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20/05/2008

Le relativisme est-il évangélisable ?

C’est une question-clé en 2008 :


 

Entre chrétiens et indifférents (voire entre chrétiens), le débat se bloque sur l’obstacle du relativisme. Rejeter « les dogmes » : c’est le dogme actuel. Toute foi, toute idée stable est vue comme « dangereuse » en raison non de son contenu, mais de sa stabilité. La notion de vérité passe pour totalitaire. On juge l’objectivité inquiétante et la subjectivité rassurante, comme s’il fallait trouver rassurant un monde où chacun serait enfermé dans sa propre optique et ses propres désirs.

Le culte actuel du relativisme joue sur un besoin de sécurité. On a persuadé les foules que la sécurité exigeait le « tout vaut tout » (alors qu’il fabrique* un autisme généralisé, une surdité réciproque : maux plus dangereux que le reste, et situation incohérente à une époque qui ne cesse de chanter le mondial, le métissage des cultures, etc).

D’où vient cette incohérence ? Du matérialisme mercantile libéral, qui produit le relativisme actuel. En effet, le « tout vaut tout » est l’idéologie du marché : tout doit être commercialisable, y compris les pulsions psychologiques les plus contradictoires. C’est pourquoi le libéralisme ne peut rien apporter, sinon le nihilisme… Ceux qui rêvaient honnêtement d’un libéralisme catholique ont fait fausse route et commencent à s’en rendre compte. L’Eglise les y aide : par exemple avec les récentes conclusions de l’Académie pontificale des sciences sociales (voir ici la note d'hier).

Le relativisme n’est pas évangélisable, puisqu’il refuse tout en faisant semblant de tout accepter.

Mais les désirs qui sous-tendent l’adhésion au relativisme, dans les consciences, sont évangélisables.

Par exemple l’idée de tolérance et celle de paix mutuelle. Ces deux idées sont compatibles avec la confiance (« foi ») que chacun place en ses propres idéaux, à condition que cette confiance se laisse interroger, voire mettre en question, par un dialogue qui peut très bien être un débat  – dans l’intérêt de chacun et de la vérité. Pourquoi la vérité ferait-elle peur ? « N’ayez pas peur », disait Jean-Paul II en ajoutant : « …d’ouvrir la porte au Christ ».

A l’inverse, il y a un subjectivisme qui tue toute possibilité de dialogue ou de conversion. Chez les agnostiques, il pose comme nocive l’ouverture à une foi religieuse. Chez certains chrétiens, il confond la foi et les opinions (de parti, de métier, de milieu social), et mélange le tout comme expression de leur « identité »…

On peut sortir de ces fourvoiements. Le débat et la bonne volonté réciproques peuvent trouver la jointure psychologique de ces subjectivismes, agnostiques ou intégristes. La société actuelle peut être évangélisée ! (La seule chose qui ne peut l’être, c’est le « péché contre l’esprit » en 2008 : le piège du relativisme en tant que système imposé à tous). Le fourvoiement a des causes très humaines ; ces causes peuvent changer. Benoît XVI s’emploie à les y aider. Aidons-le.

 

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(*) s’il n’y a plus de référence universelle partageable.

 

 

Commentaires

UN CAS

> Je me demande si, pour qu'il puisse être évangélisable, le relativisme ne doit pas d'abord être percuté par la réalité, par des événements qui obligent à choisir en constatant que tout ne se vaut pas. Je pense par exemple aux parents qui ont mal éduqué leurs enfants en en faisant des "enfants tyrans", intolérants à la moindre frustration; ils sont obligés de sortir du relativisme, mais c'est souvent bien tard et au prix de grandes souffrances.
Je vous raconte ce cas concret survenu dans une école du XVe arrondissement de Paris: une directrice d'école signale à de nombreuses reprises un enfant comme perturbateur et violent; après de nombreuses sommations, la maman accepte enfin de se déplacer et d'entendre les observations. En rentrant, elle donne une raclée "à l'ancienne" à son enfant (ce qu'elle ne faisait jamais, élevant son enfant comme "un petit dieu" à qui tout est dû). Le lendemain, l'enfant raconte l'événement à l'école... et la directrice fait un signalement pour maltraitance ! La maman, à nouveau convoquée, déclare à la directrice: "J'ai essayé de reprendre le contrôle de la situation et vous me faites un signalement ! Désormais je ne ferai plus rien, débrouillez-vous !"

Écrit par : B.H. | 20/05/2008

LA SEULE FACON ?

