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30/09/2016

Deutsche Bank : chantage à la crise systémique

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Une faillite de Deutsche Bank "menacerait le système bancaire international" ! Revoilà le spectre de la ruine des déposants, perspective installée par la globalisation libérale depuis 2007-2008 :


 

Ce matin, recul de Société Générale, Barclays, Unicredit, Santander, UBS, Crédit Suisse... Le spectre n'est pas imaginaire. Et le cas de l'énorme Deutsche Bank (DB) est significatif. DB cherche à éviter l'amende de 14 milliards de dollars dont la menace la justice américaine, pour avoir vendu "en toute connaissance de cause" des RMBS (crédits immobiliers toxiques convertis en produits financiers) entre 2006 et 2008... DB étant, ces derniers temps, dans une mauvaise passe (capitalisation boursière en chute de 50%), elle joue de sa faiblesse pour négocier avec les juges américains une amende très inférieure : cela en agitant le spectre d'une faillite qui déclencherait la crise systémique mondiale dont tout le monde a peur, et dont elle fait peser la responsabilité éventuelle sur ces juges.

L'argument du too big to fail, "trop gros pour faire faillite", est un argument terroriste [*]. Que ce chantage à la faillite puisse servir d'arme de négociation pour esquiver l'amende (et continuer comme avant), montre - à l'extrême - ce qu'est le système financier global.  DB s'est exposée "à hauteur de 46 000 milliards (plus de 13 fois le PIB de l'Allemagne) aux produits dérivés, instruments financiers pour couvrir les risques spéculatifs" - alors qu'en 2007 Lehman Brothers n'était exposée "que" pour 2,93 milliards, et l'on sait ce qui arriva.

Instaurer ce casino était le véritable but de la dérégulation des années 1990 et de la "révolution libérale". La seule liberté qui en résulte est celle de la spéculation, au détriment de l'économie réelle et de la société - qui d'ailleurs n'existe pas puisqu'il n'y a "que l'individu et le marché", on le sait depuis Mme Thatcher... Aujourd'hui  le marché menace de détruire l'existence de millions d'individus - et en tire argument pour sa propre impunité. Fruit des mensonges d'il y a vingt ans ! Qui veut encore en être complice ?

 

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[*]  Qui peut s'exprimer avec élégance : on ne peut "laisser sombrer l'un des fleurons de la banque du Vieux Continents", dit ce matin Boursier.com... Le tout est de s'entendre sur ce qu'on nomme "fleuron".

 

 

deutsche bank

Commentaires

THATCHER

> Merci pour ces éclaircissements, qui ne correspondent pas à ce qu'on peut entendre par ailleurs.
Petite correction fraternelle par ailleurs : j'ai voulu utiliser sur un autre forum la citation de Thatcher que vous apportez, et qui illustre bien une certaine "pensée". Cependant, en en recherchant la source, je me suis aperçu qu'elle n'existait pas. J'ai trouvé un discours du 31 octobre 1987, où elle disait "il y a les hommes et les femmes et il y a la famille", qui doit être la source de ce téléphone arabe, mais dans ce discours, elle n'utilise pas le mot "marché".
Merci à vous pour ce que vous faites.

Ferrante


[ PP à F. - Pardon, mais ce n'est pas parce que vous n'avez pas trouvé la référence que cette citation "n'existe pas" ! Le seul problème est que ne n'ai pas sous la main la référence anglophone. Je vais la retrouver. ]

réponse au commentaire

Écrit par : Ferrante / | 30/09/2016

PUNITION DES MARCHÉS ?

> "Si Lehman un nain à côté de la DB", mais à l'époque qui aurait pu penser que Lehman pouvait tomber ?
Mais surtout sachant que les "marchés" soutiennent Clinton, à mon avis la question est de savoir si Trump en tirerait avantage ou pas. La DB peut-elle tomber avant les élections USA (8 novembre), je ne le pense pas (mais je ne suis pas du "milieu").
Ou bien faut-il y voir une "punition" des marchés (puisque le point de départ de la crise de la DB est l'amende USA) à "l'arrogance" de l'Allemagne : la seule des grands pays de l'ouest à afficher un budget excédentaire, refusant donc s'inscrire dans une politique économique basée sur la dette ?
Punition à laquelle la chancelière refuse de céder en refusant de soutenir la DB (ce à quoi les marchés s'attendaient ?).
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Écrit par : franz / | 30/09/2016

