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28/12/2006

Noël est aussi la fête de la raison !

…parce que c’est une fête de l’incarnation :


 

 

Un lecteur (ou lectrice), qui signe "Nebel", prend à partie ma précédente note : surtout la citation de Jean-Luc Marion poussant la minorité chrétienne à s’expliquer « par raisons et arguments ».  

Nebel me dit qu’il (elle) préfère la foi du charbonnier.

Je me permets de penser qu’il (elle) se trompe.

Nous ne sommes pas chrétiens pour nous-même, mais pour autrui : et autrui n’a que faire de notre foi du charbonnier. Comme dit l’épître de Pierre, autrui vient nous demander les raisons de notre espérance. (Si notre façon de vivre l’incite à venir nous les demander...).

La tentation de l’irrationnel est une vieille faute des catho français. Elle remonte presque au XVIIIe siècle. 

C’est ce qu’explique le philosophe Jean Bastaire, dans un article publié au début des années 1990 et qu'on lira ci-dessous. Ce texte est sévère envers la bien-pensance catholique française du siècle dernier :

 

 

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<<   La raison des Encyclopédistes entendait détrôner Dieu et faire passer sous ses maigres fourches caudines un réel amputé de son cœur mystérieux et de sa flamme intime. Selon la fameuse formule du ministre Viviani en 1906, cette raison se flattait « d’avoir éteint dans le ciel des lumières qu’on ne rallumera plus ». Philosophie « d’éteigneur de réverbères », raillait Péguy.

Il fallait mettre un terme à ses séductions, dénoncer ses prétentions, immuniser contre son pouvoir corrosif.

Que ne l’a-t-on fait d’une manière positive en sauvant la raison de cette nouvelle aliénation, au lieu d’y souscrire !

On est allé à ce qui semblait le plus pressé : préserver la foi naïve contre les errements spéculatifs.
Du même coup, entre la raison et la foi, on a cautionné l’hérésie gravissime d’un conflit de principe.

Bien sûr, le Magistère n’a jamais professé formellement cette énormité. Mais tout s’est passé comme si une conjoncture difficile imposait de la vivre. Mieux valait se mettre en congé de pensée, si réfléchir devenait périlleux…

Par un contresens monstrueux, on a confondu les « pauvres en esprit »  avec  les  imbéciles. On a loué leur simplicité comme si elle résultait de l’analphabétisme. L’anémie de la raison a paru une grâce de la Providence. Comme si la pauvreté en esprit n’était pas celle du cœur, et non des connaissances !  Et comme si l’absence de réflexion était un don du Paraclet, pourtant appelé Esprit de conseil, de jugement et de science !

Une piété solide, souvent admirable, a dérivé dans les eaux du fidéisme. On a « cru » les yeux fermés, la bouche cousue et l’intelligence en sommeil. Exorcisant la spéculation comme une tentation, on a fait le sacrifice de la raison en pensant que l’offrande serait d’agréable odeur à un Dieu  incompréhensible. On oubliait qu’offrir n’est pas détruire, mais consacrer. Sacrifier ne consiste pas à renvoyer au néant, mais à rendre à une fin divine…

Plutôt que de s’abriter derrière des garants vénérables ou de lâcher du lest à retardement quand la position devenait intenable, il fallait prendre les devants et célébrer la raison  au moins autant que le faisaient les laïques, et plus justement qu’eux, comme fille de Dieu et expression de la sagesse divine.

 

LA BONNE REPLIQUE A LA DEESSE RAISON

 

La bonne réplique à la déesse Raison était le Logos, comme l’avait compris quinze siècles plus tôt, face à la raison athénienne, la théologie cappadocienne et alexandrine…

« Le Verbe s’est fait chair et Il a habité parmi nous » : cela ne veut pas dire seulement qu’Il est venu apporter les moyens ascétiques, mystiques et sacramentels du salut, mais qu’Il en a apporté aussi les moyens spéculatifs…

En vérité, les croyants qui méprisent la raison semblent ignorer l’incarnation, cette prodigieuse effraction d’amour par laquelle Dieu a décidé de nous communiquer lui-même sa lumière...

