04/03/2017
Une partie de la Curie bloque le travail de la Commission pour la protection des mineurs
Marie Collins ayant quitté – en disant pourquoi – la commission de lutte contre la pédophilie, le cardinal Parolin confirme objectivement l'explication de l'Irlandaise :
Radio Vatican, 01/03 – << C’est une des figures de proue de la lutte contre les abus sexuels au sein de l’Église : Marie Collins, membre fondatrice de la Commission pontificale pour la protection des mineurs, a remis sa démission au cardinal Sean O’Malley, son président. La nouvelle a été rendue publique par un communiqué de la Commission ce mercredi 1er mars. Il précise que Marie Collins avait remis formellement sa démission le 13 février dernier et qu’elle aurait pris effet ce 1er mars. Le texte ajoute que le Saint-Père a été informé de cette décision et qu’il a accepté la démission de Marie Collins, reconnaissant le travail qu’elle a effectué en faveur des victimes d’abus sexuels.
A l’origine de cette décision, la frustration éprouvée par Marie Collins envers l’absence de coopération de la part de plusieurs bureaux de la Curie romaine avec la Commission. Sa démission témoigne de la difficulté rencontrée dans la lutte contre les abus sexuels sur mineurs commis par des membres du clergé. Marie Collins, elle-même victime d’abus, s’est toujours engagée dans ce combat pour qu’il devienne une priorité pour l’Église, témoignant pour cela sans relâche et se faisant la voix des sans voix.
Elle avait ainsi intégré cette Commission voulue par le pape François lors de sa création en 2014. Elle en est la troisième membre à démissionner. Elle n’abandonne pas pour autant la lutte contre les abus sexuels. Elle a en effet accepté l’invitation du cardinal O’Malley à poursuivre un rôle éducatif au sein de la Commission, en signe de reconnaissance de ses capacités d’enseignement et de l’impact de son témoignage en tant que survivante d’abus.
Dans un communiqué, le cardinal O’Malley rend hommage à son action et assure que tous les points que Marie Collins a soulevé seront examinés lors de la prochaine session plénière de la Commission le mois prochain. (XS) >>
► RFI, 01/03 – << C'est une des figures marquantes de la lutte contre les abus sexuels au sein de l’Eglise : Marie Collins, membre fondateur de la Commission pontificale pour la protection des mineurs, a démissionné. Elle quitte cette structure mise en place en mars 2014 sur volonté du pape François, dénonçant le manque de coopération au sein de la Curie romaine.
Avec notre correspondant à Rome, Olivier Bonnel
Avec le départ de Marie Collins, un an après celui du Britannique Peter Saunders, la commission pontificale de protection des mineurs ne compte désormais plus aucune victime de pédophilie en son sein, un très mauvais signal alors que le pape François souhaite mettre les victimes d’abus sexuel au centre. Mais c’est surtout les raisons du départ de Marie Collins qui soulèvent des questions. « Malgré la volonté du Saint-Père d’approuver toutes les recommandations que la commission lui a faites, écrit l’Irlandaise dans sa lettre de démission, il y a eu de multiples revers ». Une lettre dans laquelle elle dénonce « la résistance » de certains membres de la Curie.
Sans la nommer directement, Marie Collins déplore aussi le « manque de coopération » de la Congrégation pour la doctrine de la foi, qu’elle juge « honteuse ». De simples recommandations, approuvées pourtant par le pape ont été écartées, regrette-t-elle.
Dans un communiqué, l’archevêque de Boston, le cardinal O’Malley, qui préside cette commission, souligne que la contribution de Marie Collins sera un grand manque. L’Irlandaise continuera néanmoins de collaborer à des programmes de formation des évêques pour faire face à la pédophilie, mais loin des intrigues de la Curie. La commission de protection des mineurs tiendra, elle, son assemblée plénière le mois prochain, l’occasion sans doute de mettre sur la table toutes ces tensions. >>
► La Croix, 03 03 2017 – << Victime d’un prêtre abuseur dans les années 1960 et devenue une porte-parole des « survivants » de la pédophilie dans l’Église, l’Irlandaise Marie Collins a démissionné mercredi 1er mars de la Commission pontificale pour la protection des mineurs instituée en 2014 par le pape François pour lutter contre les abus sexuels. Elle dénonce des « résistances » au sein de la Curie :
> Nicolas Senèze : Votre démission de la Commission pontificale pour la protection des mineurs signifie-t-elle que le pape François ne met pas véritablement en œuvre la « tolérance zéro » qu’il a pourtant annoncée ?
> Marie Collins : Je crois vraiment que le pape essaye de faire de son mieux pour lutter contre les abus sexuels dans l’Église. Je suis persuadée que ce qu’il a dit sur la tolérance zéro et sa volonté de mettre fin aux abus ne sont pas seulement des mots. Il est vrai que, sur certains cas concrets, je n’ai pas été d’accord avec les décisions qu’il a prises. Mais on peut faire des erreurs. Cela ne veut pas dire pour autant qu’il n’a pas la volonté de résoudre le problème des abus dans l’Église. Il essaye de faire avancer les choses, mais ce n’est pas toujours facile.
