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28/10/2017

Les 500 ans de Luther, dans 'Codex'

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Puissant et salubre dossier sur la Réforme dans le numéro 5 de Codex (le trimestriel qui apporte un regard chrétien sur l'histoire) :


 

Nouveau numéro de Codex, revue d'historiens que doit lire tout catholique soucieux de connaître - entre autres - la véritable histoire de sa foi [*] ! Consacré au cinquième centenaire de la Réforme ("Luther, un moine contre les papes"), le dossier central réalisé par le Pr Hugues Daussy (université de Franche-Comté) permet de comprendre ce qui s'est réellement passé :

"Sept clés pour comprendre Luther" : 1. le Saint-Empire romain germanique ; 2. une Eglise catholique qui était déjà "en quête de renouveau" ; 3. le rôle de "l'angoisse du salut" chez les fidèles ; 4. ce que disent en réalité les célèbres "95 thèses" de Luther, "affichées" (pratique alors courante) à Wittenberg ;  5. la rupture avec Rome : d'où elle est réellement venue, et pourquoi elle a été "progressive" ; 6.  le rôle politique décisif des princes et des bourgmestres allemands dans le lancement de la Réforme ; 7. "l'éclatement de la chrétienté occidentale", cataclysme aux conséquences illimitées.

"Martin Luther, l'homme qui a dit non" : "l'affirmation progressive d'un moine modèle qui entre soudain en conflit frontal avec l'Eglise" par "irrépressible angoisse existentielle teintée d'un appétit de vivre".

"La rupture avec Rome était-elle inéluctable ?"  Non, et ce fut un processus : "Entre la publication de ses 95 thèses sur les indulgences en 1517 et l'excommunication de 1521, Luther se radicalise progressivement. Il n'avait pas prémédité cette rupture avec le pape, qui se produit par étapes successives."

"Villes germaniques face à la modernité" : "Eisleben et Mansfeld, cités pour entrepreneurs" ; "Les mines de Saxe, aux sources d'une immense fortune" ; "Erfurt, le déclin d'une grande ville d'archevêque" ; "Wittenberg, l'étoile montante de l'Electeur de Saxe" ; "Worms, grandes heures de l'Empire" ; "la Wartburg, haut-lieu du nationalisme allemand" ; "Augsbourg, la place des marchands banquiers" ; "Spire, le Saint-Denis germanique"...

"L'Ecriture, la grâce et la foi" :  selon la théologie luthérienne (Confession d'Augsbourg de 1530), l'homme ne peut contribuer à son salut puisqu'il reçoit tout de la miséricorde divine. Subtil à l'origine, ce déplacement d'accent deviendra glissement puis avalanche en déclarant inutiles les "médiations" (d'où future ambiguité des sacrements et du sacerdoce luthériens) - et en invalidant l'oeuvre des conciles et des papes à travers les siècles.

  "Le camp des réformateurs" : les collaborateurs de Luther, ses concurrents, ses contradicteurs...

  "Les mass-media de la Réforme" :  comment le mouvement luthérien inaugura, grâce au média révolutionnaire qu'était l'imprimerie (appuyée pour les illettrés par la parole, la musique et  la diffusion d'une imagerie violente) les campagnes d'opinion de l'ère moderne.

"Vrai ou faux ?" :  le point sur dix idées répandues à propos de la Réforme et de son époque.

"Les protestants brisent l'unité de la chrétienté occidentale" : comment l'Europe en fut irrémédiablement divisée...

 

En contrepoint de ce dossier indispensable, je recommande deux lectures :

Martin Luther par Heinz Schilling, biographie de référence publiée en français par les éditions Salvator (2014, 704 pages),

Un regard catholique sur Martin Luther : document pour ce 500e anniversaire par la Conférence des évêques de France. Textes : papes Jean-Paul II, Benoît XVI et François ; cardinaux Koch, Kasper et Willebrands ; Mgr Vincent Jordy, Pr Martine Roberge, P. Emmanuel Gougaud. Et la "déclaration conjointe" luthéro-catholique de 2016.

