Drame de Sivens : l'apparence et les réalités

 Groupe de terroristes qui font peur à M. Cazeneuve.

 Mort d'un étudiant en botanique (tué de dos par une grenade). Premières réflexions : 

 

Selon les premiers éléments de l'enquête, Rémi Fraisse, 21 ans, a été tué par l'explosion d'une grenade offensive de gendarmerie (qui s'est sans doute coincée entre son sac à dos et sa nuque). Tué de dos, il fuyait donc devant une charge. D'après le témoignage de son père, cet étudiant en botanique - écologiste par vocation professionnelle - n'était pas un agité ; venu manifester avec des milliers d'autres contre le « grand projet inutile » du barrage de Sivens, il s'est retrouvé pris dans les affrontements entre les gendarmes et la poignée d'extrémistes qui vient rituellement détourner ce type de manifestations, comme on l'a vu à Notre-Dame-des-Landes (et dans les protestations altermondialistes).

La présence de cette poignée d'extrémistes est tellement habituelle qu'elle soulève un premier problème : pourquoi le ministère de l'Intérieur la laisse-t-elle (non moins habituellement) se produire ? La réponse est contenue dans la question.

Cette réponse concerne ce que notre société est devenue.

Les « pouvoirs » publics soutiennent le vrai pouvoir, financier, qui anime ces grands projets utiles à quelques-uns mais inutiles à la collectivité. Notre-Dame-des-Landes, c'est Vinci ; la gendarmerie a été déployée là-bas en 2012-2013. Qui est derrière Sivens ?

Les manifestations contre Notre-Dame-des-Landes ou Sivens rassemblent des milliers de protestataires. Ceux-ci déplorent chaque fois l'irruption d'extrémistes (lesquels se contrefichent de l'environnement et sont vomis par les paysans)... Les protestataires (les vrais) mettent en cause ces grands projets, qui leur paraissent issus de dossiers fourbes. Notre-Dame-des-Landes est un aéroport très discutable : les experts du transport aérien doutent de sa nécessité, ses promoteurs ont caché sa véritable dimension, et sa construction va porter une sérieuse atteinte à l'environnement. Sivens, c'est un barrage très discutable : les experts commis récemment par Mme Royal jugent le projet surdimensionné, et les syndicalistes paysans l'accusent de ne profiter qu'à un petit nombre d'agro-industriels non représentatifs. Sa construction, là aussi, porte une sérieuse atteinte à l'environnement.

Or il n'y a eu de véritable discussion* ni à propos de Notre-Dame-des-Landes, ni à propos du barrage de Sivens.

Dans ces conditions, la présence offensive de la gendarmerie est perçue comme une collusion entre l'Etat et certains circuits politico-financiers. D'autant qu'à Sivens comme à Notre-Dame-des-Landes, l'exécutif local est entre les mains du parti du Premier ministre et du président de la République... Ce qui se pose est ainsi un problème de légitimité. Cette impression d'ensemble ne sera pas effacée par le plaidoyer de M. Cazeneuve en défense du lanceur de grenade, et par son accusation (inexacte) contre « les écologistes » : le drame de Sivens est un produit dérivé de notre crise de société, liée à une entente – de plus en plus ostensible – entre des pouvoirs publics et des lobbies d'intérêts.

Cette entente est la trame de bien des problèmes actuels, dans tous les domaines, depuis la culture (notre note du 27/10) jusqu'à ceux qui préoccupent, à juste titre, les familles françaises.

 

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*  Seulement des mises en scène, ayant pour but de rendre "acceptable" le fait acquis. Idem dans les soi-disant débats sur les nanotechnologies, etc : de la tactique d'agences de com'.

 

Gaillac-Infos, 27/08, sur le projet de barrage :

■ « Une nouvelle fois la Fédération tarnaise de protection de l’environnement (UPNET) ne peut que constater ce qui se passe autour du projet de barrage de Sivens : gendarmes face aux opposants au déboisement de la zone du Testet. A notre connaissance, c’est la première fois que cette situation d’affrontement se produit dans notre département et nous le déplorons vivement car elle n’est aucunement liée au hasard. Le projet du barrage sur le Testet a commencé à faire parler de lui dès 2011 et dès ce moment, l’UPNET à demandé que des discussions puissent avoir lieu en s’appuyant sur la charte participative votée à l’unanimité par les élus du conseil général concernant les grands projets départementaux. Peine perdue ! Bien au contraire, nous avons assisté à une cascade de décisions qui "s’asseyaient" sur les avis émis soit par la commission d’enquête, soit par des expertises régionales et nationales… Nous sommes dans un pays démocratique dont la marque fondamentale devrait être le dialogue avec les citoyens. Si ce dernier n’est pas respecté, alors il n’est pas étonnant que les situations sur le terrain puissent aboutir à ce qui se passe actuellement sur la zone du Testet. En conséquence, nous réitérons solennellement notre demande d’une réelle concertation autour de ce projet car selon notre conviction "force doit rester au dialogue". »

 

 

Affichette Notre-Dame-des-Landes, 2013.