04/10/2007
Alexis II à Paris : l'événement historique ! (+texte du discours)
Et des propos de Sarkozy au patriarche, qui laissent songeur :
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Je n’ai pas pu parler au patriarche Alexis ! À la réception de la Conciergerie qui a suivi la cérémonie de Notre-Dame de Paris, il était littéralement assiégé par la foule des Russes de France. Mais j’ai discuté avec le métropolite de Smolensk : Cyrille, l’étoile montante de l’Eglise russe. Il m’a parlé notamment de la demi-heure d’entretien du patriarche avec Nicolas Sarkozy, quelques heures plus tôt à l’Elysée. Le président français a fait une profession de foi chrétienne qui a impressionné le chef de l’Eglise de Russie. « Cette démarche inédite et exceptionnelle [la visite d’Alexis II] est un signe majeur et tangible de la volonté des chrétiens d'Europe de se rapprocher et d'unir leurs efforts, autour des racines chrétiennes de l'Europe, pour construire une société plus humaine », a déclaré Sarkozy. (C’est une excellente nouvelle, et il n’y a plus qu’à attendre que cette conviction présidentielle se traduise dans les choix de société de la Ve République). Par ailleurs, Sarkozy a dit relever «l’importance du renouveau spirituel en Russie et le rôle que joue l’Eglise orthodoxe dans la reconstruction de la société russe ». Ces paroles indiquent-elles une approche affinée des réalités de l’Est, à quelques jours de la visite du président à Moscou (9-10 octobre) ?
La cérémonie de Notre-Dame fut un événement historique, comme on pouvait s’y attendre. Des milliers de catholiques français et de Russes orthodoxes emplissaient la cathédrale*. Ils ont entendu Mgr Vingt-Trois et le patriarche Alexis prononcer des paroles mûrement pesées, mais convergentes, dans leur discours introductifs – puis à la béné-diction finale, dans laquelle le patriarche a parlé avec une grande énergie de la gémellité catholiques-orthodoxes au XXIe siècle.
Le matin, Alexis II avait été reçu solennellement à la maison des évêques de France**, où il n'avait « pas caché que cette visite était une étape destinée à faciliter une rencontre avec le pape Benoît XVI » (AFP) , infirmant ainsi le titre du journal Le Monde de l’avant-veille. Ce qu’a confirmé le cardinal Jean-Pierre Ricard, qui a insisté sur la « tâche commune des chrétiens » d'être témoins de l'Evangile, de participer à la construction de l'Europe et d'assumer « notre responsabilité sociale » (cf. ma note d’hier). Après quoi le patriarche a parlé des valeurs communes de la chrétienté, reprenant les thèmes du discours au Conseil de l'Europe notamment à propos du « relativisme des mœurs ».
Alexis II a offert à Mgr Vingt-Trois une grande icône représentant trois saints patrons de Paris vénérés aussi par l’Eglise orthodoxe: saint Denis, saint Germain, saint Marcel.
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______(*) ce qui montre le peu d’influence de la russophobie ordinaire des médias. Russophobie qui inspire pourtant certains confrères catho : nostalgiques de la guerre froide (c'était si commode, l'anticommunisme atlantique), ou un peu trop docile envers ce qui vient des USA ?
(**) sur ce déjeuner, lire :
http://www.cef.fr/catho/actus/dossiers/2007/alexis2/index...
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Discours du patriarche de Moscou et de toute la Russie Alexis II
à la cathédrale Notre-Dame de Paris
Paris, le mercredi 3 octobre 2007 Source : Eglise orthodoxe russe en Europe occidentale***
Excellence, Monseigneur André Vingt-Trois, Messeigneurs les évêques, chers pères, frères et sœurs,
Je voudrais, avant tout, vous exprimer ma gratitude, Monseigneur l’archevêque André Vingt-Trois, pour votre invitation à visiter votre cathédrale et à vénérer l’une des plus insignes reliques du monde chrétien – la Couronne d’épines de Notre Seigneur Jésus-Christ. Je vous remercie également de permettre aux chrétiens orthodoxes de prier ici régulièrement.
La mort et la résurrection du Sauveur nous ont ouvert les portes de la vie éternelle où, selon l’expression d’un antique chant liturgique, il « n’y a ni douleur, ni tristesse, ni gémissement ». Même si le monde qui nous entoure est plein d’idoles vaines et fausses, même s’il est rempli d’affliction, de désespoir et de chagrin, nous savons que les portes du Ciel nous sont ouvertes et nous appelons tout le monde à y entrer, en répondant à l’invitation de Dieu : « Voici, je me tiens à la porte et je frappe ; si quelqu’un entend ma voix et ouvre la porte, j’entrerai chez lui pour souper, moi près de lui et lui près de moi[1] ». Cet appel est adressé à chaque homme et à chaque peuple. Grâce soit rendue à Dieu qu’il ait été entendu par de nombreuses personnes au cours de l’histoire chrétienne de l’Europe. Des millions d’hommes et de femmes continuent à y répondre aujourd’hui encore.