DIAGNOSTIC

> De Philippe Escande ('Le Monde Eco', 30/09) :
"Face à la stagnation de son marché local, tenu par ses petits concurrents, Deutsche Bank s'est transformée en banque d'investissement plus présente à Londres et New York qu'à Francfort ou Berlin. Symbole d'une Allemagne des années 2000 avide de concurrencer les Anglo-Saxons sur leur terrain. Ce n'était pas le sien, elle en paiera le prix fort."
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Écrit par : luça / | 30/09/2016

Franz,

> l'Allemagne est, bon an mal an, excédentaire, mais néanmoins endettée jusqu'au cou, et finance son "excédent" non en maîtrisant les fuites fiscales et la spéculation financière mais en écrasant les dépenses publiques : d'où, entre autres choses, son taux de pauvreté hallucinant pour un pays occidental et un désengagement massif des infrastructures étatiques.
Un exemple sur mille : pendant que la France agit simultanément au Mali et en République Centrafricaine dans des conditions extrêmement complexes et éprouvantes, l'Allemagne n'arrive pas à assurer ses obligations de livraison de médicaments pendant la crise de l'Ebola.
L'Allemagne poursuit une politique ultralibérale totalement sympathique aux marchés financiers. L'analyse de Patrice me paraît plus crédible.
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Écrit par : Lucas / | 30/09/2016

Mme THATCHER

> Pour la citation anglophone de Mme Thatcher, voici la transcription de l'entrevue où celle-ci dit bel et bien "There is no such thing as society":
http://www.margaretthatcher.org/document/106689

François Sarrazin


[ PP à François Sarrazin :
Mme Thatcher aimait la formule "there is no such thing as..."
Elle l'a employée souvent à divers propos : par exemple lorsque je l'ai interviewée en 1991, un an après sa perte du pouvoir. C'était au sujet des relations internationales.
Ici elle l'emploie à propos des enfants et de l'éducation (merci de nous avoir signalé cet entretien).
La phrase sur la société, l'individu et le marché fut dite lors d'une rencontre avec des dirigeants de grandes entreprises. ]

réponse au commentaire

Écrit par : François Sarrazin / | 30/09/2016

BRAVO

> Si on regarde par l'autre bout, je dis bravo aux Américains!!! Je ne suis pas fan fan des Amériques mais il faut noter qu'ils mettent à l'amende les banques qui ont fauté.
Car il n'y a pas que DB qui risque une amende mais 5 ou 6 banques de par le monde (américaines incluses)
Nous on a eu le scandale Dexia..... Qu'à fait l'Etat: une amnistie, banque comme élus (avec en plus l'utilisation de notre argent pour payer les prêts frauduleux)
Alors bravo les juges ricains, s'il vous plaît continuez!!!
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Écrit par : Sébastien / | 01/10/2016

PONCTIONNER LES COMPTES DES CLIENTS

> Le spectre de la ruine des déposants n'aurait pas dû être : lorsqu'une entreprise fait faillite ce sont normalement les actionnaires qui en subissent les conséquences, pas les clients.
Or l'oligopole bancaire n'applique pas à lui-même le credo libéral qu'il impose à tous les autres acteurs économiques, puisque, avec la complicité de politiciens asservis au système, une "petite" directive européenne est passée en catimini dans le courant de l'été 2015, transposable dans le droit interne de tous les Etats membres, permettant en cas de banqueroute de ponctionner directement les comptes des clients.
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Écrit par : Patrick S. / | 01/10/2016

LEHMAN BROTHERS

> Que voulez vous dire par 'Lehman Brothers n'était exposée "que" pour 2,93 milliards' ?
Ci-joint un article en anglais sur la chute de la banque
http://www.investopedia.com/articles/economics/09/lehman-brothers-collapse.asp
" The firm also said that it had boosted its liquidity pool to an estimated $45 billion, decreased gross assets by $147 billion, reduced its exposure to residential and commercial mortgages by 20%, and cut down leverage from a factor of 32 to about 25."
D'après l'extrait la banque avait accru de 45 milliards son coussin de liquidité et avait diminué la taille de ses actifs de 147 Milliards.
Avec les mécanismes dit de ‘leverage’ ou effet de levier , les dérivés logés dans les banques font que les expositions sont bien plus importantes que leur taille de bilan (i.e. au bilan dépôts, capital et emprunts traditionnels).
Les engagements bruts (et les expositions) aux produits derivés sont vertigineusement plus importants.....
https://www.les-crises.fr/derives-banques-systemiques/
Cordialement
Iader
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Écrit par : iader / | 01/10/2016