Tout chercheur le sait, qu’il soit philosophe ou savant : l’acte de connaissance est fondamentalement et à la fois  un acte de détachement et un acte de soumission. Détachement de soi, de ses préjugés, de ses passions, pour ne plus être que soumission inlassablement vérifiée au réel qui est le seul maître. Il faut s’oublier pour apprendre, diminuer pour accroître son savoir,  céder la place pour que la vérité gagne.

En de longs intervalles, qui sont comme des approches où se renouvellent les fiançailles, la pensée peut regarder l’Aimé, entrer de mieux en mieux dans sa familiarité, avancer dans sa lumière croissante. Elle peut et doit lire dedans : tâche de l’intelligence. Elle s’y sent irrésistiblement poussée, si elle veut rendre à Dieu une digne louange.
Plus on aime quelqu’un, plus on souhaite le dévisager, tout en sachant bien que son mystère grandira à proportion de la connaissance. Et ce sera une joie toujours plus grande… La béatitude divine est une nouveauté qui rebondit à mesure qu’on s’y livre.  Sa compréhension ne comble que pour relancer la réflexion et appeler à d’autres élucidations de plus en plus éblouissantes. Heureux ceux que le désir de savoir porte ainsi de commencement en commencement, dans une adoration inextinguible. 
>>

 

 

 

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(Jean Bastaire, Communio  n° 100, mars 1992 ("Sauver la raison") : article "Chrétiens ou crétins ?" ).

 

 

 

Commentaires

SUBLIME

> Ce texte est vraiment sublime et rejoint parfaitement le discours du Pape à Ratisbonne: "Logos désigne à la fois la raison et la Parole – une raison qui est créatrice et peut se donner en participation, mais précisément comme raison". Je suis actuellement des cours à l'Institut Philanthropos en Suisse, et nous essayons justement de nous débarasser du fidéisme pour aller vers une foi non seulement profonde mais qui a été mûrement réfléchie. Comment pourait-on être crédible face à nos contemporains si nous opposions à leurs arguments rationnels (et même parfois rationnalistes) des propos de foi? Il nous faut nous battre avec les mêmes armes pour être convaincants!

VR

[De PP à VR - Meilleurs voeux aux étudiants et aux enseignants de l'institut ! J'en ai rencontrés cette année à Fribourg et à Saint-Maurice.]

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Écrit par : vR | 28/12/2006

LUC FERRY

> OUI, bien sûr ! Fides quaerens intellectum !
Dialogue permanent et vital !
Et tellement oublié depuis plus de deux siècles !
Où sont les St Augustin, St Chrysostome, les Bonaventure, les Thomas d’Aquin, les Bossuet ?....
A condition que la raison ne s’érige pas en régente souveraine ! comme les « Lumières » ou soi-disant telles, s’arrogeaient ce pouvoir au XVIII°…
Malgré la splendeur de ses mécanismes et de ses règles, elle a aussi des limites, et elle se heurte à l’inconnu et au mystère…..
Il ne lui est pas toujours facile de l’avouer.
Aujourd’hui, par exemple, un chrétien croyant sincère et intelligent devrait pouvoir répondre assez facilement aux à-peu-près et aux sophismes contenus dans ce livre à succès de Luc Ferry «Apprendre à vivre », traité à l’usage des jeunes générations, livre par ailleurs écrit en toute bonne foi et honnêteté (ce qui n’est pas le cas d’Onfray ou de quelques autres, par exemple).
Qu’il se prenne un peu pour Aristote enseignant l’Ethique à Nicomaque, ou Gide initiant Nathanaël, est sans gravité, sinon sans influence…..
Le plus ennuyeux, c’est quand il détourne des notions religieuses à l’origine, pour les accaparer en philosophie : la notion de « sotériologie » par exemple... Ou l’assimilation-captation du « logos » platonicien et stoïcien par le « LOGOS » / « DEI VERBUM » de St Jean….
Le sujet est impossible à traiter dans un blog… mais voilà un exemple, me semble-t-il, où un chrétien catholique doit être à même de répondre rationnellement à de telles approximations.
Le fidéisme ici n’est d’aucun secours, il risque même d’avoir un effet contraire.

