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19/07/2008

"le chrétien, sans cesse dépaysé de soi par le Christ..."

Autour de l'évangile d'aujourd'hui :


Matthieu 13, 24-63 : la parabole du bon grain et de l'ivraie. Elle vise évidemment deux dérives propres aux esprits religieux : la présomption (prétendre éradiquer le mal) et l'élitisme (se replier dans un clan de « purs »). Le mal ne s'éradique pas : chacun est partagé entre mal et bien, et le reste toute son existence ; prétendre « supprimer le mal » aboutit donc toujours à supprimer des gens, perpétuelle tentation de certains « croyants » ; tentation dont Jean-Paul II fit repentance (devant Dieu) en l'an 2000 au nom des chrétiens qui servirent mal leur foi au cours des siècles. Cette Eglise fut la seule à se repentir ainsi ? Il faut l'en admirer, non le lui reprocher – si l'on ne veut pas être de faux chrétiens.

Que chacun soit partagé entre bien et mal (champ mêlé de « bon grain » et d'« ivraie ») durant tout sa vie, et que Dieu en soit seul juge à l'arrivée, est une idée spécifiquement judéo-chrétienne. Que la voie pour dépasser cette ambiguité existentielle soit de suivre le Christ ici et maintenant, est une idée spécifiquement chrétienne. Elle paraît simple. Mais c'est une ligne de crête : on la perd facilement. Autrefois les pharisiens croyaient que les « gens-du-coin » (ammeï ha-arèts), le petit peuple ignorant et routinier, étaient pécheurs par nature. Erreur élitiste. Aujourd'hui nous sommes tentés – nous, les catholiques revendiqués – de confondre la seule voie, qui est surnaturelle, avec telle ou telle vision idéologique séculière grimée de vocabulaire chrétien ; et de regarder de travers ceux qui ne partagent pas cette vision. Prétendre éradiquer ce qui nous « choque » : c'est la pire des choses, la plus inhumaine... et la moins évangélique, puisque la plus étrangère à ce que l'Evangile nous demande : être assez lucides pour savoir prendre distance d'avec nous-même, et ne pas confondre nos pulsions aveugles avec l'appel de Dieu.



En Mt 12,27, quand Jésus Christ dit : « Si vous aviez compris ce que signifie "C'est la miséricorde que je veux, non le sacrifice" [Osée 6,6], vous n'auriez pas condamné des innocents », il parle à des pharisiens. On dirait aujourd'hui : à des idéologues, même chrétiens en apparence.



« L'être chrétien est un perpétuel adieu à soi. Alors que le païen subit ses mythes et habite ses monstres, le chrétien, sans cesse dépaysé de soi par le Christ, ne se voit jamais lui-même qu'à distance. » (François Cassingena-Trévedy, Etincelles II, p. 324).



« Oubliant ce qui est derrière moi et tendu de toutes mes énergies vers ce qui est en avant, je cours droit au but, pour remporter la récompense du céleste appel de Dieu dans le Christ Jésus. » (St Paul, Philippiens 3, 13-14).