- Suite -

> http://www.investopedia.com/articles/markets-economy/062916/could-deutsche-bank-be-next-lehman-brothers-db.asp

Risque massif aux dérivés
(--> Taille notionnelle des contrats 'dérivés ' en cours: 550 000 milliards )
(--> Exposition , soit 13% du total : arrondi 73 000 milliards),
(--> L'exposition aux dérivés est de 3 600 la capitalisation boursière au 15 Juin 2016).
Cordialement
Iader

Écrit par : iader / | 01/10/2016

@ Patrick S.

> N'en revient-on pas à la question de la séparation des banques de dépôts et banques d'affaires (et des effets de leviers, une banque peut prêter plus 10 fois plus que ce qu'elle a en "liquidités") ?
Une des résolutions (non effectuée) suite à la crise de 2007-2008, une des promesse (non tenue) de 2012 de Hollande...
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Écrit par : franz / | 02/10/2016

RÉFORMER

> Question éminemment centrale de l'isolement (separation) des activités
Pour aider a y voir plus clair cf Proposition 10
Vingt propositions pour réformer le capitalisme
http://www.jesuites.com/2012/02/reformer-capitalisme/
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Écrit par : iader / | 02/10/2016

LE POINT DE VUE BANQUIER

> Quelques réflexions, tout de même. Elles ne sont pas une réaction directe à votre article, Patrice, mais ramenant le sujet sur la table, il me fournit l'occasion d'éclaircir certains éléments concernant les banques, ce que je désirais faire depuis un moment. Je m'en explique à la fin.
- La citation de Philippe Escande est intéressante, car elle cadre bien le problème. Je n'ai jamais compris d'où vous teniez que (je cite ici le débat de RND): "L'économie n'est plus financée car les banques préfèrent jouer au casino mondial". Ce n'est pas du tout ce que dit Escande, qui décrit une réalité plus proche de celle que j'observe au quotidien (puisque je travaille dans une de ces "petites banques" dont il parle): le marché du crédit est saturé et les banques s'y livrent une concurrence féroce, ce qui amène certaines (mais pas toutes) à essayer autre chose.
- Comment pourrait-il en être autrement d'ailleurs: que voulez-vous que les banques fassent de toute l'épargne qu'elles collectent, si ce n'est la reprêter? Et à qui d'autre la prêter qu'à des particuliers, à des entreprise ou aux états? On n'a pas besoin de fonds pour "jouer au casino": on passe par des produits dérivés qui ne demandent qu'un financement beaucoup plus limité.
- Bien sûr, il y aura toujours des plaintes d'entrepreneurs trouvant que les banques ne prennent pas assez de risques. Mais il n'est pas inutile de remettre certaines choses en perspectives. Sans entrer dans le détail, je dirais que la faillite d'un emprunteur "mange" pour la banque le bénéfice de 50 qui ne font pas faillite (pour donner des ordres de grandeur). Il y a donc intérêt à ne pas trop se tromper. Par ailleurs, depuis la crise, la réglementation s'est nettement durcie, qui complique plus encore l'octroi de prêts à des clients risqués.
- C'est d'ailleurs sain que les états exigent de la prudence dans les prêts. Toutes les très grosses crises bancaires récentes ont été des crises de l'activité bancaire "traditionnelle", c'est-à-dire de l'octroi de crédit. Par très grosses crises, j'entends celles qui ont eu un impact systémique, mettant à mal l'économie dans son ensemble. A commencer par la crise japonaise, la "mère des crises bancaires modernes" qui a conduit à l'élaboration des premières normes de régulation internationales (les célèbres règles de Bâle). Un excès de liquidités amène à prêter n'importe quoi à n'importe qui et un jour, le système s'effondre. Rebelotte avec les subprimes en 2008: quoi de plus "classique" que des prêts hypothécaires? En 2011, les banques qui ont souffert sont celles qui avaient trop prêté à certains états fragiles, poussées en cela, ceci dit, par un cadre réglementaire (défini par les états) qui les y incitait.
- Si l'idée de séparer "banque d'affaires" et "banque de détail" a du sens, ce n'est pas pour autant la solution miracle que certains semblent imaginer. Ca permet surtout d'éviter les problèmes ponctuels (genre la Société Générale qui aurait pu faire faillite si Kerviel avait déconné encore un peu plus). Des problèmes potentiellement très néfastes, mais pas pour autant de l'ampleur des problèmes "systémiques" comme les bulles de financement.
