Le croyant et la société de 2007

Ce que nous dit Jérémie :

 

L’évangile de ce dimanche (Luc 4, 21-30) est celui de « nul n’est prophète en son pays » : comment les citoyens de Nazareth deviennent haineux, parce que Jésus a dit quelque chose qui met en question leur façon d’être.  C’est la réaction de beaucoup de gens aujourd’hui : depuis les conformistes cathophobes... jusqu’aux catho-claniques qui se font des procès d’intentions les uns aux autres, ou qui en font au pape.

 

Le premier texte de ce même jour est tiré du prophète Jérémie (627 av. JC). Ce sont deux extraits du premier livre : 4-5, 17-19.  Les voici :

 

Le Seigneur m’adressa la parole et me dit :

« Avant même de te former dans le sein de ta mère,

je te connaissais ;

avant que tu viennes au jour,

je t’ai consacré ;

je fais de toi un prophète pour les peuples.

« Lève-toi,

tu prononceras contre eux tout ce que je t’ordonnerai.

Ne tremble pas devant eux,

Sinon, c’est moi qui te ferai trembler devant eux.

Moi, je fais de toi aujourd’hui une ville fortifiée,

Une colonne de fer,

Un rempart de bronze,

Pour faire face à tout le pays,

Aux rois de Juda et à ses chefs,

A ses prêtres et à tout le peuple.

Ils te combattront,

Mais il ne pourront rien contre toi,

Car je suis avec toi pour te délivrer. »

 

Comme toujours, ce texte a des résonances multiples et des sens divers. On peut notamment l’appliquer à la situation actuelle du croyant. Dans une société ignorant la foi chrétienne, il a mission de témoigner de cette foi… alors que souvent lui-même la connaît mal : ce qui le complexe et lui donne la tentation d’esquiver.

 

Mais Jérémie est clair. Ce qu’il dit aux Judéens d’autrefois s’applique à nous aujourd’hui :

 

LES DIRECTIVES DE JEREMIE

 

1.  La mission du croyant est universelle (« pour les peuples »). Aujourd’hui comme autrefois, elle exclut tout repli. S’accuser entre clans catho, les uns de « communautarisme », les autres de « nostalgies politiques », serait passer à côté du sujet, et restreindre les modes d'engagement chrétien à deux faux-fuyants : dire « arrêtez le monde, je veux descendre », ou dire « politique d’abord ».  Ce n’est pas ça que l’on nous demande, mais de donner au prochain les raisons de l’espérance !  Rien de plus, et c’est l’essentiel.

 

2.  Notre mission attire la désapprobation et la dérision de la société (« tout le pays », dit Dieu à Jérémie). Oui. Et alors ?  Jérémie en fut la cible. Nous également, si j’ose dire… Mais c'est classique. Par ailleurs, l’émotion générale à la mort de l’abbé Pierre montre qu’il y a aussi des façons de montrer sa foi qui conquièrent les cœurs.

 

3.  Le jeune Jérémie, dans un autre passage, cherche à esquiver la mission que Dieu lui confie :

« Et je dis : ah !  Seigneur YHWH, vraiment je ne sais pas parler, je ne suis qu’un enfant ! »

Mais Dieu réplique :

« Ne dis pas ‘je suis un enfant’, car vers tous ceux à qui je t’enverrai, tu iras ;  et tout ce que je t’ordonnerai, tu le diras… »

Appliquons-nous cette leçon.  Ne nous abritons pas derrière notre peu de formation religieuse.  On entend dire : « Tout ça n’est pas pour moi, parce ce que je ne sais pas déjà tout ça ». Sous-entendu : je n’envisage pas d’apprendre ! Ne nous réfugions pas derrière notre introversion ou notre manque de formation : « C’est bien parce qu’il se trouvait pauvre que Jérémie a laissé le Seigneur l’envahir de sa force », note l’exégète.