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16/03/2015

Jésus et le mouvement pharisien

 jesuspharisiens.jpg

Éléments historiques... et parallèles aujourd'hui :


 

 

 

Chez les chrétiens, le mouvement pharisien n'était connu que par les invectives hostiles de Jean le Baptiste (« race de vipères ») et les reproches de Jésus (« malheur à vous, scribes et pharisiens... »). Mais à l'époque de Jésus, les pharisiens sont depuis longtemps l'un des courants constitutifs du judaïsme. Nés de l'effort de « purification du pays » après le retour de la captivité à Babylone, ils ont étendu leur emprise sur la société juive en imposant un légalisme discriminatoire.

Organisés en « compagnies » (havourot), les « compagnons » (haverim)  pharisiens sont une ligue militante. Elle lie le patriotisme à l'observance d'une archi-minutieuse pureté rituelle, non seulement au Temple mais dans la vie de tous les jours. C'est l'ancienne idée judaïque du sacré : une sorte de « fluide » émanant du Temple et qui irait vers certains hommes, les Purs, et non vers d'autres, les Impurs. Les pharisiens sont un mouvement-caste, aimé des catégories sociales qu'il encadre : commerçants, artisans et paysans. Ce sont des gens graves, sobres, orgueilleux : le « vrai peuple » (celui des « purs »). A l'intérieur de leurs compagnies règne la solidarité propre à tous les militantismes.

En revanche, les compagnons pharisiens rejettent la foule des pauvres comme « impurs » : ignorants donc pécheurs, parce qu'inaptes à connaître les prescriptions du mouvement.

Populaire mais discriminatoire, ce vertuisme national-religieux aboutit à créer un apartheid dans la société juive en exaspérant ses divisions sociales. Selon l'historien israélien des religions Schalom Ben-Chorin (Mon frère Jésus, Seuil 1983), des pharisiens vont jusqu'à appliquer la répression biblique de la zoophilie à ceux des leurs qui épouseraient une membre de l' «'am ha-arèts », la classe inférieure : ignorante, donc hors-religion, donc infréquentable.

D'où la colère latente de ces pauvres contre les pharisiens. Et l'indignation de pharisiens voyant Jésus accepter des infréquentables parmi ses disciples...

Le mouvement pharisien du Ier siècle se veut le mouvement du vrai peuple. Il est donc voué, par rivalité fonctionnelle, à combattre les autres mouvements, qui le lui rendent bien. L'universitaire israélien David Flüsser (Jésus, Seuil 1970) constate : «Les esséniens appellent les pharisiens d'un terme qui signifie "ceux qui se couvrent de crépi" ; Jésus dira : "sépulcres blanchis". Les écrits de Qumrân traitent les pharisiens d'interprètes fallacieux qui "privent de la boisson de la vraie science ceux qui ont soif, et leur donnent du vinaigre pour apaiser leur soif..." » 

Jésus attaque les vertueux pharisiens plus souvent que les corrompus du Temple. Ces attaques, relatées dans les évangiles, ne sont certainement pas apocryphes : le Discours sur la montagne, indiscuté des exégètes, est accompagné d'une polémique contre les pharisiens.

Ceux-ci ont donc de quoi Lui en vouloir. « On n'a pas tort de considérer que les adversaires de Jésus étaient dans l'ensemble des pharisiens », constate Flüsser. Mais cela ne signifie :

- ni que tous les pharisiens aient pris parti contre Jésus (nous avons vu hier que Nicodème et Joseph sympathisent avec lui),

- ni que les pharisiens adversaires de Jésus le soient devenus pour des raisons inavouables. Ils semblent avoir agi contre lui en toute conscience. Après une série d'enquêtes et de discussions avec Jésus lui-même (relatées par Jean), ils ont conclu en gros : « c'est un irresponsable, ses déclarations sont incontrôlées, il compromet l'essentiel, nous devons lui résister par fidélité à Dieu. » Comme toutes les raisons invoquant la tradition et la fidélité, les raisons pharisiennes de vouloir éliminer Jésus sont donc « bonnes ». Ce sont des raisons d'hommes de bien : « notre vie droite nous donne un jugement droit. » Et ce sont des raisons de Solides Gardiens de la Doctrine : « l'ouverture est le prétexte du laxisme. »

Les pharisiens récusent les manifestations surnaturelles. (« La Torah n'est pas dans le ciel », édicte un apologue du Talmud, ce qui signifie  : même si une voix céleste se manifestait, nous n'aurions pas à suivre ses indications). Ils récusent toute action charismatique ou miraculeuse. C'est donc la résurrection de Lazare qui achèvera de les exaspérer, au terme du long procès-enquête qu'ils ont mené contre Jésus et que raconte l'évangile de Jean... L'événement Lazare a ébranlé l'ascendant des pharisiens sur la Judée. Il leur faut éradiquer l'hérésie en supprimant l'hérétique.

Quelle est cette hérésie ?

Les pharisiens admettent les changements en théologie (ils croient en la résurrection des morts, ce qui est une nouveauté) : mais ils ne les admettent que sous le couvert d'une tradition dont ils revendiquent le monopole herméneutique, et selon une procédure de disputation codifiée très minutieusement.

Jésus, lui, apporte un éclairage nouveau. Il enseigne par autorité personnelle. Or il n'a pas « étudié » : il n'est pas équipé du savoir livresque, sans lequel on n'a pas le droit d'enseigner... Les pharisiens le jugent déjà outrecuidant d'occuper (sans titre) le terrain de la discussion rabbinique ; ils le déclarent criminel lorsqu'il quitte ce terrain pour faire intervenir directement la puissance de son Père – alors que les vrais docteurs de la Loi respectent le principe selon lequel la Torah n'est pas « dans le ciel », mais dans le débat technique entre spécialistes.