> La seule façon de lutter contre le relativisme est de lui opposer des dogmes, des principes non-négociables que l'on postule à la fois comme de droit divin mais que l'on sait aussi défendre par la raison. Il est vital que nous catholiques, puissions défendre des droits inaliénables, des droits qui ne pourront être que communautaires, face à l'Etat qui est en Europe au moins, par nature relativiste.
Je ne suis pas sûr comme vous le dîtes, que le libéralisme soit la cause du relativisme; je pense même l'inverse. C'est le relativisme métaphysique des Lumières qui est la cause du libéralisme. Il ne fait donc pas combattre le libéralisme en soi (sinon on risque aussi de détruire les principes reconnus par l'Eglise de propriété privée, liberté d'entreprendre ou de faire des profits) car cela reviendrait à êre socialiste. Ce qu'il faut c'est attaquer à la base les Lumières et ses principes égalitaires et nihilistes, à sa fausse idée de liberté et de tolérance - et alors le libéralisme cessera d'être un dogme et de mener nos vies indidivuelles et sociales.
La guerre que nous menons est théologique.

Bien à vous,
Aquinus

Écrit par : Aquinus | 20/05/2008

SOCIALISME

> Pas du tout d'accord avec Aquinus, qui me paraît manquer du discernement des nuances caractérisant l'Aquinate ! Le libéralisme n'a rien à voir avec la liberté d'entreprendre qui ne l'avait pas attendu pour exister (cf l'Italie du Nord au XIIIe siècle !). Et l'on peut PARFAITEMENT être socialiste et chrétien, ce qui est mon cas ! A condition bien entendu que ce socialisme-là soit en accord avec la pensée chrétienne et la subsidiarité, chose tout à fait imaginable même si le socialisme français des cinquante dernières années n'y satisfaisait pas. L'amalgame "catholique = droite" est de plus en plus dérisoire, la droite étant Mme Morano, M. Fenech, M. Bertrand, etc.

Écrit par : G. Rossi | 20/05/2008

POUR AUTRUI

> "Défendre des droits", Aquinus ? Qu'est-ce que c'est que cette histoire ? La mission des catholiques est de témoigner de l'évangile, pas de se comporter comme un petit parti frileux de bourgeois repliés sur leurs intérêts et leurs opinions, qu'ils sont seuls à partager. "Soyez prêt à rendre compte à qui vous les demande des raisons de votre espérance" : vous croyez qu'on va venir vous les demander, ces raisons, si vous et vos camarades de clan vous vous comportez comme des vieux ex-propriétaires aigris demandant à rentrer dans leurs biens ? Vous allez mettre les autres en fuite, oui. "Passez au large, vils mécréants, ceci est mon donjon de certitudes" ! Les chrétiens ne sont pas là pour eux-mêmes mais pour autrui.

Écrit par : Marcela | 20/05/2008

À MARCELA ET G. ROSSI

> Pour donner librement Marcela, il faut posséder. Je ne suis ni vieux, ni petit ou grand bourgeois, et encore moins frileux. La propriété privée est un droit et il me semble que l'Eglise la défend ce qui n'est pas le cas du socialisme.
Je n'ai pas Mr Rossi défendu le libéralisme; j'ai dit que ça n'était pas l'ennemi principal. L'ennemi principal est le principe métaphysique qui lui permet de régner à savoir le relativisme dont parle Mr Plunkett - ainsi que le Saint-Père dans la plupart de ses discours - et qui est un produit direct des philosophes des Lumières. C'est à ce dogme qui avance qu'il faut s'opposer, poser des jalons, préserver des zones libres.
Enfin pour terminer je ne suis ni de gauche ni de droite, puisque je pense que dans la phase actuelle de la démocratie moderne (bien lire tous les mots) ces distinctions-là deviennent dérisoires. J'essaye d'être Catholique et je sais que face au néant qui avance c'est la Lumière de l'Eglise, dans sa Charité ET sa Vérité, qui permettra à une saine résistance de: vivre.

Écrit par : Aquinus | 20/05/2008

À AQUINUS

> Oui, l'Eglise défend la propriété privée. Elle défend aussi la destination universelle des biens (St Thomas d'Aquin), qui est l'exact contraire du libéralisme. Elle la défend comme remède aux urgences de la crise actuelle (spoliation des pauvres, oligarchie de profiteurs de la globalisation) : donc le libéralisme, ennemi de la destination universelle des biens, est l'ennemi le plus urgent. Donc l'ennemi principal.
Certes les Lumières sont à l'origine : mais pourquoi opposer la cause et l'effet, les Lumières et la philosophie libérale qui en sortit directement (Adam Smith) et qui fit dérailler la révolution industrielle ? Il faut être concret et ne pas s'en tenir aux grandes idées spirituelles. L'économique est la structure de péché la plus prégnante. Le Magistère nous l'indique clairement, quand le pape demande que l'on change le modèle global !

Écrit par : G. Rossi | 20/05/2008

LIBERTÉ ET VÉRITÉ

> Pour appréhender les effets pervers du libéralisme et du relativisme, il nous faut redécouvrir le lien étroit entre liberté et vérité.

"La vérité vous rendra libres" (Jean 8, 32)

Tout le reste est littérature...

