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25/08/2007

Débat (1) : quelle place pour la nation, dans la vision chrétienne du monde ?

Vous êtes divisés sur ce sujet (et tant mieux) :


 

 

Ce blog a fait naître un carrefour de lecteurs-intervenants. Vous êtes très divers et même contradictoires (tant mieux) sur beaucoup de sujets ;  notamment celui-ci : la place de la nation dans la vision chrétienne du monde.

 

Certains d’entre vous pensent, comme feu Tresmontant, que le national appartient au « vieil homme » dont saint Paul appelle à se dépouiller : le monde des instincts devenus idoles.

 

D’autres, à l’inverse, pensent que le national est l’un des cercles de l’existence humaine, et qu’il s’intègre dans l’anthropologie d’une religion de l’incarnation.

 

C’est à ce second courant qu’appartient  le message  ci-dessous  (du 25.08  à 8 h 05).  Il  réagit  - pour la contester -  à l’affirmation suivante : "Le texte de l'Evangile est révolutionnaire. Le principe d'Etat nation consacre l'émancipation politique de la bourgeoisie possédante pour qui le pouvoir procède du sol (du patrimoine) et n'émane plus du Ciel (et du respect du droit naturel). Dans ses effets, le principe national fixe l'homme à la terre. Il le maintient au niveau du sol quand la religion élève son esprit, le libère. Le principe national consacre l'attachement des hommes à une terre, un atavisme."

 

 

Texte du message :

 

 

<<  Le postulat affirmé ici est que la religion "élève l'esprit" au sens de "l'éloigne de la nature" et, de là, pose que le but est d'ordre "spirituel" au sens d'éthéré. Il faudrait revoir en profondeur la "révolution" qu'impose le Seigneur ! Et… Sa présence historique parmi nous, signe d'un amour pour l'Humanité créée.

 

Si réellement notre salut appartenait au monde de l’éther, pourquoi le Christ se serait-il fait homme, se livrant aux hommes ? Songeons qu’il Lui était loisible de nous faire sa leçon depuis le Ciel.

 

C'est au sein du vivant, de notre existence, que notre sanctification est possible. Sans quoi, nous n'aurions qu'à souhaiter mourir tout de suite pour une résurrection plus hâtive.

 

Cette déchirure est à l'origine de toutes les hérésies modernes: c'est la consécration systématique d'une fracture entre le monde créé, vil, bas ou au contraire déifié, et le monde "spirituel" compris comme éthéré, pur et parfait ou au contraire... inexistant.

 

C’est l’Islam qui affirme que Dieu est bon et l’homme mauvais. Prenons garde de ne pas mettre de côté les deux alliances que Dieu a offertes aux hommes.

 

Il faut véritablement se soucier de cette déchirure, qui fonde les dissensions entre catholiques, et entre les catholiques et le monde. Le péché originel ne condamne pas fatalement l'homme, il peut être vaincu en notre existence par l'acquiescement et le don, appelant la grâce divine du salut. Nous ne pouvons rien seuls, mais rien ne se fait sans nous. Nous sommes conviés aux noces, nous ne les organisons pas. Tout est dans cet équilibre.

 

Tout ce qui est, est né du Verbe. Ce qui est, est réellement, il n’est pas possible de réduire ce qui est, au péché, et donc à une nature absolument corrompue. Ça n’aurait aucun sens, car l’absolue corruption est tout simplement non-être.

 

Il y a donc une valeur intrinsèque en ce qui est, et plus encore une valeur intrinsèque — précieuse aux yeux de Dieu — de l’être qu’il a créé à son image, créature préférée. C’est avec cet être-là que les Alliances sont conclues.

 

Par conséquent et extension, ce n’est pas l’éloignement à l’être qui est la voie juste, mais sa prise en considération. La perspective doit se faire depuis une vision de l’Humanité vers la nation, de la nation vers la communauté, de la communauté vers la famille et de la famille vers la personne pleine et entière. Ce qui justifie l’enracinement et invalide les constructions contemporaines « babélistiques » de grands ensembles continentaux. Le principe national n’est donc pas un atavisme, mais une clé incontournable pour ouvrir l’horizon d’un déploiement de l’individu. C’est lorsque l’individu est pleinement reconnu que la construction d’ensembles est possible. Les ensembles sont possibles si l’on est ensemble, autrement dit si l’on est réellement. Car notre nature véritable est d’ordre spirituelle, être et esprit ne sont pas dissociables.

 

Rémy Wiedemann >>

 

Le débat est ouvert.