Le lieu d'où parle Jésus n'est pas celui des pharisiens. Sur certains points importants, comme la résurrection des morts, il semble en accord avec eux ; mais c'est justement en raison de cet accord apparent que les pharisiens rejettent Jésus : la façon dont il argumente leur paraît sacrilège. Il détourne de bonnes thèses au profit de cette idée intolérable : « le Père et moi sommes un ». Ses actes et paroles annoncent « une nouvelle Création qui, contrairement à la première, n'est plus une séparation-hiérarchisation des éléments [1]» : c'est donc un blasphème absolu, pour des pharisiens rivés au principe de séparation.

Si la « réponse Jésus » est inadmissible aux yeux des pharisiens, c'est en raison de ce qu'Il manifeste à son propre sujet : 1. il parle et agit au nom du Ciel, attitude contraire au principe de base du débat rabbinique (« la Torah n'est pas dans le Ciel ») ; 2. il opère des miracles pour accompagner son inacceptable message, et cela par sa propre autorité ; 3. certains de ses miracles semblent des preuves anticipatrices de la résurrection promise à chaque homme, compromettant ainsi dans la « magie » [2] ce qui aurait dû rester un débat théorique entre scribes : d'autant qu'il se pose lui-même comme « la solution au problème de la véracité de la vie éternelle » [3]  ; 4. Jésus rend inacceptable tout ce qu'il fait, dans la mesure où il dit être un avec Dieu : en remettant les péchés il revendique (horreur absolue) un rang qui l'égale à Dieu ; 5. le scandaleux discours de Capharnaüm sur le Pain de vie (et la résurrection) achève de donner gain de cause aux sadducéens contre les pharisiens : en croyant eux aussi à la résurrection des morts, ces derniers ont désormais l'air de pactiser avec un Galiléen hérétique qui propose l'anthropophagie.

Pour toutes ces raisons, les pharisiens, sincèrement scandalisés (et furieux d'être mis en porte-à-faux face aux sadducéens), ne peuvent qu'en vouloir mortellement à Jésus, concurrent démagogue qui gâche leur noble combat intellectuel. Ils préféreront s'allier momentanément à l'ennemi sadducéen si c'est le seul moyen d'être débarrassés du provocateur, qui s'appuie sur la foule des simples gens – impies puisque ignorants...

« Tu n'es que péché depuis ta naissance », disent en effet les pharisiens à l'aveugle guéri (Jean 9,34). Puisque la sainteté de Dieu ne peut s'approcher des pécheurs, Jésus, qui côtoie les pécheurs, n'est pas « de Dieu » : il est le président d'une assemblée de « morts » légaux (les Impurs), et il a la prétention atroce de les faire entrer dans la société des vivants légaux (les Purs), comme le montre allégoriquement la résurrection de Lazare : retour d'un mort biologique parmi les vivants biologiques, alors qu'approcher un mort est la souillure absolue pour les juifs ! Ce scandale va accélérer le complot du Temple contre Jésus.

Et le complot était inéluctable. En se présentant comme seul médiateur entre les hommes et le divin, Jésus supprime le système du Temple : il annule l'ancienne idée judaïque du sacré comme « fluide » qui irait vers certains hommes, non vers d'autres. Jésus libère de l'obsession de la pureté alimentaire, structure fondamentale du culte juif. Il libère les individus du tri sociologique qui les discriminait : « pécheurs » d'un côté, « justes » de l'autre. Pour Jésus « Dieu seul est bon » (Luc 18:19) ; la communauté nouvelle (kahal en hébreu, ecclesia en grec) sera ouverte à tous les humains, qui sont tous pécheurs et ne deviennent justes que par grâce divine imméritée. Aux yeux des pharisiens c'est la dissolution du judaïsme, le retour au chaos, la dé-Création ! Raison pour laquelle un héritier brillant et sincère des pharisiens, le rabbin Neusner, démontrait en 2008 [4] que Jésus était tout à fait juif mais « destructeur de la communauté ».

En ce sens, et d'une certaine manière, le conflit des Judéens avec Jésus fait penser à un phénomène d'aujourd'hui : l'effervescence de « catholiques conservateurs » contre le pape François. Les pharisiens raisonneurs et les sadducéens oligarques traitaient Jésus de démagogue. François aussi est traité de « démagogue » par une caste de gardiens-des-valeurs-de-toujours...

Raison de plus, pour nous croyants, d'aimer et d'aider ce pape. Comme Jésus, François ne dit pas « abandonnez les préceptes de la Loi » : il dit « pratiquez-les autrement ».

Comme les pharisiens d'il y a deux mille ans, nos « conservateurs » sont équipés de kits spirituels, systèmes d'évaluation avec de  minutieuses balances pour peser les « mérites » (accomplissement des préceptes) et les « dettes » (non-accomplissement)... « L'exécution sèche d'un précepte était censée suffire à créditer la vie morale du croyant et accroître son capital de justice », constatent les historiens du pharisianisme antique. Dès les premières heures de son pontificat, François a appelé le peuple catholique mondial à  fuir cette erreur et se ressourcer à l'Evangile.

 

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[1] Etienne Nodet : Le Fils de Dieu – Procès de Jésus et évangiles (Cerf 2002).

[2] Ces accusations de magie resteront dans la mémoire rabbinique comme le motif de l'exécution de Jésus : exécution décidée par les autorités judéennes de Jérusalem, selon une baraïta (tradition complémentaire) du Talmud de Babylone, traité Sanhédrin 43a.

