17/02/2007
Bayrou veut unir droite et gauche. Très bien, mais pour faire quoi ?
Et où place-t-il le "courage" ? Peut-être pas sous le même angle que le ballet de Pietragalla (photo) :
« Je veux qu'on sorte de la préhistoire. Je trouve que l'affrontement gauche-droite est un affrontement préhistorique », a déploré Bayrou à Poitiers le 16 février. C’était pour prôner « une majorité de rassemblement au service de la France ». Le temps est venu, a-t-il dit, de sortir de la préhistoire pour entrer dans une démarche « de compréhension, d'intelligence ». « Je veux gouverner avec des gens importants de gauche et de droite, courageux ensemble", a ajouté le candidat centriste.
Singulier Bayrou. Il tient des propos, tantôt gris, tantôt audacieux, sans que l’on sache dans lesquels il se reconnaît le mieux... Ceux de Poitiers semblent audacieux : mais qu’entend-il par : « courageux ensemble » ? Où place-t-il le courage ? Dans le fait de rompre avec l’esprit de parti ? Ou dans le contenu de la politique qui serait suivie ? S’il ne s’agit que de rompre avec l’esprit de parti, la chose est improbable de toute façon : les partis d’aujourd’hui sont vides mais restent des clans, fermés sur leurs appétits, on ne voit pas quelle étoile au bout du sillon ils pourraient apercevoir pour la suivre « ensemble ». Et s’il s’agit d’inventer une politique « courageuse », reste à savoir laquelle... Jusqu’où irait le courage de Bayrou ? Pas jusqu’à libérer le politique de la tyrannie des Nouvelles Mœurs, si l’on en croit ses déclarations.
Entrer dans une démarche d’intelligence et de compréhension demeure un beau programme. Mais son expression la plus lapidaire n’est pas formulée ces jours-ci par la campagne présidentielle. Elle s’affiche sur les murs du métro, avec l’étonnante devise du ballet* de Marie-Claude Pietragalla, Conditions humaines : "Le courage, c'est de chercher la vérité et de la dire." Le ballet est un hommage aux mille mineurs tués dans la catastrophe de Courrières (1906) : quand les Charbonnages firent arrêter prématurément les recherches des survivants, afin de ne pas perdre trop d’argent. Choisir de ne plus sacrifier l'humain à la rentabilité du capital, c’est ça qui serait courageux en 2007...
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(*) Paris, Palais des Sports, 23-28 mars.
00:10 Publié dans Idées | Lien permanent | Commentaires (11) | Tags : Bayrou, politique, droite, gauche, présidentielle, élection, campagne
Commentaires
CAPITALISME FINANCIER (ET BAYROU)
> Je viens de suivre un stage sur le capitalisme financier en France depuis 1945. J'y ai appris entre autre que l'humain est une variable de gestion du système! C'est ce que l'on doit enseigner en 3e et en terminale!
Quant à Mr Bayrou, je l'ai pratiqué comme ministre. Avant d'être en fonction, il avait écrit un livre très interessant sur l'éducation (la décennie des mal-appris) qui nous avait donné un certain espoir. Quant il fut aux commandes, rien ne changea, ou plutôt, cela continua de s'aggraver. Alors ses discours prônant le courage en politique me font bien rigoler.Je ne crois plus aux hommes politiques sortant du système des partis, du moins ces partis que nous avons actuellement. Il n'y a qu'à écouter ce que Mr Bayrou nous dit sur les moeurs par exemple, alors qu'il se proclame catholique pratiquant et fier de l'être! Qu'on arrête de nous prendre pour des c...!
Écrit par : Vf | 17/02/2007
FINIE LA DEMOCRATIE CHRETIENNE
> L'UDF n'est malheureusement plus le parti démocrate-chrétien qu'il a tenté d'être à une époque. C'est fini la démocratie chrétienne du centre ! Beaucoup d'exemples le montre, pour parler de ce que je connais, les jeunes UDF sont devenus un mouvement favorable aux nouvelles moeurs dans leur dimension la plus outrancière : homoparentalité sous toutes ses formes, suicide assisté (une motion de janvier 2005, très mal écrite qui défini le suicide comme seul mort digne...) etc.
Et cerise sur le gateau, le site sexycentriste http://ns22025.ovh.net/ forum de discussion et surtout de rencontre...tout est dans le titre ! Chose qui ne m'étonne pas quand on voit l'état de délabrement de ce mouvement qui veut rompre avec sa culture démocrate chrétienne.