 

 >  Également dans le numéro 5 de Codex Le département des manuscrits de la BnF / L'ADN chrétien des sauveteurs en mer / Mar-Benham, monastère victime de Daech / "1917, l'Eglise russe n'a pas été à la hauteur" / L'observatoire des médias / Culture : trésors textiles de la cathédrale de Reims, Strasbourg et les legs de l'annexion, les fouilles de Vaison-la-Romaine / Michel Zink parle de l'amour dans la poésie du XIIe siècle /  Le Quo vadis ? de Sienkiewicz / Charlemagne, la BD / Cahier pédagogique : l'Europe des Lumières / Patrimoine : les jardins ouvriers d'Ivry, le donjon de Vincennes, le bâtisseur de la cathédrale de Créteil, les Amis de Madeleine Delbrêl, l'exposition de l'Institut du monde arabe sur les chrétiens d'Orient...

 

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[*]  ...donc loin de légendes dorées exhumées depuis dix ans.

 

 

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Commentaires

LUTHER JUDÉOPHOBE

> On oublie souvent l'antijudaïsme exacerbé de Luther. Il a écrit notamment "des juifs et de leurs mensonges" et son plan pour la conversion-extermination-expulsion des juifs en 8 points donne froid dans le dos. Certes il y a eu d'autres auteurs chrétiens antijuifs avant lui, mais sur ce point il n'a rien réformé du tout, il en a même remis une couche (et pas une petite). D'ailleurs les Eglises protestantes allemandes débattent de cette question de l'influence des écrits de Luther sur l'antisémitisme du IIIe Reich (l'enfumage sur les "silences de Pie XII", fabriqué par les services culturels de la Stasi, a permis de créer une diversion médiatique).
Les protestants français sont d'une grande discrétion sur cette question, qui n'est pas pourtant marginale; il est vrai que cela ferait tache sur la belle image de victimes innocentes qu'ils se sont construits en triturant l'histoire française et européenne.

BH


[ PP à BH :
- Les protestants françajs ne sont responsables que de ce qu'ont fait à l'époque les protestants... français, et le bilan en est inattaquable sous l'angle que vous évoquez ! Ils n'ont donc pas "trituré" l'histoire des années 1940. Le reproche à leur faire est postérieur à 1945 et c'est l'américanophilie, notamment dans l'nti-gaullisme aveugle du pasteur Boegner : cf le livre remarquable d'Eric Branca sur de Gaulle et les Américains (éd. Perrin). Mais ce n'était pas un monopole protestant...
- Sur Luther : sa judéophobie est tardive, comme le montre bien le dossier de 'Codex'. Son 'Quand Jésus-Christ était juif' (1523) montre une réelle compassion envers le sort fait aux juifs en Europe. C'est à partir de 1530 que la polémique anti-juive apparaît sous sa plume pour virer ensuite à la psychose : ce en quoi il suit son époque plutôt que l'Evangile. ]

réponse au commentaire

Écrit par : B.H. / | 28/10/2017

@ BH et PP

> Sous le point de l'antisémitisme, on peut dire aussi que les excès de langage de Luther ont été largement utilisés par le courant nationaliste allemand, anti-romain. Le résultat fut qu'il y a un parallélisme assez net entre les résultats des élections de 1932 et la présence du protestantisme.
Vote NSDAP: 50% chez les protestants, 30% chez les catholiques, ce qui est 30% de trop, mais comme d'habitude, les électeurs connaissaient mal l'idéologie profonde, cachée, du parti (Hanna Arendt explique ceci très bien).
http://the-hermeneutic-of-continuity.blogspot.fr/2007/07/catholics-and-nazi-vote-1932.html
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Écrit par : Pierre Huet / | 29/10/2017

LUTHER

> à PH :
- Chez Luther il s'agissait de beaucoup plus que d'abus de langage : psychose à la fin.
- Sur le NSDAP : on ne peut vraiment pas dire que son idéologie était cachée. Elle était ostensible. Bien avant 1933 les chefs de troupe de la HJ (âge "scouts") et du Jungvolk (âge "louveteaux") faisaient chanter à leurs gamins : "Deutschland erwache und Juda den Tod", "Allemagne réveille-toi et mort au Juif". Autre chant de jeunesse : "Juda verrecke", "Que crève le Juif". En traversant les villes on faisait faire halte à la section HJ devant la vitrine du 'Stürmer', la feuille de Julius Streicher. Avec ce spectacle dans la vie quotidienne, les Allemands étaient tous au courant. Voir les travaux de Chapoutot.
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Écrit par : Alain Barny / | 30/10/2017

Mais où trouve -t-on cette revue ?