[3] Les pharisiens, qui croyaient en la résurrection, étaient irritables à ce sujet parce que cette croyance récente était ridiculisée par les sadducéens. Les pharisiens accusaient donc Jésus de donner un argument-massue aux sadducéens en défendant la résurrection d'une façon sacrilège ! Aiors que les scribes pharisiens s'acharnaient à essayer de composer (à partir d'Ecritures indéfiniment discutées) une chaîne d'arguments « sérieux et recevables » sur la résurrection des morts, Jésus affirmait que la réponse était tout simplement sa propre personne ! C'était consternant. Ses disciples eux-mêmes n'y comprenaient rien. Ce n'est qu'après la résurrection de Jésus qu'ils  allaient finir par admettre qu'Il était, bel et bien, la Preuve vivante... (Lire Jacqueline Genot-Bismuth : Un homme nommé Salut, OEIL 1986).

[4] Jacob Neusner : Un rabbin parle avec Jésus (Cerf 2008).

 

 

 

Commentaires

VRAI

> C'est vrai qu'il y a une comparaison entre les pharisiens de l'époque du Christ et certains comportements aujourd'hui.
L'Evangile et les Actes des apôtres sont une leçon pour tous les âges.
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Écrit par : Marie-Pierre / | 16/03/2015

SACERDOTALISATION

> On pourrait définir les Pharisiens comme un mouvement de « sacerdotalisation » du peuple Juif pris dans son ensemble. Tout Juif, parce que Juif, devait mettre en pratique dans la vie courante les règles qui s’appliquaient jusque-là au seul culte du Temple et à ses servants, les Lévites. Les Pharisiens, en héritiers conséquents des prophètes, ont fait tomber la barrière séparant les affaires humaines courantes du culte de Dieu : tout Juif est un être consacré. Et saint/sacré en hébreu, qdsh, signifiait « consacré » à YHWH, purifié en vue du service de YHWH. Mais pour les Pharisiens la vie entière du Juif est un acte de consécration/purification continuelle, dans et hors de l’enceinte du Temple.
Pour les Chrétiens aussi, paradoxalement. Ne sommes nous pas appelés par le Christ à être saints comme Dieu est saint (relation de co-appartenance renversante pour un païen) ? l’Eglise est un peuple sacerdotal.
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Écrit par : Blaise / | 16/03/2015

LE PAPE FRANÇOIS

> Merci infiniment à Patrice de Plunkett pour son blog que je découvre et qui m'enchante.
Il est temps que cette défense et illustration des paroles et actes du pape François soit développée et soutenue, en un moment si délicat de la vie de l'Eglise et du monde.
Je l'encourage et m'efforcerai de le faire connaître.
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Écrit par : Hervé Gentin / | 16/03/2015

LA PENSÉE DU TEMPLE

> Non, « l’idée judaïque du sacré » n’était pas celle d’un « fluide » produit par les rituels et sacrifices du Temple, et possédé par quelques personnes privilégiées. Une telle conception énergétique remonte seulement au début du XXe siècle ; on la doit à l’Ecole d’Anthropologie Française, à Durkheim en particulier, ainsi qu’à Rudolf Otto et au très contestable Mircea Eliade. « Sacré » pour les anciens hébreux et les autres peuples avoisinants signifiait une relation d’appartenance, littéralement « consacrer, dédier » une personne ou une chose à la divinité. C’était le cas par exemple des prostituées sacrées, les qadishtu(m), « consacrées » au service de la divinité. Ou encore, à l’extrême opposé, Isaïe dira qedôsh yisra’el « le saint d’Israël » pour souligner la relation exclusive et sans repentance de YHwH à Israël.

Blaise


[ PP à Blaise :
Durkheim et Eliade ? Soyons sérieux. Voyez plutôt Francis Schmidt (EPHE), spécialiste hors pair de "La pensée du Temple, de Jérusalem à Qoumrân" (Seuil 1994).
On ne peut pas évacuer la question très spéciale du pur et de l'impur et des "cercles concentriques de sainteté" dans le système du Second Temple. ]

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Écrit par : Blaise / | 16/03/2015

DÉBAT

> Toute la partie historique est très intéressante.
Sur le parallèle contemporain, même si il n'est pas sans fondement, je me demande s'il ne faudrait pas tout de même faire attention à ne pas tomber dans une sorte de "super-pharisaïsme". C'est à dire le super-pharisien debout sur une chaise au premier rang du Temple priant "Je te remercie Seigneur de ne pas être un pharisien comme ce cardinal Burke. Moi au moins je ne suis pas orgueilleux et je suis tolérant et ouvert et flexible".
C'est compliqué et j'ai bien conscience qu'en écrivant ça je suis moi-même une sorte de super-super-pharisien ;) ("Je te remercie Seigneur de ne pas être un super-pharisen comme PP etc").

Thibaud


[ PP à Thibaud
- Parce que prendre la défense du pape attaqué par une campagne d'opinion, c'est se mettre "debout sur une chaise au premier rang du Temple" ? Permettez-moi de vous trouver expéditif dans vos jugements ad hominem ! J'ai trouvé les propos du cardinal Burke indignes d'un cardinal, et mon indignation n'a rien à voir avec ce dont vous m'accusez.
- La première chose à faire, c'est de ne plus défendre les incendiaires en tirant sur les pompiers. Autrement dit : de ne plus crier au scandale contre celui qui se permet de protester face aux campagnes des gardiens autoproclamés de l'orthodoxie. Surtout quand ceux-ci se permettent de jeter le doute sur... le pape.
- Leur façon oblique d'attaquer puis de se poser en victimes dès qu'on leur répond, est peu honorable. Ces gardiens autoproclamés ont poussé des clameurs d'indignation contre l'existence même d'un débat au synode ! Qu'ils ne viennent pas nous dire maintenant qu'ils sont partisans des débats... ]

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Écrit par : Thibaud / | 16/03/2015

SACRÉ

> Nous ne parlons pas de la même chose. Ce que je critiquais, c'était une conception énergétique et essentialiste du sacré, qui transparaissait dans votre post. Cela dit, je n'évacue pas la question du pur et de l’impur en lien avec le Temple et ses rituels. Cela n'aurait aucun sens.