C.

[De PP à C. - Autant Onfray-Homais est peu philosophe, autant Ferry est digne de considération. Et de discussion...]

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Écrit par : clement | 28/12/2006

LE 25 MARS

Bravo pour votre article et les commentaires qu'il a suscités ! J'aimerais juste apporter une petite précision: l'Incarnation ne se fête pas le 25 décembre, mais le 25 mars. C'est au moment où Marie a prononcé son Fiat que le Verbe s'est incarné en elle.
Dans son homélie du 25 mars dernier, le pape Benoît XVI y fait d'ailleurs allusion à quelques reprises.

E.B.


[De PP à EB - Vous avez bien sûr raison ! Disons que le 25 décembre manifeste dans la sensibilité des foules une incarnation qui reste plus "conceptuelle", si j'ose dire, dans sa fête du 25 mars.]

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Écrit par : Elise Bonnette | 28/12/2006

ET VERBUM CARO FACTUM EST
ET HABITAVIT IN NOBIS

Merci à TOUS

Gérald

Écrit par : Gérald | 28/12/2006

PAS TOUT A FAIT D'ACCORD

> Je ne suis pas tout à fait d'accord avec le début de votre note. Si nous devons toujours être prêts à rendre compte de l'espérance qui est en nous, nous devons d'abord la vivre et la vivre comme une grâce. Vous le dites vous-même et saint Pierre le dit aussi dans sa lettre, c'est par sa façon de vivre que le chrétien attire d'abord et, comme c'est en général au sein d'une communauté, il importe surtout que certains dans cette communauté soient aptes à répondre aux questions ou aux attaques. Mais la foi du charbonnier est souvent d'abord un magnifique témoignage pour autrui.
Je ne suis pas d'accord non plus avec ce que vous appelez "la vieille faute des cathos français" : la tentation de l'irrationnel, et encore moins avec le "philosophe" Jean Bastaire. Vous auriez mieux fait de citer saint Augustin. Il est difficile d'identifier ce "on" que J. Bastaire accuse d'"hérésie gravissime" et "monstrueuse" mais cela n'est pas vraiment argumenté. Quant à "l'acte de soumission au réel qui est le seul maître" suivi de la métaphore sur les fiançailles, je n'y vois rien de rationnel. Ce n'est pas avec des "raisonnements" de ce type, aussi fleuris soient-ils, que des chrétiens convaincront qui que ce soit, hors ceux qui sont déjà convaincus.
Heureusement, n'en déplaise à V.R., les propos de Ratzinger sont d'une tout autre portée.
Pour en revenir au rapport entre la foi et la raison, il est en effet important aujourd'hui que les chrétiens et les futurs prêtres soient bien formés, mais les dons sont divers et grâce à Dieu la sainteté ne se mesure pas à la philosophie.
Enfin, concernant votre titre, tant qu'on y est (mais croyez que j'apprécie souvent vos articles!) il m'aurait semblé que le fait que Dieu se fasse homme était plutôt un scandale pour la raison, une folie pour les hommes...
Amicalement,
Christine


