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02/04/2007

Les chrétiens face aux élections : une réflexion du cardinal Barbarin

Le rôle de l’Etat, le respect de la vie, la famille, la lutte contre le capitalisme financier, le devoir écologique, la prière pour les adversaires:


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Cardinal Philippe Barbarin

21/03/2007

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<<  Les « présidentielles » et les « législatives » occupent depuis plusieurs mois la première place dans les medias. De fait, l’enjeu est important, car il touche la vie sociale et l’équilibre politique de notre pays. Les disciples du Christ prennent leur place dans ces débats, et beaucoup s’y engagent personnellement. Ils apportent leur contribution à la réflexion commune et, dans le secret ou dans les rassemblements communautaires, ils prient à cette intention. Les évêques de France ont écrit, il y a quelques mois déjà, un texte intitulé Qu’as-tu fait de ton frère ?, qui parcourt l’ensemble des questions et y porte un regard chrétien. En tant qu’institution, l’Église garde une certaine distance par rapport à la campagne, tout en y étant attentive, car sa mission est de servir la société, et tout ce qui touche l’homme la concerne. Une phrase de Benoît XVI, tirée de l’encyclique Dieu est amour, peut lui servir de boussole en ce domaine : « L’Église ne peut ni ne doit prendre en main la bataille politique pour édifier une société la plus juste possible. Elle ne peut ni ne doit se mettre à la place de l’Etat. Mais elle ne peut ni ne doit non plus rester à l’écart de la lutte pour la justice. Elle doit s’insérer en elle par la voie de l’argumentation rationnelle et elle doit réveiller les forces spirituelles sans lesquelles la justice, qui requiert aussi des renoncements, ne peut s’affirmer ni se développer... ».

 

Notre témoignage de chrétiens peut être en ce moment d’énoncer les points qui nous paraissent les plus importants pour le bien commun, pour la bonne marche de notre pays et son avenir, et d’expliquer pourquoi.

 

> Nous avons par exemple besoin d’un État fort qui ne se laisse pas influencer par la pression des lobbies et qui organise la vie commune. À la base de la vie sociale, il y a le respect de la vie humaine et la famille. Le Code civil lui-même énonce cet engagement majeur : « La loi garantit le respect de l’être humain dès le commencement de la vie ». Comment se fait-il que depuis trente ans, on permette tant d’exceptions à cet article ? Pour l’instruction des enfants et l’éducation des jeunes à la liberté, l’attente est grande, aussi bien dans les familles que dans le corps social. Personnellement, c’est une grâce que je demande au Seigneur : le renouveau des congrégations vouées à l’éducation ou l’apparition de nouvelles initiatives en ce domaine.

 

> Un second point est celui du travail et de sa juste rémunération. Tous les partis sont attentifs à la souffrance que représente le chômage. C’est justice que chacun trouve sa place dans le service et la construction de la société. Pour cela, il faut s’opposer à un capitalisme qui deviendrait purement financier.

 

> La question de l’immigration demande aussi un nouveau positionnement. Elle appelle des mesures intérieures pour assurer la possibilité de vivre ensemble et garantir la paix sociale. Mais elle ne sera jamais résolue si l’on ne remonte pas aux causes, au niveau d’une concertation internationale qui fasse sortir chaque pays de ses intérêts propres. Si l’on ne s’y attaque pas, le dramatique déséquilibre des ressources dans notre planète continuera d’appauvrir les pays les plus pauvres, de les priver de leurs élites, et personne ne pourra empêcher les pauvres de quitter leur pays pour tenter leur chance dans un monde occidental qu’on leur présente comme un mirage.

 

> La sonnette d’alarme des menaces écologiques est maintenant tirée. Tout le monde comprend qu’il ne s’agit pas d’une lubie des « verts », mais d’un enjeu vital pour la survie du genre humain. L’engagement écologique rencontre une forte résonance dans le cœur des croyants. Respecter la création et ne pas voler les générations futures, c’est un devoir que Dieu nous fait.

 

> Il faudrait aussi arriver à s’expliquer sur la place des Églises et des religions, dans la société. Le mot « laïcité » a des sens tellement variés - et contradictoires dans la bouche de ses différents utilisateurs ! La construction de l’Europe, où se mêlent des traditions diverses, peut aider la France à trouver en ce domaine un chemin nouveau.

 


L’influence d’un citoyen peut paraître minime, si elle se limite à son bulletin de vote. Mais l’action d’un chrétien ne saurait s’arrêter à l’accomplissement de son devoir électoral. Nul ne doit minimiser sa responsabilité. La communauté chrétienne encourage tous ses membres, en particulier les jeunes, à s’engager dans la « chose politique » (res publica). Le pape Pie XI nous a éclairés en affirmant que l’engagement politique est la forme suprême de la charité.