Blaise


[ PP à Blaise - Ne me soupçonnez pas de "conception énergétique et essentialiste du sacré", svp. D'abord, ce serait faux ; ensuite, je ne suis ici que l'écho de spécialistes du judaïsme antique ! Schmidt souligne un détail révélateur : la manipulation d'objets sacrés au Temple exigeait ensuite une "décontamination" des mains du célébrant. La minutie démultipliée des prescriptions matérielles en matière de pureté, exportées de l'intérieur vers l'extérieur du Temple, et indexées à l'origine sur la sacralité du Temple, est un fait objectif. ]

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Écrit par : Blaise / | 16/03/2015

ATTAQUES

> Derrière ces attaques contre le pape, je me dis que c'est la dimension surnaturelle de l’Église que nous devons redécouvrir et honorer dans la foi.
Sur cet attachement à la tradition formelle, en parcourant les commentaires sur Orange Actualités lors de la renonciation de Benoît XVI, j'ai été effaré de lire en substance que "le pape ne s'appartient pas et est là pour respecter le protocole" ! Ainsi Jésus serait mort pour qu'un type loge dans une villa de luxe, pète dans la soie et s'habille de façon baroque pour faire des défilés protocolaires ? 'Charlie Hebdo' n'aurait pas dit mieux !
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Écrit par : DV / | 16/03/2015

ESPRIT SAINT

> J'ai dû me montrer maladroit dans mon expression, je vous prie de m'excuser, puisque ce n'était pas ce que je voulais exprimer. Je ne voulais pas vous traiter de "super-pharisien", simplement faire remarquer un risque spirituel auquel tout chrétien est confronté.
Et ma remarque maladroite est indépendante de tout le débat sur le synode. Qui, soit dit en passant, s'est quand même terminé par une victoire de la ligne majoritaire défendue par Burke et les évêques africains, contre la ligne minoritaire des évêques allemands.

Thibaud


[ PP à Thibaud :
- Merci de votre réponse.
- Mais au synode comme au concile (surtout lorsque le synode n'est pas accompli et qu'aucun texte final n'a encore été voté), je ne sais pas ce qu'est une "victoire de la ligne majoritaire" ! J'attends la synthèse finale dans la lumière de l'Esprit Saint...
La grille d'interprétation de ce type d'événements est dans le Catéchisme de l'Eglise catholique : non dans les articles politisés des "vaticanistes", qui ne sont que des réglements de comptes entre salons romains... ]

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Écrit par : Thibaud / | 16/03/2015

DISCUSSION

> Je rejoins (en partie) Thibaud sur les difficultés que soulèvent les réflexions sur les pharisiens.
Tout d'abord, rien de nouveau : depuis ma tendre enfance j'ai toujours entendu les procès contre les pharisiens en paroisse. Je sais que les sourds n'entendent pas, mais ce n'est pas à défaut de le leur crier bien fort. L'Église là-dessus aussi fait son boulot, si je puis être aussi terre à terre. alors, pourquoi parfois ça ne marche pas ?
Je crois que les pharisiens ne seraient pas aussi présents dans la Bible s'ils étaient là pour seulement nous parler des autres : le Juif décadent qui a renié l'Alliance avec son Dieu, le sale catho libcon qui ne pense plus qu'au mariage gay, et s'effarouche du pape François, etc. bien des tentations et péchés ne font dans l'Évangile qu'une apparition fugace. si l'endurcissement des pharisiens est central, c'est qu'il est une maladie qui nous guette tous.
Vous nous remettez avec brio dans le cadre de l'époque et dites : c'était tout à fait logique qu'ils condamnent Jésus.
En effet : alors disons nous que nous ne savons pas si nous n'aurions pas été capables, nous-mêmes, d'être profondément méfiants ou troublés par les méthodes, les propos, et les miracles de Jésus à son époque. acte d'humilité nécessaire. Cela me fait un peu penser à l'aspect toujours gênant de ceux qui prétendent qu'ils auraient résisté sous l'Occupation... Le péché des pharisiens n'est pas si difficile à commettre. il est extrêmement humain, et même s'il est politiquement contextualisé, il gravite aussi en dehors de son contexte. pensons aux saints qui se disaient les plus grands pécheurs du monde ! oui, on aurait tous été capables ; la grâce du Christ nous en garde peut-être.
Si donc il est si difficile pour l'Église de tenir un propos efficace sur les Pharisiens (qu'on tourne souvent un peu en ridicule, au style "ah les snobs, y zavaient rien compris) c'est peut-être parce qu'il est dur de se rappeler qu'on peut être les méchants de l'histoire. Jésus n'est pas mort sur la Croix à cause des péchés des Pharisiens, mais à cause de tous nos péchés. Autrement, il n'aurait pu sauver le monde. Si le sacrifice divin n'est pas que pour les Juifs, c'est qu'il n'est pas suscité que par la péché d'une fraction des juifs. ce serait de la pure recomposition (ou de l'historicisme) que d'interpréter la mort de Jésus sous des aspects purement politiques. La Parole de Dieu ayant toujours un aspect universel, méditons son actualité, mais pas seulement dans une lecture également politico-pastorale du présent (qui a bien sûr sa place). cette rage souvent décrite dans l'Évangile à propos des réactions des pharisiens touche tout le monde. Il n'y a qu'à voir comment ont été traités de nombreux mystiques authentiques dans la vie de l'Église, et jusqu'à récemment, pour constater que quand la présence surnaturelle de Dieu se réinvite dans nos vies, il n'y a pas que les libcons qui peuvent avoir l'écume aux lèvres.
En définitive, votre très intéressante narration montre bien la liaison entre les enjeux socio-politiques et les enjeux spirituels dans la coupure entre les pharisiens et Jésus-Christ. Alors ne prenons pas qu'un morceau du message ! notre tendance pharisienne ne se vérifie pas que dans notre rapport aux autres, mais aussi dans notre rapport à Dieu et à la spiritualité chrétienne.
bien à vous