[De PP à C. - De quoi manquons-nous aujourd'hui ? De saints, sûrement, mais ce n'est pas mesurable. Ce qui l'est, c'est l'effrayante absence des chrétiens sur le terrain des débats modernes. Cette absence laisse le champ libre à tous ceux qui disent que... nous n'avons rien à dire. Alors que c'est le contraire : non seulement nous avons beaucoup à dire, mais nous sommes les seuls à dire quelque chose de sensé.
D'autre part, il suffit de fréquenter nos paroisses pour constater la mauvaise conscience de catholiques persuadés (par l'air du temps) qu'ils n'ont rien à dire...
Je me permets donc de penser, avec Bastaire, qu'il y a une urgence de ce côté-là : faire prendre conscience - à tous - que le message chrétien n'est pas un repli narcissique et irrationnel, mais une flamme qui doit tout embraser y compris l'intelligence. C'est un DEVOIR, nous dit l'Eglise, spécialement depuis Vatican II ! Nous n'avons pas le droit de nous y dérober...

ps/ Comment Dieu pourrait-il mépriser la raison dont Il a doté sa créature ? La différence est que notre raison est limitée et celle de Dieu absolue : la raison divine dépasse infiniment la nôtre, et c'est cela qui paraît "déraisonnable" aux mini-rationalistes étriqués. Mais leur "raison" n'est pas la raison. Je vous suggère une relecture de l'encyclique "Fides et Ratio", qui dit tout ça beaucoup mieux que moi. Josef Ratzinger aussi, dans sa conférence de la Sorbonne et dans ses livres, explique le rôle essentiel que la raison a joué dans l'éclosion du christianisme comme religion universelle de l'Antiquité ! (Acceptons les leçons du Magistère, même quand elles dérangent nos habitudes). Nous devons renoncer à ce "refus de penser" dans lequel on s'était enfermés, et qui nuit gravement au témoignage ! Ce n'est pas de l'intellectualisme que de reconnaître que tout le monde peut réfléchir, chacun à sa manière... Quant à moi je suis triste chaque fois que j'entends un juif pieux dire : "Vous les chrétiens, vous n'étudiez pas, et vous ne connaissez même pas votre religion."]

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Écrit par : Christine | 29/12/2006