Écrit par : Michel de Guibert | 20/05/2008

@ AQUINUS :

> Je crois, fondamentalement, qu'il n'est pas besoin de posséder pour donner. Celle qui donne la vie ne la possède pas, il est vrai qu'elle ne fait que la transmettre, mais que faisons-nous d'autre que transmettre, sur cette terre ? Transmettre la joie, la paix, une bonne nouvelle, mais aussi transmettre des biens, des connaissances, une foi.
La notion de propriété que vous semblez évoquer me fait penser à celle du droit romain, usus et abusus, elle est bien antérieure aux siècle des Lumières, et je pense que c'est par le Christianisme qu'elle a été battue en brèche, usus et fructus, non ?

Écrit par : Christine | 20/05/2008

LUMIERE ET CONTRE-LUMIERE

@ Aquinus et @ G.Rossi

> J'ai beaucoup de mal dès lors qu'on met en cause l'apport des Lumières en bloc et sans discernement comme vous le faites (Aquinus). Ne doit-on retenir des Lumières qu'un vaste moment d'orgueil de l'Homme par rapport à son créateur ?
Le destin de l'Homme n'est-il pas de prendre en charge sa vie terrestre sous le regard de son créateur et dans l'écoute de celui-ci ?
Les méfaits réels des Lumières (et des penseurs des contre-Lumières, Nietzsche en tête) doivent-ils les condamner sans appel ?
La démarche de l'Homme n'est-elle pas plutôt de procéder à des ajustements et des replacements constants, dans une démarche toujours hésitante, brouillonne, bredouillante et dans un brouillard que, seule la lumière du Christ vient éclairer, lumière qui ne vient pas se placer en contre-Lumière ?
Les Lumières n'ont peut-être pas été humbles, mais notre critique doit l'être.
De même en matière économique (G.Rossi).
je suis plutôt de tendance socialiste (au sens parti socialiste), ce qui ne veut plus rien dire aujourd'hui, mais je ne peux m'empêcher de me satisfaire de l'apparition d'une classe moyenne en Chine et en Inde, pour ne citer que ces deux pays, au-delà des excès d'un système qui tourne au n'importe quoi et que je dénonce par ailleurs.
Et si on doit, à juste titre, s'indigner des neuf cents millions de pauvres d'aujourd'hui, au moins doit-on replacer cette réalité dans une perspective historique qui nous montre qu'il y a toujours eu, proportionnellement, autant de miséreux et de moins que rien qu'aujourd'hui.
Il ne s'agit pas de s'en consoler mais de considérer que l'ordre actuel permet à une large part de l'humanité, dépassant une simple élite, de faire plus que subsister.
Cet accès à une abondance relative n'est pas le but à atteindre puisque l'Homme ne se nourrit pas de pain seulement, mais c'est toujours ça de gagné.
Aucun cynisme ni désespoir dans ce propos, c'est une chance et un nouveau défi.
Je pose des questions, voyez-vous, et je trouve vos commentaires intéressants dans la mesure où ils interrogent ma conception de l'autonomie de l'Homme envers son créateur, de l'articulation du dialogue de celui-ci avec celui-là.

Relativement au relativisme abordé par le post de Patrice de Plunkett, je circule dans les milieux athées (je me répète) et je note une fatigue certaine par rapport à ce "tout vaut tout"....
Mais j'ai conscience que pour autant, cela ne veut pas dire que les prises de conscience conduisent à des changements.
Mais j'espère et je parle.

Pour le coup Pas si Sombre Héros.

Écrit par : sombre héros | 21/05/2008

"INTEGRALEMENT"

> Christine: il y a bien d'autres choses à donner que des biens matériels nous sommes d'accord et c'est probablement le plus important - donner son temps, donner son écoute, donner son bras. Ceci dit en ce qui concerne des biens matériels on ne peut réellement donner que ce qui est à soi, je maintiens.
Sombre héros: quand j'attaque les Lumières j'attaque leurs philosophes officiels dont les excès et erreurs ont conduit fin XIXe aux excès et erreurs symétriquement inverses. Nietzsche a bien compris l'esprit des Lumières qui a tué Dieu et par son matérialisme exclusif s'est porté par-delà le Bien et le Mal. En fait, si les Lumières ont tué Dieu (ou essayé) en Occident on peut dire que Nietzsche a tué l'illusion des Lumières.
Il ne faut pas tomber dans de faux débats socialistes/libéraux, gauche/droite. Ca n'a aucun sens, c'est un piège de ces Lumières justement. Il faut marteler sans cesse que seul le Christ donne le véritable sens à la vie, il faut ensuite le mettre en pratique et se servir littéralement de l'Eglise, de ses sacrements et de ses savoirs pour réellement changer le monde. Il faut être intégralement chrétien, catholique, pour sortir de cette modernité qui n'en finit pas de mourrir.

Écrit par : Aquinus | 21/05/2008

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