perlapin


[ PP à P.
- Evidemment d'accord sur le fond.
- Mais on ne peut pas laisser sans leur répondre les journaux de la bonne bourgeoisie (tirant à des centaines de milliers d'exemplaires) accréditer l'idée d'un "malaise des catholiques conservateurs face au pape François"... Etes-vous sûr qu'en faisant le chien muet j'aurais fait mon devoir ? Je suis sûr du contraire.
- Quant au fait que les pharisiens ont cru bien agir (emportés par leur bonne conscience de milieu comme nous pourrions tous l'être), et que la réalité de la société judéenne du Ier siècle était contradictoire, il me semble que c'est ce que je dis dans ma note !
- Ça ne doit pas nous faire oublier qu'il y a actuellement un cas de procès à Jésus, intenté par des "gardiens de l'orthodoxie", et que c'est la sourde mais obstinée campagne menée à l'encontre du pape François...
- Nous sommes un certain nombre à être indignés de cette campagne, et à le dire. Nous dénoncer comme intolérants diviseurs, ce serait noyer le poisson. ]

réponse au commentaire

Écrit par : perlapin / | 16/03/2015

@ PP

> C'est bien ce que je disais. La question abordée par Francis Schmidt, ce n'est pas « le » sacré : le judaïsme antique ne possédait pas un concept abstrait dans ce genre. Schmidt étudie plutôt, semble-t-il, la pureté et l'impureté rituelles telles qu'elles ont été pensées par les auteurs sacerdotaux. De même, l'Eglise, à l'époque médiévale et moderne, n'a jamais parlé du sacré en général.
Cela étant, merci pour l'indication bibliographique.
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Écrit par : Blaise / | 16/03/2015

JÉSUS ET LA PURETÉ ALIMENTAIRE

> Les Pharisiens contemporains de Jésus tendaient effectivement à s'appliquer à eux-mêmes des prescriptions ne concernant a priori que la classe sacerdotale ou lévitique. Ces dernières années, des historiens du judaïsme tels que Daniel Boyarin ont relu les controverses entre Jésus et les Pharisiens du début de Mc 7 (autour de la pureté et de l'impureté des aliments), comme une remise en cause par le premier non pas des règles de kasherout (Jésus et ses disciples mangeaient exclusivement kosher... du moins jusqu'aux Actes), mais de ces "excès de zèle" (les purifications) prônés par le courant pharisien. Boyarin va jusqu'à affirmer que dans l'histoire, Jésus aurait été en réalité (sur ce plan-là du moins) dans une "réaction conservatrice", en rappelant à l'ordre un mouvement "déviant" faisant passer sa "tradition des Anciens" avant la Torah divine. Ce qui resterait de toute façon le moindre des griefs des Pharisiens à son encontre, en regard des autres faits "scandaleux" que vous énumérez.
Mais il semblerait par ailleurs que ces innovations aient prêté à discussion au sein même du mouvement pharisien, qui n'avait comme on le sait rien d'une faction monolithique. Les historiens d'aujourd'hui n'en sont plus à présumer de la pensée pharisienne du 1er siècle à partir du simple décalque de la pensée talmudique ultérieure.

AC



[ PP à AC

►Jésus met en cause le bien-fondé spirituel du système de pureté alimentaire :

Matthieu 15:10-14 - " Alors Jésus appela la foule et lui dit : 'Ecoutez-moi et comprenez-moi bien : ce qui rend un homme impur, ce n'est pas ce qui entre dans sa bouche, mais ce qui en sort.' Alors les disciples s'approchèrent de lui pour lui faire remarquer : 'Sais-tu que les pharisiens ont été très choqués par tes paroles ?' Il leur répondit : 'Toute plante que mon Père céleste n'a pas lui-même plantée sera arrachée. Laissez-les : ce sont des aveugles qui conduisent d'autres aveugles ! Or, si un aveugle en conduit un autre, ils tomberont tous les deux dans le fossé...' "

Marc 7:15 - "Il n'est hors de l'homme rien qui, entrant en lui, puisse le souiller; mais ce qui sort de l'homme, c'est ce qui le souille..."

Romains 14:14,17,20
"Je sais et je suis persuadé par le Seigneur Jésus que rien n'est impur en soi, et qu'une chose n'est impure que pour celui qui la croit impure."

1 Timothée 4:4,5
"Car tout ce que Dieu a créé est bon, et rien ne doit être rejeté, pourvu qu'on le prenne avec actions de grâces"

► Jésus annule les règles de purification corporelle

Matthieu 15:20b - Jésus répond à Pierre : "Manger sans s'être lavé les mains ne rend pas l'homme impur."

Luc 11:38-41 - "Le pharisien remarqua qu'il n'avait pas fait les ablutions rituelles avant le repas, et il s'en étonna..." (S'ensuit la réponse de Jésus, très violente et détaillée, sur l'hypocrisie des pratiques extérieures pharisiennes : versets 39-52 ; et l'offensive accusatoire des pharisiens contre Jésus).