FOI ET RAISON

> En accord total avec votre défense de la raison, cher Patrice de Plunkett, et félicitations pour votre travail de journaliste au milieu des marécages et des cloaques actuels de la médiacratie.
J’approuve votre réponse corrective sur Luc Ferry, philosophe véritable tout à fait digne d’intérêt et honnête, mais, vous en conviendrez, dont la présentation qu’il fait de la philosophie & de la religion, sont largement critiquables. Travail de la foi et de la raison, en effet !
Et pour répondre à une objection contre ce nécessaire travail de la raison, autant que de saints chrétiens, notre temps, en France du moins, manque cruellement de penseurs véritables, d’apologètes, de dialecticiens, et de poètes comme Claudel ou Péguy.
On a honte d’avouer que Claudel est un converti, un catho de feu, et un immense poète, qu’on laisse jouer ou moquer selon l’humeur du jour aux incroyants et aux marxistes.
Quant à Péguy, il n’y a plus qu’Alain Finkielkraut pour s’y intéresser sérieusement et honnêtement ! Pour la plupart des cathos, c’est un « pétainiste » [ !!!!], voire un fasciste !
On se goberge d’un œcuménisme à la petite semaine et on ignore superbement G.K. Chesterton, ou le cardinal Newman, et même le Père Couturier, qui n’a pourtant pas tout à fait la même pointure que les précédents !
Voyez dans quelle considération notre assemblée épiscopale a placé le Cardinal Lustiger !
Dieu sait pourtant que l’Esprit Saint n’envoyait pas alors n’importe qui à l’Eglise de France : un Juif converti, une intelligence supérieure alliée à un mystique profond, une lucidité foudroyante alliée à une humilité de l’esprit, une écoute fraternelle constante, une capacité de doute et de remise en cause, une présence lumineuse de foi et de raison au milieu d’un monde païen pour lequel il était un signe vivant, quand il officiait on voyait réuni en sa personne toute la Bible, ancienne et nouvelle Alliance, le grand prêtre Aaron et le successeur des Apôtres…..
Quel contraste avec son prédécesseur !
Bien sur que la foi dite du charbonnier peut conduire à la sainteté, mais elle ne peut être détachée de la raison, même le charbonnier en a conscience dans la simplicité et l’humilité de son intelligence ! Il ne faut surtout pas prendre le charbonnier pour un c… !
En tout cas ce n’est pas la foi du charbonnier qui anime nos tripatouilleurs fidéistes au faux esprit conciliaire….. c’est plutôt l’idéologie politique et ses ersatz ! quand ce n’est pas une stupidité bovine….
En 1997, Claude Allègre, ministre de l’E.N. publie un livre semi-pamphlétaire, mais extrêmement documenté, « DIEU face à la Science »…..
Pas de réponse du moindre intellectuel chrétien ! Seul, un vieux religieux, le Père Pierre Grelot, sulpicien je crois et exégète de renom, a trempé sa plume dans l’encrier pour envoyer au ministre, surfant allègrement sur les dogmes chrétiens, une « Lettre ouverte » que Le Cerf a bien voulu éditer en 1998 « La Science face à la Foi ». Lettre beaucoup plus riche en arguments que le livre du ministre, mais ensevelie dans un silence sépulcral, y compris de journaux chrétiens !
Une quinzaine d’années auparavant, le professeur Monod publiait « Le hasard et la nécessité », livre dont le sérieux et la puissance d’analyse en imposaient à bon droit, et qui appelait une réponse chrétienne, au même niveau, ou du moins à un niveau convenable….
RIEN ! Ma sœur Anne ne vois-tu rien venir ?....... je ne vois que des fumées d’éloges qui poudroient…. et des cathos qui merdoient !.....
En 1991, Jean Guitton publie sous forme de dialogues platoniciens, avec deux jeunes savants russes, les frères Grichka & Igor Bogdanov, « DIEU ET LA SCIENCE » (Grasset) Excellent travail de réflexion pédagogique. Accueil avec sourire condescendant de la caste médiacratique, c’est sans surprise ! et de la part des cathos ayant pignon sur rue : sourires jaunes en forme de cul de poule, ou démarques « vertueuses » avec rictus appuyé à l’encontre d’un philosophe réputé non conciliaire, même s’il en a été observateur.
Tout cela est bien triste ! Le catholicisme en France paie aujourd’hui très cher, et ce n’est pas fini !, cet ostracisme de la pensée, de la réflexion catholique !
Notre Pape Benoît nous invite à réveiller notre raison dans son dialogue avec la Foi.
Son prédécesseur avait largement ouvert le chantier.
Je prie pour que notre pays retrouve ce charisme de la réflexion catholique qui a longtemps été le sien, et plus largement celui de la culture chrétienne : musique, poésie, peinture, etc…
Affirmer, « confesser », proclamer sa Foi n’a jamais été facile, même aux époques dites de chrétienté. Nous allons au rebours du monde !
Mais voir se lever les nouveaux Albert le Grand, François de Sales, Bossuet, Pascal, Fénelon, Malebranche, Massillon, Lamennais, Chateaubriand, Montalembert, Lacordaire, Ozanam, Veuillot, Bloy, Maritain, Bernanos, et bien d’autres, n’est pas une vue de l’esprit, pour peu qu’on désencombre la route des idoles du rationalisme, et que les croyants se réveillent et surtout ne se neutralisent pas eux-mêmes… dans leurs querelles picrocholines
Unis, ils sont invincibles. Ils détiennent la VERITE, dans des vases et des mains d’argile c’est vrai ! ils en sont indignes ! c’est non moins vrai ! mais c’est à eux, et eux seuls qu’a été confié ce dépôt sacré de LA VERITE, du CHEMIN, et de LA VIE !
Ils doivent le porter au monde de tout leur être !