 

 

 

 

Commentaires

UNE CONDITION

> Votre commentaire est très intéressant, et j'y souscris pour l'essentiel car, comme vous le dites bien, notre foi est fondée sur une réalité historique, l'Incarnation du Dieu fait homme en Jésus Christ, ce qui devrait suffire à nous garder de tous les "éthérismes" ou autres "catharismes"...
Mais j'y souscris à une condition : garder certes pieusement nos enracinements "charnels", mais ne pas "sacraliser" pour autant le principe national car Dieu seul est saint, et son Eglise !
La première Alliance, l'alliance noachique, s'étend à toute la création (Genèse 9, 17) et précède la "babellisation", confusion des langues de l'homme qui veut se faire Dieu... et la Nouvelle Alliance, celle en Jésus Christ, Dieu qui se fait homme, est pour tous les hommes (Jean 3, 16-17 ; Romains 10, 9-13 ; Galates 3, 26-29) et précède la Pentecôte, sorte d'anti-Babel qui restaure l'unité perdue (Actes 2, 5-12) et préfiguration de la Jérusalem céleste où "une foule immense de toutes tribus, langues et peuples et nations se tiennent debout, en vêtements blancs, des palmes à la main, devant le Trône et devant l'Agneau (Apocalypse 7, 9-10).

Écrit par : Michel de Guibert | 26/08/2007

FUMEUX CONCEPT

> Si je suis d'accord pour affirmer qu'il ne faut pas tomber dans le piège d'une vision dualiste, que la mission chrétienne se fait au sein de ce monde créé, je ne vois pas en quoi cette vision, qui tient compte du mystère de l'Incarnation, justifie la notion d'Etat-nation, qui n'est qu'un reliquat de l'histoire, basée sur un concept fumeux - la nation. Que ceci fut peut-être une nécessité historique, un bienfait momentané pour l'humanité (occidentale ?), je ne le nie pas, mais je ne pense pas qu'il possède pour autant un caractère nécessaire et qu'on puisse se prévaloir de l'Evangile pour en justifier la pérénité...

Je ne dis pas qu'il faille absolument changer structurellement l'organisation politique qui prévaut aujourd'hui, ou qu'il faille revenir à des formes "qui se perdent". Je dis que cela n'a strictement rien à voir avec la foi chrétienne. La part "incarnée" de la vie chrétienne trouve sa forme dans l'Eglise et ses structures propres, qui sont transnationales et universelles.

Personnellement, j'aime ma patrie, la Suisse, mais en aucun cas je ne reconnais à la nation dont je suis membre de prérogative sur mon être ou mon identité. La foi, elle, en a, alors qu'elle ne porte pas de couleurs nationales. Je me sens par exemple plus en famille avec un catholique africain qu'avec un compatriote matérialiste athée...

Écrit par : Philippe M | 26/08/2007

PAS DE BINAIRE

> Cette discussion, me semble-t-il, s’est enfermée dès le départ dans un système binaire hautement contestable. Ainsi soit le Christ nous délie de tout ce qui est « terrestre », y compris l’Etat-nation. Dans une religion universaliste de ce type, s’adressant à la seule conscience, il n’y a plus alors que des rapports d’individus déliés face au Christ. Soit au contraire l’Incarnation annoncée par les Evangiles doit être prise au sérieux : nous avons des responsabilités au sein de la société et nous devons y jouer notre rôle ; ce qui serait parfait si le second intervenant ne confondait pas « le monde » avec l’Etat-nation. Là, je suis sceptique.

D’après Rémy, la nation est une catégorie si universelle qu’il la met à la seconde place après l’humanité, dans sa liste des composantes de la personne.
Pourtant, ce que je constate c’est que le sentiment national est un tard venu. Il ne s’est constitué véritablement que dans la seconde moitié du XVIIIe siècle. Auparavant c’était le roi qui assurait symboliquement l’unité des français (une fois devenu inutile, on lui coupe la tête). La nation n’est d’ailleurs que le résultat d’un long processus par lequel l’Etat instaure un rapport direct avec les citoyens, tout en affaiblissant les corps intermédiaires de la société. Et son premier ennemi c’est l’Eglise, ne l’oublions pas (d’où le Gallicanisme). La modernité a consisté à affaiblir tous les contre-pouvoirs, tout ce qui faisait lien indépendamment de la société. Même ce qui relève du domaine des valeurs ou de la vérité menace aujourd’hui d’être de plus en plus monopolisé par l’Etat.

Dans ce cas, que reste-t-il aux communautés ?