Écrit par : Charles Vaugirard | 17/02/2007
LUI SEUL LE SAIT
> Bayrou a pour difficulté de se situer dans l'univers. Ignorant ce que signifient Droite et Gauche, il patine forcément dès lors qu'il lui faut inventer un nouvel espace à partir de ces notions. Problème de latéralité ?.. S'oppose-t-il, ou bien se marie-t-il à l'une et à l'autre ? Lui seul le sait.
Écrit par : Michel THOMAS de LA GARDE | 18/02/2007
BAYROU
> Bayrou se situe au centre, tout simplement.
Il n'a pas à inventer un nouvel espace, il cherche à débarrasser la place démocratique envahie sur la gauche par l'idéologie totalitaire et sur la droite par la toute-puissance de l'argent.
Tout cela au nom d'un respect de la liberté qui lui interdit en effet d'imposer des règles morales qu'il est cependant le seul des candidats à respecter (suffisamment ringard pour être marié à la même femme depuis l'âge de 20 ans, pour avoir 6 enfants et ni maîtresse ni mazarine, pour revendiquer ses racines paysannes et pour être fier d'être catholique pratiquant). Complètement plouc, en effet...
Plus les bien-pensants (de gauche ou de droite) se moquent de lui, plus j'ai d'estime pour le personnage...
Écrit par : Claire | 18/02/2007
@Bayrou
je suis totalement d'accord !
Écrit par : Le pti prince | 18/02/2007
BAYROU ET SES VALEURS
> Oui, Bayrou est courageux et oui, cela semble d'autant plus étonnant que ses convictions ne sont pourtant pas extrémistes.
Il n'est pourtant pas si rare, et cela devrait encore moins étonner dans des milieux chrétiens, de rencontrer des personnes suffisamment sûres de leurs valeurs pour ne pas s'en laisser conter, ni moralement, ni politiquement. Et cela s'est renconté souvent dans l'Histoire de France, depuis les Impartiaux de la Révolution française qui rejetaient les violences des deux bords jusqu'aux résistants anonymes de la dernière guerre qui ne répondaient ni à un appel de de Gaulle ni à celui du communisme mais à leur simple sens de la dignité humaine. Et tous ceux-là se sont recrutés majoritairement chez les croyants. Le personnalisme chrétien s'inscrit dans cette lignée : n'obéir à aucune idéologie mais faire de la personne humaine la seule référence.
Il est vrai que ceux-là s'affirment peu en général.
Alors pourquoi se moquer quand enfin l'un d'entre eux ose affronter le système en place ? Cynisme destiné à ne pas être associé à la naïveté du petit Béarnais ? Conscience de classe ou intérêts financiers qui interdisent de lui donner raison ?
J'avoue que je ne comprends pas le ton méprisant utilisé dans les milieux catholiques à propos de Bayrou.
Vous reconnaissez que les partis d'aujourd'hui sont des "clans fermés sur leurs appétits", c'est bien ce que ressentent la plupart des Français et c'est pourquoi le fait de leur proposer de s'affranchir de ces partis en créant une majorité présidentielle autour d'un projet fédérateur et non plus au service d'un clan peut trouver un écho. Il s'agit de s'adresser aux personnes et non plus aux partis.
Quant au projet politique, c'est d'abord celui d'un humanisme chrétien garanti par la laïcité, il défend la liberté et la dignité absolue de la personne humaine devant l'idéologie politique et le système économique (ne plus sacrifier l'humain à la rentabilité du capital disiez-vous) et pour cela il propose de rassembler, de fédérer, d'entrer dans cette démarche d'intelligence et de compréhension au lieu d'exclure, par l'argent, par la naissance, par l'idéologie, par la confiscation du pouvoir, et même par l'ordre moral. Car, sur ce dernier point, pour prendre un sujet douloureux, on ne peut que déplorer avec une grande tristesse le nombre d'avortements provoqués non par la libéralisation des moeurs mais au contraire par le poids du qu'en dira-t-on dans des milieux où la jeune femme se sent incapable de soutenir la pression familiale. J'en ai connu une personnellement, et elle ne s'en est pas remise. Ce n'est pas si simple malheureusement.
Plusieurs aspects dans cette réponse mais votre article en contenait les amorces.