[ PP à FP - En librairie : c'est un "mook", distribué comme les livres. Aussi chez certains points de vente de presse. Vous pouvez vous abonner pour 60 € l'année : abo-hcm.cld@orange.fr, ou CLD, 14 ue de l'Eglise, 16120 Châteauneuf-sur-Charente
et consulter leur site : revue-codex.fr ]

réponse au commentaire

Écrit par : Françoise Pillon / | 30/10/2017

LUTHER ET MAHOMET

> Ce que je lis dans ce fil de commentaires m’interpelle : apparemment, il est désormais possible d’énoncer, touchant l’appel au meurtre des « mécréants », que de la même façon qu’il y a eu deux Mahomet, avant et après Médine, il a existé deux Luther, celui, débonnaire, du « Petit Catéchisme » et celui, violemment antisémite et sujet à plusieurs dépressions, des dernières années à Wittemberg ?

Denis


[ PP à Denis - C'est plus sûr à propos de Luther que de Mahomet, sur lequel on manque de données historiques fiables. Quant aux textes censés dictés à Mahomet par le Ciel, le caractère tardif du "Coran" empêche d'en penser quoi que ce soit... ]

réponse au commentaire

Écrit par : Denis / | 30/10/2017

à Denis

> On pourrait demander à Tariq Ramadan, mais je crains qu'il n'ait d'autre soucis en ce moment.
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Écrit par : akbar / | 30/10/2017

@ PP et Denis

> Selon mon édition du Coran (traduction Mohammed Chiadmi, ed Tawhid à Lyon) il est certain qu'aucun texte n'est de la main du Messager de Dieu, selon son titre traditionnel, la tradition disant qu'il a dicté ses révélations à ses compagnons, dont il est résulté des recueils divergents. Près de 50 ans après sa mort, le calife Othman a fait établir un texte unique et détruire les sources pour éviter les disputes! Ce qui n'empêche pas l'Islam de considérer ce texte canonique comme dicté par Dieu et non simplement inspiré.
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Écrit par : Pierre Huet / | 30/10/2017

SÉPARÉS

> N'oublions pas, à regret, que la rupture de l'unité religieuse de l'Europe continue de perdurer, malgré les pas de géant accomplis depuis cinquante sur le chemin de l’œcuménisme. En bon catholique que je suis, j'éprouve toujours une déception intérieure lorsque je me trouve parmi des frères protestants. J'étais il y a quelques jours dans les montagnes de l'Est de Taïwan, évangélisées par les Missions étrangères de Paris et par les missionnaires protestants. Dans chaque village traversé, on trouve systématiquement une église et un temple, parfois l'une face à l'autre. Un prêtre français âgé, rencontré sur place, m'a raconté combien cette concurrence était difficile à vivre, certains pasteurs n'hésitant pas à dépeindre les catholiques sous les poncifs mariolâtres des siècles passés.
Un bémol : j'écoutais il y a quelque temps le superbe entretien donné par Hans Urs von Balthasar dans un français parfait, dans lequel il évoque son amitié avec Karl Barth. Balthasar affirme, à propos de Barth, "avoir le sentiment que, dans son cœur, [Barth] se demandait si la vérité ne pouvait pas être de l'autre côté (comprendre : du côté de l'Église romaine), mais c'était plus fort que lui : il était une sorte de "pape" de toute cette Église (protestante)..." (https://www.youtube.com/watch?v=m1ETPlqMCnA).
Trop peu de nos frères protestants se demandent si la vérité ne se trouve pas "de l'autre côté" ; l’œcuménisme, s'il est indispensable, devrait à mon sens y concourir.

PV


[ Pp à PV - J'ai eu cette expérience durant mon enquête sur les évangéliques, en entendant de gentilles jeunes femmes me demander si je n'avais pas un peu honte d'être un idolâtre... ]

rémponse au commentaire

Écrit par : Philippe de Visieux / | 03/11/2017

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