Il y a en France, depuis une vingtaine d'années, une nouvelle "offensive pharisienne" : non pas frontalement contre Jésus, comme il y a deux mille ans ; mais obliquement, pour faire croire aux paroissiens que Jésus était un pharisien comme les autres.
Résultat :
a) réhabiliter les pharisiens et par là nier leur part de responsabilité dans la Passion ; ce qui oblige à révoquer des tranches entières des textes évangéliques ;
b) banaliser Jésus, le résorber dans le judaIsme de son temps ; ce qui contredit les faits... et (par exemple) Neusner. ]

réponse au commentaire

Écrit par : Albert Christophe / | 16/03/2015

@ PP :

> je ne proteste pas contre votre dénonciation des critiques injustes que notre pape subit. Je dis seulement que si vous voulez fouiller le sujet des pharisiens, je crois qu'on peut aller plus loin, et par la même occasion être plus convaincant pour l'ensemble des chrétiens. Si vous avez des commentaires positifs de gens pensant de toute façon comme vous avant qu'ils vous lisent, je pense qu'on manque en partie la cible !!
Je crois par ailleurs qu'en Église la correction fraternelle prend des formes différentes que dans la prise d'opinion traditionnelle. C'est pour cela que si vous choisissez de parler en chrétien plutôt qu'en journaliste (deux choses pas incompatibles mais qui parfois entrainent des partis pris différents ! Enfin vous le savez mieux que quiconque), votre parole serait plus audible si elle ne s'arrêtait pas là. Si vous souhaitez simplement polémiquer avec les libcons sans avoir de chance de les convaincre, alors pas besoin d'en dire plus. Dans l'Évangile, Jésus corrige souvent, mais c'est Jésus. Je crois que notre coté, les modèles de sainteté nous inspirent parfois autre chose. Allons voir du coté de saint François de Sales, par exemple.
Enfin à titre personnel je serais ravi de vous lire sur vos belles expériences et vos découvertes dans l'église, car lisant votre blog depuis peu j'ai moins eu l'occasion de voir ce type d'article (à l'exception notable et très intéressante des enjeux écologiques!). Après je devrais peut être apprendre à mieux fouiller dans les archives.
Bien à vous !

perlapin



[ PP à P.
- En effet : vous ne me diriez pas exactement la même chose si vous suiviez ce blog depuis un peu plus longtemps. Je fais écho aux initiatives de l'Eglise (notamment celles dont la bien-pensance préfère ne pas parler) ; vous ne le savez pas, mais c'est votre droit.
- Etant journaliste, je parle des réalités d'aujourd'hui. Elles sont souvent pénibles. Faudrait-il les taire ? certains cathos le pensent ; je ne suis pas de leur avis. Le roudoudou a vidé trop d'églises.
Vous voyez de l'agressivité dans ce que je dis ? C'est une question de point de vue, et d'évaluation des urgences. Informateur par métier, je ne peux pas laisser agir sans protester un certain courant qui a pris de l'ascendant dans la cathosphère française depuis deux ans. Cet ascendant pose un problème de magistère parallèle ; un problème qui appellerait une mise au point officielle ; mise au point que d'autres catholiques dans ce pays espèrent. Et attendent.
Si cette mise au point venait, elle ferait cesser les controverses internes.
Tant qu'elle ne sera pas venue il y aura des controverses, et parfaitement justifiées : "l'unité" est surnaturelle et ne se confond pas avec un consensus sociologique ; surtout si ce consensus couvre une sorte de soustraction d'obédience (inavouée) envers le pape, entretenue dans le public à la faveur de la désorientation générale.
- Vous ne paraissez pas mesurer l'effet négatif qu'a produit sur le public non-croyant (98% des gens) la campagne anti-François des milieux bien-pensants. Si je lance l'alerte dans mon blog, c'est parce que je fréquente beaucoup plus de non-croyants que de bien-pensants. L'urgence est la nouvelle évangélisation, non l'auto-contemplation frileuse !

ps - "Si vous avez des commentaires positifs de gens pensant de toute façon comme vous avant qu'ils vous lisent, je pense qu'on manque en partie la cible !!", me dites-vous ?
Mais il me semble que je publie vos commentaires, qui ont entrepris de me remonter les bretelles avec une ironie de confesseur jésuite... ]

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Écrit par : perlapin / | 16/03/2015

@ PP :

> Je suis désolé d'être venu vous chercher querelle, en des termes blessants (même si mon intention n'était pas de blesser mais une tentative ratée d'humour). C'était particulièrement mal venu, surtout en ces temps de Carême. Je vous présente toutes mes excuses.

Thibaud


[ PP à Thibaud - Mais pas du tout, cher Thibaud. La contradiction me fait le plus grand bien, surtout par temps de Carême. N'hésitez pas à continuer si besoin est. ]

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Écrit par : Thibaud | 16/03/2015

PRÉCISIONS

> Merci pour toutes ces précisions qui sont d'une grande opportunité. Le dialogue interreligieux ne peut se faire que dans la vérité clairement exprimée, ce qui peut et doit se faire sans polémique. Bien sur, le sujet est très délicat puisque le judaïsme actuel se réclame du courant pharisien (cf 'Le rabbin et le cardinal', Bernheim et Barbarin) mais c'est comme ça, on n'y peut rien.
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Écrit par : Pierre Huet / | 17/03/2015

LA CAMPAGNE

> Très étrange, cette campagne médiatique contre François ! D'après le journaliste Jean-Marie Guénois, elle s'explique essentiellement par un manque de confiance dans le Saint-Esprit. C'est probablement une clé de compréhension.

Blaise


[ PP à Blaise - D'autant que la campagne avait commencé par des articles et déclarations de Guénois lui-même... ]

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Écrit par : Blaise / | 17/03/2015

"Lá fhéile Pádraig"

> Bonne fête PP !