Écrit par : clement | 29/12/2006

à Clément,

> Merci de votre contribution si documentée et argumentée.
Certains de nos"penseurs", du laïc qui cléricalise à l'envers au clerc à "plusieurs casquettes" sont semble-t-il, comme un certain Descartes, fascinés par leur propre Cogito ce qui leur donnent le sentiment d'être et ne leur permet pas d'aller très humblement à la source en allant de la question précédente à la question précédente...
Avant ? Au commencement ? A l'origine ?Au mystère ?
Pour faire bref "Deus est ergo sum" en toute simplicité, humilité et rigueur intellectuelle, ce que fait le Saint Père dans son message du 1er janvier et depuis longtemps qu'il écrit et qu'il publie...
Que l'Eternel nous bénisse et nous garde comme des vases d'argiles qui n'ont pas de suspicion envers leur Potier... et sont au service du Règne de Son Fils dans la force et la douceur de l'Esprit.

Écrit par : Gérald | 30/12/2006

DE DESCARTES A PASCAL

> Cher Gérald, (et cher Clément)
Vous devriez relire ou lire ?) le "Discours de la méthode" car le but de Descartes était justement de prouver l'existence de Dieu et le début de sa méthode est d'une rigueur imparable. Le problème est qu'il n'avait pas entièrement remis en cause les postulats concernant Dieu, justement, et que la fin de l'ouvrage est donc intellectuellement plus contestable.
L'essentiel est que, si l'on ne peut pas prouver l'existence de Dieu par la raison, on ne peut pas non plus prouver qu'Il n'existe pas. D'où le fameux argument d'un autre grand philosophe chrétien (doublé d'un génie en mathématiques et en physique, car quoi qu'on en dise aujourd'hui, la science et la théologie sont allées de pair pendant très longtemps et d'ailleurs nombre de nos chercheurs actuels sont aussi de fervents chrétiens, ne désespérez pas.) Le pari de Pascal repose sur cette incertitude : puisque la Raison ne peut m'assurer ni de l'existence de Dieu ni de son inexistence, mais puisque je ne perds rien (ou si peu) en vivant comme s'il existait et que, ne perdant rien (ou si peu) je puis gagner le bonheur éternel, cela vaut la peine de tout miser sur Lui.
Ce n'est peut-être pas le plus désintéressé des engagements mais Pascal s'adressait aux libertins, qui ont tant essaimé et auxquels vous semblez prêter grand cas.
Voyez-vous, pour convaincre des incroyants par la raison, car je maintiens que l'exemple est d'une toute autre force, et que d'ailleurs s'il y a une preuve de l'existence de Dieu elle est bien dans la manifestation de cet Amour, depuis la Création jusqu'à l'Incarnation (la fête de Noël que PP mettait en titre) et non dans un quelconque raisonnement ; mais si la raison doit en effet être utilisée dans le débat avec les incroyants, elle doit l'être intelligemment, par des personnes qui maîtrisent ce qu'elles disent, ont lu les auteurs qu'elles citent et comprennent les notions qu'elles manient, sans quoi elles risquent d'attirer encore une fois le ridicule sur l'ensemble des catholiques, surtout s'il leur manque l'humilité qui est la marque de la vraie intelligence.
Il est donc en effet essentiel que les prêtres et les chrétiens en général soient bien formés, sans pourtant que ceux qui ne sont pas à l'aise dans les raisonnements théoriques se sentent infériorisés, car l'Eglise et le monde ont me semble-t-il surtout besoin de vraie Foi et de vraie Charité.
L'Esprit-Saint a donné à notre Eglise un Pape sûr auquel nous pouvons accorder toute confiance et j'espère qu'il aura le temps de réaffirmer la doctrine catholique dans les milieux ecclésiaux où elle semblait battue en brèche, mais il me semble qu'en France la période critique est passée et que le nouveau troupeau, s'il est plus restreint, est moins rétif, c'est pourquoi, si nous devons être prêts à rendre compte de notre foi, et si nous avons même le devoir d'intervenir sur toutes les questions morales, sur les choix de société et toutes les décisions qui concernent l'homme et l'avenir de notre planète, cela doit être sans arrogance, avec la ferme conviction de celui qui, fidèle à la communion de l'Eglise et nourri de la Parole de Dieu et d'une vie de prière, sait que Dieu parlera pour lui... à condition qu'il Le laisse parler.
Gardons-nous de couvrir sa voix du tumulte de nos querelles et de nos condamnations hâtives.
Fraternellement,
Christine


