13/11/2018
Lutte contre la pédophilie : pourquoi le pape a suspendu le vote des évêques américains
Le pape François et le nonce (français) à Washington
C'est pour amener le problématique épiscopat US à tenir compte des futures décisions du sommet mondial des épiscopats sur la protection de l'enfance, qui se tiendra en février au Vatican :
► Aux Etats-Unis et en France, nouvelle vague d’agitation sur le Net : sans chercher à connaître les raisons de la décision papale, les bergogliophobes et les cathophobes, si souvent alliés objectifs, invectivent une fois de plus François (pour des griefs contradictoires mais l’effet est le même).
En réalité, la décision du pape vient d'un souci d'universalité : il veut éviter que l’épiscopat US – en partie atteint par le syndrome isolationniste de la droite américaine – ne se vote des dispositions sur mesure, et ne se désolidarise ainsi par avance du sommet mondial des présidents de conférences épiscopales sur la protection de l’enfance qui se tiendra à Rome en février prochain.
La décision du pape François est judicieuse. Elle repose sur les informations américaines transmises par le nonce apostolique en poste à Washington : le Malouin Christophe Pierre [photo], nommé en 2016 à la place d’un personnage douteux : Carlo Maria Vigano devenu prête-nom de l’ultradroite comme deux ou trois autres nonces de sa génération... Mgr Pierre explique ainsi la décision papale de ne pas laisser l'Eglise US s'isoler, repli qui aboutirait à la voir réformée non par elle-même, mais sous la pression du Department of Justice : “Nous devons montrer que nous sommes capables de résoudre ces problèmes sans les abandonner à d’autres. Il peut y avoir chez certains [évêques] une tentation de laisser la responsabilité de réformes à d’autres que nous-mêmes, comme si nous n’étions plus capables de nous réformer, et comme si toute confiance devait être transféré à d’autres institutions [que l’Eglise].”
Pour chasser toute ambiguité, les évêques américains unis au pape (ils ne le sont pas tous) ont déclaré par la voix du cardinal de Chicago, Blase Cupich : “Afin d’être clairs sur nos positions et de le faire savoir au peuple catholique américain, nous pouvons néanmoins voter une contribution qui sera à la disposition du cardinal Di Nardo (président de la conférence épiscopale américaine) lorsqu’il ira au sommet romain de février.” Le cardinal Cupich a également proposé une session spéciale de l’assemblée des évêques américains, en mars, sur la question des abus sexuels, sans attendre la session ordinaire prévue pour le mois de juin.
11:01 Publié dans Pape François | Lien permanent | Commentaires (6) | Tags : pédophilie
Commentaires
TRUMPISME RELIGIEUX ?
> Les évêques américains ont couvert le plus énorme scandale de pédophilie au monde. Une partie d'entre eux ont tenté odieusement en août-septembre d'en refiler la responsabilité... au pape François. Et maintenant ils feraient du trumpisme religieux, America First et que le reste du monde catholique fasse ce qu'il veut de son côté, we don't care ???
Ce serait un peu gros.
François a raison de les obliger à marcher au même pas que les conférences épiscopales du reste du monde.
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Écrit par : Edson / | 13/11/2018
LE CAS DE LA FRANCE
> Quitte à me faire l'avocat du diable, les évêques américains pourraient crier aux deux poids, deux mesures : la conférence épiscopale française récemment réunie n'a non seulement pas vu ses travaux suspendus sur ordre du nonce Ventura, mais elle a su produire un remarquable document sur la lutte contre la pédophilie, et ce quatre mois avant la réunion de février au Vatican.
Cela démontre bien qu'une partie de l'épiscopat yankee est un problème pour l'Église universelle ; les soutiens du pape, comme le cardinal Cupich, auront fort à faire pour éviter l'isolement de l'Église US concernant ces questions aussi tragiques que fondamentales pour l'avenir de l'institution ecclésiale.
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Écrit par : Philippe de Visieux / | 13/11/2018
VRAI
> Il est triste de lire "les évêques américains unis au pape (ils ne le sont pas tous) ont déclaré..." et non "les évêques américains, unis au pape, ont déclaré...". Mais si c'est la vérité, autant la dire.
SL
[ PP à SL - Et c'est la vérité. Une partie de l'Eglise catholique américaine est en proie à une sorte de "trumpisme religieux" : isolationnisme et mépris du reste du monde.
La chose est d'ailleurs plus ancienne que Trump. En 2003, tournant le dos à la position anti-guerre d'Irak de Jean-Paul II, l'archevêque de Baltimore disait : "Quand il s'agit de politique et de guerre, mon pape c'est le président des Etats-Unis..." Rideau. ]
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Écrit par : Sven Laval / | 13/11/2018
à PP
> L'archevêque de Baltimore de 2003, ce n'est pas le cardinal grand maître actuel de l'Ordre du Saint-Sépulcre ?
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Écrit par : Churubusco / | 14/11/2018
INTERPRÉTATION
> Je n'ai pas compétence pour me faire une idée à ce propos sur le fond. Mais médiatiquement, ça risque d'être interprété avec malveillance. Exemple de titre:
https://www.lemonde.fr/ameriques/article/2018/11/13/pedophilie-le-vatican-bloque-la-prise-de-mesures-de-lutte-contre-les-abus-sexuels-aux-etats-unis_5382759_3222.html?utm_medium=Social&utm_source=Facebook&fbclid=IwAR0ecwiGeYY-MdC1MrqG8pqG5OiylrSUP3h0-VT44FtB2ti81y5vQe0acBo#Echobox=1542101906
PH
[ PP à PH - Le Monde adopte le point de vue de l'AFP, lequel n'étonnera personne. En tout cas cette interprétation française n'a pas l'excuse de l'émotivité d'Américains, qui s'attendaient à des décisions immédiates et radicales de la part de leurs bishops (ce en quoi ils auraient été probablement déçus). Le Vatican a pris le risque de ces interprétations malveillantes à son encontre, parce que celui d'un isolationnisme du catholicisme US lui paraît pire. Le coup Vigano a montré de quoi sont capables les Américains catholiques de droite contre le pape vu comme "étranger hostile". Beaucoup souhaiteraient le voir à Guantanamo. ]
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Écrit par : Pierre Huet / | 14/11/2018
'LA VIE'
> Le Monde et l'AFP, soit, mais quid de 'La Vie' ? Voilà ce qu'on peut lire dans l'éditorial de Jean-Pierre Denis : "Rome vient tout juste de demander aux évêques américains de surseoir à un certain nombre de mesures de lutte contre les abus, mesures qu’ils s’apprêtaient à voter. Ils ont été pris de court. Personne ne comprend. Une fois encore, et encore une fois de trop, une bonne intention épiscopale a viré au désastre médiatique, au scandale pour les victimes, à la confusion pour beaucoup de fidèles." M. Denis parle de bonnes intentions des évêques US... Trop de naïveté de sa part ?
PV
[ PP à PV - Plutôt une malveillance désormais systématique à l'encontre du pontificat. Serait-ce parce que la clientèle courtisée depuis quelque temps par ce magazine est trop à droite pour aimer le pape ? ]
réponse au commentaire
Écrit par : Philippe de Visieux / | 15/11/2018
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