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02/01/2021

La pandémie n'est pas un complot, c'est un sous-produit du système économique global

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Serge Morand

Alors que des insurgés de 2018 (intoxiqués depuis 2020 par la diversion complotiste des libéraux-conservateurs) oublient le rôle du productivisme ultralibéral dans la pandémie, ce rôle est remis en lumière par l'enquête scientifique de Serge Morand [photo] :


Écologue de la santé, directeur de recherche au CNRS et au Cirad, enseignant à la faculté de médecine tropicale de Bangkok, Serge Morand travaille depuis dix ans sur l’Asie du Sud-Est. Il a publié en septembre 2020 chez Fayard un livre sur les relations entre la santé humaine et la biodiversité, intitulé L’Homme, la faune sauvage et la peste. Il explique :

« Voilà plus de vingt ans que, chercheur, écologue de la santé, je me bats pour que nous prenions conscience de former un tout avec la nature. La préserver, c’est préserver notre humanité, et notre santé. Voilà plus de vingt ans que je me heurte à des murs du côté des sphères politique et scientifique, toutes deux sourdes à mes alertes répétées contre les épidémies qui nous menacent.
J’ai voulu m’éloigner du monde occidental, pour retrouver l’authenticité d’une nature longtemps préservée en Asie du Sud-Est… Mais là encore, la modernité devenue folle m’a rattrapé ! Pour satisfaire nos marchés dévorateurs, ces pays se sont eux aussi lancés dans une course destructrice au productivisme, à la déforestation, aux pesticides. Comme je le prédisais, les hommes ont fini par créer les conditions d’émergence d’une nouvelle peste, le coronavirus. Et qui accusons-nous ? Les animaux sauvages. La chauve-souris. Le pangolin.
Mais qui a poussé la chauve-souris, réservoir de virus, à quitter sa forêt pour venir souiller nos productions agricoles et répandre la peste moderne ? Nous. Il est temps d’en finir avec le massacre de la faune sauvage, et de renouer avec notre vraie nature. »

 

Commentaire de Thierry Jaccaud, rédacteur en chef de L’Écologiste*, dans le numéro de décembre-février de ce trimestriel (extraits) :

« On assiste à une épidémie d’épidémies. Serge Morand et ses collègues ont pu montrer tout récemment que les épidémies se mondialisent depuis le début des années 1960 (…) Pourquoi ? La corrélation est très forte avec l’augmentation du trafic aérien, passé de 330 millions en 1970 à plus de quatre milliards en 2017, ainsi qu’avec l’augmentation du fret aérien, passé d’environ 16 milliards de tonnes-km en 1970 à 221 en 2017. Les pays au centre du démarrage des épidémies sont aussi les mieux connectés à la mondialisation.

Morand retrace l’histoire très récente du fléau mondial des élevages industriels (…) Tous sont de véritables incubateurs de maladies infectieuses, comme le soulignent de nombreux rapports officiels comme ceux de l’Organisation mondiale de la santé. Les exemples sont légion. Prenons par exemple le virus Nipah en Malaisie en 1998. Cette année-là, les feux de forêt sont exceptionnellement forts. La déforestation pousse de grandes chauve-souris frugivores, les roussettes, vers des plantations de palmier à huile qui couvrent des élevages porcins à destination du marché international. Et un virus de chauve-souris malaise passe à des porcs dont la viande contaminera des habitants de Singapour.  (…)

Alors que faire ? Le contraire de ce que nous faisons actuellement. Changer de modèle. Démondialiser l’économie, relocaliser, préserver la nature, favoriser les petits élevages familiaux. Et lire l’ouvrage de Morand. »

 

L’Écologiste, édition française de The Ecologistwww.ecologiste.org – Bureau B1397, 60643 Chantilly cedex

 

 

 

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Commentaires

VORACITÉ CHINOISE

> "Pour satisfaire nos marchés dévorateurs, ces pays se sont eux aussi lancés dans une course destructrice au productivisme" : sans doute, mais il ne faut pas oublier que le marché chinois est également vorace en matières premières, en produits agricoles, etc. Les "nouvelles routes de la soie" n'ont pour autre objectif qu'assurer cet approvisionnement. Que l'Asie du Sud-est détruise ses paysages pour assouvir ces besoins n'est pas un cas de conscience pour la plupart des hommes d'affaires chinois. Ce n'est d'ailleurs pas davantage le cas en Chine continentale ni à Taïwan : certains politologues considèrent que tôt ou tard, Pékin demandera un accès plus ou moins permanent à la Sibérie actuellement déserte et quasiment inexploitée.
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Écrit par : Philippe de Visieux / | 04/01/2021

INTÉRÊTS

> merci pour cet article! je suis bien d'accord avec cette analyse! pourvu que nous changions de direction! Pas besoin d'être complotiste. le seul fait que nous soyons pécheurs explique beaucoup, nous aimons le pouvoir, l'argent. et dans une telle crise, certains poursuivent leurs intérêts, sans se concerter les uns avec les autres, mais leurs intérêts convergent dans une direction.
sainte année à vous!
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Écrit par : Pauline / | 05/01/2021

LES ZOONOSES ET LE MODÈLE ÉCONOMIQUE

> Déjà en mars dernier, Eva Illouz présentait le risque des "retombées zoonotiques", dans un texte formidable, qui établit le lien complet entre économie et santé.
https://www.nouvelobs.com/idees/20200323.OBS26443/l-insoutenable-legerete-du-capitalisme-vis-a-vis-de-notre-sante-par-eva-illouz.html

Changer de modèle économique devrait être une évidence, et une urgence !
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Écrit par : Xavier / | 05/01/2021

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