DV


PP à DV - [ Merci ! ]
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Écrit par : DV / | 17/03/2015

@ PP

> Les thèses de Boyarin (et de Yuval avant lui) le placent dans un courant récent de l'historiographie juive, qui reconsidère avec davantage de recul – et espérons-le, d'objectivité – la période de distanciation progressive entre le judaïsme post-sacerdotal et le judéo-christianisme. Une période durant laquelle ces deux voies (chacune composée de multiples courants) s'influencent mutuellement, ne serait-ce que par opposition.
Sur les controverses de pureté et d'impureté entre Jésus et les Pharisiens de son temps, la question que soulève Boyarin (entre autres) est de voir si ces notions se limitent, dans le contexte des seuls évangiles, aux règles de pureté sacerdotales indûment intégrées par les Pharisiens, ou si elles vont jusqu'à couvrir les règles de kasherut - il opte personnellement pour le premier cas. À aucun moment, cependant, vous ne le verrez faire passer à tout prix Jésus pour un Pharisien !
D'autres historiens juifs s'en chargent, certes, et depuis fort longtemps. On peut citer Haïm Mantel, Schalom Ben-Chorin, ou Shmuel Safrai qui fait de Jésus un "Hassid" avant la lettre. Nombre d'entre eux sont clairement dans une apologétique qu'on pourrait qualifier d'"anti-antisémitique".
Le problème, comme vous le signalez, c'est lorsqu'on en arrive à vouloir dédouaner le Sanhédrin de toute responsabilité (Haïm Mantel encore, David Flusser, et je ne sais plus quel auteur, cité par Gérard Israël, allant jusqu'à prétendre que le Conseil s'était réuni pour sauver Jésus des griffes des Romains !).
Dès lors, ne nous étonnons plus d'entendre qualifier la "Passion" de Mel Gibson d'antisémite parce que - Ciel ! il ose montrer des Juifs méchants à côté de Juifs gentils (mettons à part le cas de Mel Gibson lui-même).
Pour revenir à Daniel Boyarin, je sais, pour l'avoir entendu en colloque, qu'il est bien au-dessus de tout ça !
Un autre problème qui peut se poser est que de tels discours soient intégrés par des chrétiens même catholiques, en une démarche erronée par rapport au sens de Nostra Ætate. Est-ce à cela que vous faisiez allusion ? En ce qui me concerne, soyez rassuré, vous prêchez un convaincu !
(et bonne fête à vous !)

Albert Christophe


[ PP à AC - Merci ! Et, oui, ce dont je parlais est bien ce dont vous parlez : la démarche erronée (anachroniste et faussement érudite) par rapport à Nostra Aetate.]

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Écrit par : Albert Christophe / | 17/03/2015

GUÉNOIS (À R.C.F.) FACE AU PAPE FRANÇOIS

> Jean-Marie Guénois n'a fait, somme toute, qu'aggraver son cas : reconnaître à demi-mots que le trouble fête, c'est le Saint-Esprit. Les propos qu'il a tenus à l'émission "Le Temps de le Dire" sur le thème « Les chantiers du pape François
http://rcf.fr/actualite/les-chantiers-du-pape-francois »
sont proprement sidérants.
Le Christ demandait à ses disciples de veiller ; Guénois préférerait que les chrétiens dorment davantage.
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Écrit par : Blaise / | 17/03/2015

@ Thibaud

> Se condamner soi est aussi pharisien que condamner l'autre. C'est toujours prendre la place de Dieu, qui pourtant sans cesse nous redit "Va,je ne te condamne pas". ( sans jamais rajouter "Mais,...."). C'est vouloir encore et encore, jusqu'à notre intime, séparer le pur de l'impur. Hors de la grâce, tout est impur, mais là où passe l'Esprit, en sa liberté divine qui ignore toute séparation, tout est déjà purifié.
Les prostituées et les publicains qui savent et souffrent l'étendue de leur péché et ne désespèrent pas de la grâce sont de facto sauvés. Ils sont nos maîtres en confiance en Dieu, la seule "vertu" au fond qu'il nous soit demandée...d'accueillir en enfants ( force de la faiblesse, aux antipodes de la vertu payenne qu'il faut à coups de volonté acquérir par soi-même).
Il y a pharisianisme là où il y a défaut d'amour. C'est pourquoi le meilleur remède, c'est la miséricorde à laquelle nous invite le Pape François! Ou cette capacité du coeur à rejoindre l'autre par-delà tout jugement, à ignorer toute idée de séparation entre le pur et l'impur, parce qu'on se laisse rejoindre nous-même par le Christ, là-même où notre conscience morale nous condamne. Pierre et Paul sont les deux grands Vicaires du Christ, non en raison de leurs vertus personnelles, mais parce qu'ils ont vécu cette tragédie intime de l'abjection de soi, par où le Christ enfin a pu les rejoindre totalement, Pierre par la trahison de l'Ami et du Maître, Paul par un pharisianisme criminel, "déicide", tragédie bienheureuse: ils se découvrent alors aimés d'un Amour inconditionnel, indéfectible, total. Ils expérimentent dans le même temps cette blessure mortelle de leur amour-propre, cette condamnation selon la loi, et cette transfusion, ce tsunami d'amour, Le Christ les saisissant contre son coeur et les faisant renaître, en place de leur coeur figé, statufié devant l'horreur, le Coeur brûlant du Christ, aux dimensions du monde . "Ce n'est plus moi qui vis, c'est le Christ qui vit en moi"
Ainsi aujourd'hui le pharisianisme a pris forme de séparation entre les "vrais chrétiens" et la société contemporaine. D'où l'aigreur qui ronge le micro-monde catholique français, en levain qui tourne, séparé de la pâte. Que l'on se mêle à nos contemporains, emporté par les élans du coeur, nous laissant malaxer, unir à lui en son intime par les mains du Créateur-Nourricier, qui oeuvre pour la faim du Monde, et non seulement nous perdrons ces giclées d'acidité qui rongent notre micro-milieu, mais nous connaitrons la joie sans nom de contempler le miracle de la pâte qui lève,et nous avec! D'un même mouvement réconciliés avec nous-même et avec nos frères non-croyants, parce que tout entiers reçus, parce que tout entier pardonnés et donnés.
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Écrit par : Anne Josnin / | 17/03/2015

