29/06/2007
Travailliste et membre de... l’Opus Dei : l’Irlandaise Ruth Kelly, très insolite ministre de Blair puis de Brown
Une sympathique solidité "papiste" (mais sans effet politique) :
Elle est ministre des Transports dans le nouveau gouvernement britannique : Ruth Kelly, solide blonde à la voix grave, est une personnalité travailliste pour le moins atypique. Nord-Irlandaise et petite-fille de l’officier de l’IRA Philip Murphy (chef du bataillon du West Fermanagh, emprisonné par les Brits en 1922, gréviste de la faim, libéré en 1924), elle a donné à ses quatre enfants des prénoms emblématiques : Eamonn, Niamh, Roisin et Sinead. Elle est membre du Labour Party depuis 1990, elle a été élue député de Bolton West en 1997 (siège qu’elle a pris aux conservateurs), elle a été secrétaire d’Etat à l’Education (2004), puis ministre de la Condition féminine et de la parité (2006). Or Ruth Kelly est également membre de… l’Opus Dei, comme son frère Ronan. Et ses quatre enfants ont fait leurs études primaires à l’école catholique des English Martyrs, à Wapping.
En 1997, à peine élue aux Communes, elle refusait de voter les premières lois « nouvelles mœurs » de Tony Blair ; attitude qu’elle a gardée durant les législatures suivantes. En mai 2006, le cardinal archevêque de Westminster, Cormac Murphy-O’Connor (autre Irlandais), a pris publiquement la défense de Mme Kelly, attaquée par les médias en raison de ses vues « papistes » réputées « contraires aux devoirs d’un membre du gouvernement ». Ruth Kelly avait en effet agi auprès de Blair pour tenter de faire dispenser les organismes catholiques de l’application des lois pro-gay (dites « anti-discrimination »). Même action de sa part en janvier 2007, pour essayer d’amener Blair à dispenser les agences catholiques d’adoption d’appliquer de nouvelles lois pro-gay.
Cette constance catho sans complexe amuse la classe politique britannique : Blair, dans les deux cas, a rejeté les démarches de Mme Kelly*.
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_____(*) Ce qui confirme une fois de plus l’inutilité de la présence de catholiques dans les gouvernements d’aujourd’hui, dès qu’il s’agit de questions engageant la vision de la vie et de la société. Surtout si l’on sait que Blair, pour se convertir au catholicisme, a attendu d’avoir quitté le 10 Downing Street !
L'insolite existence de Mme Kelly a été révélée en 2006 au public français dans un livre qui se trouve (qu'on me pardonne) être de moi : L'Opus Dei, enquête sur le "monstre".
19:15 Publié dans Planète chrétienne | Lien permanent | Commentaires (9) | Tags : Ruth Kelly, Gordon Brown, Tony Blair, Opus Dei, catholicisme
Commentaires
BIEN-PENSANCE
> Absolument d'accord avec le post-scriptum. Les catholiques dans les gouvernements sont priés de la fermer dès qu'on touche aux questions centrales : droit à la vie, famille etc. On les colle à des postes techniques où n'importe quel athée bien intentionné aurait la même action. Et le brave public bien-pensant de dire, tout ému : "heureusement qu'elle (il) est là..." Rappelez-vous l'époque où Chirac torpillait le paragraphe sur les racines chrétiennes de l'Europe : toute la France bien-pensante disait : "heureusement que Bernadette est là..." Ah bon ? Et si elle n'avait pas été là, ça aurait changé quoi ?
Écrit par : Chante-en-hiver | 29/06/2007
COURT-CIRCUITEE
> Oui, bien sûr, c'est un peu triste de la voir ainsi court-circuitée. Mais est-ce vraiment l'essentiel? L'exemple que nous offre Ruth Kelly reste éminemment positif. De toute façon, rien de surprenant à ce qu'elle échoue à influer sur des points essentiels de la politique, telles que la loi concernant les adoptions par les homosexuels. Et avec la déchristianisation, le phénomène ne fera que s'accentuer. Ce qui compte d'abord et surtout c'est de rétablir le "religare". L'unité des chrétiens doit apparaître à tous. Leur fidélité envers leurs pasteurs renouvelée. Sinon, comment pourrions-nous être crédibles dans le monde d'aujourd'hui? Fidélité et charité doivent aller de pair, indissolublement. Et les incroyants n'y sont pas insensibles: pour eux nos divisions sont bien le signe que l'Eglise n'est qu'une institution humaine. Ils le disent parfois.
Ruth Kelly est un exemple. Mais un exemple n'a rien de passif: il appelle à l'imitation.
Écrit par : Blaise | 30/06/2007
PAS TRISTE
> Je suis d'accord avec Blaise: un peu tristounet ce post-scriptum, un peu trop désabusé.
Ne valait-il pas la peine d'en être, et de tenter de peser sur les décisions, même au risque d'échouer?