Écrit par : Maria | 18/02/2007
" LES FAITS "
> Bayrou est sûrement courageux. Mais, demain, s'il est élu Président de la République, que fera-t'il face aux lobbies gays. J'ai cru comprendre qu'il allait faire passer une loi sur le mariage homosexuel. Ceci est très grave, sans précédent dans notre histoire. Or, il est catholique pratiquant. Un catholique pratiquant et convaincu est quelqu'un qui se soumet à l'enseignement de l'Eglise ; celle-ci s'oppose très clairement au mariage homosexuel. Voilà, c'est tout, on peut penser ce que l'on veut, dire ce que l'on veut, mais les faits sont là plaisants ou déplaisants.
Écrit par : olivier le Pivain | 19/02/2007
BAYROU ET LES COUPLES HOMOSEXUELS
> Voici ce que Bayrou écrit sur son site concernant ce que vous appelez le mariage homosexuel, ce sont des propos qu'il a tenus lors d'interviews :
"Une union civile, conclue à la mairie, ouverte aux homosexuels, comportant des droits équivalents à ceux ouverts par le mariage, j’y suis fermement favorable.
Le mariage, pour moi, c'est un homme et une femme. Je plaide pour le respect réciproque. Réciproque, cela signifie que les familles traditionnelles méritent aussi d’être entendues et défendues."
Une union civile n'est pas un mariage, elle aurait le mérite de régler des situations concrètes qui peuvent se poser lors du décès d'un des deux membres d'un couple homosexuel, concernant le plus souvent le logement, parfois l'héritage ou la garde des enfants.
Puisque vous voulez vous en tenir aux faits, la réalité des unions homosexuelles est un fait, qu'on peut réprouver ou feindre d'ignorer mais non pas nier.
La réalité d'un fait et sa légalisation sont cependant deux choses différentes et des contrats notariés seraient peut-être suffisants dans ce domaine, je ne m'y connais pas vraiment, mais j'imagine que l'hostilité entre la famille et le conjoint doit rendre les conflits très rudes lors de décès prématurés et qu'un règlement ou une loi peuvent amoindrir des injustices et des souffrances...
De toute façon, sur le fond, je vous rappelle que seule le sacrement fait le mariage pour les catholiques (puisqu'on peut même se marier à l'Eglise ayant été marié civilement auparavant) Je trouve d'ailleurs pittoresque de voir des personnes ouvertement hostiles aux valeurs petites-bougeoises ou judéo-chrétiennes, comme ils les appellent avec mépris, réclamer cependant un "droit" au mariage (avec fleur blanches, anneau et marche nuptiale !) il faudrait creuser cette incohérence manifeste.
Mais cette question de l'union civile n'est donc pas fondamentale même si elle est préoccupante en tant qu'elle s'inscrit dans une transformation de la société dans son ensemble.
Mais ce n'est pas nouveau. A l'Eglise et aux chrétiens d'annoncer la Bonne Nouvelle et de proposer un chemin de bonheur et de justice conforme à leur foi et à leur espérance, quant aux politiques, leur rôle est de garantir, autant que faire se peut, la justice en dehors des chemins de sainteté, et le terrain est vaste...
Écrit par : Christine | 19/02/2007
" UNE LIMITE "
> Ca a le goût du mariage, ça a l'odeur du mariage, mais ce n'est pas un mariage. (je ne citerai pas la marque pour ne pas faire de publicité). Un homme politique qui veut devenir Président de la République en France aujourd'hui est confronté à cette douloureuse question : comment donner, dans une certaine mesure, satisfaction aux homosexuels tout en obtenant le vote catholique. Réponse : en faisant en mairie (à l'église, ils n'en ont pas le pouvoir) un mariage homosexuel sans le dire. A partir du moment où ils seront reçus par le maire, que leur union sera reconnue par lui, qu'une réception festive à la mairie sera bienvenue, appelez cela comme vous le voulez, mais c'est un mariage homosexuel. Ainsi sans le dire, on installe la reconnaissance par la République, à même niveau que les mariés normaux, les homosexuels. Si vous pensez que l'Eglise est favorable à cela, moi non. Je comprends que l'on puisse être tiraillé, c'est le problème du vote utile, mais il y a une limite.
Et si l'on prend un peu de recul par rapport à notre époque déboussolée, franchement, en dehors de toute pression, croyez-vous sérieusement que Bayrou aurait proposé ce qu'il propose là?
Et je dis cela avec d'autant moins de gêne que j'ai voté Bayrou la dernière fois au premier tour.
