06/05/2007
Présidentielle : l’évangile d’aujourd’hui…
...donne la clé de deux mois de débats entre chrétiens :
Jean 13, 35 : « Ce qui montrera à tous les hommes que vous êtes mes disciples, c’est l’amour que vous aurez les uns pour les autres. »
Je me souviens d’un confrère journaliste, dans les années 1980 : athée militant (tendance néodarwinienne), il ironisait sur le « voyez comme ils s’aiment » évangélique. Il trouvaient que les catholiques ne s’aimaient pas entre eux. L’actualité lui en apportait des preuves quotidiennes, disait-il.
Et aujourd’hui ? Nous venons de voir les catholiques se diviser sur la question présidentielle : certains se sont laissés happer par des considérations secondaires, qui ont évincé de leur esprit les repères indiqués par l’Eglise.
UNE DIVISION FACTICE
Ségolénistes fascinés par « la justice » (mais la rhétorique victimaire est un détournement de la charité chrétienne)… Sarkozystes privilégiant « la sécurité » (mais on cherche vainement ce concept dans l’Evangile)… Bayrouistes croyant ressusciter le christianisme social (mais leur candidat était celui – sauf à l’extrême gauche – qui montrait le plus d’éloignement envers l’Eglise)… Etc. Divisions inessentielles, pour des chrétiens ! À moins de penser que les gesticulations postdémocratiques sont plus essentielles que l'essentiel, c’est-à-dire la foi et les indications sociétales données par la foi.
Dans quelques heures, ce brouillage mental prendra fin. L’élu sera élu, et nous commencerons à le juger sur des faits. Quant aux catholiques agités, ils renoueront avec l’irénisme qui habille leurs rapports dans le temps ordinaire. Jusqu’à la prochaine occasion de se diviser sur du factice ?
UN PAS EN AVANT TOUT DE MÊME
Ne noircissons pas le tableau. Comme nous le disait hier l’un des animateurs du site Hermas (commentaire sous la note Si demain Ségo…), le débat entre catholiques, depuis deux mois, aura permis à beaucoup de progresser dans leur connaissance : a) de ce que pense l’Eglise, b) de ce qu’est la société actuelle.
Chaque débat est l’occasion d’y voir plus clair, en nous et autour de nous. Le monde catholique français avait perdu (de longue date) le réflexe de s’interroger et d’étudier : il est en train de le retrouver. Il redécouvre, dans le tumulte des discussions, ce qui est l’essentiel. Et l’unité profonde qui en découle.
09:45 Publié dans Idées | Lien permanent | Commentaires (4) | Tags : présidentielle, catholicisme, christianisme
Commentaires
Du dialogue jaillit la lumière.
> La religion sert cependant parfois et seulement de piédestal. Certains n'hésitent pas à monter dessus comme sur un tabouret, au risque de la piétiner, pour se donner de la consistance (Tartuffe).
Méfions nous donc des prosélytes de circonstance et des revendications bruyantes ou tonitruantes bien peu compatibles avec un enseignement de la religion qui est la tempérance.
Le regain des références chrétiennes dans le discours politique est en effet une source de satisfaction même si leur usage est limité au domaine de la séduction, du marketing politique. Mais quel que soit le gagnant des élections, nous devrons attendre pour voir triompher les vertus qui forment la structure anthropologique de la personne "mise debout" dans sa nature et par la grâce.
Votre blog y contribue. Merci.
Bon dimanche.
http://atilf.atilf.fr/dendien/scripts/tlfiv5/advanced.exe?8;s=200559030;
Écrit par : Qwyzyx | 06/05/2007
AUX NATIONS ?
> A lire aussi l´Evangile d´aujourd´hui : "séparés de Moi, vous ne pouvez rien faire..." Cet avertissement pourrait-il aussi s´adresser aux nations ?