- iader a raison de pointer que vous comparez des pommes et des poires en mettant face à face des chiffres de DB et de Lehman Brothers. Je ne sais pas d'où vous tirez ces chiffres, mais ce sont à l'évidence d'un côté (LB) des encours "financés" (et probablement ne parle-t-on ici que des expositions à certains subprimes) et de l'autre (DB) des produits dérivés (encours dont LB avait sans doute de sacrés paquets aussi). Dans le premier cas (financé), un montant de 100 signifie que vous avez prêté 100 et que si votre débiteur fait faillite, vous pouvez potentiellement tout perdre. Dans le second cas (dérivé), il s'agit probablement pour l'essentiel de swaps de taux (et dans une moindre mesure des produits plus complexes). Vous ne prêtez pas 100, vous vous mettez d'accord avec votre contrepartie pour échanger un différentiel de taux d'intérêts sur un montant de 100. Un des deux payera systématiquement, sur la durée du swap, un taux d'intérêt fixe, l'autre un taux d'intérêt aux conditions du marché. On parle donc de montants en risque nettement plus petits: un écart entre deux taux d'intérêt. D'autant que la pratique de la collatéralisation s'est généralisée. Concrètement, qu'est-ce que cela signifie? Quand vous concluez un swap avec une autre banque, chacune est en risque: celle qui paye le taux fixe et reçoit les taux variables risque que les taux baissent: elle payera plus qu'elle ne reçoit. Et l'autre, l'inverse. Un second risque se crée pour celle des deux banques qui, après quelque temps, se retrouve gagnante dans le deal: implicitement, l'autre banque lui doit de l'argent puisqu'elle a un engagement à faire des payements supérieurs à ce qu'elle recevra. C'est donc ennuyeux si cette banque fait faillite: le bénéfice attendu sera perdu. D'où la technique de collatéralisation. Chaque jour, les deux banques calculent la valeur du deal en fonction des conditions de marché du jour et celle qui est perdante donne un montant équivalent de cash en garantie à celle qui est gagnante. Comme cela, cette dernière ne perdra rien en cas de faillite.
Dernière réflexion sur les montants d'encours en produits dérivés: ces chiffres, en soi, ne veulent strictement rien dire. L'essentiel de ces dérivés servent à couvrir les risques de la banque, qui ne sont pas toujours simples (selon les législations nationales, le risque que les emprunteurs de crédits hypothécaires décident massivement de profiter d'une baisse des taux pour rembourser leurs emprunts - en allant réemprunter ailleurs à un meilleur taux - ce risque donc, peut être considérable). Les banques ajustent donc leurs opérations de couverture régulièrement, quotidiennement dans certains cas. Et les contrats s'accumulent, un jour dans un sens, puis le lendemain dans l'autre. Mais en soi, le montant total ne veut rien dire, ce sont pour l'essentiel des deals dont les effets globaux s'annulent. Ce qu'il faut regarder, c'est l'exposition nette aux risques qui en résulte.
Est-ce que cela signifie que les montants gigantesques que vous avancez sont anodins? Loin de là. Parce que tous les calculs sont imparfaits, toutes les opérations de garanties aussi. Ces imperfections sont potentiellement des miettes, mais sur des montants gigantesques, même les miettes sont énormes. Il me semble toutefois important de pouvoir mettre les choses en perspective avant de s'affoler.
- L'intervention de Sébastien résume bien la confusion qui règne autour du slogan "sauver les banques". D'abord, qui sont "les banques"? Pour moi, a priori, ce sont d'abord les propriétaires des banques. Que Sébastien se rassure donc: les propriétaires de Dexia ont TOUT perdu. Avant la crise de 2008, ils avaient près de 30 milliards d'euros en poche; maintenant: plus rien. Je ne doute pas qu'ils auraient préféré être dans la peau des actionnaires de DB qui pourraient ne s'en tirer qu'avec une lourde amende. De manière générale, d'ailleurs, pour les cas que je connais en France et en Belgique, les états ont eu bien raison de "sauver leurs banques". S'ils ne l'avaient pas fait, le risque très réel était le suivant: la banque en faillite a des actifs qui ne permettent plus de rembourser les dettes. Même en liquidant tout (et donc en premier lieu en ne laissant plus un rond aux propriétaires) il n'y aurait pas eu assez pour rembourser les petits épargnants. Et ce sont les états qui auraient du y aller de leur poche pour honorer leur propre garantie (jusqu'à 100 000 euros). Tandis qu'en intervenant, ils ont fait quoi? Ils sont entrés dans l'actionnariat d'entreprises en difficultés; ils sont donc entrés à bas prix (obligeant les propriétaires à leur faire de la place). Une fois la crise passée, les banques ont redressé la tête, les cours sont remontés et les états ont réalisé de jolies plus valeurs. Certes, ce ne fut pas comme cela systématiquement, mais c'est en tout cas la situation que j'ai vue en France et en Belgique. En fait, ce qui a été très coûteux aux états, c'est quand ils n'ont pas réussi à sauver complètement la banque, comme cela fut le cas pour Dexia. On se traîne alors des dizaines d'années avec un portefeuille toxique qu'il faut continuer à gérer et à financer.