Écrit par : olivier le Pivain | 19/02/2007
CE QUE BAYROU PROPOSE
Je pense que la vie politique française caractérisée par sa bipolarisation conditionne la plupart des raisonnements et c'est bien normal. En revanche, je crois que pour une fois, si Bayrou a "de l'espace" c'est que le ressentiment envers cette schizophrénie de la vie politique prend corps. On a longtemps parlé de centre "mou", longtemps dit qu'on ne gouvernait jamais un pays comme la France au centre etc..., ces jugements ont une part de vérité mais sont très réducteurs, surtout à la lumière de la campagne d'aujourd'hui et des enjeux actuels.
Les Français (surtout de sensibilité de droite, avouons-le, j'en fais le premier partie) supportent mal que l'on puisse faire un "pacte" (le mot est super tendance en ce moment dans la bouche de nos candidats...) avec "l'autre rive", c'est dans nos gènes.
Le problème selon moi n'est pas là. Bayrou propose de faire appel aux hommes de bonne volonté pour construire et proposer un modèle différent, qui ne soit le ni libéralisme-ultra ni le socialisme-archéo mais une voie médiane, dont il n'est pas inutile de discerner les contours avant d'aller voter. Certes, j'admets que ces contours peuvent parfois demeurer flous.
Une réaction en tant que chrétien aussi: l'Eglise est "universelle", c'est même la définition du catholicisme. Mais l'Eglise est multiple, il y a les "bobos-cathos de gôche", les tradis-en-jupe-culotte-carré-Hermès (sorry pour les clichés, c'est un peu vrai quand même), et au milieu, toutes les communautés, groupes et personnalités qui font la richesse de l'Eglise. Mais jamais l'Eglise ne sera de gauche ou de droite!
Pardon pour cette analogie mais je crois qu'elle est importante concernant "la question Bayrou". On peut critiquer nombre de ses propositions ou rester sceptique devant le flou de son programme. C'est louable et même sain dans le débat démocratique. Mais je crois qu'il faut accorder à Bayrou la volonté de rassembler au-delà des vieilles chapelles (c'est ce qui est le plus dur) pour parler d'un projet.
Enfin, sur la question cruciale du "mariage homosexuel", informons-nous bien! Bayrou répète noir sur blanc (c'est même en gras sur son site...) que le mariage c'est un homme et une femme. Il parle en revanche d'une union civile qui garantit des droits aux enfants élevés par des homos, la triste réalité est que près de 300 000 enfants en France sont dans ce cas et que bien-sûr ce sont eux qui trinquent les premiers. C'est ce qu'on appelle le principe de réalité et pardon, ce n'est pas du tout pareil que le mariage.
Désolé d'avoir été si long, je tiens juste à préciser que je n'ai jamais milité à l'UDF.
Bien à vous tous
Écrit par : Lennob | 19/02/2007
"LE PROBLÈME DE BAYROU"
> Le gros problème de Bayrou en matière "sociétale" n'est pas qu'il soit favorable à une quelconque union civile des homos. Son véritable problème en tant que démocrate chrétien est qu'il n'est pas opposé à l'homoparentalité. Il ne tient pas un discours socialiste clairement en faveur de l'adoption, mais il a une position équivoque sur les enfants nés issus de personnes homosexuelles et donc sur le droit à la parentalité de ses gens.
Discours extrêmement équivoque donc, qui peut s'expliquer par l'influence colossale du lobby gay au sein de l'UDF.
C'est malheureux à dire, mais je ne fais absolument pas confiance en Bayrou en ce qui concerne la défense de la famille. Il est touché par une sorte de "tiédeur"... or cela est suffisant pour qu'il soit décevant...
Autre point aussi qui concerne l'UDF. Auparavant, l'UDF était un immense réseau d'élus. C'était un parti de cadre à la différence du RPR qui était un parti de masse s'appuyant davantage sur son nombre de militant. Actuellement l'UDF a muté. Ses élus sont en grande partie démocrates-chrétiens et de centre droit. Bayrou ne s'appuie presque pas sur eux (d'ailleurs beaucoup s'en vont...) mais sur les militants du parti. Militants pour beaucoup arrivés à l'UDF il y a moins de cinq ans, et qui proviennent en grande partie de la gauche.
Une très grande partie des militants est favorable aux nouvelles moeurs. Cela est particulièrement criant au sein des jeunes UDF qui votent comme un seul homme des motions pour le suicide assisté ou l'homoparentalité. C'est triste, mais comme je l'ai dit dans un autre commentaire, l'UDF n'est plus du tout démocrate-chrétienne et Bayrou a totalement zappé l'héritage chrétien du parti.
La question qui demeure : y aura t'il un retour de la démocratie-chrétienne en France ? Notre société en a besoin.
Écrit par : Charles Vaugirard | 19/02/2007
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