Je préfére le ton de la page fort intéressante de l'auteur dans le remarquable livre qu'il cite (page 302), dans la partie III, 3 de son livre (L'Opus Dei est-il "conservateur?")
françois
[De PP à F. - Pas de contradiction entre la page de mon enquête sur Mme Kelly et le diagnostic que je propose dans cette note de blog...
Le livre constate le dynamisme de Mme Kelly et le pluralisme politique du mouvement spirituel auquel elle appartient. C'est un fait.
La note du blog constate par ailleurs que ce dynamisme et ce pluralisme ne peuvent rien dans une machinerie politicienne occidentale "postdémocratique". C'est un autre fait.
Mme Kelly sanctifie certainement son travail ordinaire de ministre, à son usage spirituel personnel ; ça n'a pas empêché pas le blairisme d'imposer aux agences d'adoption catholique les lois pro-homoparentalité...
Prendre acte de cette inefficience n'est pas tristounet : les faits ne sont ni tristes ni joyeux, ils sont les faits. Et l'impasse que représente aujourd'hui la voie politique conduira les catholiques à construire d'autres modes de présence sociale, ce qui n'est pas triste du tout !
ps/ Je ne peux pas être "désabusé" dans le domaine politique, parce que je ne me suis jamais "abusé" sur la possibilité de modifier cette machinerie. Ce qui se déroule ne fait que le confirmer... Si tel ou tel ne croient pas possible de vivre sans prendre part au show, libre à eux ; mais c'est autant d'énergie qu'ils n'investissent pas dans la société. Et c'est cela qui est tristounet.]
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Écrit par : françois | 30/06/2007
@ Blaise
> Je comprends votre idée, mais ne confondez-vous pas la sphère de la vie personnelle et l'efficacité politique ? Mme Kelly est quelqu'un qui a la foi catholique et qui a une cohérence de vie. Mais en tant que politicienne, elle se contente de ne pas voter les lois qu'elle désapprouve, ou de demander en vain à son chef de gouvernement de ne pas imposer aux catholiques des obligations contraires à leur conscience. Ca ne fait pas avancer d'un millimètre l'influence sociale du catholicisme. Et le système politique pèse dans le sens contraire, comme vous le remarquez vous-même.
Si l'évangélisation est la priorité absolue comme le dit ce blog (et je suis d'accord), la carrière politicienne de Ruth Kelly n'a pas l'air de servir à grand-chose sous cet angle... Mais, bon, il faudrait voir ça de plus près.
Écrit par : ludo | 30/06/2007
@ Ludo
> Effectivement, la question d'un engagement politique pour les chrétiens est très problématique. Comment cautionner l'ensemble d'un programme, dont une part s'oppose aux valeurs que nous défendons? Cela se pose aussi bien pour le vote que pour l'action politique proprement dite (comme avec Mme Ruth Kelly).
Avouons que c'est un problème difficile à trancher. Kelly a choisi de se dévouer pour son pays, même si elle sait qu'elle ne peut agir dès que les moeurs, la dignité de la vie sont abordés. Elle a fait le choix de composer, de faire contre mauvaise fortune bon coeur. C'est sa position. En faisant de la politique, le peu qu'elle peut faire elle le fait.
De plus, j'insiste : nos politiques catholiques nous discréditent constamment. En gros leur discours c'est de dire que l'Eglise, ils l'aiment bien mais qu'ils doivent être fidèles à l'Etat. C'est une situation vaudevillesque : La femme (l'Etat) et l'amante (l'Eglise). Kelly, au moins, ne marche pas. Son témoignage de rectitude est authentique, et significatif pour ses confrères.
Néanmoins, d'accord. La possibilité d'une action politique pour des chrétiens devient chimérique. Et je rejoins parfaitement M. de Plunkett sur son analyse, quand il dit qu'il s'agit pour nous de "construire d'autres modes de présence sociale". C'est là vraiment que nous serons pleinement utiles. Malgré ceux qui se font les chantres de l'unité, de l'indissolubilité de la République, et dénoncent avec aigreur les "communautarismes".
Écrit par : Blaise | 30/06/2007
LE POLITIQUE SE DISSOUT
> C'est aussi une question institutionnelle : ce sont les députés qui, en France comme au Royaume-Uni, sont à convaincre. Les ministres ne sont pas législateurs, leur présence au gouvernement représente les opinions dominantes, elle ne leur permet pas de les changer.
La sécularisation a atteint un point de non-retour, puisque désormais même la morale laïque (fondée sur l'intérêt général) a été abolie au profit d'une constellation de désirs individuels et de pulsions communautaires. Au final, c'est le fait politique lui-même qui est dissous, et en ce sens, la participation au gouvernement est inutile, car le gouvernement n'est plus que le fantôme du pouvoir.
ThomasSXB
[De PP à TSXB - Pleinement d'accord avec vous là-dessus.]