Écrit par : Fabien | 07/05/2007
LA LIGNE DE CRÊTE
> Merci pour votre référence. Mais merci, surtout, pour votre témoignage, j'allais dire : obstiné, constant. Vous tenez une ligne de crête forte, qui s'est dégagée, à l'occasion des débats, et qui, finalement, se résout à une position tellement simple : je suis catholique ; catholique, je le suis le dimanche et en semaine, en famille et hors de la famille, dans mon travail, dans mon intelligence, dans mon coeur et dans l'ensemble de mes rapports sociaux. Quoi d'étrange, au fond, à cela ?
Ce qui est bizarre, vraiment, c'est que l'on en soit venu à trouver cela... bizarre. Cette situation laisse entrevoir à quel point le laïcisme a pu entrer profondément dans les moeurs chrétiennes, au point qu'en des circonstances graves, la conviction chrétienne ne puisse plus atteindre les couches profondes de la conscience, sauf à en remonter à la première alerte, par crainte ou par respect humain.
Oui, finalement, les circonstances présentes sont une grâce. Une grâce pour prendre la mesure des choses, pour s'interroger, pour s'humilier, au sens vrai du mot, au constat de nos tiédeurs et de nos complexités schizophréniques.
Pourquoi être chrétiens si ce n'est pour en vivre ? Et n'est-ce pas vivre, aussi, que de vivre en société ? Ne sommes-nous que des ectoplasmes entre deux dimanches, entre deux prières, entre deux pélerinages ou deux lectures pieuses ? Est-ce que ce serait donc la même chose que d'être chrétien ou d'être seulement "conservateur", ou "bien pensant" ? Est-ce que ce ne serait qu'une définition théologique abstraite, sans incidence charnelle ?
Oui, vous avez raison. Mille fois raison. Et ce qui conforte cette raison, c'est la simplicité évangélique de votre démarche. Elle n'emporte ni fanatisme, ni confusion de l'ordre politique et de l'ordre religieux, ni désertion de celui-là au profit de celui-ci. En fait, vous ne proposez rien d'autre qu'un choix d'identité, ce qui est, somme toute, très à la mode et adaptée à nos psychologies modernes. Etre ce que l'on est - et nous le sommes, en prenons-nous assez conscience ? par immense grâce d'adoption - et assumer la responsabilité de ce que l'on est. Telle est la voie qu'avait éclairée le pape Jean-Paul II. C'est celle de l'Evangile. Il n'est que de la suivre, sans complexe, avec joie. Ne sommes-nous donc pas bien payés, du Sang même de Jésus rédempteur, pour savoir que la vérité libère ?
Bien, bien cordialement.
Écrit par : Pierre Gabarra | 07/05/2007
RACAN, BOSSUET ET SARKOZY
> Le "concept" de sécurité n'est peut-être pas dans les Evangiles, mais il apparaît dans la Première lettre à Timothée (2-2) invitant à prier pour les chefs politiques "afin que nous menions une vie paisible et tranquille". On peut rapprocher cette réflexion du beau passage du Testament de Richelieu (IIe partie-ch. 4) disant que le meilleur contentement des princes est de voir “beaucoup de gens dormir sans crainte à l’ombre de leurs veilles, et vivre heureux par leurs misères.” Un peu plus tôt au XVIIe siècle, Racan chante l’honnête sagesse politique :
“Il laboure le chant que labourait son père,
Il ne s’informe pas de ce qu’on délibère
Dans ces graves conseils d’affaires accablés ; (...)”
Quelques décennies plus tard Bossuet vante les mérites des anciens Egyptiens : “Cette nation grave et sérieuse connut en premier les vraies fin de la politique, qui est de rendre la vie commode et les peuples heureux.” (Discours sur l’histoire universelle, IIIe partie-ch. 3).
Il est malheureux que la mode démocratique nous ait arrachés à cette tradition dont je me serais bien contenté. On souhaiterait que ne nous demandent pas sans cesse notre avis ces dirigeants qui sont justement payés (pas si mal, et tant mieux si M. Sarko a les moyens ou les relations qui lui permettent d'aller méditer sur un yacht devant Malte, je ne guigne pas sa place)... que donc ne nous demandent pas sans cesse notre avis ces dirigeants qui sont justement payés pour choisir et appliquer ce qui est utile au bien commun.
Écrit par : Laurent Chéron | 08/05/2007
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