Le « religare » de la nation est redoutable pour notre foi au Christ. Je doute que l’Etat-nation et que le sentiment national aient fait merveille avec la guerre de 14/18. Si l’unité de la nation, tant exaltée par les libéraux, son monopole économique, militaire, etc. ainsi que l’enthousiasme effréné que celle-ci inspirait aux Européens n’avait pas été si forte nous serions en meilleure forme.

Régulièrement nous entendons des discours nous invitant à être moins sectaires, à ne pas nous enfermer. Que met-on derrière le mot « sectaire » ? Est sectaire, je le crains, ce qui n’est pas conforme à la « volonté » de la nation. Et voici l’idée sous-entendue : la nation est plus universelle que l’Eglise. Sur certains points, l’Eglise comme les autres communautés religieuse doit se soumettre. Ne parle-t-on pas de former des Imams musulmans à partir des critères convenant le mieux au chef de l’Etat ? D’où tire-t-il cette légitimité d’imposer « son » Islam aux musulmans, lui qui ne l’est pas ? sinon que selon lui la « religion » vient en second.

Certes les multiples appartenances qui font de l’homme un être personnel et engagé vis-à-vis des autres sont essentielles pour un Chrétien. Le Christ n’est pas venu abroger la paix selon les hommes mais la parachever en apportant sa paix. Mais n’allons pas confondre celles-ci avec l’Etat-nation qui a tant fait pour les niveler.

Par contre, en tant que bénéficiaire de toutes ces appartenances qui ont constitué mon identité je peux me reconnaître comme français. Mais je ne mettrai certainement pas la nation au-dessus l’échelle des priorités, comme l’a fait Rémy. La famille est une cellule bien plus concrète et fondamentale, lorsqu’elle joue son rôle. Et la communion catholique, ainsi que l’obligation envers les Pasteurs de l’Eglise me semble bien plus essentielle que l’unité toujours abstraite de la nation.

Une anecdote: Comment croyez vous que le pasteur Bonhoeffer était jugé par Churchill? Très mal! Celui-ci avait eu le malheur de trahir son pays pour mieux servir le Christ!

Écrit par : Blaise | 26/08/2007

PAUL

"8- Aussi l'Ecriture, prévoyant que Dieu justifierait les nations par la foi,
annonça d'avance à Abraham cette bonne nouvelle : " Toutes les nations seront
bénies en toi. " "

Galates 3, huit.

Dieu ne parle pas des humains, mais des nations en cette occurrence.

J'ai cherché sur jesusmarie.com la bible mentionne un nombre dont j'ai renoncé à compter les occurrences "nation" ou "nations".

Les nations sont donc une notion fort importante pour Dieu puiqu'Il en parle très souvent dans le livre de sa parole.

L'homme, la femme, la famille, la nation sont des notions bibliques. Les termes "famille" et "familles" sont mentionnées d'innombrables fois.

Ces notions sont naturelles, donc divines (Dieu est l'auteur de la nature).

Nations est pris dans la bible au sens de "naissance" commune. La nation est une fédération de familles.

Or c'est en nous occupant de la nature que nous bâtissons notre destinée surnaturelle. Ainsi, la théologie morale nous dit que nos devoirs naturels passent avant nos devoirs de prières ou de piété surnaturelle.

Écrit par : Denis Merlin | 26/08/2007

JEAN-PAUL II

> Voir à ce sujet le dossier sur Jean-Paul II et la nation :
http://www.ichtus.fr/article.php3?id_article=303

Écrit par : hildebrand | 26/08/2007

FAMILLES

> Ce qui est fondamentalement en cause ici, ce n'est pas la nation telle qu'elle était comprise par les Hébreux. C'est l'absolutisation de la nation, qui serait la seule communauté objective rassemblant les hommes. Cette unité de la nation qui cherche à affaiblir, parfois à détruire, les autres liens sociaux qui la concurrencent. Ainsi les catholiques anglais se voyaient systématiquement reprocher d'être de mauvais sujets à cause de leur fidélité envers le pape.
Au nom de quoi réduirions-nous les rapports sociaux qui structurent les hommes à la seule nation? A mon sens la nation bien conprise est plutôt la somme de nos liens, de nos obligations, de notre héritage historique et culturel.
Par conséquent la nation ne peut prétendre à être l'absolu qui nous domine. Et pour reprendre l'expression si juste de Denis Merlin, la nation dans son sens authentique est d'abord et avant tout "une fédération de familles".
Dans le sens contraire la nation moderne est idôlatre.