Dernière précision, car le vocabulaire médiatique est souvent trompeur. On a beaucoup répété que les états ont aussi "donné leur garantie" sur les dettes des banques en difficulté afin de rassurer les marchés, pour qu'ils continuent à leur prêter les fonds nécessaires à leurs activités. Il est bien évident que les états n'ont pas "donné" ces garanties, mais qu'ils les ont "vendues". Certes, à des taux moindres que le marché (qui ne voulait plus le faire de toute manière), mais confortables tout de même. Il serait intéressant aussi, un jour, que quelqu'un fasse l'étude de la manière dont les états se sont aussi remboursés en créant une multitude de taxes bancaires sur tout et n'importe quoi (manière de lever des impôts ne visant que les banques). En Belgique, si on inclut les taxes de toutes sortes, la plupart récentes, je crois qu'on arrive sur les banques à un taux d'imposition du revenu de près de 70%. Et qu'on me comprenne bien: je ne cherche pas ici à faire pleurer sur le sort des banques: ce sont les politiques que je cherche à défendre; non, ils n'ont pas juste été des benêts serviles de la grande finance.
- Un dernier mot sur ce sujet, parce qu'il y a un "exemple" qui m'agace entre tous: l'Islande. Ah! les formidables islandais qui ont eu le courage eux de "ne pas sauver leurs banques". Je n'ai pas étudié le sujet de près mais, pour ce que j'en vois, l'attitude des islandais n'a rien eu de très respectable ou courageuse. Ils ont laissé leurs banques se développer hors de proportion avec leur petite population de 330 000 habitants. Ces banques se sont donc développées à l'étranger, i.e. en collectant l'épargne des résidents d'autres pays. Quand la crise est venue, les islandais étaient de toute manière incapables de sauver les monstres qu'ils avaient laissés grandir. Ils se sont donc contentés de rembourser leurs propres épargnants et ils ont dit m... à tous les autres, ceux des pays étrangers qui leurs avaient fait confiance. Je ne vois rien de très remarquable dans ce comportement. (La question des poursuites judiciaires contre les dirigeants étant un autre sujet - là je leur donne raison.)
- Voilà. En résumé, pourquoi est-ce que je raconte tout ça? Pour la même raison que la journaliste judiciaire qui signe le blog "Plume d'Aliocha" et qui a, entre autres choses, suivi de près le procès Kerviel. Elle est depuis effarée du décalage entre ce que le procès a révélé et le traitement médiatique qui en est fait (au point de faire perdre la boule aux prudhommes, soit dit en passant). Pour ma part, je ne prétends pas que toutes mes analyses soient correctes. J'explique ce que je vois de l'intérieur. Mais je partage souvent cet effarement qui dépasse le seul cas "Kerviel". Je vais donc me permettre de la citer, elle explique très bien le sens de sa démarche (j'insiste au passage sur sa toute dernière phrase):
"Mon but n’est pas de convaincre les défenseurs aveugles du trader, moins encore de défendre la banque (j’ai autre chose à faire dans la vie), mais d’éclairer tous ceux qui s’interrogent et en arrivent à douter de la justice, des politiques et des banques à cause de cette affaire. Non, tout n’est pas pourri. La justice n’est ni folle ni à la botte, elle avait des raisons de juger comme elle l’a fait. Quant à la banque, elle est au minimum coupable d’une effroyable négligence, mais là encore, il faut se garder de sombrer trop vite dans le complotisme absurde. Ce qui me révolte dans le traitement médiatique approximatif de ce dossier, c’est qu’il contribue à alimenter un dégoût généralisé pour les institutions, sur la base d’éléments parfaitement erronés et de simplifications hâtives. Ceux qui font cela, politiques et médias, portent une très lourde responsabilité dans le climat actuel de défiance. Non seulement ils agitent de faux ennemis, mais ils empêchent de lutter contre les vrais problèmes."
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Écrit par : Luc / | 03/10/2016

