisme romain a paganisé le christianisme »...  Cet argument-là faisait florès à la fin du siècle dernier, y compris dans certains milieux catholiques où l’on a cru qu’il fallait « dés-helléniser » le catholicisme. Or la rencontre entre la pensée d’Israël et la pensée grecque n’est pas un ajout goy tardif : elle est là dès saint Paul en raison de sa formation chez Gamaliel, comme en témoignent les Actes, les épîtres et indirectement le Talmud.  Le corpus paulinien étant une référence du protestantisme, creuser cet aspect des choses pourrait aider tout le monde (catholiques et protestants) à se débarrasser de séquelles du passé jusqu’au stupide XXe siècle – et à construire le XXIe.

Sous ce rapport, on lira avec profit le numéro spécial « Année saint Paul » de L’Homme nouveau. 

En particulier :

- l’article d’André Paul sur la connivence profonde entre l’expérience et les messages de Jésus et l’expérience et les messages de Paul ;

- l’article de Claude Barthe sur « saint Thomas d’Aquin lecteur de saint Paul » (« ...Ainsi que le souligne Gilbert Dahan dans son introduction au Commentaire de l’Epître aux Galates, la connaissance intime, cœur à cœur, pensée à pensée, qu’a saint Thomas de saint Paul, est telle qu’il arrive au premier, à travers et par delà les schémas scolastiques qui nous semblent (bien à tort) l’en éloigner de plus en plus, de retrouver comme inconsciemment le mode même de la pensée de saint Paul, juif hellénisé formé dans les écoles rabbiniques… ») ;

- L’article d’Henry de Villefranche « Où en sont les études exégétiques sur saint Paul » : « …Un second facteur de renouvellement de l’exégèse vient d’une meilleure connaissance du milieu juif qui qualifie l’histoire et la pensée de Paul. Citons, par exemple, ce témoignage de Rabban Siméon ben Gamaliel : "Dans la maison de mon père, il y avait mille jeunes gens : cinq cents d’entre eux étudiaient la Torah et cinq cents étudiaient la sagesse grecque, la paidéia" (Sotah 49b). Ce témoignage jette quelque lumière sur ce qu’a pu être l’éducation de Paul dans le contexte contemporain du judaïsme hellénistique de Tarse et palestinien de Jérusalem. L’intention théologique de Paul qui s’attache "aux juifs d’abord ainsi qu’aux païens" n’est pas sans comporter la double médiation de ces deux formes de savoir et d’instruction que sont l’exégèse juive traditionnelle et la forme rhétorique de la sagesse hellénistique mêlées dans la forme et le fond de son discours. Celui-ci articule le midrash (3), la stylistique et la rhétorique. L’exégète se doit d’associer plusieurs méthodes en évitant de les aplatir hâtivement et maladroitement l’une sur l’autre. Elle doit en être le point de jonction, sans en chercher trop vite la conciliation et sans en redouter le choc… »

Comme l’écrit Villefranche, professeur au Studium Notre-Dame : « On se rappelle avec quelque gêne le temps pas si lointain où l’on opposait avec certitude les points de vue grec et juif, ou même judaïsme grec et judaïsme palestinien… » C’est pourtant ce que font encore certains évangéliques : et c’est de cela entre autres qu’il faut discuter, eux et nous. Dans la mesure évidemment où ils ne réprouvent pas la convergence théologique autour d’un vrai commentaire commun de la Bible – et où ils ne tiennent pas (comme les gens d’Ecône) l’idée d’œcuménisme pour une abomination. Dans la mesure aussi où ils ne souhaitent pas, en écho au spontanéisme individualiste de la société actuelle, la dissolution de toute structure et l’abolition de toute liturgie (4) 

Beaucoup d’entre eux veulent au contraire réagir contre cette dissolution. Ils partagent des choses essentielles avec les catholiques...  Raison de plus pour se parler.

 

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(1) Je ne les nommerai pas : notre but est d’apaiser, non d’attiser.