> Vous parlez de « résistances » au sein de la Curie, et notamment de la Congrégation pour la doctrine de la foi. De quelles résistances s’agit-il : indifférence face aux abus, opposition au pape François, ou inertie d’une vieille et grande structure ?
> M. C. : Je pense qu’il s’agit plus d’une opposition au pape François qui a soutenu la commission pontificale pour la protection des mineurs dans son travail pour le changement d’attitude de l’Église vis-à-vis des abus. Il y a un cléricalisme qui fait qu’on ne respecte pas le travail de la commission. Certains clercs voient l’action de la commission, majoritairement composée de laïcs, comme une interférence dans leur travail. Cet aveuglement empêche de voir combien des enfants peuvent être détruits par les abus commis dans l’Église.
> Cela veut-il dire que la Curie ne tient pas compte du problème des abus ? Qu’elle ne fait pas attention aux victimes ?
> M. C. : C’est loin d’être uniforme ! Il y a beaucoup, beaucoup de gens dans la Curie qui ont réellement conscience du problème des abus, veulent changer les choses et collaborent avec la commission. Je le vois dans les formations que nous avons faites, par exemple avec les nouveaux évêques qui viennent en formation à Rome et que nous rencontrons. La Congrégation pour le clergé a aussi beaucoup travaillé à une meilleure formation des prêtres, avec une meilleure conscientisation et vigilance tant des responsables que dans le recrutement des séminaristes. Le problème vient de certains secteurs de la Curie où demeure une certaine vision traditionnelle de voir les choses, une bureaucratie qui se révèle lente et inefficace. Or, dès qu’on temporise, on laisse des enfants en danger.
> Vous évoquez, par exemple, la question du tribunal que le pape a demandé à la Congrégation pour la doctrine de la foi de mettre en place pour juger les évêques pris en faute. Celui-ci n’est toujours pas en place à cause de problèmes « légaux ». Quels sont-ils ?
> M. C. : Je ne sais pas. Le problème est que la commission n’a aucun moyen de vérifier comment ses recommandations sont mises en œuvre. Elle n’a aucune autorité, et cela doit changer. S’il y a un problème canonique, soit : mais le code de droit canonique reste une loi humaine qu’on doit pouvoir changer !
> Quels sont alors les changements nécessaires à apporter pour que le travail de la commission soit efficace ?
> M. C. : Outre le fait qu’il faut lui donner plus de pouvoir, elle doit aussi avoir un budget propre, qui lui assure une indépendance financière. Mais surtout, il doit y avoir plus de coopération de la part de la Curie. Et si, déjà, il y avait plus de laïcs à la Curie, on verrait sans doute moins ce cléricalisme qui empêche tant les changements !
> En trois ans, la commission a quand même réussi à faire des choses ?
> M. C. : Avec certains dicastères, le travail a été positif. On sent qu’ils ont pris à cœur la question des abus. Le travail sur le terrain a aussi été important. Je le vois en Irlande : après la terrible crise que nous avons connue, les responsables ont compris qu’ils devaient changer. Ailleurs dans le monde, il y a eu de grandes avancées : la question de la pédophilie n’est plus perçue comme une affaire occidentale ou du monde anglo-saxon. L’éducation est vraiment la clé de tout, et c’est pour cela que je continuerai à travailler avec la commission sur la formation des responsables. Changer les esprits prend du temps : or, le temps, c’est aussi ce qui détruit les enfants qui souffrent. On ne peut pas laisser plus longtemps le silence détruire comme ça tant de personnes. >>
La mise au point du cardinal Parolin
► Radio Vatican, 4/03/2017 – << Présent à Florence pour donner une conférence sur la spiritualité d’Evangelii Gaudium, le cardinal Pietro Parolin, secrétaire d’Etat du Saint-Siège, a répondu à des journalistes sur plusieurs questions regardant notamment les questions éthiques ou la voix de l’Eglise dans le monde contemporain. Il s’est également exprimé suite à la démission de Marie Collins de la commission de protection des mineurs.
Pour le cardinal Parolin, « s’il n’y avait pas la voix de l’Eglise, qui parfois dérange, la société serait très appauvrie ». Cela concerne notamment les problématiques nouvelles et très complexes de nos sociétés. Mais «l’Eglise n’a pas de vision obscurantiste », a-t-il précisé. Selon le secrétaire d’Etat, « l’attitude de fond » de l’Eglise doit être marquée par «sa volonté de comprendre et de répondre de manière évangélique : ce qui ne veut dire, ni se refermer, ni tout accepter » […]
Répondant aux journalistes à propos des récentes tensions au Vatican et des attaques contre le Souverain Pontife, le n° 2 du Saint-Siège a aussi démenti une « solitude du pape », lequel a selon lui « la grande capacité d’être serein ». Invité à s’exprimer après la démission de Marie Collins, le cardinal Parolin explique : « Elle a voulu secouer l’arbre, et présenter sa démission était l’unique moyen de réagir ».
Le cardinal a rendu hommage au cardinal O’Malley et à la commission de protection des mineurs, qui ont fait « un beau travail de sensibilisation », rappelant que son rôle est de créer un climat qui permette de défendre les enfants et les protéger. >>
11:33 Publié dans Pape François | Lien permanent | Commentaires (0) | Tags : pédophiles
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