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05/04/2014

Le chrétien, l'argent et... l'Evangile

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Présenté par Gilles Texier, ce livre radicalement évangélique : 

 


Emidio-Marie Ubaldi : La bourse ou la vie - Gérer ses biens selon l'Evangile

 éditions de l’Emmanuel, 2013

 

Emidio-Marie Ubaldi est un franciscain, mais son livre est avant tout à destination des laïcs. Constatant que nombre de chrétiens – «  bons pratiquants » pour certains et intimement persuadés d’être libres pour la plupart – cachaient une étrange et puissante dépendance aux biens matériels (que les circonstances de la vie révélaient parfois), ce prêtre a développé, au cours des nombreuses retraites qu’il a prêchées, la nécessité de se libérer de cette emprise pour atteindre la sainteté. Ce livre se présente comme une synthèse des enseignements qu’il a donnés sur ce sujet.

Quatre parties le structurent. Les deux premières (« la Foi et les biens » et « la Foi et l’argent ») développent la vision de la foi sur la possession de biens matériels. S’il cite abondamment la vie et les écrits de saint François d’Assise, c’est avant tout sur la Parole de Dieu que le P. Ubaldi fonde ses enseignements. La structure de ces sous-chapitres est souvent la même : l’auteur prend un passage de l’Evangile, généralement une parole du Christ, et l’analyse. Les enseignements du Fils de Dieu sont alors mis à nu, dans leur radicalité première, sans rien ajouter ni rien enlever. Et ça réveille !

Au fur et à mesure que les pages défilent, on réalise l’insistance avec laquelle le Christ a abordé la question des biens. On mesure aussi le tranchant de ses avertissements et de ses commandements. En effet, il ne présente pas l’argent comme un objet, mais bien comme une idole : un faux dieu – Mammon – qui entre en concurrence dans le cœur des hommes avec le vrai Dieu. « Tout est possible à ceux qui ont la foi », nous dit l’Evangile ; mais bien nombreux, dans le monde et dans l’Eglise, sont ceux qui professent plutôt qu’ « avec la richesse, on peut tout ». Le spectacle du monde tel qu’il va conforte en partie cette vision, cette « foi » tellement diffuse qu’elle nous contamine sans même que nous nous en rendions compte. Pour devenir réellement monothéiste, pour réellement confesser que le Seigneur est l’Unique, il nous faut rejeter ce faux dieu qu’est Mammon, pour n’adorer que Dieu seul, et placer toute notre confiance dans Son amour et Sa providence. 

A la fin de ces deux parties, l’auteur introduit un chapitre un peu particulier : une sorte de petite anthologie des écrits des Pères de l’Eglise sur ce sujet. La verve de saint Ambroise, de saint Augustin, de saint Jean Chrysostome et de bien d’autres se déploie avec puissance, là encore pour encourager le partage et la simplicité (le pape François n’a donc rien inventé !). Il devient difficile alors, pour le catholique de bonne volonté, de ne plus entendre cet appel.

Il reste maintenant à le mettre en pratique. C’est ce que propose la troisième partie : « Un geste de détachement ». Le père Ubaldi énonce une distinction sur la différence d’attitudes auxquelles sont appelés le religieux et le laïc. Autant le premier a l’obligation de « se priver » (définitivement et totalement) de la possession de biens matériels, autant le second, contraint par son devoir d’état à faire usage des biens qui passent, doit « s’éprouver ». C’est-à-dire qu’il doit prouver, à Dieu et à lui-même, par un geste concret et radical, qu’il recherche avant tout les biens qui ne passent pas. Il revient à chacun de définir ce geste de détachement (l’auteur nous donne des exemples vécus pour y réfléchir : vider son compte bancaire, se séparer de sa maison secondaire, etc.), en sachant qu’il sera peut-être à renouveler plusieurs fois au cours d’une vie.

La quatrième partie, « mener une vie selon l’Esprit Saint », décrit les différentes étapes de formation et de sanctification du croyant, en se basant principalement sur les maîtres du Carmel. Car si l’auteur refuse d’attiédir le message du Christ (on l’a bien compris !), il ne tombe jamais dans le piège inverse qui consisterait à faire du détachement une fin en soi. Le but est clairement annoncé dès le début du livre, et longuement développé dans cette partie : devenir des saints, et par là-même « des apôtres de feu ». Pour y arriver il faut s’en donner les moyens. Le détachement en est un, la prière à haute dose en est aussi un autre, tout autant nécessaire.

Finalement, le plus étonnant dans ce livre, c’est qu’il parvient à développer les vastes exigences de l’Evangile sans jamais décourager le lecteur. Au contraire, il donne envie. La recherche de Dieu est présentée comme une aventure difficile, exigeante, hautement risquée, mais à l’enjeu proprement infini. Et l’on se surprend à vouloir être pauvre pour être libre, à désirer la sainteté pour porter du fruit. Le cœur de l’homme n’est décidément pas fait pour la facilité… Un livre qui risque de coûter bien plus cher à ses lecteurs que les 20 euros iindiqués sur la couverture, mais qui recèle en abondance la joie de l’Evangile.