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Écrit par : ThomasSXB | 30/06/2007
UNE COMPLÈTE PERTE DE TEMPS ET D'ENERGIE
> Entièrement d'accord avec ThomasSXB. Je rajouterais juste une chose: cela sert-il à quelques chose de vouloir convaincre les députés quand on sait qu'il sont soumis aux appareils des partis qui accordent ou non investiture, soutient, etc.? Pour moi, l'engagement en politique est une complête perte de temps et d'énergie. Je parle de l'engagement EN politique, c'est-à-dire dans le cadre des partis et participant au grand guignol que l'on appelle actuellement la démocratie. S'engager politiquement, au sens noble du terme, c'est-à-dire au service de la cité, du bien commun, alors oui mais pas dans le cadre politicien! Il faut arrêter d'être naïf et de se faire des illusions sur le poids de tel ou telle catholique qui participe à un gouvernement (cf le commentaire de chante-en-hiver avec lequel je suis entièrement d'accord). Je me demande même parfois si cette naïveté n'est pas dangereuse tant elle bloque des énergies qui espèrent vaguement quelque chose au lieu réagir et de se mettre à l'oeuvre.
Écrit par : VF | 30/06/2007
AU CONTRAIRE
> Je pense au contraire que les chrétiens ont le devoir de s'imposer et de s'engager en politique car ,même s'il ne sont pas forcément écoutés et si la machination politique est là ils font entendre leur voix ,leur avis ,et ils sont soudés entre eux.(Je parle des vrais catholique unis au pape et fidéles a son enseignement).Nous ne devons pas avoir peur de donner notre avis.
La polution extérieure du monde est la suite de la polution interieure de l'être humain.
Marie-Laure
[De PP à ML :
Ne soyons pas naïfs. La politique dont il est question dans ce débat ne consiste pas à militer dans un mini- parti, ou un cénacle sans poids parlementaire. Elle consiste à entrer dans une machinerie de "parti de gouvernement". Et là, l'influence du catholique est nulle. (C'est ce que montre l'expérience : par exemple celle de Mme Kelly !). Donc il perd son temps et son énergie... Il fait carrière ? tant mieux pour lui : mais, en 2007, les priorités du chrétien sont ailleurs ; et se soustraire à ces priorités pour "faire de la politique", pardon de vous le dire, c'est manquer à nos premiers devoirs. Les journées n'ont que 24 heures, les croyants sont peu nombreux ; le temps qu'ils perdent dans les partis est autant de temps qu'ils ne donnent pas à l'évangélisation.
Nous sommes dans une Europe où 90 % des gens(*) n'ont pas la moindre idée de ce qu'est réellement la foi chrétienne ; le leur révéler est la mission des chrétiens. Faire autre chose est du temps perdu.
Et surajouter à la foi des préférences partisanes, germe de divisions et de polémiques, c'est carrément du sabotage. Vous militez à droite ? Ca vous enlève la possibilité de parler de la foi à quelqu'un de gauche...
Navré de vous le dire aussi crûment, mais il faut être clairs.
ps 1 / Pour que les chrétiens puissent à nouveau "donner leur avis" avec une chance d'être entendus, il faut qu'ils reprennent leur liberté de parole... et qu'ils cessent de s'inféoder à des partis politiques où on leur donne le droit de se taire !
ps 2/ "Soudés entre eux" ? Mais la vie en société n'est pas un camp scout, Marie-Laure ! Chaque chrétien est là pour autrui, il doit donner envie de lui parler pour savoir ses raisons de vivre en chrétien... Et ceci n'arrivera jamais si les chrétiens donnent l'impression d'être un clan.
(*) Je parle des gens "normaux", pas des petits milieux préservés.]
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Écrit par : Marie laure | 01/07/2007
UNE PISTE
> L'encyclique Deus Caritas Est nous donne une piste, puisqu'elle constate que les laïcs, et eux seuls, à l'exclusion de l'Eglise ont la charge de la "justice" et donc la société la plus juste possible :
" L'Église ne peut ni ne doit prendre en main la bataille politique pour édifier une société la plus juste possible. Elle ne peut ni ne doit se mettre à la place de l'État. Mais elle ne peut ni ne doit non plus rester à l'écart dans la lutte pour la justice. Elle doit s'insérer en elle par la voie de l'argumentation rationnelle et elle doit réveiller les forces spirituelles, sans lesquelles la justice, qui requiert aussi des renoncements, ne peut s'affirmer ni se développer. La société juste ne peut être l'œuvre de l'Église, mais elle doit être réalisée par le politique."
Si les laïcs ne prennent pas d'initiative, l'Eglise ne peut en prendre à leurs places. Mais à chacun selon son charisme et ses talents, bien évidemment.
Il faut aussi considérer que l'engagement pour une famille juste est un engagement politique, car le phénomène politique n'est pas hétérogène aux familles. Il dépend des familles et donc de l'éducation et de l'ordre familial.
Peut-être faudrait-il commencer par nos familles, ou par aider les familles surtout sur le plan moral et de la justice (comportement des acteurs familiaux et justice entre eux) Il n'est de richesse que d'hommes, donc il n'est de richesse que de familles. En général, tel que l'enfant est formé, tel il se comportera dans la vie publique.
Écrit par : Denis Merlin | 03/07/2007
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