Écrit par : Blaise | 27/08/2007

CONFUSION

> Nous avons encore ici une confusion entre deux idées qui, si elles portent une appellation semblable, ne recouvrent pas le même domaine et n'emportent pas les mêmes conséquences. Le discours matérialiste actuel joue beaucoup la dessus en vidant les notions sacrées de leur sens premier pour les coller à des réalités bien moins glorieuses et s'en approprier le lustre par procuration.

La critique de M. Wiedemann a le défaut de confondre les deux entendements et son analyse «magique », « potterienne », de Jésus - tant à propos de la nature du Christ que du sens de sa venue - nuit à toute son argumentation.

Rendons à César ce qui est à César.

L'Etat-Nation est une institution politique déiste. La tentative de l'Etre-Suprême en témoigne. La notion d'Etat-Nation a été consacrée par la Révolution - en France mais pas dans tous les autres pays - pour substituer Dieu. Remplacer la religion catholique, fondement du pouvoir royal, par la morale matérialiste de la classe bourgeoise à l'origine de la révolution, dont le but fut de s'emparer du pouvoir plus que de le partager (Cf. situation actuelle). L'Etat-Nation apparaît donc avant tout la consécration politique de l'égoïsme et du droit de propriété (Cf. histoire des institutions de Jacques Ellul à propos du Code Civil).

Laissons à Dieu ce qui est à Dieu.

La nation, ou les nations, dans le sens des Ecritures, ne sont pas en concurrence avec Dieu. C'est un terme générique, détaché de référence. Cette neutralité permet d'unifier, d'indifférencier entre tous les hommes, et non de distinguer. Nation est ici unversel, par ce que Dieu s'adresse à tous, et qu'il nous appelle à l'unité. Les Ecritures nous apprennent que Dieu a sanctionné la tentation prométhéenne. On ne se mesure pas à Dieu. La prétention et l'orgueil de l'homme ont été punis lors de la Tour de Babel. L'homme a été pardonné par le don de la Pentecôte, la descente de l'Esprit Saint. Il est appelé à ne former plus qu'un seul peuple. C'est le sens de la venue du Christ parmi nous.

On ne peut donc pas mettre en parallèle l'une et l'autre notion*.

Alors que doit penser le chrétiende l'Etat-Nation ?

La consécration moderne – politique - de l'Etat nation est à l'origine même du nationalisme. C'est une monstruosité hérités des Lumières qui trouvent ses raciens dans la critiques des monarchomaques. Le caractère sacré de l'etat Nation provient du flot de sang qu'il a fait verser. C'est en fait une notion politique régressive fondée sur le sacrifice humain.

L'Etat Nation est le déclencheur des guerres modernes, le fondement des politiques d'exclusion et de discrimination. Cela a abouti à la pratique génocidaire et ne peut que heurter la conscience chrétienne. Nous sommes tous appelés à appartenir au même peuple, le peuple de Dieu. L'idée d'Etat Nation divise. Cette division est mortifère et elle s'oppose aux commandements.

On voit des monuments aux morts célèbrer la mémoire de ceux qui se sont sacrifiés pour défendre les idéaux de l'Etat-Nation. Ces monuments ne stigmatisent-ils pas aussi l'impéritie de ce même Etat-Nation à assurer la sécurité de sa population en l'engageant dans la guerre ?

Ce n'est pas Dieu qui a abandonné les hommes à Auschwitz. C'est le résultat de l'homme qui a rejeté Dieu. Dieu nous aime, il ne nous demande pas de se faire tuer ni de tuer. L'Etat-Nation, lui, le fait, l'excuse ou l'encourage, même s'il le punit quand ce n'est pas fait à son avantage.

*Cela me rappelle le débat sur le mariage où nous avions d'un côté une institution juridique d'essence patrimoniale, contractuelle et provisoire (puisque le divorce y met un terme), et de l'autre un sacrement religieux, spirituel et perpétuel. Deux actes différents, qui s'opposent même sur certains point de vue, et un seul et même nom.

Je recommande la lecture de :

"Paroles de poilus" (2 euros)
http://www.amazon.fr/Paroles-Poilus-Lettres-carnets-1914-1918/dp/2290335347

L'ouvrage de Léon Schirmann "Mensonges et désinformation"
http://www.italiques.com/livres/mensonges.php

L'article paru dans le dernier Sciences Humaines sur le mythe gaulois
http://www.scienceshumaines.com/le-mythe-gaulois_fr_21017.html

Écrit par : Qwyzyx | 27/08/2007

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