 

Gilles Texier – Fraternité des chrétiens indignés

 

Commentaires

MERCI

> Ben tiens, "La décroissance c'est pas chrétien" qu'on m'avait bien dit ! On a pourtant tout comme l'impression que ce livre en illumine implicitement la source et toute la profondeur théologique!
Grand merci à toi cher Gilles pour cette présentation très claire.
Ce que je trouve très beau dans ce que tu traduis de ce texte, c'est que ce chemin de dépossession matérielle est l'exact contraire d'une mortification, d'une autoflagellation qu'on s'inflige ou d'une punition qu'on subit en baissant la tête!
C'est bien d'une libération qu'il s'agit, d'un allègement de cette étouffante surabondance matérielle, d'un vide que l'on consent peu à peu à assumer avec confiance, dans lequel se déploie des trésors de grâce, par lequel on s'approche un peu plus de Celui qui nous donne tout.
Et ce renversement radical de perspective, où l'infinie richesse de la vie en Dieu fructifie au creux d'une pauvreté en voie d'évangélisation, vaut autant pour nos chemins de vie personnels que pour l'ensemble de l'humanité.
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Écrit par : Serge Lellouche / | 05/04/2014

EN 2004

> Ce bouquin me semble très intéressant ; j'ai hâte de le lire.
En 2004, un éditeur qui n'a rien de catholique avait sorti un petit bouquin intitulé "Gérer mon argent dans la liberté".
http://www.vivreautrement.ch/ecrits/livres/20-gerer-mon-argent-dans-la-liberte
Extrêmement troublant : à un moment où personne (ou presque) ne parlait de "décroissance", quatre ans avant la crise des supprimes, l'auteur de cet opuscule (Pierre Pradervand) évoquait l'écroulement du système financier mondial, démystifiait l'argent ("il est essentiel de comprendre que la fragilité extraordinaire de tout le système bancaire mondial tient au fait que l'argent constitue une croyance concernant une croyance") et invitait à en faire une "énergie d'amour" ("Au niveau spirituel, l'argent est soumis à d'autres lois que celles du marché et que j'appelle l'économie de la grâce (…)"). Une des idées : donner systématiquement 10% de ses revenus..en accompagnant chacun de ses dons d'une lettre - qui peut être anonyme- au bénéficiaire...
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Écrit par : Feld / | 05/04/2014

CE QUE JSUS DIT

Jésus dit : Si tu veux être parfait, va, vends ce que tu possèdes, donne à des pauvres et tu auras un trésor au ciel; et maintenant suis-moi

Ayant entendu la parole, le jeune homme partit plein de chagrin, car il avait beaucoup de richesses.

Jésus dit à ses disciples : En vérité je vous dis qu’un riche aura du mal à entrer au Royaume des cieux.

Je vous dire encore : Il est plus facile pour un chameau de passer à travers le trou d’une aiguille que pour un riche d’entrer au Royaume de Dieu.
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Écrit par : Franck Ferdinand / | 06/04/2014

> Merci merci merci !!!
Un livre à faire connaître et diffuser !
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Écrit par : PMalo / | 06/04/2014

EMMAÜS

> Merci Gilles pour cette présentation enthousiaste! Et vive la légèreté!Très concrètement, déposer de nos trop-pleins à Emmaüs, cela fait le même effet euphorisant qu'une bonne confession, une grâce d'apesanteur.
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Écrit par : Anne Josnin / | 06/04/2014

JE RECOMMANDE CE LIVRE

> Pour avoir lu le livre, je ne peux que confirmer tout ce qu'a écrit Gilles Texier. Et je le recommande à quiconque désire vivre l'Evangile en plénitude quelque soit son état de vie.
Nous sommes tous face au dilemme du jeune homme riche (Le Père Ubaldi y revient souvent) et cet ouvrage permet de se placer en vérité pour dire son oui à Dieu. Ce n'est ni un "traité" sur l'argent ni des "préceptes" à suivre. Mais simplement un chemin de conversion pour se libérer de l'idole qui prend la place de Dieu et nous empêche de devenir des apôtres de feu.

Evidemment quand on lit ce livre, on sent la lutte intérieure car on est placé face à ses contradictions. Mais le Père Ubaldi choisit toujours la méthode pédagogique et jamais la culpabilité.

Bref, à lire. Mais aussi à relire.
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Écrit par : Cyril B / | 07/04/2014

> J'ai pensé à Jérôme Kerviel en lisant ce billet.
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Écrit par : Patrick / | 07/04/2014

125 000 € POUR LA MÉMOIRE DU POVERELLO ?

> L'argent...j'entends à l'instant par RCF que, pour restaurer la cellule ou St François d'Assise vivait quand il venait à Rome, dont les plâtres s'effritent, on lance un "profunding" (sic) de .... 125000 €

Y'a un truc qui m'échappe.
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Écrit par : Pierre Huet / | 08/04/2014

SAINT PAUL

> En fait, il ne faut pas avoir peur quand il y a trop d'argent (serait-ce 125 000 $). Pas plus que quand il n'y en a plus. Saint Paul le dit assez clairement dans Ph 4,12 : "Je sais vivre avec rien, et je sais aussi avoir beaucoup. J'ai toujours su, en toutes circonstances, être ou rassasié ou affamé, ou recevoir beaucoup ou n'avoir rien." C'est une sagesse qui pare à toute contradiction.
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Écrit par : jem / | 08/04/2014

@ jem

> Ce n'est pas une question de peur mais de chercher à comprendre. Certains aiment bien comprendre, eh oui, et là franchement, 125 000 € pour enduire les murs d'une cellule de 10m2 aussi symbolique du dépouillement, on a du mal.

St Paul pouvait vivre avec rien ou beaucoup, mais fixait-il des objectifs (élevés) pour des collectes?
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Écrit par : Pierre Huet / | 08/04/2014

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