Ok

En poursuivant votre navigation sur ce site, vous acceptez l'utilisation de cookies. Ces derniers assurent le bon fonctionnement de nos services. En savoir plus.

23/08/2020

“Ce ne sont pas la chair et le sang qui t’ont révélé cela...”

Clefs-de-saint-Pierre-Église-Saint-Cyprien-Londres.jpg

Ce passage essentiel de l’évangile selon Mathieu (16:13-20) demande la lecture précise qu’indiquent le pape et Louis Bouyer :


 

À Jésus qui questionne ses disciples sur ce qu’on dit de lui, Pierre répond spontanément : “Tu es le Christ, le fils du Dieu vivant !”. Dans la bouche du pêcheur de Galilée, ce mot (“Christ”) est-il anachronique ? C’est ce que soutiennent depuis cent ans les lectures révisionnistes : elles veulent voir dans l’application à Jésus du titre de “Christos”, ou “Christus”, une invention de théologiens helléno-romains du IIe siècle… Mais cette idée (devenue courante depuis les années 1970) n’est pas conforme à la réalité historique ! Dans sa rétroversion de Matthieu du grec à l’hébreu puis au français, le penseur israélien André Chouraqui traduit le verset ainsi : “Tu es le messie Bèn Élohîm, le fils de l’Élohîm de la vie”. Déclaration parfaitement plausible dans le bouillonnement spirituel des judaïsmes du début du Ier siècle, comme le souligne Louis Bouyer… A moment où Jésus est apparu, le mot hébreu mashia’h, araméen messi’ha (“Oint”), désignait “la figure par excellence où se concrétisaient les attentes populaires en Israël”.  Mais, sauf dans le judaïsme essénien, les attentes les plus répandues “s’étaient alourdies en représentation d’un roi terrestre qui assurerait la revanche politique du peuple opprimé par une domination étrangère”. D’où le rejet de ces interprétations par Jésus, et le soin qu’il met à ne pas s’y prêter. S’il accueille la profession de foi de Pierre, c’est dans la mesure où son inspiration n’est pas politique mais eschatologique, ouverte au “règne surnaturel du fils de l’homme” couplé avec “l’humiliation suprême du Serviteur”. “C’est dans ce sens que la première prédication chrétienne proclamera que Jésus a été fait Seigneur et Christ dans sa résurrection par le Père, ayant été crucifié par les hommes…” Lancée à l’aube palestinienne du christianisme, exprimée d’abord selon des catégories spirituelles juives, cette proclamation initiale sera le fait de juifs et non de “Grecs” (Actes 2:36 et lettre aux Hébreux). Cela sous la motion de l’Esprit :   “Ce ne sont pas la chair et le sang (les pulsions humaines séculières) qui t’ont révélé cela.”

  

Le même passage de Matthieu contient la phrase fondatrice : “Tu es Pierre”, qui inclut le fameux pouvoir des “clefs du royaume des cieux”. Elle ne justifie en aucun cas un rêve politico-sociétal théocratique, même si ce rêve a sévi naguère ! (et subsiste encore dans un micromilieu : “la chrétienté nous sauvera”, prétendait de façon hétérodoxe un pèlerinage de Chartres). D'autre part, le “pouvoir” confié par le Christ à Pierre et ses successeurs fonde – au moins en principe – un vivre-ensemble catholique très particulier. Pour la communion de foi, Pierre est par la volonté du Christla pierre fondamentale de la piété des Eglises” (saint Augustin) : le rocher sur lequel s’édifie la communauté. L'autorité spirituelle dans l’Eglise ne saurait donc procéder de la démocratie, régime dans lequel le suffrage universel est seule source de tout. Mais dans d’autres domaines dérivés du précédent, comme la participation des laïcs, la place des femmes, la décentralisation, le discernement communautaire ou les synodes diocésains, l’Eglise souhaite réduire le “cléricalisme” vertical au profit de l’écoute et du dialogue. Il s'agit d'aider l’unité à devenir “multiforme”, selon l’expression du pape François dans son discours de clôture du synode sur l’Amazonie. On mesurera cela en 2022 au prochain synode des évêques à Rome, qui aura précisément pour thème : “Pour une Eglise synodale – Communion, participation et mission”. Dixit François : “Le grand défi de conversion pastorale qui s’ensuit pour la vie de l’Église aujourd’hui est d’intensifier la collaboration mutuelle de tous dans le témoignage évangélisateur à partir des dons et des rôles de chacun, sans cléricaliser les laïcs ni séculariser les clercs, et en évitant dans tous les cas la tentation d’un cléricalisme excessif qui maintient les fidèles laïques en marge des décisions.”