(2) Les conspirationnistes US sont persuadés, par exemple, que l’Ordre de Malte est un complot lié aux Illuminati  pour détruire le protestantisme.

(3) « Midrash : terme hébreu issu du verbe darash : exiger, chercher. Il désigne une méthode d’exégèse herméneutique, comparative et homilétique » (HV).

(4) Vouloir « revenir » au spontanéisme individualiste (une supposée célébration primitive « d’avant la liturgie ») n’est en réalité qu'une table rase et un orgueilleux mépris envers ce qu’ont vécu des générations de chrétiens. « Le plus ancien témoignage liturgique n’est pas antérieur à la plus ancienne des prières eucharistiques, c’est-à-dire au canon romain, attesté pour la première fois dans le De sacramentis, de la fin du IVe siècle, attribué à saint Augustin », note Claude Barthe. En amont de cela, nous n’avons aucun élément. Tout ce qui est fait aujourd’hui au nom d’un passé primitif supposé, relève donc de l’invention selon l’air du temps  – avec beaucoup de guitares et de synthétiseurs. Pratiques qui sont d’ailleurs controversées théologiquement parmi les évangéliques et les pentecôtistes eux-mêmes, comme on le constate sur leurs sites.

 

 

Commentaires

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> Oui, il faut un dialogue vrai entre évangéliques et catholiques ! C'est anormal que des croyants qui partagent foi en Christ (contrairement à ceux qui ont les mots mais pas la foi) continuent des querelles du passé, souvent des malentendus ! Il faut confronter courageusement les certitudes, même les antiromaines, et voir si elles sont toujours si certaines que ça, en les passant au scanner de l'Evangile !

Écrit par : Martha | 05/08/2008

> Martha ? Pas de Vineyard, je souhaite ? lol

Écrit par : Art | 05/08/2008

> Ni de Toronto ! Je suis à Sherbrooke.

Écrit par : Martha | 05/08/2008

PIERRE PERRIER

> L'opposition simpliste entre judaïsme et hellénisme ne se retrouve pas seulement chez certains évangéliques. Elle est assez répandue chez les Juifs.
Or, si j'en crois Pierre Perrier*, l'enseignement "rabbinique" qui se substitue à celui des lévites, vient du modèle des sophistes grecs(des disciples regroupés autour d'un maître savant et sage). Et en même temps, l'interprétation rigoureuse des textes qui fait son apparition alors, n'a pas son équivalent dans le monde hellénique. Il y a eu une interaction culturelle qui s'est révélée féconde. Le judaïsme n'est pas pour autant tombé dans le paganisme.
*Pierre Perrier, « Evangiles de l'Oral à l'écrit 1 », 2000, p.22

Écrit par : Blaise | 05/08/2008

SIMEON BEN GAMALIEL

> Le témoignage de Rabban Siméon ben Gamaliel est passionnant. Il faut sans doute se figurer les maisons d'étude de l'époque de Paul comme l'équivalent de nos meilleures universités. Ancrés dans la tradition d'Israël les pharisiens étaient en même temps ouverts à la sagesse des nations.

Écrit par : Blaise | 05/08/2008

À MARTHA ET ART

> chère martha et cher art , bonjour à vous d'abord,
oui nous avons le même Christ, mais ce qui nous sépare tous entre chrétiens, c'est l'ecclésiologie, c-a-d : "qu'est-ce que l'Eglise réellement, cette très belle Epouse que le Christ s'est voulu "Pure, Sainte, sans tache et donc Immaculée" ; " ???
cherchons donc déjà le mot Eglise dans tout le nouveau testament et nous aurons ensemble une approche commune de la question;
nous pourrons alors ouvrir notre débat sur "le troupeau du Christ" sur "ses brebis", et rechercher ces deux termes dans le nouveau testament, et alors nous pourrons progresser sur le sens de ce qu'est l'Eglise pour chacun d'entre nous, et nous en comprendrons aussi les différences!

Écrit par : jean christian | 06/08/2008

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