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30/06/2017

Bien commun [3] : quel rapport avec le "sociétal" ?

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Questions du Pr Frédéric Worms (ENS), extraits :


 

 

http://www.liberation.fr/debats/2017/06/29/qu-est-ce-que-...

 

<<  ...Que veut-on dire quand on parle de débat «sociétal» ? Il semble que l’on entende par là un débat qui porte sur, et souvent qui oppose, non pas des idées politiques proprement dites, pas non plus des faits scientifiques, mais des «conceptions» de la «société» en général. On pourrait dire aussi des questions de «mœurs» ou de «valeurs». [...] On croit bien faire, car cela suppose bien sûr - et heureusement - quand on parle ainsi de débat sociétal, que l’on s’est déjà mis d’accord sur beaucoup de choses fondamentales, justement sur un cadre social et politique commun, et aussi sur des vérités factuelles et scientifiques de base, et communes elles aussi. Ce geste d’isolement du «sociétal» pourrait donc être pacificateur, être le signe d’une société apaisée et mûre, qui accepte de débattre d’elle-même dans un cadre commun.

[...]  Il est loin d’être sûr, en tout cas, que cela soit pacificateur. Comment serait-il pacificateur de laisser face à face dans un cadre supposé acquis et solide, des visions du monde et de la vie humaine peut-être radicalement opposées et que chacun a bien le droit d’adopter pour lui-même dès lors qu’il s’agit des questions essentielles de sa vie ?

[...]  Mais d’ailleurs ce dit «sociétal» existe-t-il même en tant que tel et tout seul, isolé du reste ? Ce n’est pas sûr du tout ! On fait comme si le débat sociétal n’avait pas lieu dans une société et à propos de relations sociales ! Or, ce sont évidemment là deux conditions essentielles. Le débat sociétal a lieu dans une société. C’est d’ailleurs ce qui fait son enjeu puisque loin d’opposer seulement des idées, il devient violent, ce débat, lorsqu’il s’agit qu’elles orientent la vie «de tous» (terme récurrent bien sûr aujourd’hui), qu’elles deviennent donc politiques, qu’elles investissent ce que l’on appelle la loi.

[...] Tel est le problème proprement politique qui fait qu’avant les valeurs opposées il faut respecter les principes communs, qui contraignent de ne pas imposer les valeurs des uns quelles qu’elles soient, à tous. [...] Le «sociétal» masque aussi le fait que les questions vitales et morales ne sont pas seulement individuelles non plus mais mettent en cause les relations entre les hommes. On oppose parfois le sociétal non plus au politique mais au «médical», et on voit bien ce que l’on veut dire par là. La priorité non seulement de la vie et de la mort, de la lutte contre la maladie, mais aussi du soin et du secours, de la vérité et de la science, dans une société. C’est un principe concret à garder en tête. Mais il ne règle pas tout, il est plutôt une orientation. Il faut prendre en compte dans toutes les questions sociales, la pluralité des relations, l’évitement de la souffrance et aussi des abus de pouvoir qui sont aussi des souffrances et des maux. Et cela non seulement dans le face à face ou l’éthique mais aussi dans le tissu social où le débat sociétal retrouve les questions sociales. Ainsi, il est impossible d’isoler le sociétal, de toutes les autres dimensions de la vie sociale et humaine.

Mais que lui reste-t-il alors ? Que reste-t-il pour le «sociétal» une fois qu’on l’a passé au crible durement acquis par l’humanité du débat démocratique et de la lutte contre les dangers communs, toujours en chemin l’un et l’autre ? N’en aura-t-on pas une vision lénifiante et «bien pensante» ? Bien au contraire. Nous pensons que l’opposition inévitable des conceptions du bien entre les hommes aura alors une double vertu. Tout d’abord, compliquer encore les débats politiques et sociaux qui ne sont pas de purs débats d’experts et doivent avoir non pas pour contrainte mais pour but de permettre la vie commune et de mobiliser les citoyens. Mais aussi faire surgir de la vie humaine, dans un cadre commun, le débat critique sur cette vie, la discussion qui, même enflammée, fait le sel et parfois la joie de la vie humaine et aussi, au passage, de la philosophie. >>

 

 

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16:49 Publié dans Idées | Lien permanent | Commentaires (2) | Tags : sociétal

Commentaires

SIMONE VEIL

> La séquence médiatico-sociétale actuelle est étonnante (une semaine déprimante) : assemblée nationale en marche le jour de l'avis du CCNE sur la PMA, Gay Pride partout, Merkel qui cède au mariage gay en Allemagne, Simone Veil qui meurt et que J. Toubon, entre autres, récupère aussitôt en prétendant que la suite de son combat, longtemps après 1974, est la PMA pour toutes...
Quant on voit la photo de S. Veil à la Manif pour tous, et qu'on entend le discours de 1974 où elle insiste sur le fait que l'avortement sera toujours un malheur, on mesure le degré de confusion mentale auquel nous sommes descendus.
Qui aujourd'hui milite (parmi les politiques) pour que les IVG diminuent dans notre pays ? Pour que l'État aide à une éducation de tous à une sexualité et à un exercice responsable de sa fécondité ?
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Écrit par : Alex / | 30/06/2017

MOINDRE MAL ?

> Intéressant de lire l'article du p. Potin paru dans La Croix au lendemain du vote de la "loi Veil" en 1974 :
http://www.la-croix.com/Archives/Ce-Jour-la/Il-y-a-40-ans-l-avortement-legalise-au-Parlement-2014-11-28-1244454
Ce qu'il dit à la fin, notamment, est poignant : que faisons-nous pour sortir du "chemin de la facilité" ?
N'est-ce pas le p. Gaston Fessard qui disait qu'à force de se contenter de la politique du "moindre mal", on finissait par avoir le pire ?
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Écrit par : Alex / | 30/06/2017

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