[De PP à C. - L'épître de Pierre nous exhorte à témoigner par l'exemple, puis à expliquer les raisons à ceux qui viennent nous les demander. Refuser de leur répondre serait un déni d'évangélisation.
Mais nombre de catho, aujourd'hui, croient aux vertus du mutisme...
Je ne suis pas de leur avis. Pourquoi ridiculiser ceux qui se risquent au débat ? Honneur à eux, plutôt, car ils bravent le mépris des puissants.
Par exemple : en prenant le risque de se faire huer par les médias, les hommes et les femmes du diocèse de Toulon ont ouvert un débat de bioéthique que personne n'osait ouvrir, et qui débouche sur la question-clé de l'évangélisation : qu'est-ce que l'être humain ? (Question absolument centrale, dont l'obscurcissement actuel est l'obstacle à l'évangile !). Les Toulonnais l'ont fait à leurs risques et périls, et les évêques les ont soutenus.
Se taire eût-il été préférable ?]

Écrit par : Christine | 31/12/2006

Merci Christine,

> Mon propos n'était pas de ridiculiser la raison ou Descartes (qui porte un lourde paternité chez les philosophes du soupçon, ce que n'est pas Malebranche)
mais de mettre l'accent sur le mystère de l'être, de l'être humain qui pour un esprit un tant soit peu ouvert ou de bonne volonté est porté par un mystère plus grand qui est à respecter et non à chosifier ou à définir-cf. discours de J.-P. II à l'UNESCO-et encore moins à instrumentaliser...

D'une certaine façon la famille humaine [1+1=1 et toujours] voulue et "consacrée" par Dieu, Père et Fils et Saint-Esprit est ce mystère en action et en leçon pour elle-même et pour les autres.

Joyeuse nouvelle année à vous Christine.

Écrit par : Gérald | 31/12/2006

pour Christine (suite)

> Il est raisonnable et moins risqué de croire que de ne pas croire c'est le coeur de l'argumentation de Pascal, qui par ailleurs élude Descartes en deux mots "inutile" et "incertain" et a pu être considéré par Paul Valéry comme un esprit dont les capacités aurait pu s'employer autrement qu'à écrire de nombreuses notes sur des billets (commentaire exact à vérifier mais c'est quelque chose comme ça).

Il est déraisonnable de croire idéologiquement ou aveuglément et surtout contre l'intuition saine que l'on peut avoir de la miséricorde et de la bonté de Dieu.

Pour moi Descartes passe à côté de l'incarnation ce que ne fait pas Pascal qui a eu une authentique expérience mystique. Et nous sommes toujours autour du mystère du 25 III & du 25 III+IX : Le Verbe s'est fait chair...et nous ne finirons jamais-même au ciel-d'en mesurer toute la portée et nous avons bien besoin du Magistère, de la Tradition, de la vie dans-avec-par l'Eglise, de la grâce que nous recevons toujours sans aucun mérite de notre part,.....de nos pauvre propres efforts...pour devenir des fils dignes de "leur grand'frère" et du Père de celui-ci

Aujourd'hui l'Eglise nous invite à honorer Marie 'Theotokos', ce n'est pas rien...mais nos pauvres mots sans la foi du coeur et le coeur de la foi ce n'est pas grand chose.

"Fides & ratio" écrivait J.-P. II Oui, Fides & ratio, les deux ailes du grand aigle...

Écrit par : Gérald | 01/01/2007

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