 

Pour autant, les chrétiens n’oublient pas qu’il ont d’abord pour mission de « toujours prier sans se décourager » (Luc 18, 1). Prions donc pour les candidats aux élections présidentielles, législatives ou municipales. Ce n’est pas facile de prier pour ceux que l’on regarde comme des adversaires ou des dangers pour la vie sociale. Prions aussi pour les électeurs, afin que leur choix soit inspiré par l’amour des autres et le bien commun, plutôt que par l’intérêt personnel. Il est heureux que l’on entende ces intentions à la prière universelle, au cours de nos eucharisties ; j’espère qu’elles ont aussi place dans le secret de notre prière personnelle.

 

Nous avons mission de prier pour l’ensemble de la société civile, afin qu’elle vive les mois à venir comme un vrai débat où les convictions de chacun puissent être exprimées librement et dans le respect des autres. On peut prier dès maintenant pour ceux qui seront élus car les responsabilités qui les attendent sont grandes et difficiles à exercer. Les chrétiens qui assument la responsabilité de gouverner ou de légiférer ont particulièrement besoin de notre aide et de notre soutien dans leur travail. Ils sont appelés à montrer une cohérence entre leur foi et leur engagement, l’esprit de l’Évangile et le service de la société actuelle. Puissent-ils, comme dit le Concile, « Mener toutes leurs activités terrestres en unissant dans une vivante synthèse tous les efforts humains, familiaux, professionnels, scientifiques ou techniques, et les valeurs religieuses, sous la haute ordonnance desquelles tout est coordonné à la gloire de Dieu. >>

 

 

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Article paru dans la revue Eglise à Lyon, 1/2007, pp.4-5.

 

 

Commentaires

Monseigneur, merci !

> Quel président probable aura l'audace, le courage, la patience de vous lire, d'approfondir, de méditer, de ruminer, d'intérioriser ce que vous écrivez et que la plus simple des brebis croyantes et fidèles du troupeau du Bon Pasteur ne peut qu'approuver à 100% du fond de son coeur dans la prière, le dire et l'agir ?

Écrit par : Gérald | 03/04/2007

BARBARIN

> Voilà encore une position du Primat des Gaules qui ne me surprend pas du tout de sa part. Et qui est très engagée dans une forme de langage modéré.
L'Eglise de France est en train de bouger par ses nouvelles élites de grande qualité. Il manque encore le renouvellement des prêtres qui tarde. Espérons que le « Motu Proprio » qui devrait ouvrir les paroisses à tous les chanoines traditionnels, contribuera là aussi à apporter du sang neuf. Car le mouvement traditionnel qui s'est grandement développé au sein même de l'Eglise a suscité de nombreuses vocations et est un vivier de jeunes prêtres.
Un correspondant incitait les fidèles engagés dans la voie exigeante de Rome à donner l'exemple. J'ai aussi remarqué que l'exemple était très porteur. Dans mon église de plus en plus de paroissiens font la génuflexion devant le Corps du Christ au moment de la communion, se signent ou s'inclinent aussi en fonction de la liturgie.

Écrit par : Gentil Loup | 03/04/2007

DEPOSUIT POTENTES DE SEDE

> Le matin du 9 novembre 2006, j’ai écouté l’évangile du jour « les marchands chassés du Temple » Jean 2/13-22, puis son très fin commentaire réalisé par un prêtre. Ce dernier fit intelligemment remarquer que le texte grec précise que Jésus n’a pas frappé les vendeurs mais qu’il fit un fouet avec des cordes pour en chasser le seul bétail, comme l’aurait fait n’importe quel bouvier.
Ceci rejoint tout à fait le commentaire du Père Marie-Emile Boismard op, qui dans la Revue Biblique de l’Ecole Biblique et Archéologique Française de Jérusalem [RB 2003 T.110-1 (pp 33-37)] reprenait un texte copte sur l’Evangile de Matthieu de ce même épisode au Temple (Mt 21/12-13), récemment publié par Hans-Martin Schenke. Celui-ci faisait remarquer que « Jésus n'effectue aucun acte violent lorsqu'il s'en prend aux vendeurs installés dans le Temple. Nous croyons que ce détail important ne se lisait pas dans l'évangile de Matthieu mais dans une forme archaïque de l'Évangile de Jean qui, dans le manuscrit, aurait remplacé le texte mathéen primitif. »
Ainsi nous voyons que commence à être rétabli la vérité sur cet épisode dans lequel certains, depuis très longtemps, aimeraient bien pouvoir trouver une preuve, souvent avancée, étayant leur thèse d’un Jésus qui aurait été, au moins cette fois là, violent, brutal, intolérant, et donc quelque peu inhumain face à ces « pauvres » vendeurs d’animaux pour les sacrifices au Temple de Jérusalem. Tel n’est pas le cas, semble-t-il, quand on recherche la vérité. Jésus n’a chassé, à coup de fouet que les animaux. Il n’a donc fait que mettre en acte ce qu’avaient déjà prophétisé : Isaïe en 1/11 : « Que m'importent vos innombrables sacrifices, dit Yahve. Je suis rassasié des holocaustes de béliers et de la graisse des veaux ; au sang des taureaux, des agneaux et des boucs, je ne prends pas plaisir. », Jérémie en 6/20 : « Que m'importe l'encens importé de Sheba, le roseau odorant qui vient d'un lointain pays ? Vos holocaustes ne me plaisent pas, vos sacrifices ne m'agréent pas. », Osée en 6/6 : « Car c'est l'amour qui me plaît et non les sacrifices, la connaissance de Dieu plutôt que les holocaustes », et enfin Amos qui est encore plus explicite : Am en 5/22 : « Quand vous m'offrez des holocaustes... vos oblations, je ne les agrée pas, le sacrifice de vos bêtes grasses, je ne le regarde pas. »

