"Comme des agneaux au milieu des loups..."

La phrase de Jésus (Luc 10.3, au début de l'évangile de ce dimanche) veut dire bien autre chose que sa lecture intégriste :

 

 

De l'évangile de ce dimanche :

<< Après cela, parmi les disciples le Seigneur en désigna encore soixante-douze, et il les envoya deux par deux, en avant de lui, en toute ville et localité où lui-même allait se rendre. Il leur dit : « La moisson est abondante, mais les ouvriers sont peu nombreux. Priez donc le maître de la moisson d’envoyer des ouvriers pour sa moisson. Allez ! Voici que je vous envoie comme des agneaux au milieu des loups. Ne portez ni bourse, ni sac, ni sandales, et ne saluez personne en chemin. Mais dans toute maison où vous entrerez, dites d’abord : “Paix à cette maison.” S’il y a là un ami de la paix, votre paix ira reposer sur lui ; sinon, elle reviendra sur vous... Dans toute ville où vous entrerez et où vous ne serez pas accueillis, allez sur les places et dites : “Même la poussière de votre ville, collée à nos pieds, nous l’enlevons pour vous la laisser. Toutefois, sachez-le : le règne de Dieu s’est approché.” >>

 

 

"Allez ! Voici que je vous envoie comme des agneaux au milieu des loups..." La phrase de Jésus est interprétée faussement par ceux qui se voient comme un clan, opposé aux "loups" que seraient "les-gens-pas-dans-nos-idées" (c'est-à-dire 99 % des contemporains). La logique de cette interprétation fausse est un "catholicisme" replié sur lui-même, donc déchristianisé : c'est ce qu'on appelle l'intégrisme, aux antipodes du témoignage évangélique et de la mission que Jésus confie aux disciples en ce chapitre 10 de Luc  - ainsi qu'à la fin de Matthieu et Marc. [*]

 

Commentaire de Hans Urs von Balthasar :

"Jésus désarme complètement ceux - les 'ouvriers peu nombreux' - qui doivent annoncer son message. Ils doivent d'abord annoncer la paix, peu importe qu'elle soit acceptée ou non ; si elle n'est pas acceptée, on ne doit pas l'imposer par quelque violence, on doit se rendre ailleurs... Du succès ou de l'échec, ils ne doivent pas se réjouir ou se troubler. Le succès n'est pas inclus dans la mission, et le vrai succès se trouve uniquement dans le Seigneur des missions, qui par la croix a jeté Satan hors du ciel... Ce n'est qu'à partir de la croix du Christ qu'ils peuvent promettre 'paix et miséricorde'... Car la victoire sur le monde se trouve uniquement dans la croix de Jésus et ses effets dans l'Eglise et dans le monde."

 

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[*]  Ce clan n'est aujourd'hui qu'une petite fraction de la population catholique française : mais il s'est doté d'une certaine visibilité et se mutine contre le Magistère vivant (les uns en sourdine, les autres de plus en plus ouvertement). Cf. le dernier numéro d'une revue ratiocinante dont le scribe en chef déclare la guerre à François... Ce qui est reproché au pape, c'est de préférer l'Evangile au culte de la Norme. On songe à Marc 7 : << Alors les pharisiens et les scribes demandèrent à Jésus : "Pourquoi tes disciples ne suivent-ils pas la tradition des anciens ? Ils prennent leur repas avec des mains impures..." Jésus leur répondit : "Isaïe a bien prophétisé à votre sujet, hypocrites, ainsi qu'il est écrit :  ' Ce peuple m'honore des lèvres mais son  coeur est loin de moi. C'est en vain qu'ils me rendent un culte ; les doctrines qu'ils enseignent ne sont que des préceptes humains'... Vous aussi, vous laissez de côté les commandements de Dieu pour vous attacher aux préceptes des hommes !" Jésus leur disait encore : "Vous rejetez bel et bien le commandement de Dieu pour établir votre propre tradition." >>