Le temps est venu pour nous de joindre nos efforts pour faire face aux nouveaux défis du monde contemporain. Nous, les chrétiens, devons trouver la possibilité de témoigner ensemble de la Vérité de l’Évangile et des valeurs éthiques éternelles. Nous voyons en effet que la société contemporaine, perdant les repères éthiques et suivant de fausses valeurs, devient de plus en plus inhumaine et cruelle, engendre de multiples conflits et oppositions aussi bien entre des personnes, qu’entre des communautés et des peuples. C’est pourquoi, je m’adresse à vous aujourd’hui, chers frères et sœurs dans le Christ, avec une profonde inquiétude et avec la conscience de notre commune responsabilité devant Dieu pour la situation du monde contemporain.
Cette cathédrale est le véritable cœur de Paris et de toute la France. Au cours des siècles, ses murs antiques furent témoins de nombreuses tribulations historiques au cours desquelles il sembla que l’iniquité triomphait et que le mal l’emportait. Cependant, à chaque fois, la relique ici conservée manifesta la force de Dieu. J’espère de tout cœur que cette cathédrale sera non seulement le symbole du passé de votre pays et de votre peuple, mais aussi le symbole de leur avenir.
Profitant de l’hospitalité du vénérable archevêque de Paris, j’aimerais adresser quelques paroles aux évêques, prêtres et fidèles orthodoxes réunis ce soir pour prier ensemble devant la relique. Au XXe siècle la providence divine a amené en France des hommes de différents pays orthodoxes : de Russie, de Grèce, d’Ukraine, de Biélorussie, de Serbie, de Roumanie, de Bulgarie, de Moldavie… L’histoire de cette émigration a fait que plusieurs diocèses et de multiples paroisses relevant de plusieurs Églises orthodoxes locales ont été créés. La diversité de la présence orthodoxe en France est une richesse particulière en même temps qu’une responsabilité.
C’est une richesse, parce que le lien canonique et spirituel avec les Églises mères permet à leurs fidèles vivant en Occident de grandir au sein de la Tradition orthodoxe, s’appuyant sur leur propre culture et leur langue. La diversité des traditions, leur échange mutuel, permet d’enrichir notre vie et notre ministère.
C’est une responsabilité, parce que vous êtes appelés à allier de façon créative les différentes traditions et à renforcer l’unité orthodoxe en France, sans négliger les particularités de telle ou telle partie du peuple orthodoxe de diverses origines vivant en ce pays.
Excellence, cher Monseigneur André Vingt-Trois, vénérables évêques et pasteurs, chers frères et sœurs, je suis sincèrement heureux que le Seigneur m’ait permis de visiter la France et de vous rencontrer aujourd’hui. Je vous souhaite à tous, mes très chers, de grandir « dans la grâce et la connaissance de notre Seigneur et Sauveur Jésus-Christ : à lui la gloire maintenant et jusqu’au jour de l’éternité[2] ».
09:45 Publié dans Oecuménisme | Lien permanent | Commentaires (11) | Tags : Alexis II, orthodoxie, catholicisme, Mgr Vingt-Trois, Notre-Dame de Paris, oecuménisme, Benoit XVI
Commentaires
C'EST À VOIR
> La vidéo de la conférence de sa sainteté Alexis II devant la presse religieuse à la maison des évêques de France est visible sur le site http://www.orthodoxie.com
Elle est également disponible sur mon site, ainsi que, bientôt, la retransmission de la cérémonie à Notre-Dame.
Écrit par : Hervé | 04/10/2007
LDB ?
> Je ne veux pas être pessimiste, mais la déclaration de N.Sarkozy ne m'apparait pas comme une profession de foi mais plutôt comme une déclaration politique qui constate le rapprochement, autour de leurs racines communes, de communautés divisée et cela en vue de bâtir une société plus humaine dit-il. C'est de la langue de bois diplomatique assortie d'une constatation répandue chez les moins hostiles: l'Eglise n'est rien d'autre que la plus vieille o.n.g. du monde! Qu'elle s'occupe des pauvres, des infirmes et des exclus; pour le reste, qu'elle la ferme! J'espère vraiment que des Russes francophones éclaireront le Patriarche sur notre président.
Écrit par : VF | 04/10/2007
> La retransmission de la cérémonie à Notre-Dame est disponible à l'adresse suivante : http://blip.tv/file/410570
Écrit par : Hervé | 04/10/2007
"trois saints patrons de Paris vénérés aussi par l’Eglise orthodoxe: saint Denis, saint Germain, saint Marcel"
> Et sainte Geneviève ? Les orthodoxes ont une grande vénération pour cette sainte. Il y a d'ailleurs une paroisse orthodoxe à Paris portant son nom : Notre Dame Joie des Affligés et sainte Geneviève.