> Un petit complément à mon envoi précédent, pour illustrer ce dont je parlais sur la prééminence du risque de crédit dans les activités bancaires. Le calcul des fonds propres réglementaires est un exercice très encadré. Les fonds propres sont, si on veut, une réserve pour être capable d'encaisser des pertes extrêmes tout en restant en mesure de rembourser ses dettes. Chez BNP, la répartition des fonds propres (donc des risques de pertes extrêmes) est la suivante: Crédit 87%, Marchés 3%, Risques opérationnels 10%
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Écrit par : Luc / | 03/10/2016

LEUR MASQUE

> Merci pour la référence thatchérienne. Je trouve le passage intéressant en lui-même :
(Elle conteste l'idée que) "If children have a problem, it is society that is at fault. There is no such thing as society.[fo 30] There is living tapestry of men and women and people and the beauty of that tapestry and the quality of our lives will depend upon how much each of us is prepared to take responsibility for ourselves and each of us prepared to turn round and help by our own efforts those who are unfortunate. And the worst things we have in life, in my view, are where children who are a great privilege and a trust—they are the fundamental great trust, but they do not ask to come into the world, we bring them into the world, they are a miracle, there is nothing like the miracle of life—we have these little innocents and the worst crime in life is when those children, who would naturally have the right to look to their parents for help, for comfort, not only just for the food and shelter but for the time, for the understanding, turn round and not only is that help not forthcoming, but they get either neglect or worse than that, cruelty.
How do you set about teaching a child religion at school, God is like a father, and she thinks “like someone who has been cruel to them?”... "

Aide-toi, le ciel d'aidera... Individualisme, libéralisme, curieuse image de la tapisserie vivante (où les fils individuels sont tramés, liés, entrecroisés, donc font alliance, 'societas'...), le tout dans une réflexion sur le sort des enfants maltraités, qui ne peuvent donc pas comprendre que Dieu est notre Père.
Au fond, la famille dissoute par le libéralisme et le capitalisme forcené irait mieux si chacun n'attendait rien d'autre que ce qu'il peut apporter lui-même. Ne rien attendre de la collectivité, des corps intermédiaires (qui n'existent pas selon elle ?), de l'État...
Soyons toujours plus déracinés, "self-made".
Fuite en avant typique.
éjà Kennedy, avec son "ne vous demandez pas ce que votre pays peut faire pour vous, mais ce que vous pouvez faire pour votre pays"...
Masque 'citoyen' de tous les renoncements devant les puissances d'argent.
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Écrit par : Alex / | 03/10/2016

ANALYSE

> Analyse des comptes de la Deutsche Bank, selon ses propres résultats publiés cet été :
http://chevallier.biz/2016/07/deutsche-bank-2°-trimestre-2016/
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Écrit par : Théophile / | 03/10/2016

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