LA SAINT-PATRICK

> Ah, cette Saint-Patrick qui file sous le tapis (de souris), sans même le temps de trinquer ! Bonne fête à vous PP, qui êtes le pâtre qui nous hisse (au-dessus de nos médiocrités quotidiennes) ! A la bonne vôtre !

Denis


[ PP à Denis - Merci ! ]
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Écrit par : Denis / | 17/03/2015

TOUS

> Pensées et prières aujourd'hui pour tous les Patrick, Patrice, Patricia...Bonne fête à tous, et en particulier à vous cher Patrice !

cristiana


[ PP à Cristiana - Merci ! ]

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Écrit par : cristiana / | 17/03/2015

Cher Patrice,

> In extremis (23 h 50) : bonne fête !

Feld


[ PP à Feld - merci ! ]

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Écrit par : Feld / | 17/03/2015

CE QUE "SAVAIT" JÉSUS

> Merci cher Patrice de Plunkett pour cet éclairage, une fois de plus très percutant.
Vous faites cependant de Jésus un homme "sans savoir livresque", "qui n'a pas étudié". On n'est pas loin du prophète illettré de certains ...
Jésus est pourtant rabbi, comme les évangiles en témoignent. En tant que premier né de sa famille, il était spécialement enseigné dans les écritures, selon l'ancienne tradition des hébreux, par les Lévites de son village. La Galilée, et spécialement Nazareth, avaient conservé davantage qu'ailleurs le rôle des Lévites dans l'enseignement du peuple, au milieu du peuple, même si le mouvement pharisien tendait à les supplanter. En s'inspirant de l'usage grec du maitre philosophe enseignant ses disciples sur l'agora, les pharisiens avaient créé des écoles au Temple, d'où sortaient des élites nouvelles sur-instruites, qui malmenaient les Lévites par leur connaissance ultra pointilleuse de la loi.
Cela n'enlève rien cependant à l'instruction de Jésus comme premier né, gardien dans sa famille des traditions religieuses et successeur de son père adoptif Joseph. C'est pour cela qu'il est invité à lire la Torah dans les synagogues et à donner son commentaire.
Pour aller plus loin, je vous recommande très chaudement les ouvrages de Pierre Perrier, en particulier "Evangiles de l'oral à l'écrit".

Cdt, Olaf


[ PP à Olaf

- Vous avez raison, je me suis exprimé de façon trop elliptique. En disant que Jésus n'a pas "le savoir livresque", j'aurais dû préciser que c'était un grief de scribes diplômés : ce dont ils l'accusaient n'était évidemment pas de n'avoir "pas lu" (grief impossible parmi les juifs pieux du Ier siècle), mais de ne pas avoir le diplôme officiel, et d'enseigner "de sa propre autorité" au lieu de raisonner de manière livresque par citations, commentaires, gloses et interpolations selon la procédure de la caste des commentateurs.
- Oui, les travaux de Perrier sur la phase orale des évangiles (quoique discutés par les exégètes professionnels) devraient être connus de tout catholique. Leur apport est indispensable à une juste idée de nos origines religieuses. Ils contextualisent aussi bien la position de Jésus dans la culture de son époque, que le processus de sédimentation des évangiles. (L'hypothèse de Perrier permet de dépasser la controverse sur la datation des textes).
Référence de son livre principal :
'Evangiles de l'oral à l'écrit' (Le Sarment, 2000). ]

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Écrit par : Olaf / | 18/03/2015

DISTINGUER

> Ne vivant pas en France en ce moment je ne me rends peut-être pas compte de l'urgence de ce débat. Je suis d'ailleurs très confus si mes commentaires sont à la fois trop rugueux et injustes.
Cependant quand je parlais d'une distinction attitude journaliste / attitude chrétienne, c'est parce que :
• avertir les indécis sur l'imposture anti-François est une chose
• permettre à ceux qui sont déjà trompés d'ouvrir les yeux en est une autre.
Et la vision journalistique peut être polarisée ou peut prioritariser les objectifs alors que dans une approche chrétienne, je pense que tous sont à convaincre.
Je me posais donc la question des outils à convoquer pour ramener à la raison ceux qui débinent le pape. Et sur ce point, je crois que les comparer unilatéralement aux Pharisiens est peut-être trop décapant pour leur ouvrir les yeux, mais si c'est efficace pour avertir les autres.
La question que je pose est sans doute plus de fond/long terme mais je crois qu'elle sera nécessaire. Je pense que beaucoup de gens de bonne foi se sont fait embarquer dans des préjugés, et je me demande comment on pourrait inverser la vapeur.
Quant aux voix discordantes sur ce blog, si j'en suis une (bien maladroite) c'est purement sur la forme et les méthodes. Nous sommes d'accord sur le fond ! Et je me demande comment atteindre ceux qui croient être en désaccord aussi sur le fond...
En espérant cette fois avoir été plus jésuite que confesseur jésuite
bien à vous
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Écrit par : perlapin / | 18/03/2015

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