Flore
[De PP à F. - Le fait est que l'icône est celle de trois saints masculins. J'ignore la raison de ce choix.]
Écrit par : Flore | 04/10/2007
Ste GENEVIÈVE
> Oui, les orthodoxes ont une grade vénération pour Sainte Geneviève ; je me rappelle que chaque année début janvier ils vont en pélerinage auprès de ses reliques à Saint Etienne du Mont.
De manière générale, les orthodoxes vénèrent tous les saints canonisés avant la séparation des Eglises, donc tous les saints du premier millénaire.
Les réfugiés et émigrés russes orthodoxes à Paris ont particulièrement développé la dévotion aux saints patrons de Paris.
Écrit par : Michel de Guibert | 05/10/2007
GOLIAS
> A propos du président Sarkozy, j'ai relevé sur le site de Golias, que l'on a connu moins regardant sur la Tradition, l'article suivant, à propos de l'accès à l'eucharistie des divorcés remariés:
"A l’évidence, Nicolas Sarkozy peut difficilement passer inaperçu, a fortiori lorsqu’il se trouve en représentation officielle. Or, le 10 août dernier, lors des funérailles du cardinal Lustiger, il a reçu la communion eucharistique, alors que la France entière, ou presque, est au courant de sa situation personnelle.
Pour qu’aucun évêque français ne porte la responsabilité de ce geste peu conforme à la discipline ecclésiastique, c’est un cardinal étranger qui a donné l’hostie au président, lequel porporato n’était effectivement pas censé savoir quelle était au juste la situation de M. Sarkozy. Oh bienheureuse ignorance ! "
Je vous rassure, Golias n'a pas changé sa ligne de conduite: l'article est essentiellement destiné à salir l'épiscopat. Il n'empêche qu'un divorcé-remarié "notoire" a pu accéder à l'eucharistie...
AML
Écrit par : AML | 05/10/2007
AU FAIT
> Nicolas Sarkozy s'est-il marié à l'Église la première fois?
Sinon, et la deuxième?
Et Cécilia?
Écrit par : Renaud | 05/10/2007
IL NE L'A PAS FAIT
> En seprésentant à la communion, NS a forcé l'Eglise à lui donner la communion, laquelle n'avait pas d'autre choix sinon celui de provoquer un esclandre. NS aurait très bien pu croiser les bras sur la poitrine pour ne recevoir que la bénédicition. Il ne l'a pas fait. Soit il était au courant et l'a fait en connaissnce de cause, soit il l'ignorait et était venu à cette cérémonie comme à n'importe quelle autre. Dans un cas comme l'autre c'est l'expression d'un certain mépris pour le sacré.
On peut considérer qu'il s'agit là d'une sorte de provocation. Tant à l'égard de l'Eglise qu'à l'égard de la laïcité.
Écrit par : Qwyzyx | 05/10/2007
REGRETTABLE
> De Gaulle était catholique pratiquant mais ne communiait pas quand il était dans l'exercice de ses fonctions. Je trouve tout à fait regrettable que des hommes politiques cherchent à se donner l'image de bons catholiques (par des déclarations semi-publiques qui engagent peu ou, pire, par une pratique des sacrements bien mise en scène) dans le seul but de gagner des voix. Il est encore plus regrettable que des évêques entretiennent une complicité mondaine avec les grands de ce monde même quand ils semblent pourtant exigeants avec les fidèles anonymes... Deux poids, deux mesures, c'est l'image que cela donne forcément aux catholiques de la ville...
Écrit par : Jean-Marie | 07/10/2007
MASCULIN, FEMININ
> Ne pensez-vous pas que l'importance de cet événement devrait nous inciter à élever le débat ? Fi donc des rodomontades sarkhoziennes et autres effets médiatiques...
J'ai visionné plusieurs fois la vidéo de cette cérémonie. Plus que l'image traditionnelle des deux poumons de l'Eglise réunis en cet instant privilégié à Notre Dame, j'y ai vu l'image d'un vieux couple qui se retrouvait dans un geste d'humilité et de réconciliation qui remplit nos coeurs d'espoirs même lointains d'une pleine communion. Et dans ce vieux couple, comme il semblait évident que l'Orthodoxe était masculin et le Catholique féminin. Et pas seulement parceque les choeurs suivaient ce schéma... Dieu fasse que ce couple se réconcilie un jour, pour le bien de nos deux églises et pour le bien de l'humanité.
Écrit par : Frédéric RIPOLL | 08/10/2007
DECODER ?
> ...et les catholiques romains de s'exclamer "quel faux derche ce Sarkozy!". Celui-ci a pourtant ete très clair: "la visite d’Alexis II est un signe majeur (...) autour des racines humanistes relativistes de l'Europe, pour construire une chretienté plus silencieuse". Il faut savoir decoder, voila tout, ce que les loges savent faire...
Écrit par : Denis Jaisson | 08/10/2007
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