 

 

jésus-christ,évangile,christianisme

 

Commentaires

LE POINT DE BASCULE

> Ce passage d'évangile, quel bonheur… Le prêche de notre curé ce matin insistait sur ce point de bascule qu'offre la confession de l'apôtre Pierre pour témoigner de l'identité de Jésus, pour nous dire qui Il est.
D'un coup, d'un humble pêcheur juif, nous recevons cette révélation que le prophète et ci-devant charpentier de Nazareth, qui enseigne, réconforte, guérit, éclaire et rassemble les enfants d'Abraham entre Judée et Galilée depuis trois ans, possède cette triple qualité de Messie/Oint du Seigneur, et avec ça de Fils de l'homme et Fils de Dieu… ce Fils qui nous conduit, excusez du peu, au Dieu vivant ; à Dieu parmi nous, à Dieu qui vit avec nous. Rien que ça : l'Oint, le Fils, Dieu parmi nous !
Nous rendons grâce à Dieu qui nous fait ainsi don du Roc sur lequel s'édifie et s'affermit l'Eglise : Pierre et ses successeurs. Jésus leur a donné les clés du Royaume. Pour ma part, j'ai donné depuis longtemps à Pierre les clés de mon cœur – ayant toujours chéri sa bénédiction depuis mon entrée en catéchisme. D'Angelo Giuseppe à Jorge Mario en passant par Giovanni Battista, Albino, Karol Józef et Joseph Aloisius, je le confesse : j'ai toujours aimé Pierre… et le Jésus dont il témoigne !
______

Écrit par : Denis / | 23/08/2020

FEEL GOOD

> C'est le plus difficile à faire admettre aux personnes d'aujourd'hui : que le lien entre soi et le "milieu divin" n'est pas un bricolage individuel mais une relation quasi-organique instituée surnaturellement et vécue en communauté parmi un "peuple de la foi". L'Occidental-e d'aujourd'hui peut-il même concevoir quelque chose qui transcenderait ses émotions individuelles fluctuantes ? C'est vrai que le culte des "énergies cosmiques" n'engage à rien, contrairement à la relation personnelle avec le Christ ressuscité. Aujourd'hui le "spirituel" n'est que l'un des rayons du supermarché de bien-être. Feel good !
______

Écrit par : GKC / | 23/08/2020

CORPS

> OUI, OUI, OUI :
L'Eglise CORPS et NON-structure, ... CORPS VIVANT,dans l'infini du temps et de la vie, dans le questionnement de la recherche [l'impie ne cherche plus : dieu n'est rien,voilà toute sa ruse (psaume---,verset---)], dans la foi totale au CHRIST nourrissant tout acte de vie, etc, etc ...
______

Écrit par : Gérald / | 24/08/2020

à GKC :

> C'est précisément ce qui m'a le plus attristé dans le récent film néo-zélandais sur Compostelle : à une mère qui, au bout d'une journée éreintante de marche, songe en pleurant à ses enfants décédés, une Française lui offre ce qui ressemble fort à un chapelet en lui disant "prends-le, il contient des énergies positives". Et ce devant deux statuettes de saints catholiques...
Dans la scène suivante, on voit un Néo-Zélandais âgé inviter un de ses compatriotes à entrer dans la minuscule église d'un hameau traversé ; ils y déposent leurs intentions en prière devant la Croix, le second allumant un cierge avant de quitter les lieux, ému aux larmes.
Que les énergies occultes existent, il suffit de voir comment agissent les coupeurs de feu ou écouter le P. Verlinde en parler pour s'en convaincre ; ne pas oublier, dans le même temps, que ces champs énergétiques sont peuplés d'entités que le Christ a chassées et qui "ne sont pas du côté du bon Dieu", pour reprendre Joseph-Marie Verlinde. D'où l'absolue interdiction pour tout chrétien d'entrer en contact avec eux, comme le rappelle avec force le Catéchisme de l'Église catholique.
Entre énergies cosmiques et Dieu trinitaire, il faut choisir.
______

Écrit par : Philippe de Visieux / | 24/08/2020

à Philippe de Visieux

> Ce qui plaît aux gens d'aujourd'hui dans le culte des énergies cosmiques, c'est que ce fétichisme du bien-être est vague, sans engagement aucun de la part du "fidèle". Alors que les gens d'aujourd'hui croient que le catholicisme est une morale de pion bardée d'interdits. Ne se renseignant pas à son sujet, ils restent dans cette impression. Et comme les médias ne parlent de catholiques la plupart du temps que pour attirer l'attention sur les groupuscules intégristes (bardés d'interdits etc), les gens d'aujourd'hui se sentent toujours plus confortés dans leur fuite vers le cosmo-tellurique.
______

Écrit par : GKC / | 24/08/2020

JUDAÏSMES PLURIELS

> Que sont devenus les adeptes de cette idée "un roi terrestre qui assurerait la revanche politique du peuple opprimé par une domination étrangère" ? Je ne vois que deux réponses à ma question: ils ont eu une descendance ou ils ont été anéantis. La seconde alternative exige que tous ses adeptes aient été anéantis. Cela me semble extrêmement difficile à réaliser. La première alternative me mène à la question de savoir qui sont leurs descendants. Je penche pour elle car il existe aujourd'hui des Juifs. Il y avait plusieurs judaïsmes à l'époque du Christ. La branche rabbinique n'a pas à être la seule à avoir survécu.
______

Écrit par : DidierF / | 26/08/2020

à Didier F

> Il existe ainsi un "petit reste" d'ultra-orthodoxes qui condamnent fortement la "politique de Goliath" menée par Nétanyahu.
______

Écrit par : schibboleth / | 26/08/2020

Les commentaires sont fermés.