Il semble bien toutefois que Jésus se soit quelque peu énervé ce jour-là. Son énervement, le seul des Evangile semble-t-il, doit donc être motivé par quelquechose de particulièrement grave. Jésus donne explicitement la raison de son emportement : Jn 2/16 : "Enlevez cela d'ici. Ne faites pas de la maison de mon Père une maison de commerce." Matthieu est là plus explicite encore : en Mat 21/13 "Il est écrit : Ma maison sera appelée une maison de prière. Mais vous, vous en faites un repaire de brigands !".

Maison de commerce, repaire de brigands. Le Christ serait il contre le commerce. Condamnerait-il aujourd’hui l’OMC ? Non bien sûr ! Le Christ s’en prend explicitement au fait que l’argent n’a pas la place dans le Temple de Dieu. Que l’argent salit le culte que l’on doit à Dieu, Que l’argent corromp tout.

Le Christ condamne donc le mauvais usage qui est fait de l’argent, Il dénonce la corruption, puisque c’est comme cela qu’on l’appelle aujourd’hui.

Corruption que l’on dénonce chez les autres, jamais pour soi. Chacun s’offusque en France de la corruption dans les pays en voie de développement : pays d’Afrique noire, Chine, Vietnam, Philippines, Amérique du Sud. Voire même dans certains pays développées comme l’Italie ou le Japon où l’on sait qu’existent de puissantes mafia. En France cela n’existe pas !

C’est parceque la corruption n’existe pas en France, que les juges ont dû arrêter l’enquête sur la vente des frégates à Taïwan pour raison invoquée du «confidentiel défense » ! C’est parcequ’elle n’existe pas que Jean Montaldo a écrit des livres tels que « Mitterrand est les quarante voleurs » ou « Chirac et les quarantes menteurs » ! C’est parce qu’elle n’existe pas que la France possède le record mondial d’installation de ronds-points ! C’est parce qu’elle n’existe pas que le navire poubelle dénommé « Probo-Koala » a fait huit morts en Côte d’Ivoire ! C’est parce qu’elle n’existe pas qu’il y a cette interminable enquête sur l’affaire Clearstream – que l’on peut ingénument traduire par « courant transparent » - dont on ne saura peut-être jamais le fond de la vérité ! C’est parce qu’elle n’existe pas que, selon le Cevipof, les Français estiment à 60 % que les responsables politiques sont "plutôt corrompus" (La Croix, 18-10-2006,) ! C’est parce qu’elle n’existe pas que la France, en 2004, se classait en 22ème position sur l’indice de corruption international élaboré par le très sérieux organisme allemand « Transparency International », juste derrière …le Chili et … Barbade ! !

Dans ces conditions, on peut s’étonner, ou regretter quelque peu que Mgr André Vingt-Trois, dans son admirable homélie, lors de la messe de rentrée des hommes politiques du 10 octobre 2006, en la basilique Saint Clotilde, n’ait pas attiré l’attention de son auditoire, pourtant concerné, sur cette pratique malheureusement en expansion constante tant en France, que partout dans le monde et qui a été la cause du seul emportement de notre Jésus le Christ.

De même on peut regretter que dans le message du Conseil permanent de la Conférence des évêques de France à l’occasion des prochaines élections, intitulé : « Qu’as-tu fait de ton frère ? », les rédacteurs aient attendu le dernier point du dernier paragraphe du troisième et dernier chapitre pour mentionner dans le contexte de l’accueil des immigrés, les quelques mots suivants : « Enfin, réguler l’immigration veut dire pourchasser les mafias et autres circuits d’immigration clandestine, employeurs véreux, marchands de sommeil, etc… » !

Comme si la corruption et les mafias ne touchaient que les circuits d’immigration clandestins ! Personnellement, je préfère le discours clair, net et sans langue de bois, d’une petite jeune fille d’Israël, humble et peut-être trop discrète en parole, qui est entrée dans l’histoire de l’humanité par sa maternité. En effet, lors de sa grossesse, elle déclara, en Luc 1/49, 51-53, tout simplement, et probablement inspirée sur les évènements à venir : « le Tout-Puissant a fait pour moi de grandes choses. Saint est son nom,…Il a déployé la force de son bras, Il a dispersé les hommes au cœur superbe. Il a renversé les potentats de leurs trônes et élevé les humbles, Il a comblé de biens les affamés et renvoyé les riches les mains vides. »

Écrit par : Naulait | 04/04/2007

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